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Critiques de Milan Kundera (965)
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Coffret en 3 volumes : La lenteur - L'ident..

L'ignorance : Livre très philosophique au début. Il relate les questions et les pensées qui traversent tous ceux qui un jour ont dû quitter leurs pays pour plusieurs années. Peu importe la raison. Ce malais qui s’installe quand on revient au pays d’origine. Le fait que les autres ne posent pas de questions sur votre vie ailleurs. Le fait qu'ils se sont approprié de vos affaires comme si vous étiez morts. Que leurs vies sont restées là, ancrées. Et que vous n'existiez plus.

Ce que je trouve regrettable, c'est la fin du livre. Zut alors, tous les hommes ont-ils ce fichu besoin de mettre un peu de sexualité dans leur livre pour le vendre ? Dommage, je n'en vois pas l'intérêt philosophique de faire coucher Gustave avec sa mère. Absolument pas. Tant pis, si je vous parais prude.

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Coffret en 3 volumes : La lenteur - L'ident..

La principale protagoniste a tout quitté et tout laissé derrière elle, sans trop se retourner ni s'appitoyer sur son sort, elle se bat pour se reconstruire. Deux proches semblent importants pour elle.

Ce livre dénonce les blessures de l'affect, et soulève la question d'une résilience pas toujours possible même avec beaucoup de volonté, en fonction des évènements et des actes des autres.

Si l'enfer c'est les autres, j'aurais répondu à Jean-Paul Sartre de lire Milan Kundera afin d'analyser les failles de l'inconscient et la tentation de perversité instinctive chez beaucoup d'individus ,lorsque leur potentielle cible souffre déjà en silence, et semble proche de l'implosion.
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Jacques et son maître, hommage à Denis Diderot ..

Une magnifique pièce de théâtre et un grand texte..

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Jacques et son maître, hommage à Denis Diderot ..

A recommander à tous. Un livre qui se visualise tant la mise en scène s'imagine avec aisance. Le propos est gai et enlevé et réussit à soulever des interrogations lourdes. On en rit avec sérieux. Une belle prouesse.
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Jacques et son maître, hommage à Denis Diderot ..

EXCELLENT !



Absolument fabuleux ce texte.



Il s’agit d’une pèce de théâtre 🎭 qui se trouve être une variation de Jacques le fataliste écrit pas Diderot.



Premier livre que je lis du célèbre Kundera et certainement pas le dernier. Il rend à travers cette variation, sa critique de l’œuvre de Diderot, une critique positive et qui est profonde !
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Jacques et son maître, hommage à Denis Diderot ..

Je n'ai pas encore eu l'occasion de lire Jacques le Fataliste de Denis Diderot et pourtant cet hommage en forme de variation m'a enchantée.

Trois récits identiques se répondent au fil des trois actes... et pourtant l'analyse qu'en font les personnages varie systématiquement (Jacques : "Je dis que nos aventures se ressemblent étrangement") : deux des protagonistes racontent une histoire qu'ils ont vécu et dont le dénouement s'oppose, tandis que l'aubergiste donne le récit d'une aventure qui s'est passé dans un milieu social différent du sien et à laquelle elle n'a pas participé.

Dès l'incipit et régulièrement, Milan Kundera prend à témoin le lecteur/spectateur qui devient un personnage à part entière de cette pièce (Jacques, discrètement : "Monsieur... -Désignant le public à son Maître :- Qu'ont-ils tous à nous regarder?").

Des mises en abîme et des dialogues croisés s'installent entre les personnages, Milan Kundera, Denis Diderot et le lecteur/spectateur (L'aubergiste : "Vous n'avez pas besoin de réfléchir, il est écrit que vous allez prendre du canard, des pommes de terre et une bouteille de vin...").

Enfin, par un rythme rapide, précis, une écriture ciselée, Milan Kundera donne l'envie de lire cette pièce de la première à la dernière ligne sans interruption.
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Jacques et son maître, hommage à Denis Diderot ..

J'apprécie beaucoup Milan Kundera, pourtant en abordant ce livre, et en découvrant "Introduction à une variation" rédigée par l'auteur j'ai eu quelques appréhensions. Milan Kundera aborde les événements politiques de 1968 et l'occupation de son pays par les Russes, et puis le thème de la littérature en citant des grands maîtres et des oeuvres célèbres...Dostoïevski, Diderot, Sterne... Don Quichotte, Tom Jones, Ulysse, Ferdydurke, Tristam Shandy... et il s'intéresse aux adaptations, ou transpositions, qui ont été faites d'oeuvres au théâtre ou au cinéma...

