AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Fernando Arrabal (19)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées
La traversée de l'empire

L’amour me semble être le sujet « essentiel » de cette pièce de théâtre dont les didascalies sont importantes en volume et sans doute en signification aussi : l’amour sensuel (Isabelle), platonique (Virgile), la dévotion pure (Sakoto), bestial (Cerbère), soumis (Iago).







Le futur n’est pas très gai. Il est fait de technologies militaires destructrices et au fonctionnement cyclothymique.



L’empire est certainement celui des États-Unis, plus ou moins ironiquement symbolisé par Porto Rico et non moins ironiquement vaincu au final par les « latinos » dans une guerre probablement civile (le sous-titre est « La guerre des galaxies avec Puerto Rico dans les tranchées »).



Beaucoup de mise en abyme : le héros s’appelle Virgile, Cerbère est une créature mythique, Iago est probablement « issu » de Shakespeare.



Une pièce étrange, mais un auteur à découvrir.
Commenter  J’apprécie          743
Le Panique

En plongée depuis plusieurs semaines dans les arrières rayons de ma bibliothèque, la troisième rangée derrière celle qui fait bonne figure, j'en suis remonté tôt ce matin avec une prise de choix :

Le Panique de Fernando Arrabal dans la collection 10/18, éditions sortie en 1973. L'auteur nous prévient en exergue de l'ouvrage, fidèle à sa propension provocatrice :

Rien de plus simple que de faire ce livre. Il m'a suffi de réunir des textes à propos du Panique et puis de faire un choix pour que ce mémento ne devienne pas une encyclopédie.

Et c'est daté du 01/01/1973.

Rappelez-vous le jour de l'an 1973, Pompidou et Allende étaient encore de ce monde, la guerre du Kippour n'avait pas encore éclatée, et les Rolling Stones n'étaient pas encore interdits de séjour en France par Raymond Marcellin, l'abominable maire de Vannes et sinistre de l'intérieur.

Nous vivions les derniers jours des Trente Glorieuses, et comme d'habitude, les milieux autorisés ne s'étaient pas encore autorisés à nous en parler. Par la suite, ils nous colleront abusivement, et en vrac, l'heure d'été, les doubles vitrages, la laine de verre, les idées à la place du pétrole, la vitesse limitée et autres fariboles dont on nous rebat toujours les oreilles.

Arrabal s'est gentiment fourré le doigt dans l'oeil, et nous entubé en beauté, avec son exergue qui ressemble comme deux gouttes d'eau à l'introduction du discours du gars qui annonce je serai bref… et qui va bavasser pendant deux heures, tellement son mémento ressemble à s'y méprendre à une encyclopédie, le seul avantage étant qu'elle ne fait qu'un volume et qu'elle tient dans la poche.

Tout y passe, comme un Pape du Panique, Arrabal délègue le sale boulot à Dominique Servain (dont on apprend maintenant qu'il est coiffeur à Savigny sur Orge – 2bis Rue Châteaubriand, 91600 Savigny-sur-Orge, France - +33 1 69 44 90 80 - voilà où l'a mené la fréquentation trop assidue d'individus comme Fernando Arrabal) pour décerner des brevets de Panique, en expliquant pourquoi, ils sont plus paniques que d'autres, avec dans l'ordre des élus :

Arrabal ( !) ; Jodorowsky ; Topor ; Bardon ( ?) ; Szafran ; Zeimert ; Ogier

Topor, Jodorowsky, et Arrabal y vont ensuite, chacun, de sa petite définition du Panique :

Arrabal

« Activités de l'homme panique :

- Art

- Jeu

- Fête euphorique ou solitude indifférente

Thèmes et sources de l'homme panique :

- Moi

- Allégorie et symbole

- Mystère

- Sexe

- Humour

- Création de chimères

- La réalité jusqu'au cauchemar

(…)

L'homme panique cultive quelques lieux communs :

- Humanisme, universalisme, progressisme, pacifisme, antiracisme, agnosticisme etc.

