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Critiques de Jean-Michel Maulpoix (44)
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Boulevard des Capucines

Galerie de portraits dessinés à l’encre, comme des impressionnistes l’ont fait de leurs pinceaux, par Jean-Michel Maulpoix, auteur du si beau livre Une histoire de bleu, Boulevard des Capucines raconte un siècle où se croisent poètes, peintres, dandys de toutes sortes et bourgeoises. Un siècle à propos duquel il dit : « Le siècle a le goût des tableaux, des chromos et des trompe-l’œil autant que de la nouveauté et de l’exactitude. » Un siècle où les uns posent pour le photographe Nadar tandis que d’autres tentent de se faire leur place au soleil.



Une galerie réussie, toute en finesse et en nuances, suivie par un journal imaginaire qui l’est beaucoup moins, tant par le ton utilisé que par les descriptions et sa longueur alors que la première partie, constituée de courts textes, avait un rythme qui se trouve cassé par cet ajout.



Dommage. Il y avait ici deux livres. Vouloir les unir rend ce Boulevard des Capucines beaucoup moins fort. À moins, bien sûr, d’éviter le journal imaginaire pour ne conserver que la magie de ce siècle que Maulpoix décrit avec amour et finesse.
Lien : http://lalitoutsimplement.co..
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Boulevard des Capucines

Un XIXeme siècle littéraire, artistique avec Huysmans, Nadar, Rodin, Baudelaire, Mallarmé..

Des vies parisienne et en bord de mer..
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Cahier de nuit

Dernière œuvre de Jean-Michel Maulpoix.

Oui, le poète- non excusable - à des démêlés judiciaires pour des faits de violence conjugale, triste fin de route d un couple déchiré, aux torts visiblement partagés. Il en entrouve la porte d ailleurs dans quelques unes de ses pages.

Mais il reste un poète à part qui semble faire une introspection de lui même et de cette vieillesse qui l entoure. Elle et sa nouvelle solitude.

Ses écrits, moins poétiques et moins pertinents, vont vers l essentiel, la phrase simplifiée aux pointes déposées sans détours, comme s'il cherchait à se comprendre mieux lui-même. Nous ne sommes plus dans l éblouissement d une lumière mais dans la protection d une flamme affaiblie, regrets et nostalgie pour unique chaleur.

L histoire d un bout de route usée qui ne laisse plus que le murmure intimiste d une poésie, celle qui donne envie d être partagée.

Des carnets d enfant que tout le monde un jour a créé - au moins - dans sa mémoire.



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Cahier de nuit

J'aime la plupart des ouvrages que JM Maulpoix a publié, et sa plume lyrique et douce me berce à chaque lecture.

Mais l'auteur vient d'être condamné pour violences conjugales en févier 2024, tout en assumant une posture assez infâme, tant pour sa défense que sa promotion.

En tant que poète contemporain, ce n'est pas tolérable.

En tant qu'éditeur, ce n'es pas tolérable.

A quand un #metoo de la littérature ?

Maintenant, vous sachez.

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Chutes de pluie fine

« J’ai croisé dans le ciel des îles, traversé des déserts, des montagnes de suie, des banquises, de vieilles lunes et de très vastes mers. J’ai perdu le nord et l’échelle, la perspective, le sens de l’en haut et de l’en bas.

Et j’ai vu quelquefois ce que nul ne verra jamais : comment est fait mon cœur. »



Voyages : un carnet, petit bloc de papier où finiront par s’écraser tous les bavardages et pensées vagabondes, incessant remue-ménage et chutes de tout Amour , constellations de notes noires sur blanc, silence et musique, un peu d’encre fine telle des chutes de pluie tièdes, pour éclairer l’humaine solitude et rafraîchir un peu la mélancolie des jours sans - et recréer parfois la féerie des nuits.



Voyages : les villes s’enchainent, Kyoto, Pékin, Saigon, Shanghai, Beyrouth, Essaouira, Rio, Kiev, Manhattan, Montréal … autant de récits miniatures jetés sur le papier buvard où s’épongent ainsi les bruits et les couleurs du monde.

Du silence au capharnaüm. Du blafard à l’éclatant. Des égarements.