La postface écrite par François Ricard "Variations sur l'art de la variation" est aussi très technique.

Qu'allait offrir la pièce en elle-même? N'allait-elle pas être complexe, alambiquée?

La surprise fut excellente! Rien de compliqué! Beaucoup d'humour axé sur le libertinage... Un texte fluide, très agréable à lire. Un théâtre qui semble frayer avec l'absurde. Une pièce courte, comprenant trois actes. Une centaine de pages de pur bonheur. J'ai adoré. Je suis conquise.
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Jacques et son maître, hommage à Denis Diderot ..

J'ai eu la chance de jouer ce texte merveilleux de légèreté et de profondeur, j'étais Jacques, puis j'ai eu la chance de le voir jouer à Paris au Théatre 14, je ne sais plus exactement quand, il y a une vingtaine d'années environ. Milan Kundera réussit parfaitement son exercice de style, proposant un hommage à Denis Diderot et son roman sous la forme d'une pièce de théatre. Cette forme lui permet notamment, grâce aux dialogues croisés, de mettre en évidence les parallèlles des récits de Jacques et de son maître. Il n'est pas si fréquent qu'une pièce de théatre se révèle dès la lecture, sans le secours du jeu des comédiens pour l'éclairer. Jacques et son maître est une lecture jubilatoire et je reviens souvent vers ce beau texte.
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L'Art du roman

Ce livre de Kundera, je l'ai trop adoré. Tout ce qu'il dit dedans, c'est trop bien écrit et sérieux, j'ai beaucoup appris avec cette lecture. Bon bien sûr, faut se concentrer parce que sinon on peut pas tout comprendre mais je veux dire, les images qu'il donne dans son bouquin elles sont trop bien trouvées. En lisant ce bouquin, j'ai beaucoup appris sur ses autres livres, genre la vie est ailleurs ou d'autres encore que j'ai bien kiffés.

Franchement, ce philosophe, c'est vraiment un artiste des lettres et de l'écriture et rien que pour ça je le félicite. Bravo monsieur Kundera, je continuerai toujours à vous lire.



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L'Art du roman

Quand Kundera décide de discourir sur le roman , on se tait et on écoute . Une leçon pareille ne peut que se lire avec la plus grande attention . Chaque mot trouve sa place comme une mécanique parfaite . C'est grandiose , intelligent , instructif et l'on en redemande !!
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L'Art du roman

salmon
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L'Art du roman

Le roman recit devenement fictif racontant l'aventure d'un ou de plusieurs personnage.ainsi,ils'evalue en fonction desservices quil rend a lhomme.ce pendant il semble y avoir une certaine contradiction par rapport aux services qu'un romandoit rendre.si les uns pensent qu'il doit etre un passe temps aussi bien pourlelecteur que pourl'ecrivain.d'autre par contre le considere comme une lecon de morale afin d'eveiller la conscience des generations presentes et future.c'est dans cette optique meme k je me pose la question si le roman n'est pas uniquement une lecon de conduite pour la generation presente
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L'Art du roman

En partant de sa propre expérience d’écrivain, Milan Kundera nous livre dans « L’art du roman » sa conception de l’univers romanesque. En sept parties (chiffre cher à l’auteur), l’auteur dévoile ses analyses par rapport à ses habitudes d’écrivain : retour sur les sources du roman, extraits d’entretiens avec Christian Salmon, retour sur son analyse du roman « Les somnambules » de Broch et réflexions autour de l’univers kafkaïen avec lequel il se découvre des points communs (sur les effets du communisme entre autre)… L’ensemble est très riche et adopte également un ton pédagogique.

En bref, c’est intéressant et agréable à lire alors autant ne pas s’en priver !

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L'Art du roman

Ce recueil d'essais de Milan Kundera est à la portée du lecteur indifférent à la théorie littéraire, mais curieux de voir comment un romancier envisage sa propre pratique, et surtout comment il lit les autres auteurs. Rien n'est plus précieux que les lectures de Kundera, que ses critiques informées, vues de l'intérieur du métier de romancier, à la façon dont Proust écrivait les textes de son "Contre Sainte-Beuve".
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L'Art du roman

Avec l'Art du roman, Milan Kundera entamait en 1986 son exploration d'une question qui l'a préoccupé tout au long de son oeuvre de romancier: Qu'est-ce que le roman? Que nous apporte le roman? En quoi est-il indispensable?