Jodorowsky nous régale ensuite d'un texte de 1964 intitulé « Panique et poulet roti » :

Ça commence par …. « En apercevant les innombrables cadavres que l'on rôtit à la machine, percés en rang par la broche fatidique, nous affirmons que le symbole de la terreur de l'auguste moderne, est le poulet rôti. »

Et quelque part, ça se termine par … « Mais il est évident que tout art panique débouche sur une seule manifestation : L'EPHEMERE PANIQUE. »

Ouvrage d'auto congratulation et d'auto promotion chères aux trois piliers auto-proclamés du Panique - Arrabal, Jodorowsky, Topor - qui appellent à la rescousse, Gaston Bachelard, Cioran, Alexis Carrel, le docteur Gibier, Jacques Sternberg, Ruellan, Jérôme Savary, Wilhem Reich, Balthasar Gracian.

Paniques ultimes, pour nos amis, les Compagnons Chrétiens, cette équipe de Ruby uruguayenne, dont l'avion s'est écrasé en 1972, dans la Cordillère des Andes, et qui ont survécu à l'altitude et aux températures extrêmes.

Les journaux titraient alors :

20 décembre 1972. Après avoir dévoré leurs camarades, 16 rugbymen uruguayens sont sauvés.

Soixante-douze jours après le crash de leur avion dans les Andes, les survivants de l'équipe de Montevidéo sont retrouvés.

Ah Panique, quand tu nous tiens.

Demain je repars en plongée dans les rayonnages occultes de ma bibliothèque. Je tremble à l'idée de ce que je pourrai y trouver !



A lire par ceux qui aiment Arrabal


Lien : http://desecrits.blog.lemond..
Commenter  J’apprécie          202
Théâtre 9

Arrabal écrit :

"Il me semble que je déteste cette pièce, le Ciel et la merde. Aucune connivence, je crois, avec les personnages, Erasmo ... quelle horreur ! Je me demande pourquoi j'ai écrit cette abomination. Si quelqu'un peut me donner une explication ... Ecrivez-moi. "

N'ayant pas d'explication à fournir, j'écris ici ( en plus j'ai pas l'adresse d'Arrabal).

Dans le Ciel et la Merde, le prologue nous prépare à une méditation religieuse. Arrabal propose même aux metteurs en scène d'inviter un mystique, un religieux, peu importe la religion. Les spectateurs sont invités à se déchausser en entrant au théâtre comme dans un temple (sinon ils restent dans le hall ou ils repartent chez eux). Il propose à deux volontaires d'être enfermés pendant la représentation, dans une cage ou dans un carcan. Ils peuvent crier, pleurer, blasphémer, ils resteront dans leur cage. Les spectateurs seront séparés, surtout les couples, et l'auteur préconise de créer de nouveaux couples. De quoi créer un certain malaise, de quoi nous faire sortir de notre zone de confort. Les indications scéniques dans les textes d'Arrabal sont tout de même fort intéressantes. Le spectateur est amené à se sentir incarcéré lors de la représentation d'une pièce dont le sous-titre est "Souvenirs de cinq condamnés pour meurtre dans le couloir de la mort". Mort, meurtre, Viva la muerte ! (d'où la préface consacrée au film). Le Ciel et la merde met en scène des condamnés pour meurtre qui se regroupent autour d'Erasme, gourou à la Charles Manson, de quoi faire l'Eloge de la Folie, de l'orgie. De quoi créer la catharsis à partir des émotions les plus violentes, de quoi faire de la révolution théâtrale une révolution politique et sexuelle.

Dans "la Grande revue du XXème siècle" ou 'Marie Satanas c'est pas dégueulasse" (sous-titre qui m'a bien fait rire !) Arrabal présente cette pièce comme une "revue satanique du meilleur panique". Marie Satanas est dans la pièce la jeune lectrice d'un livre où le XXème siècle est raconté en images, un livre trouvé parmi les effets personnels d'un homme massacré par sa famille de fanatiques. Ce livre entraîne plusieurs visions de Marie Satanas, des scènes sur Hiroshima et Einstein, Les Jeux Olympiques et Landru, Hitler dans son bunker, La Vierge de Fatima et les soucoupes volantes, la tragédie du Titanic. Freud et la révolution sexuelle. Les crimes et la lune. Marie Satanas se sentira de plus en plus persécutée - l'effet de la panique.



