Citations de Fiodor Dostoïevski (3113)
[…] mais tout m’était tellement égal que j’avais fini par vouloir tomber sur une minute où ça me serait moins égal.
D’un coup, j’ai eu l’idée que si le gaz s’était éteint partout ç’aurait été plus gai, que le gaz rendait le coeur plus triste, parce qu’il éclairait tout.
Mon Dieu ! Tout un instant de bonheur ! N'est-ce pas assez pour toute une vie ?
Ô Dieu, si seule ment je pouvais vous aimer tous les deux ! Pourquoi n'êtes-vous pas lui ?
Pendant tout un an je l'ai aimé. je n'ai pas eu de pensée qui ne fût à lui. Mais vous voyez, il m'abandonne.
Pourquoi ne pas dire tout de suite franchement ce qu'on a dans le cœur si l'on sait que ce n'est pas au vent qu'on jette ses paroles ? Et chacun affecte une sévérité outrée, comme pour avertir le monde de ne pas blesser ses sentiments... Et ses sentiments, tout le monde les cache.
Pourquoi n'est-il pas vous ? Pourquoi n'est-il pas comme vous ? Je vous préférerais, mais c'est lui que j'aime.
Je cherchais à cette absence prolongée des explications et j'en trouvais. D'ailleurs, dans un tel moment on accueille si volontiers les plus improbables consolations ! On est si heureux de la moindre apparence d'excuse !
N'est-ce pas ainsi quand nous sommes malheureux ? Ne sentons-nous pas plus profondément la douleur des autres ?..
Mais, mon Dieu, comment donc ai-je pu être si sot, si aveugle ? Tout était déjà pris par un autre; rien pour moi. Ces tendresses, ces soins, cet amour...
Je vous jure que si jamais je puis me marier, je ne demanderai pas de bonheur à une autre que vous.
Mais alors je ne me demandais pas encore : « Où sont les rêves ? » Et voici que je hoche la tête et je me dis : « Comme les années passent vite ! Qu'en as-tu fait ?
As-tu vécu ? Regarde comme tout est devenu froid ! Les années passeront, toujours davantage ta solitude t'accablera et viendra la vieillesse accroupie sur son manche à balai; ton monde fantastique pâlira... Novembre... Décembre... Plus de feuilles à tes arbres... »
O Nastenka, ce sera triste de vieillir sans avoir vécu : n'avoir pas même de regrets !
Voyons, est-il possible de croire qu'il n'ait jamais connu l'être qu'il étreignait dans les transports de son rêve ? Quoi ! Rêvait-il donc la passion ? Se pourrait-il qu'ils n'eussent pas marché les mains unies dans la vie, bien des années mêlant leurs âmes ? [...] Était-ce donc, tout cela ! N'était-ce donc qu'un rêve ?
Ça s'organise si facilement un monde fantastique ! Et qui sait si ce n'est qu'un mirage ? C'est peut-être des deux mondes le plus réel.
Oui, Lise, votre question de tout à l'heure: «N'y a-t-il pas du dédain envers ce malheureux, à disséquer ainsi son âme? » est une question douloureuse... Voyez-vous, je ne sais pas m'expliquer, mais ceux qui se posent de telles questions sont capables de souffrir. Dans votre fauteuil, vous devez remuer bien des pensées...
Souviens-toi toujours, jeune homme, que la science du monde s’étant developpée, en ce siècle principalement;
elle a disséqué nos livres saints et, après une analyse impitoyable, n'en a rien laissé subsister. Mais en disséquant les parties, les savants ont perdu de vue l'ensemble, et leur aveuglement a de quoi étonner. L'ensemble se dresse devant leurs yeux, aussi inébranlable qu'auparavant, et l'enfer ne prévaudra pas contre lui.
Sache, imbécile, que, si nous autres nous ne croyons plus, c'est par pure frivolité : les affaires nous absorbent, les jours n'ont que vingt-quatre heures, on n'a pas le temps, non seulement de se repentir, mais de dormir son soûl. Mais toi, tu as abjuré devant les bourreaux, alors que tu n'avais à penser qu'à la foi, et qu'il fallait précisément la témoigner ! Cela constitue un péché, mon brave, je pense?
«Nous ne craignons pas trop, me déclara-t-il, tous ces socialistes, anarchistes, athées et révolutionnaires; nous les surveillons et sommes au courant de leurs faits et gestes.
Mais il existe parmi eux une catégorie particulière, à la vérité peu nombreuse : ce sont ceux qui croient en Dieu, tout en étant socialistes. Voilà ceux que nous craignons plus que tous, c’est une engeance redoutable ! Le socialisme chrétien est plus dangereux que le socialisme athée.»
A la fin, ces hommes s'épuisérent dans un travail absurde, et la souffrance parut sur leur visage, et ces hommes proclamèrent que la souffrance est la beauté, car seule la souffrance est porteuse de pensée.