Et bien, et bien !
Finalement, je n'aurai pas lu que Balcon en Forêt (qui d'ailleurs est dans le tome II) des oeuvres complètes de
Julien Gracq ! J'ai suivi l'ordre chronologique proposé par les éditions de la Pléiade pour ce grand auteur de la langue française. Je n'apprécie que très peu les auteurs contemporains, vivants en fait - ou plutôt devrais-je dire médiatisé - car j'ai toujours l'impression de subir un flux marketing, une influence journalistico-financière, un choix de maisons d'édition. Bref, Gracq c'est un peu ma limite haute, bien que je lise quelques auteur très récents et plébiscité (
De Luca, Bobin, etc...), on n'est pas à une contradiction prêt !
Toujours est-il que lui, comme anti-moderne, on fait pas mieux (ou pire) avec ce que cela implique de qualités et de défauts (apparence de prétention, de hauteur, froideur).
Ce tome présente l'ensemble du travail publié par
Julien Gracq, à la fois sur la littérature, et romanesque (ou théâtral, d'ailleurs). Ces deux aspects sont bien différents:
J'ai adoré l'ensemble des oeuvres romanesques, de fiction: il y a un souffle, une force d'écriture et de narration, une profondeur un peu mystique rare en littérature, et appréciable. Et ce même si le côté un peu désuet du romantisme à la Byron/Shelley/Stoker du Château d'Argol ne m'a pas emballé, je fuis en ce moment ces ambiances sombres et méphitiques. J'aime au contraire le Camus solaire de l'Été, par exemple.
Le Rivage des Syrtes et un chefs d'oeuvre, à n'en pas douter, proche d'un
Jacques Abeille à mon goût, pour le côté chute d'une très vieille civilisation, initiation d'un jeune homme à la vie, aux intrigues politiques.
J'ai eu un peu plus de mal à lire ses essais et critiques, même si j'en partage les goûts et revendications.
Louis Poirier (Gacq) était un élève très brillant, que ce soit à son lycée nantais ou à Henri IV où il fait ses classes préparatoires, puis dans sa formation de géographe. On ressent son immense culture tout du long, ses goûts affirmés et son peu de sensibilité à la mode. Proche au début des surréaliste, il ne "s'en carte" pas chez eux ; il est tout de suite et pour toujours très distant avec les existentialistes et le nouveau roman. Camus reste pour lui un homme qui a fait à un moment une erreur d'interprétation même si ses mots ne sont pas aussi dur qu'envers
Sartre...
Ces essais donc, sont un peu trop verbeux à mon goût, ou trop éloignés des littératures que je lis. En effet je crois n'avoir jamais ouvert un ouvrage surréaliste, je n'aime pas
Sartre ni le nouveau roman et n'en est donc que très peu lu, comme tout le reste de la production littéraire de cette époque en fait...
Le style en est pointu, le propos direct, mais sûrement trop éloigné de mes lectures et appétences...
Pour terminer sur cette critique, il faut lire ces livres, parcourir cette littérature des frontières, des confins, des décrépitudes, des états limites, de tension et d'explosion. le style est maîtrisé, à la fois sobre mais puissant, des phrases longues, emplies de propositions, d'un vocabulaire juste mais très variés, parfois un peu archaïsant (à dessein) sans que cela gène le lecteur qui a bâtit sa culture à l'image de l'auteur.
Gracq est intemporel est pourtant très ancré dans son époque, qu'il a su critiqué avec ferveur !