"Adieu, adieu, vous tous

et bonne fin de soirée

et pas de rêves dégueulasses

sur Marie Satanas".
Commenter  J’apprécie          163
Theatre 16

Le théâtre du cofondateur du mouvement Panique, Arrabal, est un précipité de substances organiques, un "corps" insoluble formé par réaction entre plusieurs substances en solution, ou par une action physique sur une substance en solution - Et si vous vous demandez de quelles substances je parle, voyez donc le titre de la postface de Luce Moreau-Arrabal sur "le rôle des sécrétions et excrétions dans le théâtre d'Arrabal".

Elle explique en quoi Arrabal provoque - parce qu'il introduit sur scène de la sueur, de la salive, du sperme, de l'urine, de la merde, du sang. Arrabal n'est pas qu'un vulgaire provocateur ; il y a volonté de redonner du sens au théâtre et à la vie comme chez Artaud et pour cela, de bousculer, pour créer l'effet de bascule.



Luce Moreau-Arrabal montre en quoi Arrabal réconcilie le profane et le sacré sur scène, comment il invoque le dieu Pan(ique) ou d'autres dieux. Comment il marie Eros et Agapé : l'érotisme (voire la pornographie) et l'amour au sens spirituel. Arrabal renoue avec le théâtre traditionnel, le théâtre antique et le théâtre du Moyen-Age, avec les mystères, mettant en scène la Passion du Christ, blasphémant Dieu, allant jusqu'à dire que Dieu est mort, pour mieux le ressusciter sur scène (même s'il est incarné par une tortue comme dans la Charge des Centaures, une tortue dont les excréments sont faits d' or).



Théâtre 16 comprend :

Bréviaire d'amour d'un haltérophile (un titre religieux où l'amour de l'haltérophile qui vit par son corps n'est qu'essence)

Apokalyptica (qui réécrit les Livres de la Bible)

La Charge des Centaures (ou ceux qui détruisent un royaume - les Centaures étant les conquistadors apparus comme des dieux à l'Empereur du Nouveau Monde mais ceci n'est peut-être qu'un rêve de Zaranitz, l'ermite qui s'adresse à Dieu)
Commenter  J’apprécie          150
L'enterrement de la sardine

Connaissant déjà Arrabal pour certaines pièces de théâtre, (Le Ciel et la Merde, par exemple) et pour son film – Viva la muerte - , je me suis laissée tenter par ce titre : L'enterrement de la sardine, qui m'a fait (sou)rire. Et me voilà partie pour une critique d'Arrabal : pêcheuse en eaux troubles, pécheresse que je suis.



En Espagne, l'enterrement de la sardine est une tradition ayant lieu le Mercredi des Cendres, lors du dernier jour du carnaval – un évènement propice pour la profanation du sacré, pour la sacralisation du profane et vive est la (ré)jouissance !



Le carnaval d'Arrabal, c'est l'éclate, le chaos le plus total, et les descriptions subissent cet éclatement généralisé. Différents tableaux se succèdent, se répètent. Il y a du Jérôme Bosch dans ce carnaval (Le Jardin des délices – qu'Arrabal reprend dans son théâtre), du Goya. J'ai reconnu les Deux vieillards mangeant de la soupe, sortis du tableau, mais Goya a également représenté L'enterrement de la sardine, de manière grotesque et horrifique.



Les références chrétiennes les plus macabres ne sont pas absentes. Il y a de la sardine, du poisson (Ichthus), et on célèbre la mort de la sardine, comme on célèbrerait la mort de Dieu. Et puis il y a des croix (ces représentations par excellence de la torture). Il y a le cortège des Pénitents qu'on purifie par la cendre.



La fin du carnaval, c'est la fin du monde. C'est apocalyptique comme texte – il me reste à découvrir Baal Babylone d'Arrabal.



Il y a autant de plaisir que de torture chez Arrabal.

Et c'est d'autant plus le cas lors du carnaval.



Un homme, un spectateur, enchaîné, assiste au carnaval depuis sa fenêtre et la foule, exaltée, défile sous ses yeux.