Instantanés parachutés entre deux gares, deux aéroports, deux hôtels :

Maulpoix, observateur « passager », furtif, à l’affût de ce qui frappe l’œil et … titille l’âme.



Insolite le regard !

Ici, pas franchement touristique, non. Accrocheur plutôt, perçant la pauvreté derrière les devantures, s’attardant sur le non attirant, les marbrures de misère, les impudeurs tristes ou insolentes, les ruines ou les poussières de guerre, la saleté des murs, la crasse, la nonchalance et la stupidité humaine.

Là, les yeux éclaircis, qui s’écarquillent sur les silhouettes de femmes, les visages de la rue, les gestes quotidiens, l’œil rehaussant le banal, la beauté simple, les instants sereins posés sur la mer ou sur des ailleurs apaisés.

Autant de flaques d’ombres ou d’ondées de petits bonheurs !

Mais, au fond, partout les mêmes hommes, qui courent - Et ce même temps qui passe - ce même aveuglement.



Insolite l’oreille !

A l’écoute d’autres langues, d’autres boîtes à musiques et d’autres mêmes silences.

L’homme, cet « instrument à cordes » cordes rêches, cordes sèches, « capables de rendre un bruit de pluie ». Et cette même discordance – dans cette même ignorance.



Insolites, les pas du voyageur dont la résonnance s’effrite sur le papier en étrange lassitude.



Maulpoix : une solitude poétique, un cœur en jachère, « refusant ici-bas de défaire ses valises ». Tiens, il y a du Bobin, dans cet homme là, en beaucoup plus lyrique, en beaucoup plus mouvant (tiens, ça me va bien), beaucoup plus « électrique » !

Il a cette encre bleue limpide et chaude qui voudrait des réponses, qui cherche, qui tremble, qui s’use … et qui coule sur la peau du cœur.

Homme, rêveur secoué de fantômes, conquérant de nulle part, recherchant les lointains pour toucher Son plus proche. Ressac des mots, jamais de fin.



Il verse ses ecchymoses au bleu du ciel et au bleu de l’eau à l’encre noire d’amours touchés -- jamais gardés.



La poésie se fait toute seule,

Aimantée par l’œil et l’élan

La force du désir

Ce sont là ses voyages, des histoires d’amour à la pointe de la plume :

« chutes ou poussées de fièvre » noyées dans les escales,

averses de neige dissoutes dans les phrases.

Partir, fuir,

et toujours revenir, et toujours repartir

Poète instable, assoiffé d’ailleurs, où les rêves n’ont pas de portes, les amours pas de cages.

Ecrire c’est exister, se balader en feuillets dans le sac d’une femme …

et ainsi ne jamais mourir.



Restes d’enfance, fouiller,

Mémoires- caresses, toucher,

Devenir

« celui qui dit oui à tout ce qui l’emporte »

Vouloir

le simple bonheur d’être vivant,

Chercher

Un idéal reflet,

particule d’eau salée,

Elle … Toi …

La chambre vide. Son ombre versée sur la page. Papiers froissés.





« Mes villes sont des bateaux à quai, rouillés d’écume et blancs de sel »

Mais,

« Je retournerai dans la ville, où le désespoir fait merveille »





J’ai adoré !





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Chutes de pluie fine

- CHUTES DE PLUIE FINE -



Un recueil de Poésie qui m'a fait voyager dans les quartes coins du mondes. J'ai trouvée cela magnifique les phrases, les citations et comment l'auteur décris les paysages. J'ai même un moment crue que j'étais à Rio !

Je le conseil vivement, cela à était pour moi une découverte cette auteur qui a gagnée le prix goncourt de Poésie 2022.



Carlaines
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Journal d’un enfant sage

Voici le journal d'un enfant de trois ans ! Bien sûr, dès le départ, il faut accepter le pacte qui relie le lecteur à l'auteur et y voir là le regard attendri de l'écrivain que l'on devine d'ailleurs au détour des mots et des pages. J'ai aimé retrouvé la magie du premier âge et ce monde invisible et naïf qui forme la trame du quotidien. Ce n'est pas rien que d'aimer les camions-poubelles et le bleu du ciel à un âge où le langage est fait de surprises, à cet âge où l'enfant est poète malgré lui. Voilà une prose rafraîchissante qui nous fait retrouver un peu de notre propre enfance. J'ai peut-être moins apprécié la deuxième partie intitulée Leçon de choses, n'y trouvant plus vraiment le regard de l'enfant, mais ça demeure un joli livre.
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L'hirondelle rouge

L’auteur d’Une histoire de bleu assombrit sa palette. Il n’écrit pas pour tenir le désespoir à distance, au contraire, il donne des mots au chagrin qui le dévaste.


