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Citations de Günter Grass (223)


Le Prince Eugène était contrefait et pour cette raison mourut de mort naturelle. Si Jésus avait eu une bosse, on aurait à peine pu le clouer sur la croix.
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Jan avait déjà passé trois fois le conseil de révision, mais il avait été réformé à chaque conseil en raison de son état lamentable ; ce qui, en des temps où l'on envoyait à Verdun tout ce qui se tenait à peu près debout afin de le mettre, sur la terre de France, à l'horizontale pour l'éternité, en disait long sur la constitution de Jan Bronski.
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«Maman est morte », dis-je en manière d'explication. «Elle n'aurait pas dû. Je le prends mal. Les gens disent tout le temps : une mère voit tout, sent tout, une mère pardonne tout. Ce sont des slogans pour journée des mères ! Elle a vu en moi un gnome. Elle aurait fait son affaire au gnome si elle avait pu. Mais elle ne le pouvait pas, parce que les enfants, même les gnomes, sont déclarés sur les papiers et ne peuvent pas être supprimés simplement ; et aussi parce que j'étais son gnome, parce qu'en me tuant elle se serait supprimée et gênée elle-même. "Ou bien moi, ou bien le gnome ?" s'est-elle demandé. Puis elle en a fini avec elle-même. Elle n'a fait que manger du poisson, et encore pas frais, elle a donné congé à son amant et, maintenant qu'elle est à Brenntau, morte, tout le monde dit, les amants et les clients dans la boutique : "le gnome l'a mise à la tombe avec son tambour. C'est à cause du petit Oscar qu'elle n'a pas voulu continuer à vivre, il l'a tuée !".
J'exagérais amplement, je voulais si possible impressionner signora Roswitha. En fait c'était Matzerath et Jan Bronski que la plupart des gens rendaient responsables de la mort de maman. Bebra pénétra ma pensée.
«Vous exagérez, très cher. C'est par jalousie pure que vous boudez votre maman défunte. Parce qu'elle n'est pas morte de votre fait, mais du fait d'amants fatigants, vous vous sentez dédaigné. Méchant et vain que vous êtes, comme il n'est pas permis de l'être à un génie ! »
Puis après un soupir et un coup d'œil en biais à signora Roswitha : «Il est malaisé de persévérer dans notre grandeur. Rester humain sans croissance externe, quelle tâche, quelle vocation ! »
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Tout ce qui nous est sacré, l'histoire aux mille détours, le brillant empire des Hohenstaufen, les abruptes cathédrales gothiques, tout cela n'existerait pas si une frugalité sotte devait être le fait de l'homme.
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Et puis il y avait de poudre effervescente au goût framboise, et aussi une poudre effervescente qui, quand on l'arrosait avec de l'eau claire du robinet, sifflait, faisait des bulles, jouait les énervées, qui, quand on la buvait avant qu'elle ne se fût calmée, avait de loin, très lointaine, une saveur de citron et en prenait aussi la couleur dans le verre, mais avec plus de zèle encore : un jaune artificiel qui se donnait des airs de poison.
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Elle mangeait le saucisson avec la peau ; tout en mangeant, son visage s'amincissait, toujours plus vorace, plus triangulaire, plus renard - un coup d'œil qui m'a profondément marqué. Qui m'effacera de la tête ce triangle ? Combien de temps le verrai-je en moi mâcher le saucisson, la peau, les hommes ; et sourire, d'un sourire triangulaire comme en ont, sur les tapis, les dames dresseuses de licornes ?
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Finalement il était trop tard pour la transporter à la clinique ; une sage-femme d'un certain âge, qui ne reprenait plus sa petite valise que de temps en temps, dut être appelée de la proche Hertastrasse. Dans la chambre à coucher, elle aida ma mère et moi à nous détacher l'un de l'autre.
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Günter Grass
L'échec est beaucoup plus instructif que la victoire . Les vainqueurs croient en eux-mêmes et sont persuadés que leur point de vue est juste et validé par les faits , et ainsi ils n'apprennent rien . Les perdants doivent remettre en question tout ce à quoi ils ont cru et les raisons pour lesquelles ils ont combattu , et ont ainsi une chance d'apprendre , de la façon la plus dure , les leçons les plus grandes que la vie peut vous donner .
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Derrière moi cancanaient, gueulaient, riaient, pleuraient et chahutaient mes condisciples supposés. On me jetait des boulettes de papier, mais je ne me retournai même pas ; je trouvais les nuages en route plus esthétiques que le spectacle d'une horde grimaçante de merdeux totalement débondés.
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Une affection inquiète, attentive aurait à coup sûr interdit à mes amis d'apporter un objet aussi dangereux que du papier vierge et de l'abandonner aux sécrétions verbales de mon esprit.
