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Citations de Jean Bottéro (62)


Un mythe n'est donc pas, au moins à sa naissance, un récit gratuit, de pure fantaisie, destiné au seul plaisir, à l'art, à l'enchantement : c'est la réponse à une question, c'est la solution d'un problème, c'est toujours une explication - quelque chose qui relèverait, en somme, de la « philosophie », si l'on entend par là la démarche de notre esprit quand il « cherche à savoir » et à tirer au clair les grandes interrogations qui nous viennent devant le monde et devant nous-mêmes, dans la mesure où, pour les formuler et pour y répondre, nous ne nous plaçons point dans l'orbite propre à la « science ». Cet apparentement du mythe et de la philosophie est si peu forcé, si obvie, que la première philosophie de notre monde, telle que l'ont élaborée les Grecs, est notoirement descendue en droite ligne de leur mythologie.
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Si l'on me demande ce que c'est qu'un orage, j'évoquerai l'humidité de l'air, la formation des nuages, les phénomènes d'ascension rapide de certains d'entre eux, leur charge à la fois électrique et pluviométrique, et autres abstractions... Un Loreto, Indien du territoire péruvien, répondra, lui, à la même question : « L'Orage est un homme géant, qui a les jambes plus longues que le corps, la figure longue et sèche, des oreilles ressemblant à celles des vampires : les éclairs sont le mouvement de ses oreilles. Le grondement du tonnerre est la force de ses pieds quand il court d'un côté et de l'autre. L'Orage est produit par lui alors qu'il pêche le boa, dont il se nourrit et qu'il appelle anguille. Il fait alors d'énormes enjambées, et c'est pourquoi l'on entend le tonnerre d'un côté à l'autre... ». Le narrateur, ou ses garants, ont-ils vu le géant en question, si minutieusement décrit ? Évidemment non ! Ils n'en ont jamais constaté l'existence ni observé les mouvements : tout cela, ils l'infèrent, ils le déduisent. Car, n'ayant point connaissance d'autres causes libres que l'homme, ils ne peuvent concevoir l'Orage, qui éclate n'importe où et n'importe quand, que comme provoqué par un agent humain. Et vu l'énormité du phénomène, ils sont bien obligés de poser un « géant », à se mesure.
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La "doctrine" anthropogonique qui s'y fait jour [Poème du Supersage] est, dans son canevas, parfaitement claire: les hommes ont été créés et mis au monde, et leur constitution subtilement calculée et parachevée, pour remplir vis-à-vis des dieux le rôle de serviteurs: de producteurs, qui mettent en valeur les richesses de ce monde en vue de fournir, par leur travail, d'abord au monde surnaturel les biens matériels qui lui sont nécessaires: le manger et le boire, le vêtement et la parure, le mobilier et le couvert. Des surplus de ces biens, ils profiteront eux aussi, la chose va sans dire - mais secondairement et comme par surcroît. La vie humaine n'a de sens, de raison d'être et de finalité qu'au service des dieux - tout comme les sujets du royaume n'ont de sens, de raison d'être et de finalité qu'au service du souverain et de sa maison: ici encore se retrouve la même transposition, armature et pilier de soutènement de l'entière idéologie religieuse dans le pays.
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Avec sa chair et son sang,
Nintu mélangea de l'argile,
< Pour que fussent associés du dieu et de l'homme,
Réunis en l'argile >
Et que (les dieux) fussent ainsi, désorm[ais, de loi]sir (?).
De par la chair du dieu,
[Il y eut], en outre, dans l'Homme, un "es[prit]"
Qui le démontrerait toujours vivant après sa mort.
Et cet "esprit" [fut là] pour le garder de l'oubli !
Une fois qu'Enki eut malaxé cette argile,
Il appela les Anunnaku, les grands-dieux,
Et les Igigu (devenus, eux aussi,) grands-dieux,
Lesquels crachèrent sur l'argile.
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Il est urgent de renoncer à tout vocabulaire moralisateur et de se consacrer au patient examen des sources disponibles, en élargissant les perspectives et en variants les angles de prises de vue. En un mot : faire de l'histoire et uniquement de l'histoire.
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Engouement passager ou recherche d'un contact plus sérieux, l'approche d'un système culturel aussi touffu et éloigné de nous que le Proche-orient antique, et principalement l'ancienne Mésopotamie, qui le couronne, a quelque chose de pénible, et même d'assommant. Tout le monde est d'accord là-dessus.
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L'Ecclésiaste est un livre obscur et difficile à comprendre, le plus énigmatique peut-être de la Bible hébraïque.
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L'"avenir", ainsi dévoilé, n'était pas, comme on s'y attendrait, le "futur absolu", celui qui surviendrait réellement et immanquablement, mais ce qu'on devrait appeler l'"avenir judiciaire" : seulement une décision d'avenir prise hic et nunc, comme celle d'un juge qui condamne à tel ou tel châtiment, ou du roi qui se propose de doter de tel avantage.... Les décisions divines communiquées aux intéressés par divination déductive, comme les arrêtés du souverain et les sentences du juge, étaient susceptibles d'appel et de changement.

p. 346
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Quiconque est familier d'une langue étrangère, surtout un tant soit peu loin de la nôtre, sait qu'aucune poésie, voire aucune prose, n'est vraiment et totalement traduisible, même lourdement paraphrasée ; et un historien sérieux devrait toujours garder conscience des limites de ce qu'il a appris, surtout lorsqu'il n,e s'agit point de banalités, de truismes ...

p. 67
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« À Son aspect, la joie éclate !

Elle est majestueuse, tête couverte de joyaux :

Splendides sont Ses formes ; Ses yeux, perçants et vigilants !
C’est la déesse à qui l’on peut demander conseil.