Lien : http://www.lemonde.fr/livres..
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L'hirondelle rouge

Jean-Michel Maulpois, L’hirondelle rouge - Prose poétique - 2017 - 108 pages - ⭐️⭐️⭐️⭐️



« Je continue de chercher dans mon encre les yeux de mon père, les mains de ma mère. Je m’obstine et tends l’oreille. Aucune voix, aucun chant. Les souvenirs sont faits de petits riens qui durent, de petits riens très durs en travers de la gorge. »



Ce sont de courts tableaux évoquant la vie et la mort de ses parents en même temps que sa démarche face au deuil. La poésie et le désir peut-être pourront le sauver du noir absolu. L’écriture est très belle, simple, musicale. On ne comprend peut-être pas tout, mais la musique des mots entre en nous comme un doux savoir. Alors on devine, sous le chant, l’essentiel.



Jean-Michel Maulpois, Le jour venu - Prose poétique - 2020 - 124 pages - ⭐️⭐️⭐️



C’est un peu la suite de L’hirondelle rouge. C’est encore très bien écrit mais c’est noir, très noir et très lucide sur la condition humaine. On y trouve peu de quoi espérer si ce n’est dans les mots et la poésie. L’auteur évoque encore ici la mort de ses parents, puis la sienne.



« Pourtant, il faut que tu comprennes cela : ce n’est pas nous qui possédons ce monde, c’est lui qui nous contient, nous protège comme le corps maternel abrite son enfant, comme le nid où éclôt le chant contient l’oiseau et comme la fleur contient le parfum. Ce qui s’en va, s’envole, s’échappe ou s’exhale est d’abord contenu, comme la langue dans le dedans obscur. Puis le désir entrouvre. Le vêtement bâille, l’oiseau chante ou s’envole…»
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L'hirondelle rouge

Cet ouvrage n'est pas un recueil de poèmes, ce n'est pas non plus un carnet de route, il s'agit d'un carnet de deuil que le poète a rédigé à l'encre noire de la tristesse, en mémoire de ses parents disparus, sur fond de souvenirs, d'états d'âme et de regrets éternels… Ce livre-refuge a le pouvoir de réveiller les douleurs du passé, provoquées par la perte des êtres chers, tout en les tempérant par la célébration du présent, de la vie, de l'espoir et du désir d'aimer.



Jean-Michel Maulpoix est un écrivain, poète et artiste, il dépeint ses sentiments avec une infinie sensibilité ; il couche les phrases sur le papier, très élégamment, parfois sensuellement, utilisant une plume à la fois tendre et émouvante qui fait envoler ses pensées, à tire-d'aile, comme l'hirondelle retrouve chaque printemps le même nid douillet. J'ai beaucoup aimé le style d'écriture employé par l'auteur dans cet opus : les poèmes en prose confèrent une tonalité douce à l'oreille, une profondeur d'expression, ils teintent les mots de couleurs chatoyantes, de rouge sur fond bleu, tel le tableau peint par Joan Miro, Hirondelle amour, dont il est fait référence dans le livre.

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L'hirondelle rouge

*******



Hirondelle Amour : rouge sur un ciel bleu, des formes, des lignes, des objets, de vagues personnages flottent dans un espace indéfini. L’univers du peintre surréaliste Joan Miro surprend, étonne, séduit : mouvement immobile, battement d’ailes, poésie colorée.



