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EAN : 9782714313010
80 pages
José Corti (30/03/2023)
4.1/5   77 notes
Résumé :
Ce court récit inédit de Julien Gracq met en scène une fascination. C’est la vision initiatrice, brève mais répétée, d’une demeure, aperçue à chaque trajet depuis un car traversant la campagne pendant l’Occupation, qui pousse le narrateur à se mettre en route, cheminant seul dans les sous-bois pour s’approcher de la maison. À travers le récit de ce parcours aussi sensuel et contemplatif qu’intériorisé, La Maison déplie, comme une intrigue, la naissance d’un désir.>Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (22) Voir plus Ajouter une critique
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Trente pages de texte en petit format, plus la copie du manuscrit et une postface. Comme indiqué dans la postface, il s'agit d'un manuscrit « restant dans un tiroir » « qui n'est jamais arrivé entre les mains de José Corti ». C'est souligner la distance entre José Corti, disparu en 1984, et les Éditions Corti actuelles, depuis peu dirigées par les auteurs de la postface, Mael Guesdon et Marie de Quatrebarbes. José Corti aurait-il publié La maison ? Je ne crois pas, mais c'est une chose faite maintenant, sous un titre d'une platitude qui n'existe pas ailleurs chez Gracq. Je m'étais gardé de l'acheter, mais les amis qui connaissent mon attachement à Gracq me l'ont offert, je l'ai donc lu. La profusion descriptive, le cheminement de la pensée qui accompagne le marcheur, l'apparition d'une Mélisande dans une maison ruinée, c'est bien du Gracq, sans la tension du désir du Château d'Argol, de la Presqu'île ou du Rivage des Syrtes, sans Heide, sans Irmgard, sans Vanessa, sans la servante du roi Cophétua. Un exercice, une ébauche.

Faut-il publier les manuscrits que leurs auteurs ont gardés pour eux pendant des décennies ? La question ne concerne pas Gracq seulement, voir la résurgence de manuscrits de Céline. Pour moi non. Les éditeurs devraient orienter leurs efforts vers de nouveaux talents.
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"Ce qui dérivait immanquablement dans sa direction le cours de mes promenades, c'étaient les friches -...-"
Cette affirmation de Julien Gracq précédemment lue, et partagée ici cette semaine, semblant une coïncidence, pourrait très bien s'écrire en exergue à ce court récit qu'est "La Maison".

Au cours d'un trajet hebdomadaire en autocar, le narrateur, l'oeil attiré par une rupture de la végétation dans le paysage, est surpris d'apercevoir à la lisière de cette "friche", tout en fouillis, un maison dont le style, à lui seul, interroge sur sa présence dans le lieu.
Curieux de la découvrir davantage, et profitant d'un moment de liberté, il refait à pied la partie de la route passant devant la bâtisse et s'enfonce dans l'enchevêtrement végétal autant inquiétant, hostile que silencieux, comme déserté des oiseaux ou de la moindre douceur.

C'est toujours un merveilleux moment hors du temps qui s'offre à celui qui pénètre les pages écrites par Julien Gracq. Il sait qu'il lira et relira inlassablement les mêmes phrases, ébloui, en préservant leur compagnie pour mieux s'en imprégner et savourer le moment présent. Une atmosphère qui s'écrit en attente, souvent mêlée d'inquiétude, un paysage, personnage à lui seul qui se fait messager de l'époque tourmentée ou d'un lieu, en confessant sa rudesse, en dévoilant la tristesse et la solitude qui l'habitent. Une maison qui occupe toutes les pages, mais pas seulement, puisque la traversée de ces bois inamicaux loin de mener à une ruine maléfique entraîne au rythme des mots choisis et des descriptions minutieuses vers l'incarnation d'une sensualité qu'il fallait mériter en acceptant de traverser cette friche menaçante et sans vie.


(Je me sens toujours minuscule devant les mots de cet écrivain, n'en parlant que très maladroitement, mais je voulais seulement vous donner l'envie d'apercevoir à votre tour cette "Maison".)
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C'est avec un plaisir non dissimulé que je me suis laissé guider par la plume tant aimée de Julien Gracq. L'imaginaire de l'auteur naît et se développe avec grâce dans ces quelques pages. Comme chaque fois, on découvre l'univers sensible et intime de Gracq; ici, sa manière de regarder le monde et de transformer une maison souvent aperçue de la fenêtre d'un autocar (sans doute un élément biographique, comme le suggère la postface) en un lieu presque mystique.
Le rythme du récit, les glissements, les fondus enchaînés (pour reprendre une métaphore utilisée par l'auteur dans ce texte), nous arrachent du quotidien morne et soucieux de l'Occupation pour nous faire pénétrer au coeur d'un monde mystérieux et doux. La richesse de vocabulaire chez Gracq est toujours un régal : ses phrases se dévorent, s'apprivoisent parfois.
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Tout y est. Gracq l'auteur arpenteur de lieux est bien à l'oeuvre dans ces pages : le sous bois, la lande, le lieu déserté, l'eau qui serpente...

