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Citations de Françoise Chandernagor (607)


L’ALOÈS

Au bout de l’amour il y a l’amour
Au bout du désir il n’y a rien.
L’amour n’a ni commencement ni fin.
Il ne nait pas, il ressuscite.
Il ne rencontre pas, il reconnaît.
Il se réveille comme après un songe
Dont la mémoire aurait perdu les clefs.
Il se réveille les yeux clairs
Et prêt à vivre sa journée.
Mais le désir insomniaque meurt à l’aube
Après avoir lutté toute la nuit.

Parfois l’amour et le désir dorment ensemble
Et ces nuits-là on voit la lune et le soleil.

Liliane WOUTERS, 1983
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Rome. Une ville rouge qui cuit à l'étouffée dans ses vieilles murailles, une ville étranglée entre ses collines couronnées de temples raides. Du creux des vallons jaillissent des tours crénelées ; çà et là, des immeubles étroits, dressés comme des pieux, crèvent le maillage serré des tuiles brunes. Tout est vertical ici, tout semble hérissé. Une ville bossue et pleine d'épines...
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Elle rit, elle babille, elle embrasse, elle donne : c'est Julie. Elle batifole avec ses nains, joue avec ses singes, folâtre avec ses musiciens, gazouille avec ses enfants, effeuille un palmier, croque une pêche au vinaigre, plume un éventail : Julie. " Sais-tu que j'ai déjà vu ton mari ? Quand j'étais petite. Enfin, pas si petite. Juste avant la guerre des Basques. Je l'ai aperçu deux ou trois fois derrière mon père, dans des défilés. Quel cavalier ! Bel homme... Remarque, je ne l'ai jamais vu sans son cheval. Un vrai centaure. Homme pour le haut et cheval pour le bas ! Entre nous, un centaure, c'est le rêve de toutes les femmes : oui, oui, on aime toujours mieux embrasser les lèvres d'un homme que la bouche d'un cheval, mais, pour le reste, crois-moi, le cheval amoureux est beaucoup plus "avantageux" ! Allons, ne rougis pas, vierge pudique, tu n'es pas censée comprendre les folies que je dis ! "
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En ce temps-là, le monde était jeune, et Alexandrie, la plus grande ville du monde. Du monde connu, bien sûr. Mais le monde connu, " l'Oïkouméné " des Grecs, n'était pas petit : quand Séléné vit le jour, il s'étendait déjà de la mer du nord à l'Ethiopie, et des rivages de l'Irlande jusqu'à l'Île de Ceylan.
Au-delà, on soupçonnait bien, vers l'est, l'existence d'un mystérieux " pays de la soie ", contrée bénie des dieux où les pelotes du précieux fil poussaient sur les arbres comme des fruits, mais aucun caravanier syrien, aucun marchand parthe, n'avait jamais été admis à parcourir de bout en bout la route des " fruits qu'on tisse " : de marché en marché et de troc en troc, elle se perdait dans les déserts d'Asie.
Quand aux pays du sud - qu'on devinait dès les premiers contreforts de l'Atlas et les montagnes d'Erythrée -, on les savait, de source sûre, peuplés d'unijambistes mangeurs de pierres, d'hommes sans tête dont la bouche s'ouvrait au milieu de la poitrine, et de satyres à corps de bouc qu'aucune personne sensée n'aurait eu envie d'aller voir de près.
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ODE À L’AMANT

Tu es la vigueur du soleil
Et ta sève embaume,
Elle est un ruisseau de Mai sous l'aubépine,
Plus douce que la fleur du sureau.
Tu te dresses et tu es la force de la forêt,
Son mouvement dans la lumière.
Ta poitrine est rude sous ma joue,
Tes reins blessent mes mains nouées,
Tu es rude comme un chêne.

Je t'ai baisé comme un rouge-gorge dans ma main,
J'aime la tiédeur de ton corps dans ma main.
Je me rassasie de ton odeur sauvage ;
Tu sens les bois et les marécages
Tu es beau comme un loup (…)
Je louerai ta brutalité,
Le sanglot rauque de ta chair ;
Je louerai ta sève immense
Où l'univers est en puissance.
Je louerai tes poings et comment ils se dénouent
Tout à coup quand tu retombes
Au creux d'une épaule,
Plus doux qu'un petit enfant
Et plus innocent qu'un ange.

