Des Américaines à Paris de Gérard Bonal aux éditions Tallandier
Mary Cassatt, Natalie Barney, Renée Vivien, Winnaretta Singer, Isadora Duncan, Gertrude Stein, Alice Toklas, Romaine Brooks, Edith Wharton, Anne Morgan, les soeurs Klumpke? le Paris de la Belle Époque vibre sous les assauts de ces Américaines éprises de liberté. Elles sont riches, artistes, philanthropes. Elles peignent, écrivent, dansent, jouent de la musique, tiennent salon, aiment. Paris est une fête pour ces femmes aux moeurs libres qui fuient l?Amérique puritaine. le salon de la princesse de Polignac où se retrouve toute l?avant-garde musicale, Fauré, Ravel et Debussy ; l?atelier de la rue de Fleurus où Gertrude Stein arbitre le match Picasso-Matisse ; le temple de l?amitié de Natalie Barney, rue Jacob, où l?on croise Colette, André Gide, Ernest Hemingway, Adrienne Monnier, Jean Cocteau? Autant de lieux qu?elles ont rendus célèbres dans le monde entier grâce à leur énergie et leur talent.
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Ce Paris de la Belle Epoque, telle une nouvelle Gomorrhe, se voit donc sacré patrie du saphisme international, tandis qu'un formidable appel d'air pousse les disciples américaines de Sappho vers la capitale : leur singularité y sera mieux acceptée que chez elles, où les mentalités sont toujours marquées par l'asphyxiante tradition puritaine. Fortunées, bénéficiant d'une culture cosmopolite, parlant couramment le français qui est souvent pour elles comme une seconde langue maternelle, elle vont trouver à Paris un espace de liberté. Il n'est ainsi pas anodin que Renée Vivien choisisse d'écrire ses lettres d'amour à Natalie Barney en français, choix délibéré qui vient signifier la rupture avec une certaine mentalité anglo-saxonne.
Colette, nous sommes encore dans votre monde, nous n'en pouvons pas sortir, nous n'en voulons pas sortir, car il dure plus longtemps, il est plus vrai que le nôtre. (J.-M. G. Le Clézio)
Toutes choses qui peuvent passer, sinon pour des actes d’indépendance, du moins pour des tentatives d’autonomie. Sauf que c’est Willy qui lui conseille de faire tomber sa « grande corde incommode de cheveux ». Willy qui voit plus loin, champion toutes catégories de la publicité, Willy qui est en train d’inventer cette paire de twins dans laquelle il veut embrigader sa femme en faisant d’elle la jumelle exacte de Polaire : même coiffure courte et bouclée, même chapeau, même robe.
(à propos d'Anna Gould mariée à Boni de Castellane)
...ses hommes d'affaires, ceux qui représentent en France les intérêts des Gould, s'inquiètent et la mettent en garde.
Anna est riche. Mais elle est laide, très laide. Courte sur pattes, noiraude, "simiesque" disent certains. Et Boni ne rate aucune occasion de faire des mots à son propos, des mots qui, bien sûr lui reviennent aux oreilles : "Elle est belle vue de dot." A propos de la chambre conjugale qu'il fait volontiers visiter à ses amis : "Voici la chapelle expiatoire", "Le revers de la médaille".
Il doit bien exister au monde quelque chose, un lieu qui ne soit pas un rapport de force avec autrui ou soi-même. La tendresse, peut-être.
Elle n’a pas encore vingt-deux ans, c’est une fille blonde – une grande bouche, un menton fin – sans vraie beauté mais charmante, « les yeux gris et gais, portant sur la nuque un chignon bas de cheveux glissants, qui coulaient entre les épingles ».
Homme étrange, ce Robineau ! Violent, ivrogne, fou dangereux… Mais capable de longs affûts dans la nature, d’observations patientes des bêtes sauvages dont il connaît tous les secrets. Comme Sido, plus tard, l’écrira à sa fille, à propos d’une pluie de grenouilles tombée en été, à la faveur d’un orage, avec la grêle et l’eau : « J. Robineau, qui connaissait à fond les choses des champs, des bois et des étangs m’en avait déjà parlé. » Les grenouilles, et aussi l’histoire du renard noyant ses puces : « Le premier mari de ma mère, chasseur et d’humeur solitaire, regardait mieux les bêtes que les gens.
Quatre mois plus tard, Gabrielle Colette se présente à l’écrit du certificat d’études primaires. Où elle obtient – Ô surprise ! – 3 en rédaction. Trois sur 10. Il faut dire que le devoir proposé aux candidates – des enfants de douze ou treize ans ! – a de quoi surprendre, même en tenant compte du contexte politique revanchard de l’époque, quinze ans après la débâcle de 1870 : « Vous avez eu l’occasion de voir une carte allemande, où la province de Bourgogne, dont l’Yonne fait partie, était représentée comme ayant appartenu et devant faire retour à l’empire d’Allemagne.
La vérité autobiographique n’est qu’un leurre, une tentation de plus parmi toutes celles qui s’offrent à l’écrivain, comme le mensonge ou l’impuissance. Que le public exige des confessions, qu’il croie même, abusé par l’écriture ou le ton, les obtenir quelquefois, est une chose ; que l’auteur soit en mesure de les lui accorder en est une autre. Et sans doute le récit en forme de mémoire reste-t-il le genre où l’écrivain, humblement, alors qu’il veut se raconter, éprouve le plus douloureusement la distance invisible, infranchissable, qu’il y a entre soi et soi...
Tout le travail rêvé de Jules Colette est là, sur les étagères, réduit à des titres, à des projets qui n’ont pas vu le jour : Mes campagnes, Les Enseignements de 70, Chansons de zouaves, Le Maréchal de Mac-Mahon vu par un de ses compagnons d’armes… Si l’on en croit Colette, rien ne put venir à bout de ce trésor de papier vierge : « Mon frère y écrivit ses ordonnances, ma mère couvrit de blanc ses pots de confiture, ses petites filles griffonneuses arrachèrent des feuillets... » Sido l’utilise volontiers en guise de papier à lettre.