« Une douzaine de kilomètres avant d'arriver à A..., la route nationale, qui commence ici à descendre doucement à travers les étendues de plateaux bas […] une tache lépreuse au milieu du paysage bocager, une étendue de campagne remarquablement hostile et déserte. »

Le thème du lieu enchanteur où foisonnent les signes qui attendent d'être révélés est peut-être celui qui m'emporte le plus à chacun de ses livres . Comment ne pas penser à la ruine d'Argol ou à la maison forte du Balcon ? Ces lieux qui ne sont pas seulement le décor d'une intrigue mais qui sont racontés à travers tous les sens du marcheur aventureux.
À travers La Maison, nous apercevons des maisons, celle aux fenêtres ouvertes du poète Keats, celle des Usher chez Poe :

“ le sentiment d'accablement qui de près persistait pourtant et même s'approfondissait dans la lumière rajeunie venait d'ailleurs ”

La décadence, le mystère et un certain érotisme ne sont pas en reste. Et le sortilège veut qu'au détour d'une phrase j'ai même pensé à Hill House :

“courbant encore après des années puissamment l'âme sous le flétrissement de ces stigmates mornes, ici pour toujours une porte s'était refermée”

Certains parleront de maniérisme, je préfère le goût du mot rare : « une couleur pulvérulente », « une terre gâte », « une végétation naine et déjetée », « ces taillis crayeux », celui de la poésie. Celui où le verbe n'est plus le messager mais devient poésie et convoque l'imagination. le mot, comme une clef qui ouvre à cet autre monde, celui que l'on devine, mais que l'on ne voit pas sans le sortilège du mot. Sans cela ce récit se résumerait finalement en tout et pour tout au coup de la panne au milieu de nulle part.

Enfin, observer cette voix narrative toujours aussi intense en train de se construire dans les dernières pages fac-similées était un beau cadeau qui prolonge le plaisir de lecture suffisamment bref pour me laisser orpheline.
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Comment ? Qu'ouïs-je ? Un inédit de Julien Gracq ? Un court texte, encore mieux, car parfois sur la longueur, Gracq peut être difficile à suivre -bien que le rivage des Syrtes soit et reste indubitablement dans mon classement de mes livres préférés. Et cette couverture verte qui attire l'oeil et que j'ai vue du premier coup chez mes libraires attitrées. Et José Corti, évidemment... Tout est là pour me faire passer un délicieux moment. Il faut rechercher un endroit calme pour en profiter, pour ne pas être distrait et ne pas perdre le fil. Et le charme opère. L'écriture délicate, travaillée, élégante, faite de longues phrases aux mots méticuleusement choisis, pesés imprègne le lecteur qui se retrouve avec l'auteur dans "l'autocar fourbu" puis dans le sous-bois qui entoure la maison. de même, ses remarques sonnent juste : "D'où vient qu'à certaines minutes privilégiées de notre vie, minutes de vacuité apparente et de tension très basse où nous nous abandonnons au courant et marchons vraiment où nos pieds nous mènent, la paroi volontaire qui nous mure contre l'infini pouvoir de suggestion embusqué dans les choses soudain flotte et se dissout, -rendant à une sorte de pesanteur native et aveugle ce qu'il faudrait bien appeler notre matière mentale pour en faire la proie d'attractions sans réplique, et déchaînant en nous un sentiment confus à la fois de sommeil du vouloir et de presque scandaleuse liberté ?" (p.19) Certes, la chose eut pu être dite plus simplement, en moins de mots, mais l'élégance mon cher, l'élégance en eut été absente.