Jean-Michel Maulpoix nous parle de ses parents : « Que pourrais-je opposer d’autre à la détresse de l’amour ? ». Il s’est inspiré de la toile du célèbre artiste catalan : « L’hirondelle amour revient avec le printemps ; quelques grammes d’encre au cœur. »

Son père et sa mère ont franchi le seuil : « Il reste des miettes et le son de leurs voix sur la nappe en coton rouge de la salle à manger, longtemps après que les assiettes en ont été débarrassées. »

Comment oublier ? Les souvenirs reviennent par vagues chez l’auteur : « Tends l’oreille vers ces planchers qui craquent au fond de ton enfance. »



Les parents ne sont pas encore mariés par ce jour de grand soleil lorsqu’ils prennent la pose face à l’objectif qui les réunit en noir et blanc sur la photo : « Et voilà que je suis à présent, né de leur bel amour… Quand par la rose de l’appareil photographique, s’échappe le cri d’une hirondelle rouge ! »



« Dans la glace, parfois, le visage de mon père. »

Ce père peignait le dimanche sous les yeux de son fils. Le poète a gardé dans ses écrits le goût du chevalet : « Surtout ne pas remplir, ne pas saturer ; évider et tendre la phrase, y chercher des amorces et des points d’équilibre, des lignes d’envol dans le vide porteur. »



« Elle a rejoint mon père. Les voici de nouveau côte à côte. Confondus dans un même silence. Ils reposent à présent du sommeil de la terre. »

La description de la maison de retraite est magnifique et terrible. Seul un grand poète peut nous restituer de façon aussi réaliste ces lieux de fin de vie qui se ressemblent tous, où la vie s’est arrêtée en entrant, quand la cervelle ne répond plus, que les mots n’arrivent plus.

« À leur arrivée, on offre aux nouvelles pensionnaires un bouquet de fleurs en plastique. Ce sont des fleurs de cimetière. » ; « Vie de cendre où grésille à peine le vieux cœur qui rougeoie. » ; « Au bord de la falaise, elle n’attend plus rien, sinon que l’on vienne la chercher. » ; « Ici, je ne peux rien dire, rien faire, sinon tenir la main de ma mère : aucune musique consolatrice, aucun chant, pas même un mot de compassion. Inapte au poème comme à redire l’amour. »



Ils sont partis et le poète souffre : « Le monde, quand je le touche des yeux, ne rend plus le même son ; à présent, rideaux déchirés, la fenêtre s’ouvre à tout instant sur le silence du vide. »

La colère l’envahit : « Colère de la créature contre sa finitude et son absurdité, colère de fils abandonné, colère d’âme aussi ancienne que les pleurs d’enfant dans la nuit. » ; « Dans le silence ou dans le bruit, je regarde glisser les jours, puisqu’il n’y a désormais plus de poèmes capables de les sauver de l’oubli. »



Le poète tente de résoudre le grand mystère de la vie. Sa propre mort l’interroge : « Tu attends, toi aussi, derrière la porte, l’oreille déjà collée contre le bois. Tu as pris rendez-vous. Ton tour viendra bientôt. Tu ne guériras pas de cet abîme. »



Puis, le poète se ressaisit. « Mais je n’ai à présent d’autres choix que d’écrire… Offrir à l’absence un bouquet de fleurs d’encre. ».

Il retrouve ses mots, se penche sur la langue comme au chevet d’un malade. « Il lui parle doucement, dans le creux de l’oreille. Elle ouvre un œil, se relève, ose un pas. Qui disait qu’elle était perdue ? »



Une femme, le printemps, deux corps qui respirent, le désir d’une lumière d’été, et la vie reprend ses droits : « Dis-moi. Combien de printemps nous reste-t-il ? Le sais-tu, mon amour ? Pour célébrer entre nos draps le grand retour. Ce plaisir d’être nus : nos noces ! Ce frisson d’oiseau qui court sur la peau ! Ces fleurs qui éclosent sous mes doigts, entre tes lèvres, entre nos ailes ! ».



L’hirondelle rouge amour est revenue avec sa vertu d’espérance. Le peintre a ressorti sa palette : « Peindre par petites touches le sans-gêne de l’air. Peindre encore sa joue bleue et ses hanches, sa gorge rouge ou verte, ses battements de ciel ou de cil. Peindre la volupté paisible de son corps nu. »



Pour l’originalité de sa pensée, la qualité de son écriture et de sa poésie, il faut lire et relire Jean-Michel Maulpoix. Il transcende les mots qui sous sa plume changent d’épaisseur.