MARIE DAUGUET, 1926
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Elle avait su très tôt que la vie n'est pas la " farandole des desserts".
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Cléopâtre, je ne la vois pas. Son visage, sa silhouette, disparaissent sous des couches de cultures superposées : il n'y a pas que César et Antoine qui lui soient passés dessus - trop de peintres aussi, trop d'écrivains... Ce n'est plus une femme, c'est un mythe. Comme Don Juan ou Carmen. Eternellement contemporaine. Sa beauté se met au goût du jour : au Moyen-Age elle porte un hennin, au Grand Siècle une fontange, et, dans le film de Mankiewicz, elle a des yeux de biche, des cheveux crêpés et une nuisette en nylon. Mieux, il arrive aujourd'hui qu'on la coiffe façon "punkette", mèches ultracourtes, ébouriffées.
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Je suis née au milieu du jour,
La chair tremblante et l'âme pure,
Mais ni l'homme ni la nature
N'ont entendu mon chant d'amour.

Depuis, je marche solitaire,
Pareille à ce ruisseau qui fuit
Rêveusement, dans les fougères
Et mon coeur s'éloigne sans bruit.

Cécile Sauvage.
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page 100
[...] La galerie serait incomplète, enfin, sans les portraits de Potel-Romain et de Raincy, qui pensaient sacrifier aux plaisirs de l'élégance et de la beauté. Potel-Romain était un poètereau noir et gros, la bouche enfoncée et les yeux de travers; il venait, lorsque je le connus, de quitter la perruque et, n'ayant point trop de cheveux de son cru, croyant élégant d'y mêler trois ou quatre moustaches postiches de chaque côté afin de s'étoffer; avec cela, tout hérissé de galants rouges, jaunes et bleus, la rhingrave trop courte, et le genou cagneux enserré dans deux rotondes de dentelles dont le tour aurait passé celui de la Table Ronde. Quant à Raincy, c'était un muguet issu de la finance, qui ruisselait d'écus et de parfums, d'or et de pierreries. Il avait toujours sur lui tant de brocarts et de rubans qu'on eût dit d'une châsse à la Fête-Dieu. Il est vrai qu'il était assez fou pour donner parfois dans un genre plus dépouillé : certaines nuits, il se glissait nu sous un drap; il allait, ainsi vêtu, aux abords de la Place Royale, et dévoilait aux dames attardées l'excès de ses appâts, pour leur faire peur ou pour leur faire envie. [...]
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Pour la sexualité, les Anciens sont "modernes". Rien moins que puritains. La position du missionnaire, très peu pour eux ! Ce qui n'empêche pas qu'ils aient, comme un chacun, leurs dégouts et leurs tabous. Différents des nôtres : rien de plus ordinaire à leurs yeux que la bisexualité, une notion qui n'a même pas de sens pour un romain - " on baise, ou quoi ? " ; et rien de plus banal, de plus charmant, que la pédophilie : tous les partenaires sont permis pourvu qu'on garde un rôle " actif " ; mais pas question, entre amants convenables, de s'ébattre en pleine lumière (on éteint la lampe), ni de confondre le haut avec le bas - dans la gymnastique amoureuse, le haut ne communique qu'avec le haut, et le bas qu'avec le bas.
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VERS D’AMOUR

Tu gardes dans tes yeux la volupté des nuits,

O Joie inespérée au fond des solitudes !

Ton baiser est pareil à la saveur des fruits

Et ta voix fait songer aux merveilleux préludes

Murmurés par la mer à la beauté des nuits.

Tu portes sur ton front la langueur et l’ivresse,

Les serments éternels et les aveux d’amour,

Tu sembles évoquer la craintive caresse

Dont l’ardeur se dérobe à la clarté du jour

Et qui te laisse au front la langueur et l’ivresse.