Je peux reconnaître que Julien Gracq ne s'adresse pas à tous les lecteurs, que sa lecture est parfois ardue et qu'il peut paraître abstrus, mais ce petit texte, ne fait qu'une trentaine de pages. Trente pages de Julien Gracq demandent plus d'attention que trente pages de n'importe quel autre écrivain(e), mais celles-ci offrent une entrée assez simple dans son oeuvre et l'on pourra dire ensuite que l'on a lu Gracq et que pfff, finalement c'est quand même vachement bien.
Lien : http://www.lyvres.fr/
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critiques presse (5)
LeMonde
22 mai 2023
La prose vibrante et magnifique de l’auteur du « Rivage des Syrtes » se retrouve dans un court inédit qui raconte la fascination du narrateur pour une mystérieuse villa.
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LaLibreBelgique
16 mai 2023
Publication de "La Maison", court récit de Julien Gracq, resté inédit à ce jour.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
Culturebox
17 avril 2023
L'auteur est un mystère de la littérature française depuis le prix Goncourt qu'il a refusé en 1951. Julien Gracq, disparu en 2007 à l'âge de 97 ans, a légué ses manuscrits à la Bibliothèque nationale de France et laissé des instructions quant à leur publication.
Lire la critique sur le site : Culturebox
Marianne_
17 avril 2023
Les éditions José Corti publient « La Maison », un nouvel inédit exhumé des cahiers de Julien Gracq. L'auteur, dont le nom est immanquablement associé à celui de la maison d'édition, ne décevra pas ses lecteurs.
Lire la critique sur le site : Marianne_
LeFigaro
30 mars 2023
Comme des vestiges que la terre, en un mystérieux mouvement, ferait remonter à la surface, des textes de Julien Gracq, mort en 2007, nous parviennent régulièrement comme le lointain écho d’une voix qui s’est tue mais résonne encore. Bien sûr, ces inédits n’ont jamais l’amplitude du Rivage des Syrtes ou de La Presqu’île. La Maison est un supplément à l’œuvre de Gracq.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Sur le fond de mon humeur très sombre, bien plutôt et même avant qu'elle ensoleillât la lande, il se fit tout à coup dans le plein sens du mot une embellie. La contrariété littérale qui avait été, je le sentais maintenant avec force, ma disposition de tout l’après-midi, disparaissait. Un poids de tristesse m’était enlevé. La pluie cessait – inexplicablement réchauffant, un rayon de soleil décoloré coulait à travers les branches : autour de moi, la rumeur fourmillante des bois sous l’averse se figeait goutte après goutte dans le suspens doucement épanoui d’une foule de théâtre, et tout à coup, faisant vibrer la lumière décapée par l’averse, un oiseau chanta sur deux notes transparentes et calmes, de la voix même de l’éclaircie. Tout était léger, ouvert, cristallin, facile – un autre monde – comme si le rideau de pluie brusquement levé m’eut été ce « fondu enchaîné » des films qui soude en une seconde les rues aux forêts et les minutes aux années. Quelques pas plus loin, la maison soudain fut là.
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D'où vient qu'à certaines minutes privilégiées de notre vie, minutes de vacuité apparente et de tension très basse où nous nous abandonnons au courant et marchons vraiment où nos pieds nous mènent, la paroi volontaire qui nous mure contre l'infini pouvoir de suggestion embusqués dans les choses soudain flotte et se dissout - rendant à une sorte de pesanteur native et aveugle ce qu'il faudrait bien appeler notre matière mentale pour en faire la proie d'attractions sans réplique, et déchaînant en nous un sentiment confus à la fois de sommeil du vouloir et de presque scandaleuse liberté ?
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A l'extrême rigueur habitable, la maison paraissait d'évidence abandonnée. Pourtant j'écoutais, l'esprit tout entier en proie à un suspens involontaire, les dernières gouttes de l'averse s'égrener des branches dans un silence qui ne parvenait pas à rejoindre celui de l'absolue solitude. Un volet battait de temps à autre contre le mur dans le vent faible, avec un claquement léger - dans l'accalmie de l'averse parfois un gargouilllis d'eau claire s'éveillait et tinter dans les dalles - évoquant malgré moi l'idée d'un ordre de marche alerté et d'une présence légère, d'une porte que soudain quelqu'un va pousser.
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Les soir tombait plus vite qu'ailleurs sur l’égouttement de ces fourrés sans oiseaux. Leurs bruits légers et distincts:craquement de branches,sifflement faible du vent dans un pin isolé,éteignaient les bruits insignifiants de la campagne-- au long d'eux,dans la brume pluvieuse,on marchait comme dans une ombre portée: la route tout entière feutrée et épiante,n’était plus qu'une oreille collée contre la lisière des bois.
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... des silences figés dans une tension brusque comme ceux d'une femme qui se coiffe à son miroir ou qui se maquille avec des gestes d'envoûteuse.
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Vidéo de Julien Gracq
À travers les différents ouvrages que l'auteur a écrit pendant et après ses voyages à travers le monde, la poésie a pris une place importante. Mais pas que ! Sylvain Tesson est venu sur le plateau de la grande librairie avec les livres ont fait de lui l'écrivain qu'il est aujourd'hui, au-delàs de ses voyages. "Ce sont les livres que je consulte tout le temps. Je les lis, je les relis et je les annote" raconte-il à François Busnel. Parmi eux, "Entretiens" de Julien Gracq, un professeur de géographie, "Sur les falaises de marbres" d'Ernst Jünger ou encore, "La Ferme africaine" de Karen Blixen. 
Retrouvez l'intégralité de l'interview ci-dessous : https://www.france.tv/france-5/la-grande-librairie/
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