« Il se peut que trois gouttes de sang suffisent pour emplir un cœur d’oiseau et qu’il se remette à chanter. »



***


Lien : http://www.httpsilartetaitco..
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Le jardin sous la neige

Un style mélangé entre poésie et nouvelles, qui ouvre la porte sur le mois de Novembre. Avec la Toussaint, la fête des morts, la pluie, qui nous emmène enfin sur decembre et la neige. Le silence du paysage. C'est plutôt agréable à lire et court. La mort est un peu trop présente sous différentes comparaisons et métaphores.
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Le jardin sous la neige

Contempler son destin, en brassant les mots, les images et les figures de style, l’ironie et l’angoisse, mais aussi une forme de bienveillance quant à sa propre carcasse et, du distillat, écrire, toujours écrire, des poèmes en prose sur l’attente. Cette recherche, Jean-Michel Maulpoix, 70 années éprises de mélancolie, la donne à lire dans son dernier recueil au Mercure de France, le Jardin sous la neige, sur les étagères des librairies depuis début mars.
Lien : https://www.liberation.fr/cu..
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Le jardin sous la neige

Je n'ai lu que 2 livres de cet auteur - Une histoire de bleu et Le jardin sous la neige. Il a un talent particulier. C'est un maître des mots. Hier soir, alors que j'avais encore quelques lignes pour terminer le livre, j'ai découvert avec étonnement qu'il était aussi un criminel. Un combat de femmes. Un maître d'un Auschwitz entre quatre murs. Le prix Gouncourt doit être retiré. La littérature est une valeur, elle concerne la création de la vie, et non celle des criminels glorifiés.
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Le jardin sous la neige

Recueil publié en 2023 au Mercure de France, le Jardin sous la neige de Jean-Michel Maulpoix est, à l'instar de beaucoup de ses recueils, composé de poèmes en prose.



Ce livre vient à la suite de L'Hirondelle rouge, recueil dans lequel le poète évoque la disparition de ses parents, et le Jour venu, livre où il poursuit sa réflexion sur la mort et le deuil.



La saison froide est une métaphore qui revient souvent dans le livre. Saison où la nature semble se défaire, s'abandonner tout entière à une trêve imposée. Empruntée à l'hiver, la saison froide est pour Jean-Michel Maulpoix le motif choisi pour évoquer encore la vieillesse, la fin de vie mais aussi, la confession d'une tristesse, d'une écriture qui semble être arrivée au bout de son chemin.



Dans plusieurs chapitres, Maulpoix interroge par diverses approches son rapport personnel au vieillissement, à la mort. le visage changé de l'autre, son corps fatigué, ses mouvements lents et puis sa disparition, tout est observé de près ou avec retrait. Son écriture fait apparaître le sentiment aigu de la finitude de l'être, une sensation saisissante qui va de la peur vers le doute, de la douleur jusqu'à la résignation :





« Je ne suis qu'un long crépuscule, déjà un tas d'os qui grince et peine à se déplacer seul, un paquet de ténèbres tout près de choir, un défaut d'astre, ce très peu de lueur qu'il reste d'une ancienne espérance. »



Dans une prose métaphysique et très personnelle, Jean-Michel Maulpoix mène une réflexion sur le rôle de la pensée, de la poésie, sur notre rapport au langage et aux livres, mettant en contraste ce qu'ils sont aujourd'hui et ce qu'il en restera demain, dans les derniers moments. Des résidus de paroles, de pensées… autre chose, peut-être.





« […] Parvenu à un certain point, il n'est plus que la nuit pour éclairer la nuit.

Pourtant, il est heureux, n'est-ce pas, que des poèmes soient en nous et qu'ils aient trouvé place dans notre mémoire au côté de nos souvenirs les plus obscurs, les plus lointains, les plus perdus : voilà qu'ils les éclairent, de côté, comme des soleils couchants, et ils les dorent parfois d'une belle lumière qui les rend plus précieux. Enveloppés de leur parole, ils se tiennent ainsi très proches et légèrement brillants dans cette nuit qui est la nôtre. »



L'ombre de Stéphane Mallarmé apparaît dans de nombreuses pages du recueil. Portrait de l'homme vieillissant dans son appartement parisien de la rue de Rome, réhaussé par l'évocation de quelques-uns de ses poèmes (je songe au magnifique Éventail de Méry Laurent). En se rappelant du grand poète, l'écriture de Maulpoix se fait plus desserrée, plus nuancée. Un moyen pour lui, peut-être, de tenir la vieillesse et la mort à distance, de l'objectiver.



