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Critiques de Julien Gracq (353)
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Gracq : Oeuvres complètes, tome 1

Et bien, et bien !

Finalement, je n'aurai pas lu que Balcon en Forêt (qui d'ailleurs est dans le tome II) des œuvres complètes de Julien Gracq ! J'ai suivi l'ordre chronologique proposé par les éditions de la Pléiade pour ce grand auteur de la langue française. Je n'apprécie que très peu les auteurs contemporains, vivants en fait - ou plutôt devrais-je dire médiatisé - car j'ai toujours l'impression de subir un flux marketing, une influence journalistico-financière, un choix de maisons d'édition. Bref, Gracq c'est un peu ma limite haute, bien que je lise quelques auteur très récents et plébiscité (De Luca, Bobin, etc...), on n'est pas à une contradiction prêt !

Toujours est-il que lui, comme anti-moderne, on fait pas mieux (ou pire) avec ce que cela implique de qualités et de défauts (apparence de prétention, de hauteur, froideur).

Ce tome présente l'ensemble du travail publié par Julien Gracq, à la fois sur la littérature, et romanesque (ou théâtral, d'ailleurs). Ces deux aspects sont bien différents:

J'ai adoré l'ensemble des œuvres romanesques, de fiction: il y a un souffle, une force d'écriture et de narration, une profondeur un peu mystique rare en littérature, et appréciable. Et ce même si le côté un peu désuet du romantisme à la Byron/Shelley/Stoker du Château d'Argol ne m'a pas emballé, je fuis en ce moment ces ambiances sombres et méphitiques. J'aime au contraire le Camus solaire de l’Été, par exemple.

Le Rivage des Syrtes et un chefs d’œuvre, à n'en pas douter, proche d'un Jacques Abeille à mon goût, pour le côté chute d'une très vieille civilisation, initiation d'un jeune homme à la vie, aux intrigues politiques.

J'ai eu un peu plus de mal à lire ses essais et critiques, même si j'en partage les goûts et revendications.

Louis Poirier (Gacq) était un élève très brillant, que ce soit à son lycée nantais ou à Henri IV où il fait ses classes préparatoires, puis dans sa formation de géographe. On ressent son immense culture tout du long, ses goûts affirmés et son peu de sensibilité à la mode. Proche au début des surréaliste, il ne "s'en carte" pas chez eux ; il est tout de suite et pour toujours très distant avec les existentialistes et le nouveau roman. Camus reste pour lui un homme qui a fait à un moment une erreur d'interprétation même si ses mots ne sont pas aussi dur qu'envers Sartre...

Ces essais donc, sont un peu trop verbeux à mon goût, ou trop éloignés des littératures que je lis. En effet je crois n'avoir jamais ouvert un ouvrage surréaliste, je n'aime pas Sartre ni le nouveau roman et n'en est donc que très peu lu, comme tout le reste de la production littéraire de cette époque en fait...

Le style en est pointu, le propos direct, mais sûrement trop éloigné de mes lectures et appétences...



Pour terminer sur cette critique, il faut lire ces livres, parcourir cette littérature des frontières, des confins, des décrépitudes, des états limites, de tension et d'explosion. Le style est maîtrisé, à la fois sobre mais puissant, des phrases longues, emplies de propositions, d'un vocabulaire juste mais très variés, parfois un peu archaïsant (à dessein) sans que cela gène le lecteur qui a bâtit sa culture à l'image de l'auteur.

Gracq est intemporel est pourtant très ancré dans son époque, qu'il a su critiqué avec ferveur !
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Les eaux étroites

Gracq dévoile la source de ses souvenirs les plus chers dans une promenade « sans aventure ni imprévu » sur la rivière voisine de sa maison d’enfance. L’Èvre, affluent de la Loire, est un conservatoire de sensations dans un monde clos, amniotique, inaccessible par la route comme par le fleuve du fait d’un barrage noyé de végétation. Voilà pour le décor. L’écrivain-géographe ne pouvait s’arrêter là, il partage son émotion et sa culture dans une prose imagée, majestueuse et savante dont la lecture demande une attention continue — acquise chez tout lecteur de Gracq — mais aussi l’adhésion à l’exercice. Ici l’exercice va trop loin quand l’auteur orne et encadre ses souvenirs avec Goethe, Fournier, Poe, Bachelard, de Quincey, Nerval, Rimbaud, Balzac et Proust. Bien sûr on trouve des pépites dans ces 70 pages (voir la citation), mais l’auteur écrit pour le complice averti plutôt que pour un lecteur réceptif et confiant. Je relirai Presqu’Ile, encore et encore, mais pas Les Eaux étroites.
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Le Rivage des Syrtes

Qu'il est difficile de critiquer un livre comme celui-ci, tant il semble que son ampleur me dépasse. "Ampleur" n'est peut-être pas le bon terme. "Profondeur" encore moins. C'est chez Gracq une sorte de superficialité tyrannique, où le monde des apparences, du ressenti, de l'affleurement, est la clé et le secret de toutes choses. C'est peut-être ce qu'exprime Danielo dans son monologue final : la seule chose qu'il a apprise en dehors des livres, c'est la facilité avec laquelle les choses adviennent.