L'homme enchaîné (l'observateur) reçoit périodiquement les visites de deux femmes – Altagore et Lis - qui l'initient à l'amour, à la mort - et c'est violent. Il y a des calices, des cilices, Alice (oui, toujours elle, je la croise partout !), et La Palice.



Elles l'initient aussi à la lecture – des signes. Les rites nous rappelent que le carnaval, c'est une manière de canaliser les énergies d'anciennes fêtes païennes. Les signes cabalistiques, sataniques ou bénéfiques abondent, mais c'est à lire avec humour chez un pataphysicien, parce que c'est par l'humour que tout s'exprime. Ceux qui participent au carnaval chantent et détournent les comptines enfantines et les comptines enfantines sont dotées d'un caractère magique : Am, Stram, Gram, pique et pique et Colegram, etc. Ainsi, certains termes donnés comme cabalistiques ne sont autres que : Nracineh, Lvoltaireh, Becqueth.



Ce texte, c'est surtout du grand-guignolesque, du grand spectacle horrifique, avec ses danses macabres qui outrepassent toutes les limites de la bienséance. Un enterrement qui pourra vous réjouir, pourvu qu'il vous divertisse.
Commenter  J’apprécie          130
Viva la muerte

Dans le salon d'hiver, une femme vieillissante monologue en présence de son fils assis à sa gauche. Les persiennes et les fenêtres de l'appartement madrilène ont été fermées : les voisins pourraient entendre et voir.



A nouveau, elle rabache son amour pour le mari et père disparu, son sacrifice pour les enfants (dont le narrateur), son goût pour l'ordre, la virilité, le Devoir, pour toutes ses valeurs constituant le socle du franquisme triomphant.



Une fois de plus, il ne dit rien, ou si peu. Mais il se souvient. De son père, sur une plage de Melilla (enclave espagnole en Afrique du Nord). De son grand-père, qui regarde sans agir, et mourra couvert par le manteau de la vierge Pilar, non sans un dernier pêt irrévérencieux. De sa tante, pétrie de lectures saintes (dont Thérèse d'Avila, très certainement), qui l'initie aux tourments du sado-masochisme. De ses hésitations à intégrer le monde franquiste contemporain, (armée, corrida, processions, …). Ce monde, qu'il hésite à embrasser, est porté par les femmes, omniprésentes, castratrices, impliquées, actives, tandis que les hommes sont absents, presque féminins, enclins à la tolérance, à la contemplation.



Cette histoire est portée par l'écriture magistrale d'ARRABAL. Homme de théatre, ARRABAL sait frapper en quelques mots, en quelques images : les phrases sont incisives, directes, comme une condamnation au peloton d'exécution.

Comme une litanie ânonnée le rosaire à la main, les personnages apparaissent et disparaître, sans logique chronologique, avec les mêmes mots. L'univers du texte est sombre, brutal, fermé, obsessionnel. Le Devoir (musturbation, dirait-on aujourd'hui) écrase. Les réactions des personnages en sont d'autant plus violentes, incontrôlées, surréalistes.

Ce texte, édité en 1971, suite à l'emprisonnement de l'auteur en 1967 en Espagne franquiste, a donné lieu à la réalisation d'un film par ARRABAL lui-même, et à une collaboration avec le dessinateur TOPOR, qui a su illustrer ce lieu où «  un démon brûlait les âmes sacrilèges dans un cachot de l'enfer ».

Commenter  J’apprécie          110
Un esclave nommé Cervantès

De Fernando Arrabal, j’avais l’image d’un dramaturge provocateur et loufoque, une sorte de Salvador Dali des lettres, possédant plus de lunettes qu’Elton John et Polnareff réunis. Il est peut-être cela, mais pour ce bouquin il se fait biographe de son illustre compatriote Miguel de Cervantès. Le problème c’est qu’Arrabal s’il est érudit, n’est pas historien. Alors, voila ce qui m’a plu dans ce livre : Au-delà de la vie de Cervantès lui-même, on en apprend beaucoup sur son époque c.-à-d. le 16ème siècle espagnol, celui de l’inquisition, de la conquête de l’Amérique, des règnes de Charles Quint et Philippe II ... Pour donner du crédit à l’entreprise le texte est agrémenté de fac-similés de documents d’époque. Le bavardage « en roue libre » d’Arrabal est souvent plaisant. Mais ce qui m’a moins plu c’est la généalogie rébarbative des Cervantès et de la famille royale espagnole. Et surtout l’angle psychanalytique que prend Arrabal pour interpréter et expliquer le caractère et les actes des personnages. Hélas, l’érudition facétieuse d’Arrabal ne fait pas de lui un historien rigoureux. Le livre se termine d’ailleurs au lendemain de la bataille de Lépante, Miguel de Cervantès n’a alors que 24 ans et Arrabal nous promet une seconde partie, ce volume ayant été édité en 1996, il semble qu’il en ait abandonné l’idée. 3* néanmoins. Allez salut.
Commenter  J’apprécie          60
La pierre de la folie