On pourrait craindre que le livre répondant à ces questions s'avère théorique, indigeste et ne s'adresse qu'aux seuls spécialistes. Tel n'est pas le cas! La grande force de Milan Kundera, c'est de parler à ses lecteurs avec une certaine simplicité, une certaine proximité. Il ne prétend pas faire le tour de la question. Il cherche par petites touches à atteindre le coeur du sujet en tant qu'auteur particulier ayant ses goûts et sa vision de la littérature. A partir de sept textes indépendants et apparemment disparates (essai, critique, discours officiel, dictionnaire personnel, entretiens, notes), il aborde différentes facettes du caractère indispensable du roman en tant que genre.

Pour Kundera, " le chemin du roman se dessine comme une histoire parallèle des Temps modernes" (p.20) et de la culture européenne. En illustration, il nous dit avoir été particulièrement sensible à quatre "appels" créateurs(p.26 à 28):

- Appel du jeu: Dans Tristram Shandy de Sterne et Jacques le fataliste de Diderot.

- Appel du rêve: Dans l'oeuvre de Kafka.

- Appel de la pensée: Dans L'Homme sans qualité de Musil et dans Les Somnambules de Broch.

- Appel du temps: Chez Broch, Aragon et Fuentes.

En résumé, pour l'auteur d'origine tchèque, est un roman toute narration qui permet d'appréhender l'existence humaine dans toute sa globalité en apportant un éclairage original, c'est-à-dire inexistant avant lui. le roman est le fruit d'une histoire qui le travaille, qu'il dépasse et dont il révèle, mieux que par tout autre approche, un aspect ou une "réalité enrichie"; ce surcroit de compréhension passe essentiellement par une forme particulière, un "style". C'est l'adéquation du sujet et de la façon de le rendre qui constitue le roman dans son unicité, dans sa valeur et dans sa nécessité. A ces conditions, le roman se hisse à la hauteur des plus grandes oeuvres d'art.
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L'Art du roman

Le roman n’examine pas la réalité mais l’existence. Et l’existence n’est pas ce qui s’est passé, mais l’existence est le champ des possibilités humaines, tout ce que l’homme peut devenir, tout ce dont il est capable. Les romanciers dessinent la carte de l’existence et des possibilités humaines. Il est l’explorateur de l’existence.
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L'Art du roman

Une forme d'histoire du roman en Europe et surtout à l'Est.
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L'Art du roman

Recueil de réflexions et de courts essais, l'art du roman laisse la parole à Milan Kundera sur des sujets divers et passionnants par l'approche qu'en fait l'auteur, qui m'avait déjà subjuguée dans son roman l'insoutenable légèreté de l'être.
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L'Art du roman

Cet ouvrage pourrait tout aussi bien s’intituler, de mon point de vue : « Théorie de la littérature telle qu’elle m’est insupportable ». J’admets ne pas avoir poursuivi au-delà de la page 104, non parce que l’essai est difficile ou épais – on sait depuis longtemps, je l’espère, l’étendue de mon goût pour l’effort –, mais parce que j’y ai rencontré incessamment, aussi bien quant à la forme qu’au fond, des objections rédhibitoires qui me donnaient l’impression d’y perdre mon temps. Quand, dans un essai, tout vous paraît à la fois flou et faux, embrumé de contradictions innombrables et artificiellement gonflé de volonté de gloire, et que vous ne voyez, tandis que vous êtes vous-même une sorte de professionnel pour ce sujet, pas même l’intérêt pratique de se poser les questions auxquelles l’auteur s’efforce très maladroitement de répondre, votre arrêt prend plutôt la forme d’un refus que d’un abandon – où cessation rime alors avec sécession.

Toutes les problématiques de Kundera sur le roman me paraissent pédantes et oiseuses. La conception que l’auteur se fait de ce genre m’évoque les périodes les plus intellectuellement déconstructivistes de l’art contemporain, et toute symptomatique de l’époque où l’on a incité le spectateur à voir ce qui ne figurait pas dans l’œuvre, cependant que cette façon de lui révéler l’invisible était extrêmement flatteuse pour le créateur en ce qu’elle faisait de lui une variété de génie, étant bien admis, je ne sais pourquoi depuis les romantiques, que le génie est toujours celui qu’on ne comprend pas et qui voit et crée justement ce qui n’existe pas. Voici un écrivain alambiqué qui fait de son homme instruit après avoir plu à des foules communes (je soupçonne ses origines tchèques, à la fois « sérieuses » et « exotiques », d’avoir beaucoup contribué à son succès), et qui prétend fournir, à travers ses romans, des méditations sur l’existence. Quelle est donc sa position, ou, pour être plus juste, sa posture ?