J'ai lu au hasard la critique d'une lectrice sur Internet. Elle semblait irritée par le fait que "l'auteur cherche toujours la métaphore parfaite". Elle a raison. Une autre façon de le dire est que les métaphores de Gracq sont parfaites (du moins d'une justesse, il me semble, inégalée en leur genre).



Que dire de plus ? Je me tiens devant le Rivage comme devant une vieille merveille du monde. Il me faudrait reculer ; mais parler d'une chose de loin ce n'est plus parler de la chose, c'est parler de notre rapport à elle. Quant à rester à ses pieds pour en contempler les détails, cela ne fonctionne pas : on ne voit que la mousse, les fractures, les défauts. Oui, Gracq en fait des tonnes. L'a-t-on jamais reproché aux bâtisseurs de colosses ou de pyramides ?
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Un balcon en forêt

J'ai retrouvé avec beaucoup de plaisir, la poésie de J.Gracq, qui m'avait deja enchanté dans "le rivages des Syrthes". Je conseil à tous les Gracophile, la lecture de ce livre, reflet d'une guerre perdu sans qu'elle ai eu lieu, le récit de ces hommes, vivant dans ce balcon en forêt.
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Les terres du couchant

Il y a longtemps, en conversant sur Le Rivage des Syrtes, mon interlocuteur l'avait qualifié de « roman géographique » en ceci que le véritable protagoniste du récit, par lequel la trame se déroule, l'intelligence du texte avance, les émotions du lecteur se précisent, la tension augmente jusqu'à son apogée interrompu – l'inévitable confrontation avec l'ennemi – est non le héros mais la description des lieux.

Dans Les Terres du couchant, manuscrit retrouvé et récemment publié dans un état vraisemblablement presque accompli, qui fut longuement travaillé (1953-56) juste après Le Rivage, je trouve que cette caractéristique est développée encore davantage, je dirais jusqu'au paroxysme ; ainsi, j'inscris résolument ce roman dans le sillage et la succession du précédent, malgré l'avis contraire de Bernhild Boie, spécialiste de Gracq qui signe la postface du livre, et je vérifie encore la théorie que tout auteur continue à écrire pareillement tant qu'il n'a pas le sentiment d'avoir fait le tour de son menhir.

Je retrouve cette continuité d'abord par l'intrigue.

Dans les deux cas, il est question d'un État, méconnaissable vis-à-vis de nos repères historiques et géographiques, mais dont l'antiquité s'accompagne du déclin et qui est confronté à la menace imminente de guerroyer contre un ennemi qui finira sans doute par le vaincre ; cette prédiction le porte à tenter de se soustraire à l'Histoire, alors que le narrateur-héros, impatient face à cette passivité, l'y précipite par son action à la fois patriotique et rebelle. Dans le second roman la guerre a bel et bien éclaté, pourtant, en dépit des dernières actions guerrières décrites dans toute leur expressivité – les prisonniers décapités et l'érection d'une pyramide avec leurs têtes, images qui ne constituent pas l'excipit du récit – elle garde jusqu'à la fin son caractère d'imminence voire de transcendance.

L'intervention du héros-narrateur est encore de nature semblable à celle du précédent. Ce fonctionnaire diligent, accompagné de quatre complices – Hingaut, Lero, Hal et Bertold, « frères que nous nous sommes choisis, vous dont il m'est bon et suffisant que nous soyons ensemble » (p. 36), décide de quitter l'apathie de la grande ville de Bréga-Vieil et de fuir clandestinement, en franchissant dans le plus grand secret une frontière sous forme de mur, pour se retrouver d'abord dans un village maritime, les Grèves de Lilia, et ensuite, dans la seconde partie du roman, au plus proche de la bataille, dans la ville fortifiée de Roscharta, près du château d'Armagh qui tombera et sera incendié le premier. L'action du roman correspond au parcours de cette fuite, de cette clandestinité et de cet engagement auprès des garnisons belligérantes de la forteresse.

Mais je reviens surtout sur le « roman géographique » qui se constitue intégralement par les descriptions des lieux. D'abord d'un constat quantitatif : presque tous les paysages sont minutieusement pris en compte : urbain, villageois, rural, forestier, de plaine, de col et de prairie, maritime, lacustre, d'architecture militaire (citadelle), de ruines de guerre. En revanche les descriptions psychologiques, ne serait-ce que celles du héros et de ses quatre compagnons, sont pratiquement absentes. Celles des activités humaines sont elles aussi réduites à part infime et souvent entourées de vague et d'ellipses.