Renée VIVIEN, Cendres et Poussières, 1902
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page 265
[...] Je ne rencontrais point non plus de divertissement à mon ennui dans le charme des lieux : j'avais le château de Saint-Germain en horreur. Non point les entours et l'emplacement, qui offrent des merveilles à la vue, mais les bâtiments me déplaisaient. L'architecture en est sans grâce, la brique de médiocre apparence, la cour du château-vieux parfaitement laide, et les intérieurs des deux palais les plus incommodes du monde.
Les fêtes brillantes qu'on y donnait sans cesse pour amuser le courtisan, les bals, les opéras, les feux d'artifice, les comédies ne pouvaient masquer ce que l'endroit avait de dégoutant, une fois les lumières éteintes : on ne pénétrait dans la grande cours qu'en défilant entre les échoppes et les éventaires où les "officiers du serdeau" vendaient à leur profit les restes de "la Bouche du Roi"; pour parvenir aux magnifiques appartements d'apparat du monarque et des princes, il fallait d'abord fendre la foule des courtisans démunis et du menu peuple qui se pressaient autour de ces baraques branlantes, affronter les odeurs de graillon, et piétiner allègrement os de poulets, reliefs d'ortolans, et quignons de pain; cela fait, on avait le plaisir de monter encore quelque sombre escalier bien puant du soulagement qu'y prenaient les chiens et les gentilshommes, de traverser des paliers couverts d'ordures et des antichambres où régnait le "parfum" lourd des garde-robes et des privés. [...] Si l'on avait ensuite le bonheur d'échapper aux coupe-bourses et aux tire-laine, qui patrouillaient en liberté dans les salons, et qu'on n'avait laissé dans l'aventure ni les perles de son collier ni les franges et les dentelles de sa robe, on pouvait espérer de se retirer enfin dans un appartement, qui n'était d'ordinaire que d'une seule chambre, sans air, sans vue, et sans feu.
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Ainsi, je n'avais jamais été maîtresse d'arranger mes appartements à ma mode : je vivais depuis trente ans dans des meubles rouges et verts quand je n'ai de goût que pour le bleu ; en été, je dormais dans la pleine lumière, mes fenêtres n'ayant ni volets, ni châssis, ni contrevents, car la symétrie en eût été choquée ; et en hiver, je grelottais de froid car il fallait tenir les croisées ouvertes par horreur de la fumée des feux.
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Il vivra dix ans et trois mois. Mais toute vie achevée est une vie accomplie : de même qu'une goutte d'eau contient déjà l'océan, les vies minuscules, avec leur début si bref, leur infime zénith, leur fin rapide, n'ont pas moins de sens que les longs parcours. Il faut seulement se pencher un peu pour les voir, et les agrandir pour les raconter. L'enfant de la Tour est un vieillard parce qu'à son échelle il a tout vécu. Il ne lui reste ni illusions ni appétit. Sa mesure est comble.
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L'amour est la rencontre d'une occasion et d'une tentation,mais quand la tentation y est,l'occasion manque rarement.
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Le Roi hésita un moment sur la déclaration de ce mariage. Je vis bien qu'il la craignait ; cependant, il me l'offrit. Je lui représentai alors qu'il ne fallait pas qu'il fît pour moi une chose si au-dessus de moi, et qu'il ne faisait que trop déjà en m'épousant ; qu'enfin, il valait mieux, de tout point, garder ce mariage secret. Il se rendit fort aisément à mes raisons.
Il m'avait fallu paraître mariée avec Monsieur Scarron quand je ne l'étais guère ; maintenant que je serais bien mariée, il me faudrait jouer les veuves. C'était mon sort apparemment que de ne pouvoir être mariée à la façon commune.
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- Et si vous étiez malade pour de bon, il faudrait bien pourtant changer quelque chose à l'étiquette...
- Point, Madame. Les rois ne sont pas malades. Ils meurent, c'est tout.
- Oh, Sire, ne pourriez-vous parfois être moins roi ?
- Il me semble, Madame, que, par moments, avec vous... mais aujourd'hui, vous ne voulez plus...
- Laissez-moi vous assurer, lui dis-je en souriant, que, de toutes les façons, vous ne faisiez pas moins le roi dans ces moments-là que dans les autres.
( Madame de Maintenon et Louis XIV)
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LA SINCÈRE

Veux-tu l'acheter ?
Mon coeur est à vendre.
Veux-tu l'acheter,
Sans nous disputer ?

Dieu l'a fait d'aimant ;
Tu le feras tendre ;
Dieu l'a fait d'aimant
Pour un seul amant !

Moi, j'en fais le prix ;
Veux-tu le connaître ?
Moi, j'en fais le prix ;
N'en sois pas surpris.

As-tu tout le tien ?
Donne et sois mon maître.
As-tu tout le tien,
Pour payer le mien ?

S'il n'est plus à toi,
Je n'ai qu'une envie :
S'il n'est plus à toi,
Tout est dit pour moi. (...)

L'âme doit courir
Comme une eau limpide ;
L'âme doit courir,
Aimer et mourir.

Car pour nos amours
La vie est rapide,
Car pour nos amours
Elle a peu de jours.

Marceline DESBORDES-VALMORE
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Comme autrefois le poète Racan, je soutiendrais volontiers que la prose n’est que de la marche quand la poésie est la danse même…

Avant-propos de Françoise Chandernagor
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Ton baiser a la splendeur éclatée des érables
À la saison des grands départs d'oiseaux
Quand leurs graines ont pris le large
Sur les vents qu'elles empourprent

Je t'aime dans la profondeur des nuits.


Juliette Darle.

En cette journée de la Femme, quoi de mieux que de mettre en valeur une femme poète méconnue, pourtant très engagée pour faire découvrir à tous la poésie.
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