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Citations de François Nourissier (199)


Les villes grouillent de fils et de petits-fils de paysans. Ce n'est pas un bien, ce n'est pas un mal.Un air chanté faux , pas autre chose.On naît à Villemomble ,on apprend à marcher sur les trottoirs de Paris.
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Yvette aimait les hommes , peut-être à la façon dont les chômeurs aiment un emploi.
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De toute façon, Mme du Jusy n'était pas douée pour l'admiration. Les premières voix qui prêchaient la collaboration lui parurent communes ; les visages des messieurs de Vichy, revanchards et contraints, ne lui inspiraient pas confiance. Des blafards, des fesses-serrées, des tard-venus. Elle avait jubilé quand les murs de Paris s'étaient couverts de cette affiche jaune où Marcel Cachin, le moustachu communiste, avec sa tête de bon bourrelier de village, appelait les ouvriers français à fraterniser avec les soldats allemands. La preuve était faite et la trahison consommée.
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- Sais-tu que certains prisonniers rapatriés arborent une espèce d'insigne ? Un bout de fil de fer barbelé, tu te rends compte... Destiné sans doute à proclamer la gloire de s'être fait poisser par les frisés.
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Dans une petite rue, derrière le musée de Cluny, devant la façade aveugle et muette d'un bordel de dernier ordre, on avait assis deux femmes sur des chaises, en haut de quelques marches, où le trottoir formait une espèce de surplomb. Elles restaient exposées là comme autrefois elles l'eussent été au pilori. Les mains de l'une étaient liées derrière son dos, l'autre les avait posées sur ses cuisses marbrées de bleus. A toutes deux on avait arraché leurs vêtements, dénudés les seins. Des types montaient la garde autour d'elles, repoussant les excités d'une crosse négligente ; d'autres avaient fini de tondre la plus grosse, à laquelle ils peignaient maintenant une croix gammée sur le crâne, d'où lui coulaient sur le visage des bavures noires.
- C'est aux fesses qu'il faudrait la lui peindre !
On voyait des touffes de toison rousse sur le trottoir. Ils tenaient levée la tête de l'autre en tirant ses cheveux et bonimentaient à gros mots sales. Les ciseaux, que manipulait une sorte de larve en culotte de golf, ne parvenaient pas à trancher la tignasse noire. On vit surgir une de ces cisailles qui servent à élaguer les haies, qu'on se passa sous les applaudissement. Un type tira plus fort sur les mèches qu'il avait saisies à pleine main et la femme fut légèrement soulevée de la chaise ; elle gémissait , de façon un peu ridicule, de sorte qu'on ne la prenait pas en pitié. En quelques claquements , les deux énormes lames firent de la malheureuse un épouvantail, dont, s'écartant, les deux hommes montrèrent aux spectateurs le visage livide, bosselé de coups, les yeux fous.
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Machinalement, en sortant de Saint-Louis, Lucien a traversé le boulevard pour aller lécher les vitrines de la librairie Rive gauche. [..............].
Deux agents jettent un coup d’œil à Lucien qui s'est trop attardé. Il quitte à regret les photos grand format de Benoist-Méchin, de Giono, de Chardonne : il aime contempler les têtes de littérateurs, interpréter les sillons, les creux tragiques, apprécier l'art des éclairages rasants qui donnent de l'âme à qui en manque. Les pauvres, pense Lucien, ils ne doivent plus être tellement satisfaits de trouver leur tête ici, et taille géante ! Il se rappelle cette publicité qu'avait faite à son ouverture la librairie allemande : un catalogue de littérature française illustré des portraits de six ou huit grands hommes. On trouvait là, outre ceux dont l'effigie règne encore ce matin, Châteaubriant en penseur terrien, l'oncle Henry en Dieu du Stade, Brasillach tout rond, Drieu longiligne. Et les autres ? Je les ai oubliés, c'est aussi bien. Lucien se demande l'impression que cela leur fait, aux grands hommes, après trois longues années, de piétiner finalement le mauvais versant du volcan. Sont-ils obstinés ? Apocalyptiques ? Embêtés ? Se sentent-ils résolus ou filochards ? Grandes consciences douloureuses ou joueurs maladroits ? Pourtant, un écrivain célèbre, ça connaît du monde, ça écoute. On a ses entrées, on sait des choses que les pauvres gens ignorent. On possède le dossier, quoi ! Comment ont-ils fait pour calculer si mal leur coup ? Les idées, oui, la folie froide et forcenée des idées. Mais là encore, si eux se trompent, qui verra clair ?
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Mon vélo dérapa et le tête-à-queue me jeta dans un groupe d'hommes et de femmes dressés sur la pointe des pieds. Ils essayaient de mieux voir. On me retint de tomber, en maugréant. Puis la petite foule soudain s'ouvrit, et à trois mètres de moi surgit, tendue en avant par l'instinct de fuir, d'échapper à ce cul-de-sac, figure de proue abominable, une femme sans âge, le torse nu, tondue, le visage et le crâne barbouillés de peinture rouge. Des types la retenaient par ses deux bras qu'ils tordaient en arrière, l'offrant à la foule comme du gibier crevé, une dérisoire statue de victoire dont le mouvement, l'élan animal faisaient saillir deux seins très blancs sous les dégoulinades de minium.