J'irais plus loin : un seul personnage féminin est identifié, nommé, et il intervient très parcimonieusement ; c'est celui de la comédienne Aega. Voyez comment même la description de ce personnage glisse continuellement vers des métaphores paysagères (je les souligne en italiques) :



« Je me souviens seulement […] qu'une femme très belle, flottée encore sur le sentier de nuit bleue qui l'avait apportée, leva ses mains et d'un mouvement très lent des épaules fit crouler sa chevelure sur son vêtement blanc, comme la pluie lourde et chaude qui croule sur un jardin. La femme plus que nous est mêlée à cette terre et nous l'apporte : dans le champ clos sans ombre où nous vivons, où tout signe se résout dans sa signification crue, où l’œil cerne son but et l'heure sa tâche précise, où l'on circule par les rues entre les angles durs d'une ruche nettoyée, c'était comme si toute l'épaisseur confuse de ce monde perdu s'était jetée soudain sur nous dans son parfum de forêt mouillée avec l'air frais du matin sur les routes ouvertes, le flamboiement des villages à midi, le vent qui brûle aux pointes des herbes, les tours bleues qui montaient sur les soirs de voyage, les chaudes braises rouges de la nuit visitée. Beauté terrible à l'enfermé, parce qu'elle est méprisable, toute couverte de ses yeux cruels où reverdissent les royaumes de la terre. » (p. 191)



Enfin, cette longue citation permet de cerner une autre caractéristique sans doute constate dans l’œuvre de l'auteur : ses images sont très nettement d'inspiration surréaliste, et si Gracq se défendit de s'assujettir au pénible examen qui excluait beaucoup plus qu'il n'acceptait les candidats à appartenir au mouvement, d'autant plus qu'il se méfia toujours des critiques et de leurs activités procustiennes, il n'en demeure pas moins qu'il apprécia et plaida pour son ami Breton même après que d'autres l'eurent abandonné.



A l'aune de ces deux caractéristiques, ce roman me semble remarquable : un don pour la postérité qui compense et surpasse l'éventuelle trahison d'un hypothétique testament.
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Préférences

Ce recueil comporte quatorze textes de formes assez différentes ayant tous pour sujet la littérature en général et les « préférences » de Gracq en particulier. Certains articles sont des analyses assez savantes de l'oeuvre et du style littéraire d'auteurs aussi connus que Chateaubriand (qu'il nomme le « Grand Paon », c'est tout dire), Racine et Barbey d'Aurevilly qu'il égratigne au passage, Lautréamont, Edgar Poe, Junger et Novalis pour qui il a une grande admiration. Il nous propose également de véritables études littéraires comme le « Spectre du poisson soluble » sur le surréalisme, « A propos de Bajazet » sur le classicisme ou « Un centenaire intimidant » consacré à l'oeuvre de Rimbaud. Le lecteur découvrira une conférence donnée à l'Ecole Normale Supérieure intitulée « Pourquoi la littérature respire mal » dans laquelle, entre autres choses, il démontre qu'il y a deux sortes de littératures : celle des créateurs et celle des monnayeurs qui « vulgarise pour les lecteurs attardés la production au ton d'avant-hier ». La littérature de création se subdivisant elle-même en deux écoles, une littérature de rupture (celle du nouveau roman, de l'existentialisme ou du surréalisme) et une littérature de la continuité ou de la tradition. Toutes deux coexistent au lieu de se combattre et de s'annihiler. « Les yeux bien ouverts » est un entretien radiophonique sous forme de dialogue sur le thème de la rêverie, du voyage et de la chambre interdite.

Et enfin, last but not least (en réalité le texte d'ouverture de l'ouvrage et le plus intéressant à mon goût) « La littérature à l'estomac », un long article ou un court essai sous forme de véritable pamphlet publié en 1950 dans la revue « Empédocle » de Marcel Camus. Gracq y brosse un état des lieux argumenté de la littérature de son époque. Au sortir de la guerre, il constate que les gens lisent de moins en moins (que dirait-il aujourd'hui ?). Les lecteurs et critiques préfèrent se baser sur des réputations et répéter ce qu'ils ont entendu ici ou là sur tel ou tel écrivain sans pour autant faire l'effort de réellement connaître son oeuvre. Quant à l'écrivain, son statut s'apparente de plus en plus à celui du fonctionnaire. L'éditeur lui procure une véritable rente de situation. Des clans, des coteries politiques s'organisent pour établir une sorte de totalitarisme de la pensée. Il vise Sartre et l'existentialisme. « Autant Nietzsche a toute sa place en littérature, autant Kant ne l'a pas. » dit-il.

Un peu daté, mais très finement observé, cette charge (et tout l'ensemble de ces textes d'ailleurs) résonnent d'autant plus cruellement à nos oreilles aujourd'hui que les maux dénoncés par ce professeur qui avait abandonné la fiction pour se consacrer à disséquer la littérature sont toujours les mêmes et en bien pire maintenant. A lire en le réservant quand même aux « spécialistes ».


Lien : http://www.etpourquoidonc.fr/
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La Forme d'une ville

La ville de Gracq prend la forme d'une orange. Quartiers d'un tout. Une toile d'araignée tissée entre la Loire et l'Erdre. Nantes la Grise - La ville à la rondeur d' un galet. Une partance. Ce sont les premières années de la vie de Gracq qui cheminent et se superposent. Et ce sont ces images, cet atmosphère, qui s'imprimeront dans son esprit et qui l'accompagneront durant tout son parcours littéraire. Pas de tourisme, pas de grande leçon d'histoire, mais des lumières, des odeurs, des contrastes, des ombres, des bruits. Un possible, une annonce dans un regard d'enfant. La ville vit, croit, s'enfouit, ressurgit en dehors de nous. Mais elle nous imprègne à tout jamais. Elle nous forme et nous la reformons. Sans cesse nous la reformulons mais nous ne la répétons jamais. L'empreinte qu'elle nous laisse est elle plus marquante que la forme que nous lui donnons ? Les strates de nos vies construisent les villes. Une déambulation très intéressante.