Voilà un livre bien étrange.



Selon la 4e de couverture celui-ci ne se réduirait pas à une simple transposition poétique des rêves de Fernando Arrabal... Ouaich... Même si j'ai trouvé certaines phrases bien tournées et/ou sujettes à réflexion... je n'ai rien compris!



Commenter  J’apprécie          60
Artiste et métèque à Paris

Prenant comme étude de cas une vingtaine d'artistes exilés à Paris, les auteurs, David Alper, avocat et journaliste américain et Lise Bloch-Morhange, journaliste française se sont efforcés de cerner, tant du point de vue de l'oeuvre, les interactions entre trois éléments: l'artiste, l'exil et Paris.

Parmi les personnalités interviewées: Fernando Arrabal, Tahar Ben Jelloun, Julio Cortazar, Léonor Fini, Eugène Ionesco, Izis, Milan Kundera, Henry Miller, Serge Rezvani, Iannis Xenakis, etc
Commenter  J’apprécie          50
Viva la muerte

Le père de Fernando Arrabal fut arrêté en 36 par les milices de Franco (l’auteur lui-même sera emprisonné en 1967).



En une succession de courts chapitres à la prose lancinante et incantatoire, il raconte à sa mère ses souvenirs de cette enfance sur fond de guerre civile, aigus, morcelés : les genoux maternels si blancs, les mains de son père lui enterrant les jambes dans le sable (il a 3 ans), sa Tante Clara, mystique hystérique qui lui demande de la fouetter, les processions religieuses, l’omniprésence de la religion, l’obsession des femmes de la maison pour sa virilité.



Un récit cru et violent donnant à voir toute la douleur, le désarroi, la cruauté, de cette enfance, marquée par le traumatisme de l’absence du père, et une écriture d’une force peu commune.
Commenter  J’apprécie          50
Théâtre IV

Ce volume est le tome Théâtre XIV, publié par Christian Bourgois en 1982 et reprenant deux pièces de l'auteur de la même année. En l'occurrence, "L'extravagante réussite de Jésus-Christ, Karl Marx et William Shakespeare", et "Lève-toi et rêve".



Les deux pièces sont extrêmement différentes.



La première met en scène un dictateur sud américain fumant des bâtons de chaise et vêtu d'un simple uniforme militaire kaki. On pense à Castro. Arrabal lui taille un costume de première bourre. Inculte, borné, limité intellectuellement... on a une caricature, une bouffonnerie, une pantalonnade. Le dictateur possède un sosie qui va être mis à contribution pour prononcer un discours creux et faussement révolutionnaire. Pendant ce temps, ses proches collaborateurs fomentent une contre-révolution, avec la CIA, mais celle-ci est tuyautée par des communistes également. En même temps, les révolutionnaires découvrent les plaisirs de la chair et se travestissent gaiement. C'est sans queue ni tête, on a même droit à un extra-terrestre qui se révèle être un échappé de l'asile... Arrabal déploie sa haine des dictateurs. On y cite un paquet de tyrans, dont Franco évidemment. Même mort, le caudillo continue d'exercer un pouvoir de répulsion sur Arrabal. Le message principal pourrait être de démystifier les dictatures, de montrer les perversions et les déviances des régimes totalitaires. Arrabal dénoue patiemment le mojo des dictatures qui fonctionnent sur l'air du 'faites ce que je dis, mais pas ce que je fais".