Le livre se clôt par un chapitre qui donne son titre au recueil : le Jardin sous la neige. Après l'expression de la douleur, le portrait de Stéphane Mallarmé, advient une écriture plus apaisée, presque méditative.



À la couleur noire de la terre, à celle de la nuit qui engloutit tout, à celle de l'encre qui couche les mots sur la page, Maulpoix y oppose la blancheur de la neige, souveraine et fragile. Au creux de la saison froide, la neige recouvre la nature environnante, protège l'existence passée. Sur le paysage, elle dépose un silence étrange et particulier, elle amortit le tumulte et la rumeur, nous fait prendre conscience de notre intime présence au monde. Elle fait soudain espérer la promesse d'un nouveau printemps, celle de la vie qui se perpétue.



Dans ce recueil qui m'a beaucoup touché, Jean-Michel Maulpoix évoque avec trouble et émotion, avec maîtrise aussi, un sujet difficile. Sans affectation mais avec lucidité et humilité, il s'en remet à la poésie, à toute la réserve des mots pour dire l'inconcevable tragédie de la vie, le souvenir aussi de tout ce qu'elle nous aura offert.





« Je suis venu ici pour accepter l'inacceptable ! Pourquoi m'a-t-il fallu autant d'années, autant de phrases, pour le comprendre ? Des mots, voilà tout ce que j'ai pu trouver pour faire mine de donner un sens à ce qui n'en avait pas. Je sais que j'ai fait fausse route. D'autres l'avaient compris : la charité était la clef. »





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Le jardin sous la neige

Des pas sur la neige (1910), et à la contemplation des toiles de peintres impressionnistes – Sisley, Monet, qui aimaient représenter des jardins enneigés. Le poète y voit, pour l’écriture aussi, « la promesse d’un printemps que la blancheur protège ». Comme une germination secrète de graines, et l’espoir de plantes vivaces.
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Le jour venu

Je préviens de suite le lecteur que j'aurai du mal à faire une critique objective de ce recueil de textes poétiques en prose. C'est en effet sans doute une des plus belles lectures que j'ai faites dans ma courte vie (et pourtant je "collectionne" 75 ans..., mais la vie est toujours trop courte, n'est-ce pas !). Or, justement, ces textes évoquent la fin, la mort des parents de l'auteur, "le jour venu" (comme cette expression est douce et amoindrit la douleur du deuil !). Et l'auteur ne tourne pas autour du pot, il en parle, mais si doucement, si subtilement...



Disons-le tout net : Jean-Michel Maulpoix, c'est du Christian Bobin en liberté, complètement libre, comme un oiseau qui n'a plus aucun souci de son plumage (et tant pis si on lit à travers mes pensées..). J'ai lu quelque part qu'il assumerait de prôner un "lyrisme critique", mais peut-être prendrait-il beaucoup plus de détours pour le dire. Disons simplement qu'on comprend presque tout, et franchement ce n'est pas un défaut ici, mais une qualité rare, car le texte est tout sauf léger et facile. Ce sont à chaque fois des pensées profondes, et inscrites dans une sorte de durée et qu'on a envie de transcrire dans un carnet de citations.



Voilà, donc : ma critique n'est pas critique, elle est enthousiasme et enthousiaste ( c'est beau , tout simplement beau, de bout en bout : j'avoue même que je n'ai pas encore réussi à clore ma lecture, de peur de cet achèvement...). Page 61, Maulpoix pose la question si "Désir" n'est pas le "le nom qu'il convient de donner à la source inconnue d'où proviennent les mots du poème". Ce mot de désir, qui a tant fait gamberger les psychanalystes autrefois, le voilà inséré dans la poésie d'aujourd'hui, et c'est un bonheur, croyez-moi ! Bonne lecture !
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Le jour venu

Ce recueil fait suite, comme l'indique l'auteur dans la quatrième de couverture, à "L'hirondelle rouge" écrite après le décès de ses parents.

Ce recueil constitue une sorte de traversée de la douleur. Il évoque d'abord les disparus, la fin de leur vie telle que les mots en refaçonnent l'écho, puis la douleur d'être, et dans les derniers textes une forme de réconciliation avec une présence au monde nouvelle où la conscience de la finitude individuelle s'accorde au désir de goûter et sentir par les sens mais aussi par les mots ce que le monde, et la nature en particulier, donnent encore à vivre.