Astrid SHRIQUI GARAIN
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Le Rivage des Syrtes

Le Rivage des Syrtes

Julien Gracq (1910-2007)/Prix Goncourt 1951

Issu d’une des plus vieilles familles aristocratiques de la seigneurie d’Orsenna, une république fictive à une époque indéterminée mais que l’on pourrait situer sur les rives de la Méditerranée (j’y reviendrai en fin de commentaire), Aldo hésite sur son avenir et finalement choisit de partir comme observateur dans une forteresse des provinces du sud érigée sur le rivage des Syrtes. Cette forteresse considérée comme le purgatoire où l’on expie quelque faute de service durant des années d’ennui interminables, surveille la mer des Syrtes qui sépare Orsenna seigneurie assoupie dans une torpeur voisine de l’anéantissement, du Farghestan, pays imaginaire ennemi immémorial, situé sur l’autre rive, avec lequel Orsenna est en conflit depuis trois siècles bien que de fait une paix très précaire soit établie depuis longtemps entre les deux états.

Aldo, le narrateur, découvre alors le quotidien de la forteresse et constate qu’il n’y a rien à observer et que le laisser-aller somnolent de cette garnison pastorale est général. Tout est calme, irrémédiablement calme ! « J’ouvrais ma fenêtre à la nuit salée : tout reposait sur cinquante lieues de rivage, le fanal du môle sur l’eau dormante brûlait aussi inutile qu’une veilleuse oubliée au fond d’une crypte…Cette vie dénudée s’offrait clairement, dans l’évidence de son inutilité même, à quelque chose qui fût enfin digne de la prendre. »

Aldo se lie peu à peu avec le capitaine Marino qui dirige la forteresse. Il a bien remarqué qu’une certaine torpeur règne au sein de la base et sous l’œil sceptique de Marino, vieil officier aguerri et blasé, il tente de réveiller ce petit monde. « J’exaltais cette vie retombée de ma patience ; je me sentais de la race de ces veilleurs chez qui l’attente interminablement déçue alimente à ses sources puissantes la certitude de l’événement….Il ne se passait rien. C’était une tension légère et fiévreuse, l’injonction d’une insensible et pourtant perpétuelle mise en garde…Ah ! le rassurant de l’équilibre, c’est que rien ne bouge. Le vrai de l’équilibre, c’est qu’il suffit d’un souffle pour faire tout bouger. Rien ne bouge ici et cela depuis trois cents ans… »

Jusqu’au jour où Aldo croit distinguer dans la nuit un bateau longeant la côte en s’éloignant. Le lendemain, une patrouille avec le «Redoutable » commandé par Marino est menée le long des côtes des Syrtes. Sans succès. Mais pour Aldo l’essentiel n’est pas là bien qu’il découvre au cours d’une promenade une anse cachée où se dissimule un bateau arrimé non loin d’une demeure isolée.

Pour Aldo inquiet et nerveux à qui la solitude et l’inertie commencent à peser, l’action va plutôt se situer dans le cadre d’une liaison amoureuse avec Vanessa Aldobrandi, dernière descendante d’une très vieille et riche famille aristocratique d’Orsenna, dont le trisaïeul a trahi la confiance en s’alliant aux Farghiens. Aldo découvre que Marino et Vanessa se connaissent, ce qui crée en lui un certain malaise. L’idée le trouble qu’une suspecte collusion existe entre eux surtout lorsqu’il est convié à une fête à Maremma chez Vanessa qui devant Aldo, séductrice, ne veut surtout pas faire mentir sa réputation de prodigalité somptueuse. C’est alors qu’Aldo découvre que le bateau mystérieux appartient à Vanessa.

Dans un style magnifique, Julien Gracq nous décrit l’ambiance de la fin de soirée chez Vanessa : « La musique s’était tue dans les salons et une rumeur plus lointaine immobilisait les façades de pierres de Maremma. La flèche des sables fermait l’horizon d’une barre noire ; par la passe ouverte, les rouleaux de vagues gonflés par la marée déferlaient en paliers phosphorescents de neiges écumeuses, en degrés démesurés qui semblaient crouler théâtralement par saccades du cœur même de la nuit. Un crissement solennel montait des sables, et, comme la frange du tapis qui déborde d’un escalier de rêve, une nappe aveuglante venait se défroisser à mes pieds mêmes sur les eaux mortes. » On entend le ressac… Quel style !