Tout cela, en moi, précis et brûlant comme si la scène s'était déroulée hier et avait duré très longtemps, me laissant le loisir de la détailler : la croix d'or entre les seins de la femme; la petite culotte de jersey bleu, souillée, déchirée, qu'on lui avait laissée pour tout vêtement; le rictus qui lui tordait le visage - supplication, terreur - alors que sa bouche tuméfiée crachait encore des injures. Les justiciers portaient des casques sur la nuque, des cartouchières et, à la ceinture, d'énormes étuis à revolver pris sans doute à des sous-offs allemands. Sur leurs visages passaient des ombres ignobles : jactance, rigolade. Et puis soudain un souffle de panique, la peur qu'on la tuât, leur proie, la pauvre pute dont ils avaient rasé les cheveux, arraché les vêtements Dieu sait avec quels attouchements obscènes, sur laquelle ils avaient peint cette croix gammée dont les branches coulaient en bavures écarlates vers le cou, les épaules, le visage convulsé de leur victime.
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Les deux côtés de la table, se faisant face, Lucien et sa mère. Elle lit. Un numéro de L'Illustration. Il traînasse au creux d'une dissertation. Les deux bougies brûlent inégalement. L'une, unique rescapée de la cuvée 40, donne cette belle lueur chaude, à peine tremblante, réputée rendre les femmes jolies.
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Je sais aujourd’hui que je ne trouverai jamais la maison que je cherche, jamais je ne l’habiterai, jamais je ne laisserai nulle part pousser mes racines, je ne cesserai pourtant pas d’investir dans un lieu l’inépuisable espérance d’apaisement qui me harcèle, entre quelques murs réputés chargés de souvenirs, dans un jardin clos.
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François Nourissier
L’écriture est le seul pouls où j’entende encore battre mon cœur.
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[...] s’il suffit qu’un texte né de ma plume soit réduit à l’anonymat pour perdre toute chance d’être apprécié, voilà lurette que j’escroque le monde, ou que le monde m’escroque. Qui abuse qui ?
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La main à plume
Ne croyez pas qu'on entre dans un livre comme à Prisunic. Si vous saviez le temps passé sur le trottoir, autour du pâté de maisons, et les fausses entrées, les remords, les absolus désespoirs. Ce livre-ci par exemple, exactement celui-ci, que vous lisez, à la page 37 duquel vous êtes parvenu (et peut être trouvez-vous la soupe un peu fluide, ou grasse, ou amère, ou bien vous demandez-vous quand on entrera "dans le sujet" alors qu'on y est jusqu'au cou), ce livre-ci ne m'est apparu, boiteux, réticent, qu'après des mois d'errements. Il devait successivement s'intituler Polka, Les Distances, A défaut de génie, L'Or de la Loire et L'Imbécile. Il a été, selon les semaines, fictionneux ou chroniqueux, bref ou massif, pâteux ou délié. Le voilà devenu épistolaire.
P. 37
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Mes mains sont si occupées à te gratter le dessous des oreilles qu'elles ne peuvent plus rien "tenir", et c'est bien ainsi. Toi qui aimes tant déchiqueter, gratter, démantibuler, tu as réduit en miettes quelques proverbes louis-philippards.
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Le remords organise plus de tumulte dans une tête que des enfants ne font de bruit dans un appartement.
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De la guérilla, du voyage au bout de l'ennui nous fîmes, Marie-Anne et moi, le style de notre vie.
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La mode depuis quelques années est à l'innocence des enfants, à la culpabilité vague et générale des parents. On a beau en rire, on prend insensiblement la couleur de son temps.
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Car j'écris souvent, en rêve. Ma prose s'y déploie en queue de paon, s'y gonfle, s'y pavane, quelle musique ! Elle s'y permet aussi des folies de vitesse, des arrêts pile, des sécheresses exquises. Au matin, le chef-d'œuvre est envolé.
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Si l'on éprouve tant de mal à parler à ses enfants, c'est aussi qu'on ne peut rien leur dire. Dès que la vie tangue, mieux vaut se taire si l'on ne veut pas tourner à la caricature. Il n'y a de vie que privée, et sur celle-là, bouche cousue. Restent les principes, les idées générales, la marche du monde, et "Te-sens-tu-prêt-pour-ton-examen?" - autant dire la ronce, bonne à être arrachée.
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Il faut s'aimer soi-même pour aimer l'être qui vous précède, celui qui vous suit. Cette chaîne des générations, qui a belle réputation et remue les coeurs, m'enchaîne sans me rassurer. Comment aimerais-je reconnaître chez d'autres les caractères que je suis parvenu à gommer en moi?
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(...) je me sentais, à y réfléchir, dans la peau d'un courailleur vieillissant qui s'émeut de trouver chez une donzelle les facilités et les appétits qui lui feraient horreur chez sa propre fille. A la maison, la vertu! Ailleurs, un peu de feu me réchauffait.
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