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Au dessus du piano, le portrait du sombre Beethoven, cadeau de Greff, fut ôté de son clou et, au même clou fut exposé un Hitler au regard pareillement sinistre. Matzerath, qui n'avait pas le goût de la musique grave, voulait bannir sans rémission le musicien sourd. Pourtant maman, qui aimait beaucoup les phrases lentes des sonates beethovéniennes, les avait étudiées sur notre piano deux ou trois fois plus lentement qu'il n'était indiqué et les faisait s'égoutter de temps à autre, obtint à force d'insistance que le Beethoven prît place non pas au-dessus du divan, mais au-dessus de la desserte. Ainsi commença cette confrontation sinistre entre les plus sinistres : Hitler et le génie, suspendus face à face, se regardaient, se perçaient à jour et pourtant n'éprouvaient aucune sympathie réciproque.
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Accepté, rejeté, éliminé, intégré, rejeté, rappelé : c'est seulement en qualité de sous-locataire qu'Oscar apprit l'art de remonter dans le passé en jouant du tambour.
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Il y en avait des morts qu’il avait aspergés de lysol ! Et il en savait des noms ! Ça finissait par être fastidieux pour moi qui nageais dans le lysol. Ce qui me préoccupait, ce n’était pas la vie ou la mort de cent mille noms, mais de savoir si la vie, la mienne, et sinon ma vie, ma mort pourrait être à temps et suffisamment désinfectée par les antiseptiques de M. Fajngold.
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Klepp tue quelquefois des heures à établir des horaires. Il engloutit sans arrêt, pendant la conception, du boudin et des lentilles réchauffées, ce qui vérifie ma théorie selon laquelle tout simplement : les rêveurs sont des polyphages. Le fait que Klepp sue sang et eau pour garnir ses rubriques donne raison à mon autre théorie : seuls de vrais feignants peuvent faire des inventions qui économisent du temps.
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«Il est grand temps, mon fils! Le néolithique, ainsi que nous appelons l'âge de pierre récent, est entré dans sa phase finale. Venue de Mésopotamie, par le delta du Nil et l'ile de Crète, encouragée par la vigueur virile, la civilisation se répand. Là on voit des femmes travailler les champs et plus tard piler dans les mortiers le grain obtenu. Ainsi les famines ne sont plus irréparables. Non, porcs et boeufs se multiplient, élevés en troupeaux. Il y a toujours des provisions de réserve. On construit des habitats fixes. La horde et la grand famille s'articulent en tribus. Des roi-héros règnent. L'État jouxte l'État. Et les hommes sont en armes. Ils savent pourquoi ils se battent : pour leurs possessions héréditaires. [...]»
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Jan dansa avec maman, Matzerath avec l'ossue et colossale Hedwige ; elle avait le regard insaisissable d'une vache, ce qui inclinait son entourage à la croire toujours toujours enceinte.
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Vinrent d'abord les Rugiens, puis les Goths et les Gépides, ensuite les dont Oscar descend en ligne directe. Peu de temps après, les Polonais envoyèrent Adalbert de Prague. Il vint avec la croix, et les Kachoubes ou Borusses l'occirent avec la hache. Cela arriva dans un village de pêcheurs appelé Gyddanyzc. De Gyddanyzc on fit Danczik, Danczik devint Dantzig, qui plus tard s'écrivit Danzig ; et aujourd'hui Danzig s'appelle Gdansk. Mais avant qu'on ait trouvé cette orthographe, après les Kachoubes, ce furent les ducs de Pomérélie qui vinrent à Gyddanyzc. Ils portaient des noms comme Subislaus, Sambor, Mestwin et Swantopolk. Le village devint une petite ville. Puis vinrent, de très loin les Brandebourgeois, et ils détruisirent aussi quelque peu. Boleslav de Pologne voulut en faire autant ; et pareillement l'ordre des chevaliers Teutoniques prit soin que son glaive séculier remît à neuf les dégâts à peine réparés.
Plusieurs siècles durant, un petit jeu de démolition et de reconstruction fut pratiqué par les ducs de Pomérélie, les grands maîtres de l'Ordre, les rois et anti-rois de Pologne, les margraves de Brandebourg et les évêques de Wloclawek. Architectes et démolisseurs s'appelaient : Othon et Waldemar, Bogussa, Henri de Plotzke et Dietrich von Altenberg qui construisit le château de l'Ordre sur les lieux où, au vingtième siècle, sur la place Hévélius, on défendit la poste polonaise.
Vinrent les Hussites ; après avoir mis le feu en quelques endroits. Puis les Teutoniques furent expulsés de la ville, leur château rasé, parce qu'on ne voulait pas de château dans la ville. On se fit Polonais, et ça n'allait pas si mal.
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Là je me dis, je me résolus, je décidai que je ne serais pas politicien et encore moins épicier en denrées coloniales, mais que je mettais un point final, que je restais ainsi - et je restai ainsi, je m'en tins à cette taille et à cet équipement pour bien des années.
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Où Patrie gisait terrassée, Poésie ne pouvait fleurir.
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«[...] Il a fallu des dizaines d'années pour que le mil soit relayé par la pomme de terre. Et la suppression du servage a duré plus longtemps encore plus longtemps. Toujours ces régressions. Après Robespierre vint Napoléon et ensuite ce Metternich...»
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