Dans les jours qui suivent, l’ambiance change au sein de l’Amirauté sous l’action de Fabrizio qui veut rénover la forteresse afin d’occuper les habitants. Il semble soudain que l’ennui ait disparu de l’Amirauté, et en quelques jours la forteresse est débroussaillée, jaillissant alors de ses haillons. Tous ces changements en apparence insignifiants entrainent avec eux un trouble qui va jusqu’à changer le goût même et la saveur de l’air. Aldo pris dans ce tourbillon ne fréquente plus dans sa solitude inexorable la salle des cartes, véritable réceptacle de silence dont le souffle froid et moisi l’avait chaque fois saisi à la gorge comme celui d’un hypogée. C’est comme si la vie était revenue avec le bruit familier des outils et des voix résonnant autour de la forteresse comme une prise de possession de ces ruines. Aldo n’est plus le même.

Rejoignant Vanessa, Aldo découvre le calme des plaines grises qui mènent à Maremma, toujours moites de brume au matin, ressemblant à ces aubes d’été languides qui se trainent comme assommées sous une fin d’orage.

La surprise que lui réserve Vanessa l’enjôleuse, c’est Vezzano, un îlot rocheux qu’il rejoignent en bateau, un havre de sensualité et de mystère où leurs corps vont se rapprocher : « Elle était contre moi, muette, ses seins durs et nus sous sa blouse tendus par la fraicheur comme une voile étarquée…Mes yeux glissèrent vers la naissance de ces seins que soulevait un souffle sans loi… Nous dûmes passer de longues heures dans ce puits d’oubli et de sommeil… tandis que s’anuitait l’île avant le retour des fantômes du soir…, et qu’à l’horizon montait dans le clair de lune le Tängri à la cime énigmatique et omineuse, palpitant irréellement sur la mer effacée… Je trouvais une délectation lugubre dans ces nuits de Maremma, passées parfois tout entière auprès d’elle, qui sombraient par le bout au creux d’un déferlement de lassitude, comme si la perte de ma substance qui me laissait exténué et vide m’eût accordé à la défaite fiévreuse du paysage, à sa soumission et à son accablement. »

Insensiblement et de façon très détournée, Vanessa, qui marche sur les traces de son ancêtre, instille en Aldo l'envie de mener à sa guise les affaires de la Forteresse et de transgresser la frontière maritime qui sépare Orsenna du Farghestan. La fatalité fait son chemin et Aldo cédant à une impulsion irrésistible approche, avec hardiesse et par curiosité, un jour son bateau des côtes ennemies lors d’une mission de reconnaissance de routine avec le Redoutable… En proie au vertige de l’irréversible, Aldo et Fabrizio courent vers l’irréparable. Un inexorable destin fait son chemin… Coups de canons farghiens, une escarmouche telle une vétille qui va avoir des conséquences paradoxales, celle déjà de désennuyer la population d’Orsenna et de la forteresse, qui toutes deux sombraient au fil du temps dans une léthargie séculaire tant et si bien que l’éventualité d’une guerre ou d’une expédition punitive est agitée avec complaisance, se situant encore dans une abstraction incolore et vaguement fantastique, tandis que le cœur réactivé de la ville se remet à battre. On se remémore alors cette maxime de café du commerce : « Il nous faudrait une bonne guerre !)

La déclaration de Danielo antique édile de la ville ne laisse planer aucun doute quant à la suite : « Les temps sont venus, alors il est temps que les trompettes sonnent, que les murs s’écroulent, que les siècles se consomment et que les cavaliers entrent par la brèche… »





Julien Gracq dans ce roman à la gestion dramatique de l’attente remarquable, a su acclimater un style très personnel à son expérience surréaliste. Pour lui, l’essentiel n’est pas ici de raconter une aventure mais de suggérer un univers étrange et un peu mystérieux, hors du temps et de l’histoire. « Dans une sorte de clair obscur maintenu tout au long de ce vaste poème en prose par la magie des images et l’envoûtement d’un style unique, l’auteur maintient un climat de mystère, se suspens permanent, l’attente d’une catastrophe vaguement pressentie mais impossible à situer et à contrôler, comme si l’auteur voulait nous faire éprouver, jusqu’au plus profond de notre être, la condition de l’homme devant le destin. »

Dès le début, sur le fond, j’ai songé au Désert des Tartares de Dino Buzzati, puis au Château de Kafka, deux romans également étranges avec lesquels le livre de Julien Gracq a des ressemblances quant à l’ambiance, excepté pour ce qui concerne le propos, la poétique et le style, lequel est exceptionnellement personnel et sublime.

Quelques remarques géographiques intéressantes pour tenter de situer l’action de ce roman. Hors roman, Syrte est une ville de Libye. La mer des Syrtes au temps des Grecs puis des Romains se situait entre Carthage et Cyrène puis plus généralement et plus tard figura l’ensemble de la Méditerranée. On a pensé que l’auteur situait la cité état d’Orsenna à Venise avec sa lagune et ses eaux dormantes et que le Farghestan représentait l’Empire Ottoman. Donc on le voit, un mélange des lieux et des époques.

Enfin, certains exégètes ont vu dans ce roman une allégorie illustrant le déclin de l’Occident. Chacun se fera son idée.



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Au Château d'Argol

"Ils se dévêtirent parmi les tombes."