Comme dans "Rue des fleurs" (je ne fais référence à ce recueil que parce que c'est l'unique autre recueil de l'auteur que j'aie lu), la poésie naît d'images étonnantes créées avec des mots simples. Mais il s'agit ici, non plus de vers libres, mais de prose poétique. On y trouvera quelquefois deux voix, un peu à la manière de ce qu'on trouve dans "Enfance" de Nathalie Sarraute. Le ton ici, est tout autre, évidemment mais les deux voix expriment des polarités différentes du poète.
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Les 100 mots de la poésie

Quelle joie d'avoir eu en main un « Que sais-je ? » traitant de poésie qui ne fût pas un succinct résumé scolaire, sous forme de dissertation, des techniques de la versification, des figures de la rhétorique, ou des règles de la forme-mètre-rime-alexandrin !

Persuadé d'emblée que la quête infinie et insoluble de sa propre définition est ontologiquement liée à la poésie, ou plutôt à l'acte poétique, je suis désormais acquis à l'idée qu'une nomenclature subjective, personnelle, privée même, élaborée comme une succession de fragments en prose poétique constitue la meilleure approche pour qualifier cette étrange, immémoriale, atterrante création de musique langagière ; à condition, sans doute, d'éviter la tentation du lexique ou du dictionnaire – en somme le leurre de l'objectivation totalisante. Cette collection de cent mots, de « Acte » à « Voix », illustre un « entendement » contemporain de la poésie, de la part d'un poète sans doute plus que d'un critique [la question restant posée de se demander : « Poète, est-ce une identité, une fonction ou un état intermittent ? » (p. 89)] même si les entrées contiennent une foison de références à des poètes (et parfois des auteurs, des philosophes et autres critiques) du passé et d'ailleurs, et semblent d'ailleurs les caractériser, à l'instar de « Âme » qui renvoie successivement à Platon, à Lamartine (« cri de l'âme »), à Victor Hugo (« l'art d'apprivoiser les âmes »), à Baudelaire et à Paul Claudel...

Mon seul regret est que la « constellation de mots » n'ait pas tenu la promesse annoncée dans l'Avant-propos d'inclure des verbes « qui disent les gestes d'un travail et d'autres qui désignent des mouvements du corps et de la pensée » : peut-être cette intention d'origine s'est-elle émoussée pour ne retenir à la fin que des substantifs, un nom propre – Orphée – et les trois pronoms personnels caractéristiques : « Je », « On » et « Tu ».



J'ai été tenté de citer in extenso le fragment « Langue », qui m'interpelle le plus vivement. Cependant, j'opte pour une cit. tirée de l'entrée « Poème », qui n'est certainement pas la plus originale ni même peut-être la plus représentative du livre, mais qui donne une ouverture historique qui semble bien, pour une fois, faire œuvre de synthèse :



« Mixte de son et de sens, concentré d'images et de rythmes, parfois prouesse verbale, le poème est cet objet, "objeu" et "objoie" (Francis Ponge), fait de mots que l'on ne peut détacher de sa forme. […] Aux temps classiques, il fut pour une part le produit d'un art poétique qui lui préexistait ; aux temps romantiques, il vint exprimer et illustrer un sujet, amplifié, exalté parfois jusqu'au sublime. Aux temps modernes, il n'est souvent plus qu'un moment ou une étape d'une recherche qui le dépasse infiniment ; [...] » (p. 88)

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ne cherchez plus mon coeur

Il y a comme ça, pour chacun je pense, des écritures qui vous parlent, dans lequel on se coule, que l'on voudrait croire voix à vous seul (ou seule) adressée, presque comme venant d'un vous qui en serait capable. Et l'on est un peu bouche ouverte, mais en même temps si bien, on reconnaît, et en même temps on pense mais oui, c'est ça, j'aurais pas su.

Enfin, en clair, j'aime, sans pouvoir analyser. Juste cette exactitude, cette tension sans effort apparent, cette tristesse qui se berce, cette faculté d'émerveillement, la simplicité des choses, la délicatesse et le travail du regard.

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