La seconde pièce met en scène une communauté qui ressemble étrangement à Jesus et ses apôtres. Sauf que Jesus s'appelle Jonas. On a l'impression d'avoir des Zadistes avant l'heure, qui squatte un territoire interdit. Entouré par les forces de l'ordre qui vont donner l'assaut. Désoeuvrés, marginaux, rejetés de la société, les membres de ce groupe, de cette secte n'ont plus que leurs rêves comme capital. C'est intense et poétique, mais ce n'est pas trop l'Arrabal que j'apprécie.



Même si la première pièce est très "cliché", assez facile dans ses rouages, elle m'a davantage plu. Cela reste un théâtre assez vieilli, pour ce que je peux en juger.
Commenter  J’apprécie          40
La traversée de l'empire

Je replonge avec plaisir dans le théâtre d'Arrabal. Cette pièce post-apocalyptique (créée en 1988 oui oui 1988) est désopilante. On y retrouve tous les thèmes chers à l'auteur : la religion, la sexualité, la violence, la guerre, la manipulation, la science. Rien n'est droit, tout est de travers chez Arrabal. Les tanks crachent des ballons vert olive. Des êtres mutants surgissent, notamment un homme-chien-loup qui n'est pas une femelle. La voix radiophonique pseudo scientifique ne fait que se cacher devant une langue de bois (ça semble très actuel), la guerre détruit tout et ne sert à rien. Non, à part certaines références la pièce n'a pas pris une ride. Le mouvement Panique initié par l'auteur et ses camarades est toujours aussi virulent. Certes je vois mal un théâtre national monter ce genre de pièce de nos jours. Il en faudrait un grain de folie ou une pierre de la folie (très grande oeuvre poétique de l'auteur) ou juste de l'audace ou du courage, mais le fait que le livre existe, permet de rêver au temps où le théâtre était libre. Ce n'est peut-être pas la pièce la plus forte du dramaturge, mais elle a son lot de bons mots.
Commenter  J’apprécie          30
El greco et Fernando Arrabal

J'ai emprunté à la BM ce livre pour préparer ma visite à l'exposition "Greco" à Paris (début 2020). Mais je l'ai refermé au bout d'une dizaine de pages.



En effet, soit ce type est dingue, soit c'est moi qui suit complètement coinçée ou qui n'y connait rien à l'art.

J'avoue que je ne suis pas une grande connaisseuse mais :



- Je n'ai pas vu dans Le Martyre de saint Maurice un jeune éphèbe se faire sucer par un vieillard;

- Ni dans Saint Jérôme pénitent, celui-ci serrant "dans sa main droite un gros rouleau de chair dont l'extrémité surgit à la hauteur de son sternum. L'ermite inverse son extase en onanisme.";

-Ni aucun "bergers (qui) se prosternent devant un gigantesque phallus mal camouflé en museau de vache" dans l'Adoration des bergers. Et pourtant, je l'ai scruté et retourné dans tous les sens mais rien ... !



L'auteur apporte cependant un éclairage fort intéressant sur la vie (très) privée du peintre, citant même le nom de son amant (l'exposition du Grand Palais ne cite même pas le nom de sa femme !)



C'est bien dommage (bizarre ?) qu'il considère que la mort de ce grand peintre soit le meilleur moment de sa vie ! ("il va passer ses meilleurs moments, jusqu'à ce que, à l'âge de 73 ans, il vive, en mourant le meilleur d'entre eux.")



La manière dont il parle de l'Eglise (mais dans le texte il n'y a pas de majuscule) est juste ignoble : "le peintre reçut les quatre sous qui lui furent remis par des mains pleines d'excréments" !



J'arrête là, vous aurez compris que ce livre n'est pas un livre d'art à mettre entre toutes les mains, il sent trop le souffre et la haine.