En éjaculant ses fantasmes d'adolescent dans son château d'Argol, Julien Gracq retrouve la fébrilité, la grandiloquence et la radicalité propre à cet âge de la vie. Ses héros traversent leur crise pubérale dans des décors médiévaux : claustré dans un vieux château breton, lui-même ceint d'une forêt lugubre, Albert, blondin épris d'idéalisme, a invité son pernicieux ami, le sombre Herminien à le rejoindre. La gracile Heide escorte ce dernier. Les dissensions philosophiques, les baignades dans l'océan et les explorations sylvestres se succèdent tandis que couvent d'inavouables convoitises. de désirs confus en prurit de possession, la guerre à trois se déclenche.



Récit initial de l'écrivain, Au château d'Argol pèche par excès de matière : trop d'images, de références, d'adjectifs... Avec son attirail gothique et sa symbolique lourdement ésotérique, Gracq étouffe son conte sous les oripeaux de ses idoles : ici les harnachements wagnériens -Parsifal et Sainte Lance, dragon et oiseau de la forêt-, là le fourniment surréaliste -démons et merveilles, rêves et magie-. Mais plus encore, la présence tutélaire et séminale d'Edgar Allan Poe macule la prose opulente du jeune auteur de ses horloges grinçantes, ses freux sinistres et ses blêmes suaires.



Gracq touche souvent au sublime quand il s'essaie par exemple à la sensualité. Délicatement teinté d'homoérotisme (entre L'Éternel retour de Cocteau et le Prince Eric), sa légende perverse dépeint les affres du désir adolescent avec une élégante justesse. Mais sa prose savante aux irisations poétiques reste trop souvent exsangue, alourdie par le suif d'un maniérisme suranné.



Chantourné voire amphigourique, Au château d'Argol n'en reste pas moins une expérience unique pour le lecteur saisi d'étonnement devant cette langue baroque aux vertus hallucinatoires.



Un fruit vert.



"Et, perdant le souffle, il sentit maintenant que les pas allaient le rejoindre, et, dans la toute-puissante défaillance de son âme, il sentit l'éclair glacé d'un couteau couler entre ses épaules comme une poignée de neige."
Lien : http://lavieerrante.over-blo..
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La Littérature à l'estomac

Dans ce pamphlet écrit en 1949 et publié l'année suivante, Julien Gracq est particulièrement féroce avec le milieu littéraire parisien, les écrivains, les éditeurs et les critiques. L'écrivain à peine "reconnu" va "donner le spectacle pénible d'une rosse efflanquée essayant de soulever lugubrement sa croupe au milieu d'une pétarade théâtrale de fouets de cirque -rien à faire ; un tour de piste suffit, il sent l'écurie comme pas un, il court maintenant à sa mangeoire ; il n'est plus bon qu'à radioter, à fourrer dans un jury littéraire où à son tour il couvera l'an prochain quelque nouveau "poulain" aux jambes molles et aux dents longues." (p.18) Il est aussi impitoyable avec les écrivains établis qui se comportent comme des "fonctionnaires" de l'écriture, produisant chaque année leur livre sans vraiment changer la formule qui les a fait connaître, sans prendre de risques que l'on finira sans doute par lire tant leurs noms sont martelés : "On y cède à la fin ; il y a des places enviables en littérature qui se distribuent comme ces portefeuilles ministériels échoués aux mains de candidats que rien ne désigne, sinon le fait qu'"ils sont toujours là" [...] De même que l'éditeur sait qu'après un premier livre, inévitablement -bon an, mal an- il en viendra un autre, lui [l'écrivain une fois édité] considère paisiblement qu'il a passé un contrat à vie avec le public..." (p.35/36/37)



Gracq n'égratigne pas uniquement l'écrivain, il n'est pas tendre avec la critique ni avec le public qui, en France, où il y a toujours eu des salons, parle beaucoup de littérature, s'écoute parfois parler, pérorer en société autour du dernier écrivain à la mode adoubé par le monde de la littérature. Il y est souvent plus question de parader que de parler de ses goûts, des sensations ressenties à la lecture de tel ou tel ouvrage, c'est cela que Gracq nomme "La littérature à l'estomac". Écrit en 1950, ce pamphlet peut faire un peu daté, et pourtant, il est intéressant de le lire maintenant et de tenter d'y voir en quoi il est toujours d'actualité. Il fut l'objet de pas mal de commentaires acerbes du monde littéraire, jugeant Gracq élitiste -ce qu'il est effectivement, tant dans ses goûts pas toujours les plus aisés à aborder : Lautréamont, Barbey d'Aurevilly, Robert Margerit, Ernst Jünger, mais aussi Edgar Allan Poe ou Rimbaud... que dans son écriture, pas toujours simple.



Publié chez José Corti, comme tous les livres de Gracq, il m'a fallu -quel plaisir !- couper les pages, comme je l'avais fait pour mon premier Gracq, Au château d'Argol et pour le sublime Le rivage des Syrtes pour lequel il reçut le Prix Goncourt en 1951 qu'il refusa, fidèle à ce qu'il écrivit dans ce pamphlet. Lorsqu'on voit la foire d'empoigne qu'est devenue ce prix et la course à tous les autres prix, peut-on lui donner tort ?
Lien : http://www.lyvres.fr/
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Un balcon en forêt

Restés sur un excellent souvenir du rivages des Syrtes le petit chef d’œuvre de la douloureuse attente nous avons abordé celle de l’ardennais avec beaucoup de gourmandise .