Il s’agit tout premièrement d’un être infiniment flatté qu’on s’intéresse à lui, intarissable sur son œuvre, qui aimerait se penser en chef de file de quelque courant littéraire d’envergure, ambitionnant des succès critiques vraiment intellectuels – c’est nettement un homme à qui ne suffit pas l’estime populaire (imaginer un Marc Lévy réclamant des commentaires littéraires et philosophiques sur son « œuvre ») –, aspirant à ce que resurgisse sur lui l’admiration qu’on voue à des novateurs, seulement il ignore encore de quelle école il pourrait être le maître et, à vrai dire – je crois même qu’il le sait –, il lui manque un manifeste pour y être légitime. Alors il retourne au plaisir de disséquer ses propres livres qu’on devine assez pénibles et vains, d’une surface feignant le reflet du ciel ou des profondeurs, pour y rencontrer une théorie qu’il n’a pas eue en les écrivant : il y cherche avec insistance pour la trouver, retourne des formulations élégantes, comme il suffit souvent à un universitaire de s’enfoncer longtemps par thèmes dans n’importe quel roman pour y dénicher toutes sortes d’extrapolations aventureuses qui finissent tôt ou tard par donner l’illusion de quelque innovation critique. Il est avéré pour moi que Kundera, pour qui l’auto-explication est une façon de valorisation, s’invente régulièrement et de toutes pièces des justifications ; cette hypothèse se trouve confirmée par le fait que quand il parle de divers romans pour inférer une théorie générale, il oublie volontiers quantité d’œuvres d’importance, ne retenant que celles que des savants ont déjà abondamment et excessivement commentées : Rabelais, Tolstoï, Dostoïevski, Kafka, etc. On vérifiera que toutes ses références se situent principalement du côté de la pédanterie, de la conceptualisation la plus caractérisée, de l’affichage lexical le plus fat : Husserl, Heidegger, philosophes de l’abscons intangible ; il fourbit sans arrêt les armes de son régiment, des armes rutilant ou plutôt suintant du bavardage insupportablement inapplicable de professorat qu’il admire tant, dont il veut se faire aimer et auquel il semble vouloir tant appartenir.

Kundera, c’est l’homme qui veut s’élever par la théorie et qui, pour cela, aspire à profiter de sa notoriété grand public pour s’installer parmi les sages dont il usurpe les manières et singe les certitudes. Malheureusement, il n’en a pas du tout l’étoffe car toutes ses théories sont fausses et contradictoires : par exemple, pour marquer la progression historique des romans selon une énième classification fumeuse, il veut que Flaubert consiste en une introspection sise dans un quotidien, en une exploration du moi normal – il pense bien sûr à Mme Bovary – et il l’oppose aux grandes aventures antérieures vers l’extériorité à la Cervantès… où l’on voit qu’il n’a pas lu Salammbô ou qu’il l’écarte délibérément. Toutes ses réflexions sont à l’avenant, aventurées, sans concertation avec le Vrai minutieux, à dessein de parler absurdement de tout objet littéraire dans l’espérance et au prétexte d’en dire quelque chose, n’importe quoi, mais le premier. Il livre des notes très éparses et inconsistantes (admettons : pas tout à fait des brouillons) sur un roman assez confidentiel d’un certain Hermann Broch dont il exprime toute une substance compliquée et peu miscible – c’est qu’il faut à des Kundera, dont le désir fiévreux est à la prime découverte savante, puiser son jus souterrainement dans toutes les nappes possibles, mais cette multiplicité manque d’éloquence et trahit son opportuniste, au même titre qu’à forer et sur tous les plateaux inconnus on arrive nécessairement à extraire au moins une gouttelette de pétrole.