Le sort de toutes choses, Elle le tient en mains !

De Sa contemplation naît l’allégresse,

La joie de vivre, la gloire, la chance, le succès !

Elle aime la bonne entente, l’amour mutuel, le bonheur,

Elle détient la bienveillance ! »

Hymne d’Ammi-ditana de Babylone à Ishtar
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Un mythe n'est donc pas,au moins à sa naissance ,un récit gratuit ,de pure fantaisie,destiné au seul plaisir ,à l'art , à l'enchantement;c'est la réponse à une question ,c'est la solution d'un problème ,c'esty toujours une explication...
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... l'écriture proprement dite n'est apparue qu'à partir du moment où, par le moyen de tels raccourcis - que nous appelons, comme tels, pictogrammes -, on a voulu reproduire, non plus des objets et des scènes choisis par les artistes pour suggérer leurs états d'âmes ou leurs fantasmes, mais la totalité de ce qui, tiré de la réalité, roule dans notre pensée.
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Il faut rappeler que c'est en 1872 qu'une extraordinaire découverte a établi, de façon irréfutable, que la Bible n'était pas le plus vieux livre du monde, le "Livre" unique et surnaturel ! L'anglais George Smith, un des premiers déchiffreurs des textes cunéiformes, a présenté en effet, parmi les tablettes rapportées de Ninive à Londres, un récit du déluge plus ancien et qui répondait, jusque dans le détail, à celui de la Bible. Avec cette découverte capitale, George Smith venait de faire connaître un long passage de l'Epopée de Gilgamesh, dont on ne connaissait jusque-là que quelques bribes. Dans un autre admirable mythe babylonien, le Poème du Supersage, contemporain de la plus ancienne version de Gilgamesh (deuxième tiers du IIe millénaire), on retrouve un récit de la création de l'homme et de son anéantissement par un déluge qui ne peut que faire songer aux premiers chapitres de la Genèse : le Supersage était le Noé babylonien.

Jean Bottéro. Le Dieu de la Bible
L'héritage des mythes
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...les dieux eux-mêmes , en grand nombre et imaginés sur le patron des hommes,se trouvaient donc dans les mêmes conditions matérielles qu'eux: ils avaient des épouses , des concubines , des maîtresses , et ils exerçaient généreusement ,avec alacrité , leurs capacités amoureuses .
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Il n’est pas facile d’accorder créance à la tradition, postérieure de plus d’un millénaire aux événements, et depuis unanimement reçue, qui identifie cette « Montagne » (appelée dans la Bible tantôt Sinaï, tantôt Horeb) à l’un des sommets de la péninsule du Sinaï : le Djebel Moussa. Beaucoup plus archaïque, et enracinée dans la mémoire collective d’Israël, il existe en effet une autre tradition, qui semble bien faire coïncider le premier contact « immédiat » pris par Israël avec Yahvé, au moment de l’Alliance, avec un ébranlement de la nature terrifique et tout à fait insolite, dont les traits rassemblés, dés les plus vieux récits de l’Exode, ne sauraient guère évoquer qu’une éruption volcanique. Dans ce cas, la montagne « environnée de tonnerres, d’éclairs, d’une nuée paisse, avec comme de violents sont de trompe », la montagne « toute entière fumante, Yahvé y étant descendu en un feu dont la fumée sortait comme d’une fournaise, et qui tremblait du en haut en bas » (Exode, XIX, 16 et 18 : Elohiste), serait donc à chercher ailleurs, dans une région dont l’activité volcanique soit connue à l’époque historique : c’est le cas du pays de Madian, au nord du Hedjaz, et un certain nombre d’indices bibliques anciens pointent dans la même direction. (pp. 59-60)
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Les souverains d'En-Bas, comme ceux d'En-Haut, étaient régulièrement assistés, dans leurs Conseils et décisions, par une élite de divinités, qu'on a fini par appeler Annunaki. Ce sont Eux, notamment, qui devaient décider (on disait volontiers "juger") le cas de chaque etemmu (âme), non certes pour lui accorder une existence infernale plus ou moins satisfaisante selon ses mérites, puisque ces "mérites" en question, non moins que la "moralité" ou la "bonne conduite" ici-bas, ne jouaient pas le moindre rôle dans l'orientation de l'après-mort, identique pour tous et définitivement tranchée par le trépas lui-même ; mais pour entériner, en bonne règle, l'entrée du mort dans sa nouvelle existence et sa nouvelle résidence, un peu comme un greffier le registre de ceux qu'on incarcère.

p. 218
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Le terme de religion définit l'attitude des hommes vis-à-vis d'un ordre de choses qu'ils appréhendent obscurément et d'instinct comme radicalement supérieur à eux-mêmes et à tout ce qui les environne ici-bas. Comparable à l'amour, qui se fonde d'abord sur cette autre impulsion, tout aussi spontanée et irraisonnée, qui nous porte avec force vers un autre individu de notre espèce, dans lequel nous pressentons comme un complément, un enrichissement de notre personne et de notre vie, la religion suit un tracé analogue, si ce n'est qu'elle n'évolue pas su le plan horizontal, à la recherche de l'"autre",mais vertical, du "sur-naturel".
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.... l'écriture est née de la reproduction, par croquis plus ou moins schématisés, des choses de ce monde.
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... la tablette cunéiforme la plus récente - un almanach astronomique - est datée de l'an 74/75 de notre ère...
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L'Assyrie [...] n'a pratiquement rien apporté de valable ou de capital, et elle restera toujours en manifeste et profonde dépendance de la Babylonie : victorieuse ou vaincue, Babylone demeurera le pôle intellectuel et spirituel du pays entier - même à l'époque brillante des Sargonide, entre 720 et 609.
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