Mais voilà, attente certes il y a mais la comparaison s’arrête là



Quatre soldats dont un sous- officier sont affectés, dans les Ardennes à une maison-forte sorte de bunker fortifié dans l’attente d’une attaque allemande



La maison-forte est implantée dans une forêt. Véritable un piège à cons du point de vue pragmatique d’un bidasse et souricière qui ne laissera bien peu de chance à la survie elle sera le lieu de vie de l’attente d'un petit groupe de soldats: un point de chute sans plus et un lieu d’enfermement plus hostile que protecteur à laquelle chacun essayera d’échapper.



La forêt, elle, pour l’officier songeur est une île: nid douillet ou un jardin dans lequel on peut batifoler avec une amante, se promener sous les trembles, respirer l’air froid et sec d’un soir d’hiver et griller une cigarette. Une oasis contre l’extérieur hostile à partir de laquelle il peut se projeter dans le futur proche, celui de l’attaque attendue et plus lointain, celui de son avenir. Lieu d'introspection et de retraite mystique .

C’est aussi une frontière avec vue sur la guerre et l’après -guerre : un balcon suspendu au bord de la bataille à venir parfois ressenti comme le coeur des ténèbres avec pourriture des feuilles, miasmes, humidité et froidure. Foret courtaude qui écrase les hommes où il est toutefois possible de braconner et rêver, moment de liberté très apprécié des soldats.



Les personnages sont peu nombreux.

Un sous- officier rêvassant, en suspension dans le temps qui attend l’attaque allemande mais pas seulement Ce temps mort sera pour lui l’occasion de prendre son envol pour la vie. Amoureux d’une femme enfant qui l’a ensorcelé dans la forêt il va vivre un amour bref et passionné. Extatique et surtout mystérieux on est loin de l’amour bucolique et forestier. Ici pas de « je n'aime que toi jolie petite fleur des champs" c’est l’étreinte endiablée et fiévreuse comme si le temps était compté.

Il est pris dans un état de songerie et d’angoisse face à la réalité de l’avenir et va connaître la dure réalité de la guerre.

Les sous-fifres compagnons plutôt que subalternes qui font passer le temps entre le braconnage, les saouleries par désœuvrement, le réapprovisionnement, la popote enfin le train train quotidien du bidasse. On imagine sans peine Pithivier et Tassin assurant l’ordinaire avec l’efficacité qu’on leur connaît.

Un capitaine lointain portant un jugement assez désabusé sur l’armée française dont la débâcle est annoncée par les militaires eux-mêmes avant d’avoir vu l’ennemi.

En fait comme dirait Chaudart « Comprenez, une supposition que les Allemands reculent...Crac ! On est là ! - Pour les empêcher de reculer. - Non pour euh.......la tenaille, quoi » Sans parler du matériel obsolète qui ne fonctionne pas ... "Brancher le fil vert sur le bouton vert et le fil rouge sur le bouton rouge. Puis s'éloigner de cent pas" dirait Lamoureux. La furia francese, la guerre à la française !



Une femme enfant qui émerge de la forêt et qui prend dans ses rets le bel officier. A moitié femme car malgré son jeune âge déjà mariée et veuve, à moitié enfant et moitié elfique (ce qui fait beaucoup de moities il eut été plus judicieux de parler de tiers…) Une créature elfique ou une goule venue on ne sait d'où qui disparaît comme elle est venue.

Le récit de cette attente est bien servie par une narration réaliste. La description de la foret, de la botanique et géologie est très naturaliste : les termes sont recherchés et précis Ils correspondent parfaitement aux choses observées ou imaginée. Ce lyrisme en fait très réaliste se trouve en parallèle accompagné par une songerie ou rêvasserie qui permet d’échapper à l’attente physique et aux sentiments de s’exprimer.

Toutefois cette narration très dense déroulée en un flot continu amène une certaine torpeur voire même un certain ennui. Il n’y a pas la même exaltation qui sous-tend le rivages des Syrtes. On est ballotté et un peu perdus entre la forêt, le ronron militaire et les états d’âme du sous- officier ce qui fait qu’à la fin il ne reste dans la bouche qu’ un goût de cendres. Une impression pas spécialement agréable plutôt une contrariété: on n' a pas eu son content. On est comblé d’avoir retrouvé Gracq et son regard attentif des choses mais aussi pas mécontent de clore cette lecture.