Si je dois quand même lui trouver un point positif, je dirais que les reproductions sont de bonne qualité, en couleur et de grand format.
Commenter  J’apprécie          30
La traversée de l'empire

Il s'agit d'une pièce de théâtre, à la lecture de laquelle on a l'impression que le visuel est la dimension principale de l’œuvre d'Arrabal. Le mieux est donc sans doute d'aller voir la pièce, lorsque cela est possible, comme en témoigne l'usage massif de didascalies. Le style est très allégorique : on comprend qu'on assiste à une sorte de troisième guerre mondiale, qui semble opposer les Américains aux pays latins (?) et aussi à une sorte d'apocalypse générale, symbolisée par l'abbesse Sakoto, qui figure la Mort. Noter une critique de l'armement ultra-technologique dont l'effet est le même au fond qu'en des temps dits bien plus primitifs. Néanmoins, le propos est par moments extrêmement obscur, pour ne pas dire douteux : pourquoi le personnage homosexuel est-il nommé Iago (cf. Othello), un exterminateur, et connaît-il une fin atroce? On a trop souvent une impression de sensationnalisme, de mélange de concepts, de prophéties... un peu gratuites.
Commenter  J’apprécie          30
Houellebecq

Si Fernando Arrabal et Michel Houellebecq s'apprécient mutuellement. Ce livre est surtout un travail d'éditeur. En cela il est décevant. Je critique ici le travail de l'éditeur espagnol, car Le Cherche Midi n'a fait qu'éditer la traduction.

Bien sûr si l'on regarde le côté positif, il y a quelques perles dans les textes d'Arrabal, mais souvent ce sont des fragments assez répétitifs.

Il aurait été bien meilleur d'essayer d'initier une correspondance régulière entre les deux, comme avec Bernard-Henri Lévy ou une série d'entretiens que publier ce livre. Il y en a certes deux, mais ils ne représentent qu'une minorité du livre.

Dommage, car le potentiel était là.

Commenter  J’apprécie          20
Lettre au général Franco

Lettre intégrale du dramaturge - poète au dictateur. Sans concession et la vérité sincère reflétant la situation espagnole incongrue et dramatique à l'aube du 21ème siècle. On est fasciné de dégout et halluciné des situations cruelles que vivent les espagnols.
Commenter  J’apprécie          20
La pierre de la folie

Un livre décidément curieux et attachant, sorte de journal en écriture automatique d'un rêveur éveillé, sous le signe de la circularité, de la récurrence, mélange de lumière et d'ombres qu'on sent furtivement passer sous nos pieds et peuvent donner l'idée d'une inquiétante profondeur qui recèlerait pourtant en son sein la solution au problème.


Lien : https://www.bookcrossing.com..
Commenter  J’apprécie          10
Le Panique

Peut-être qu'il s'agit d'une époque qu'un jeune de trente ans comme moi ne peut pas connaître. Peut-être s'agit-il d'élucubrations artistiques d'un "mouvement" qui se prétend ne pas être un mouvement artistique que je ne peux également pas comprendre...

Toujours est-il qu'au delà du memento de Topor ou des aphorismes de Lichtenberg, je n'ai pas trouvé beaucoup de grain à moudre pour mon moulin cérébral. Quand on a déjà eu une première expérience avec Jodorowsky par exemple (le film El Topo) et qu'on y a vraiment, mais vraiment, pas gouté... eh bien on prend cher à plus d'un passage de ce livre que je qualifierais de "recueil d’œuvres paniques". Paniques: c'est la manière dont ils essaient (ou n'essaient pas) de se définir. Et recueil : car on y trouve un peu de tout, y compris des illustrations, parfois sympas, souvent surréalistes mais sympas...

Je crois malheureusement que les jeunes générations ne vont pas se retrouver dans ce genre de trip pré soixante huitard.

Allez, hop! A la boite à livre du voisin, en espérant que cela fasse le bonheur d'un plus chanceux que moi :)
Commenter  J’apprécie          10
La pierre de la folie

« La Pierre de Folie » de Fernando Arrabal (2004, Maelstrom, 128 p.) par cet auteur du groupe Panic avec Roland Topor et Alejandro Jodorowsky. Pièce parue dans « La Brèche », la dernière revue surréaliste. La pièce fait allusion à l’opération pratiquée au Moyen Age pour extraire cette pierre, à l’origine supposée de la folie.

