Citations de Gaston Bachelard (544)
Toute objectivité, dûment vérifiée, dément le premier contact avec l’objet.
Quand une âme sensible et cultivée se souvient de ses efforts pour dessiner, d’après son propre destin intellectuel, les grandes lignes de la Raison, quand elle étudie, par la mémoire, l’histoire de sa propre culture, elle se rend compte qu’à la base des certitudes intimes reste toujours le souvenir d’une ignorance essentielle. Dans le règne de la connaissance elle-même, il y a ainsi une faute originelle, c’est d’avoir une origine ; c’est de faillir à la gloire d’être intemporel ; c’est de ne pas s’éveiller soi-même pour rester soi-même, mais d’attendre du monde obscur la leçon de lumière.
Alors le poème est une grappe d’images.
"Le paradis, à n'en pas douter, n'est qu'une immense bibliothèque."
L'homme se mire dans son passé, toute image est pour lui un souvenir.
C'est après le retentissement que nous pourrons éprouver des résonances, des répercussions sentimentales, des rappels de notre passé. (...)
« Afin d’enhardir ma lampe timide
La vaste nuit allume toutes ses étoiles.»
TAGORE, Lucioles.
Ce court poème est écrit sur l’éventail d’une femme.
En faisant appel à l'indulgence du lecteur pour cette tâche difficile, nous allons donc entreprendre de montrer l'usage non-kantien de la catégorie de substance.
Il brille au Paradis. Il brûle en enfer. Il est douceur et torture. Il est cuisine et apocalypse. Il est plaisir pour l'enfant assis sagement près du foyer; il punit cependant de toute désobéissance quand on veut jouer trop près avec les flammes.
Ce que peut espérer la philosophie, c'est de rendre la poésie et la science complémentaires, de les unir comme deux contraires bien faits.
« le temps ne dure qu'en inventant »
L'essence même de la réflexion, c'est de comprendre qu'on n'avait pas compris.
Si l'on nous demandait le bienfait le plus précieux de la maison, nous dirions : la maison abrite la rêverie, la maison protège le rêveur, la maison nous permet de rêver en paix.
Il existe pour chacun de nous une maison onirique, une maison du souvenir-songe, perdue dans l’ombre d’un au-delà du passé vrai. Quel privilège de profondeur il y’a dans les rêveries de l’enfant.
Heureux l’enfant qui a possédé ses solitudes. Ainsi par-delà toutes les valeurs positives de protection, dans la maison natale s’établissent des valeurs de songe, dernière valeur qui demeure quand la maison n’est plus.
Les poèmes de la nage volontaire sont des poèmes de la solitude.
Ainsi, pour certaines âmes, l'eau tient vraiment la mort dans sa substance. Elle communique une rêverie où l'horreur est lente et tranquille
Au bord des eaux, tout est chevelure
La philosophie de langue française contemporaine — a fortiori la
psychologie — ne se servent guère de la dualité des mots âme et esprit. Elles sont, de ce fait, l'une et l'autre un peu sourdes à l'égard de
thèmes, si nombreux dans la philosophie allemande, où la distinction
entre l'esprit et l'âme (der Geist et die Seele) est si nette. Mais puisqu'une philosophie de la poésie doit recevoir toutes les puissances du
vocabulaire, elle ne doit rien simplifier, rien durcir. Pour une telle philosophie, esprit et âme ne sont pas synonymes. En les prenant en synonymie, on s'interdit, de traduire des textes précieux, on déforme des
documents livrés par l'archéologie des images. Le mot âme est un mot
immortel. Dans certains poèmes, il est ineffaçable. C'est un mot du
souffle
À elle seule l'importance vocale d'un mot doit retenir l'attention d'un phénoménologue de la poésie. Le mot âme peut être dit poétiquement avec une telle conviction qu'il engage tout un poème. Le
registre poétique qui correspond à l'âme doit donc rester ouvert, à nos
enquêtes phénoménologiques.
On se surprend à vivre dans les mots, à l'intérieur d'un mot, des mouvements intimes. Comme une amitié, le mot se gonfle parfois, au gré du rêveur, dans la boucle d'une syllabe
L'enfance coule de tant de sources qu'il serait aussi vain d'en faire la géographie que d'en faire l'histoire.