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Citations de Günter Grass (223)


Je restai l’enfant de trois ans, le gnome, le Petit Poucet, le nabot qui ne veut pas grandir ; pourquoi ? Pour échapper à des distinctions comme le petit et le grand catéchisme ; pour n’être pas à l’âge dit adulte, un mètre soixante-douze, livré à un homme qui, debout à se raser devant la glace, se nommait mon père ; pour n’être pas contraint de reprendre une boutique qui, selon le vœu de Matzerath, devait – denrées exotiques – signifier pour un Oscar majeur l’univers des adultes. Pour ne pas faire sonner un tiroir-caisse, je me cramponnai au tambour et à partir de mon troisième anniversaire je ne grandis plus d’un doigt ; je restai l’enfant de trois ans, mais aussi de trois sagesses, que surplombaient tous les adultes, qui ne voulait pas mesurer son ombre à leur ombre, qui était parfaitement achevé au-dedans comme au-dehors. Alors que ceux-là, les adultes, ne font jusqu’à la vieillesse que rabâcher l’histoire de leur développement, je fus l’enfant qui comprit tout seul ce qu’ils n’apprennent qu’avec tant de peine, souvent dans la douleur, au fil de leur expérience ; l’enfant qui, pour démontrer que quelque chose grandissait, n’avait pas besoin de porter chaque année des chaussures et des culottes plus grandes.
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On avait eu pitié des familles . On voulait leur épargner les frais d'entretien d'une fosse commune, vaste et vorace de fleurs; on se dispensa de l'entretien et d'une éventuelle exhumation en aplanissant le sol sablonneux de Saspe et en ramassant les douilles de cartouches sauf une - car il y en a toujours une d'oubliée - parce que les douilles éparses déparent tout cimetière décent, même quand il n'est plus en service.
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Je porte à mon crédit l'ignorance dont la mode arriva à cette époque et qui aujourd'hui encore fait au-dessus de bien des visages l'effet d'un fringant chapeau.
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Le souvenir se fonde sur des souvenirs qui à leur tour sont en quête de souvenirs. C'est ainsi qu'il ressemble à l'oignon, donc chaque pelure qui tombe met au jour des choses depuis bien longtemps oubliées, jusqu'au dents de lait de la première enfance ; mais ensuite le tranchant du couteau lui donne une autre destination : haché peau après
peau, il fait venir des larmes qui troublent le regard.
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Ah! Plût aux dieux que vous autres, Mesdames qui rendez une âpre justice et condamnez la cause masculine, fussiez à l’égal de Sophie demeurées occluses! Si seulement chacune d’entre vous fermait boutique définitivement. Ne dépendrait-il pas de vous d’en finir avec la conception, l’enfantement? Le moment ne serait-il pas venu d’arrêter le trafic, d’échapper aux filles et aux fils, de ne plus rien porter à terme et de permettre à l’humanité une sortie pensive? J’ai devant moi des statistiques portant espoir. Du mariage à deux enfants, au mariage à un, au mariage à zéro. Exit l’histoire. Plus de croissance. Après une relative sénescence: l’extinction silencieuse, sans glas. La nature vous en saurait gré. Notre planète pourrait renaître.
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[...] ... Assez longtemps, exactement jusqu'en novembre trente-huit, j'ai, embusqué avec mon tambour sous des tribunes, avec plus ou moins de succès, dispersé des manifestations, fait bégayer des orateurs, tourné des marches et des choeurs en valses et en fox-trots.

Aujourd'hui, malade à titre privé dans un établissement ad hoc, alors que tout cela est devenu historique et qu'on le rabâche avec ardeur certes, mais à froid, j'ai pris le recul nécessaire pour apprécier mon activité de tambour. Rien n'est plus éloigné de mes intentions que de voir en moi un résistant : c'est peu de choses que six ou sept manifestations démolies, trois ou quatre rassemblements ou défilés à qui le tambour a fait perdre le pas cadencé. Le mot de résistant est devenu très à la mode. On parle d'esprit de la résistance, de milieu résistant. Il paraît même que la résistance peut se prendre par voie interne ! On appelle ça émigration intérieure. Sans parler de ces hommes d'honneur aux fermes convictions qui, pendant la guerre, pour avoir négligemment obscurci les fenêtres de leur chambre à coucher, se virent coller une amende et s'appellent maintenant résistants, hommes de la résistance.

Jetons encore un coup d'oeil sous les tribunes d'Oscar. Est-ce qu'Oscar leur a joué du tambour, à ceux-là ? A-t-il, suivant les conseils de son maître Bebra, pris les rênes de l'action et fait danser le peuple devant la tribune ? A-t-il, un dimanche de plat unique du mois d'août mil-neuf-cent-trente-cinq, pour la première fois, et plus tard encore quelquefois, pulvérisé des manifestations brunâtres à l'aide d'un tambour qui, pour être rouge et blanc, n'en était pas pour autant polonais ?