C’est, tant qu’on y est en supplément à « La piedra de la locura » du chilien Benjamin Labatut, (2021, Anagrama, 80 p.). L’auteur né à Rotterdam, aux Pays-Bas et a passé son enfance à La Haye, puis Buenos Aires et Lima, avant de s’installer à Santiago de Chile à l’âge de 14 ans. C’est aussi l’auteur de « When We Cease to Understand the World » (Quand on cesse de comprendre le Monde) (2020, New York Review of Books, 194 p.). Traduit en français par Robert Amutio, le traducteur de Roberto Bolaño, sous le titre de « Lumières Aveugles » (2020, Seuil, 228 p.). Il a été récompensé par un « 2021 International Booker Prize » ce qui n’est pas rien. Il faisait partie de la liste de lecture de Barack Obama pour l’été 2021, avec une douzaine d’autres titres.

C’est un court essai (80 pages) en deux parties. « L'extraction de la pierre de la folie » et « Le remède à la folie ». Avec une question « Pourquoi les diables volent-ils des manuscrits de livres inédits ? ». La première partie prend comme exemples Howard Philips Lovecraft et Philip K Dick, les deux auteurs de science-fiction. Puis il passe à des mathématiciens, tels David Hilbert ou Kurt Gödel. Cela devient de plus en plus filandreu.



« Le curé est venu voir ma mère et il lui a dit que j'étais fou. Alors ma mère m'a attaché à ma chaise. Le curé m'a fait un trou dans la nuque avec un bistouri et il m'a extrait la pierre de la folie ». Il faut dire que « J’ai une bulle d’air. Je la sens très bien. Quand je suis triste, elle se fait plus lourde et parfois, quand je pleure, on dirait une goutte de mercure. La bulle d’air se promène de mon cerveau à mon cœur et de mon cœur à mon cerveau ». Cela ne s’arrange pas. « Tous les matins des morceaux de ma tête tombent et même des morceaux de visage. Quelquefois la moitié de ma tête s’éboule. Je dois passer des heures entières dans la salle de bain à remettre les morceaux ».

Et cela ne s’arrange même pas du tout. « Malade, malade, malade, mâle, mâle, mal, mal, ma, mai, mai, mais, maître, maître, maître, maîtres, maîtresse, malade, malade, manger, mandat.

Malade, malheur, mal, malaise, manège, mandibule, mander, mandais, mande, ma, mal, maman, maire, majeur, majesté, mal, malade, malades, malade.

Malade, mars, marie, maroc, marotte, marmotte, marmite, masser, massacre, martyr, mascotte, mâle, mal, ma, mai, mai, maître, maître, maîtresse, malade, malade, maman, maman, mer.

Malade, malheur, malheur, mandat, manger, mal, ma, mander, mandais, ma, mal, maman, mehr, maîtres, maîtres, maîtresse, maman, malade, mandibule, mal, malade, maman, maman, maman, mère ».

J’avais prévenu, c’est de Arrabal et du groupe Panic.

En fait « La Pierre de Folie » part d’un tableau de Hieronymus Bosch (1485) «de keisnijding » (l’extraction de la pierre de la folie) au musée du Prado de Madrid. Au Moyen Age, on croyait que les fous avaient une pierre dans la tête et que le moyen de guérir la folie tait de pratiquer une lobotomie. Le tableau représente l’opération subie par un bourgeois, sous le regard d’un moine et d’une nonne. Le médecin est représenté avec un entonnoir (le savoir) porté à l’envers sur sa tête en guise de chapeau. Cela le caractérise en tant que médecin des fous. La nonne, par ignorance ou pour imiter le médecin, porte sur sa tête le livre de la connaissance médicale. Le chirurgien principal, tout en noir vêtu, enlève la pierre du crâne du malade à l'aide de tenailles.

A vrai dire, du Prado je préfère presque la salle en sous-sol avec les peintures de Goya dont le terrible « Saturne dévorant un de ses enfants » et le « Chien se noyant ». Et puis, il n’y a qu’à traverser l’avenue pour aller voir en face le « Guernica » de Picasso.

Commenter  J’apprécie          00


Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Fernando Arrabal (195)Voir plus

Quiz Voir plus

Quiz sur "La tresse" par Dorian M.

Combien y a-t-il de personnages principaux ?

1
2
3
4

10 questions
150 lecteurs ont répondu
Thème : La tresse de Laetitia ColombaniCréer un quiz sur cet auteur

{* *}