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Le Rivage des Syrtes

Dans un pays imaginaire, Orsenna, en guerre larvée depuis trois siècles contre son puissant ennemi le Farghestan, Aldo, un jeune aristocrate, est envoyé dans le pays des Syrtes en tant qu'observateur. Aldo se fait à la fois témoin de signes d'un destin inéluctable (la reprise de la guerre) et initiateur (malgré lui ?) de ce conflit renaissant. Un livre important et exigeant où une grande place est laissée aux paysages. Dans un style onirique, le célèbre auteur angevin décrit les affres de l'attente et du destin. Pour ce livre, Julien Gracq a reçu en 1951 le Prix Goncourt, qu'il refusa pour protester contre le milieu littéraire et poursuivre son oeuvre en toute liberté.
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Le Rivage des Syrtes

Le lecteur curieux est invité à suivre le lien du blog pour une proposition de lecture du roman de Julien Gracq par R. Barbier, selon l'angle : "Faut-il souhaiter "une bonne guerre" comme Aldo ?"



En ces temps de pax americana, de capitalisme dévitalisant, de sommeil et d'engourdissement des énergies, ne voit-on pas cette question arriver, comme l'air de rien, comme s'il s'agissait de se donner une bonne claque sur les joues pour faire à nouveau affluer le sang.



L'Occident, qui n'a plus connu de conflit majeur sur son territoire depuis près de 75 ans, somnole dans un doux techno-confort matériel qui ne semble plus suffire à certains. Alors quoi, faut-il à nouveau sonner le clairon ? Faut-il tout remuer, encore, comme un enfant qui, défaisant un puzzle, souhaite "recommencer" ?



Ces questions, ce sont aussi celles d'Aldo, narrateur et personnage principal de l'immense ouvrage de Julien Gracq : Le Rivage des Syrtes.
Lien : https://thomasspok.blogspot...
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Le Roi pêcheur

Une lecture qu'il faudra que je reprenne. Je trouve la plume de Julien Gracq hypnotique. J'adore sa vision du Graal et surtout son talent à rendre une atmosphère mystérieuse et oppressante.
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La Littérature à l'estomac

J'ai découvert ce livre au hasard d'une critique d'une liste sur le thème de l'autofiction.



C'est incroyable comme un pamphlet écrit il y a plus de 60 ans soit encore de nos jours si criant de vérité. Comme quoi... rien ne change!
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Le Rivage des Syrtes

Le rivage des Syrtes est un confins, une frontière. Aldo y est nommé par l'Etat d'Orsenna pour surveiller le Farghestan tout proche, de l'autre côté de la mer. Durant cet exil, loin de la vie trépidante et mondaine de la capitale, Aldo attend l'affrontement de ces deux pays qui se font face depuis des centaines d'années. Rien ne se passe, jusqu'à ce qu'Aldo décide de prendre le large et de croiser près du Tängri, le volcan du Farghestan : la guerre se rallume. Plein de poésie, le récit est un long chemin que l'on suit par une écriture longue, qui se cherche à travers les images et les adjectifs. Voilà le roman d'un homme qui refuse d'être à sa place et qui, par sa conduite, mène à l'évènement fatal. Le roman valut à Gracq le prix Goncourt de l'année 1951, mais Gracq le refusa puisqu'il avait dénoncé, l'année précédente, le monde de la critique et de l'édition.
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Les eaux étroites

Je dois reconnaitre avoir eu beaucoup de mal avec ce court récit, dont j'ai eu bien du mal à cerner les enjeux. Gracq y relate l'une de ses balades sur l'Evres, affluent de la Loire, le tout dans une écriture très poétique. Et là est justement mon problème, j'ai toujours eu beaucoup de mal face aux écritures trop poétiques. Il n'en reste pas moins que cette œuvre est un véritable régal pour l'imagination.
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Gracq : Oeuvres complètes, tome 1

Livre rare, d'une écriture très précise, élégante, trouée parois de fulgurances, avec la dimension, disons, métaphysique de cette attente qui n'en finit pas, signature de Gracq
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Le roi Cophetua

De cette nouvelle le cinéaste André Delvaux a réalisé un film remarquable: "Rendez-vous à Bray"



http://marylouveunblogfr.unblog.fr/2011/11/03/rendez-vous-a-bray-andre-delvaux/
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La maison

En 2021, je découvrais la langue de Julien Gracq avec Le Rivage des Syrtes. Une magnifique découverte! Du coup, quand La Maison aux mêmes éditions Corti fut édité, je n'ai eu qu'une envie, me replonger dans l'univers de l'auteur!



Là où le style m'avait subjugué avec le premier, je dois avouer qu'ici c'est toute l'atmosphère qui s'en dégage qui m'a habité dans ce court roman.



On est pendant l'Occupation. Un aller - retour hebdomadaire en bus, passe devant une demeure, la maison, qui occupe tout l'imaginaire du narrateur au point qu'un jour, il décide de faire une halte et d'aller à la rencontre de celle - ci...



C'est court et pourtant le texte happe le lecteur au point de l'aspirer dans celui-ci! Un texte qui finit par brouiller nos repères pour nous offrir un instant d'intemporalité! La dernière fois que j'ai eu cette sensation, c'était avec Le grand Meaulnes d'Alain - Fournier qui est toujours resté un roman à part pour moi, justement à cause de la puissance de l'atmosphère... De cette magie que seuls de tels livres et auteurs savent vous offrir!



Si je devais avoir un regret à exprimer, c'est que c'est si court! On voudrait y rester plus longtemps...
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