J'ai fait tout cela, vous devez bien l'admettre. Suis-je, moi, le pensionnaire d'un établissement psychiatrique, un résistant pour si peu ? A cette question, je dois répondre non et je vous prie, vous qui n'êtes pas internés, de ne voir en moi qu'un être un peu à part qui, pour des raisons privées, esthétiques de surcroît, prenant à coeur aussi les doctrines de son maître Bebra, rejetait la couleur et la coupe des uniformes, la cadence et la force de la musique en usage sur les tribunes, et qui, pour cette raison, ramassait un peu de protestation sur un tambour d'enfant. ...
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Je me joignis sans réfléchir à la colonne, car même sans intervention de l'ennemi, le solitaire qui se déplaçait sans ordre de marche se serait transformé en candidat à la mort, bon pour la corde au cou.
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Le miroir devient, par la ballerine, l'instrument sans indulgence de l'ascèse.
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"J'observai et j'écoutai un papillon de nuit qui s'était égaré dans la chambre. de taille moyenne, poilu, il il courtisait les deux ampoules de soixante watts, jetait des ombres qui, disproportionnées à l'envergure réelle de ses ailes, couvraient, remplissaient, élargissaient d'un mouvement spasmodique la pièce et son attirail de meubles. Quant à moi, j'analysai surtout, plutôt que le jeu de lumière et d'ombre, le bruit qui s'élevait entre le papillon et l'ampoule: le papillon jacassait comme si il avait hâte de se vider de son savoir, comme si il ne devait plus avoir le temps de boire aux sources lumineuses, comme si son dialogue avec la lampe était la dernière confession du papillon"
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Je n’insisterai pas sur les pigeons, bien qu’il soit dix fois admis que les pigeons sont matière à littérature. Un pigeon ne me dit rien, une mouette me dit davantage. La colombe de la paix me semble un pur paradoxe. Je confierais un message de paix plutôt à un vautour ou même à un vautour charognard qu’au pigeon, le plus grincheux des locataires qu’il y ait en ce bas monde.
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Un nombre inquiétant de mes confrères écrivains, naguère capables de réciter le discours antifasciste rattrapé en cours du soir (ou vraiment à eux) se retrouvent en ce moment d'une humeur "nationale" qui frise l'abrutissement.
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J'allais dévaler les marches sans dire merci et à la vitesse de dix beaux diables pour m'échapper du catholicisme quand une voix agréable, quoique impérieuse, vint toucher mon épaule: "M'aimes-tu Oscar?" Sans me retourner , je répondis: "Pas que je sache." Alors lui, de la même voix, sans crescendo: "M'aimes-tu Oscar?" Je répliquais d'un ton rogue: "Je regrette, pas le moins du monde!" Alors il me cassa les pieds pour la troisième fois: "Oscar, m'aimes-tu?" Et Jésus put voir mon visage: "Je te hais galopin, toi et toute ta quincaillerie!"
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Je faisais le commerce du disque et je savais bien qu'il ne fallait pas rester élitiste, parce que seule la masse rapporte.
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Pour ne pas faire sonner un tiroir-caisse, je me cramponnai au tambour et à partir de mon troisième anniversaire je ne grandis plus d'un doigt.
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(incipit)
D'accord : je suis pensionnaire d'une maison de santé. Mon infirmier m'observe, me tient à l'oeil ; car il y a dans la porte un judas, et l'oeil de mon infirmier est de ce brun qui ne peut me radiographier car j'ai, moi, les yeux bleus.
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quel objet en ce monde , quel roman aurait l'ampleur épique d'un album de photos ?
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Puis Dach se rassit, appela au premier rang les auteurs de l'appel à la paix et, par précaution, comme une protestation de Logau soulevait des mouvements divers, il ajouta : Mais pas de dispute, mes enfants !
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Günter Grass
«Nous sommes tous les témoins passifs d'une barbarie, sans cesse renouvelée»
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Qui aujourd’hui me prend sous ses jupes ? Qui m’éteint la lumière du jour et la lumière des lampes ? Qui me prodigue l’odeur de ce beurre jaune amolli, légèrement rance, que ma grand-mère empilait, logeait, déposait sous ses jupes pour me nourrir et dont elle me donnait, jadis, pour exciter mon appétit et m’y faire prendre goût ?
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Bruno a des yeux de poulpe éteint. Il décoche au plafond ce regard préhistorique chaque fois qu’il lui faut réfléchir.
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