Ce pourrait être assez hilarant, toute cette volonté obstinée du classement propret, toute cette élaboration aporétique et qu’un véritable examen confond, hilarant si ça ne révélait pas, presque à chaque page pathétiquement comme une fébrilité d’homme surclassé, quantité de complexes et de contradictions qui font à eux tous une sorte de malaise existentiel de l’auteur : on sent un élève interrogé bien au-delà de son champ de connaissance (a posteriori je le suppose un mauvais écrivain, de ceux qui passent leur temps à essayer de trouver des idées composées et qui vont faire très bien), et qui improvise des réponses qu’il se sent ensuite tenues de soutenir ardemment, en mentant effrontément pour se donner de l’assurance et conforter absurdement le fait qu’il n’aurait pas parlé inconsidérément. Ce phénomène est particulièrement perceptible dans les deux interviews qu’il rapporte où, comme il rencontre en l’occurrence un homme beaucoup plus instruit que lui y compris sur son œuvre (un certain Christian Salmon), il est sans cesse en but à des embarras qu’il contourne et élude comme il peut et plutôt mal. Des exemples ? Dans son premier entretien, il commence par dire, par provocation je pense, que ses romans ne sont pas psychologiques, et puis, ennuyé des contre-exemples que C. S. lui fournit, il finit par dire qu’ils sont plutôt « existentiels » et qu’ils se penchent sur « l’intériorité » : c’est vraiment une façon de chicane et de mauvaise foi. Il ne cesse de réfuter l’usage de la philosophie dans le roman, c’est catégorique chez lui, péremptoire même comme nombre de ses préventions, parce qu’il l’estime déconnectée des personnages, alors l’intervieweur lui fait remarquer que dans son Insoutenable légèreté de l’être, il commence par une réflexion toute personnelle sur Nietzsche : Kundera s’empêtre avant d’expliquer que c’est différent parce que ça a quand même un rapport avec les personnages. Puis il déclare que le temps des descriptions est terminé, et on lui soumet encore des exceptions fortes issues de sa propre littérature où il paraît décrire beaucoup.

Tout ce jeu de faux-semblants mal assumés est encore plus net encore dans la deuxième interview dont il ne suffit que de citer des extraits pour révéler presque comiquement sa posture et son ton à la fois intenables et pitoyables : « C. S. : Dans L’insoutenable légèreté de l’être, le contrepoint est plus discret. — Dans la sixième partie, le caractère polyphonique est très frappant. » (Mince ! il prétend donc tout l’inverse, mais seulement dans une partie !) Ou bien « C.S. : Mais pourquoi un romancier doit-il se priver du droit d’exprimer dans son roman sa philosophie ? — Il y a une différence fondamentale [ici, évidente ampoule de théoricien]. C.S : Dostoïevski dans son Journal d’un écrivain est pourtant tout à fait affirmatif. — Mais ce n’est pas là que réside la grandeur de sa pensée. […] C. S. : Dans vos romans, on trouve aussi des passages où c’est vous, directement vous, qui parlez. — Même si c’est moi qui parle, ma réflexion est liée à un personnage. » […] C. S. : Mais souvent, vos méditations ne sont liées à aucun personnage [là, deux exemples embarrassants]. — C’est vrai. J’aime intervenir de temps en temps directement, comme auteur, comme moi-même. En ce cas-là, tout dépend du ton. » (C’est tout à fait un échange où l’auteur est confondu de mauvaise foi.) Ou encore, peu avant le moment où d’agacement j’ai arrêté ma lecture : « M. K. : le roman est une méditation sur l’existence vue au travers de personnages imaginaires. — Si on adhère à une définition aussi large, on peut appeler roman même le Décaméron ! — Je ne pousserai pas la provocation jusqu’à dire que le Décaméron est un roman. » (On ne saura pas pourquoi.) Dans chacun de ces exemples, on vérifie que Kundera, pourtant en présence d’une sorte de soutien, je veux dire d’un intervieweur particulièrement attentif et bien intentionné, n’est pas à la hauteur de ses théories fermement prononcées, et qu’il les enfreint toutes sans justification : on ressent sans mal, je trouve, la petite mine boudée du garnement pris en flagrant délit de contradiction mais qui, incapable même de s’en apercevoir, non seulement persiste dans ses prescriptions réfutées, mais surtout ira jusqu’à les restituer quand même dans un livre !

Et tout est ainsi inconsistant, on sent chez Kundera une incapacité perpétuelle à exprimer une idée définie et plus que superficiellement ferme, c’est un auteur qui éprouve manifestement un désir de pavane à l’imitation des doctes causeurs qu’il poursuit d’assiduité, et qui renouvelle à l’infini des concepts sans fond, comme cette idée que je condamne et trouve tellement sinistre et compromettante pour lui qu’un roman se construit sur deux niveaux : « Au premier niveau, je compose l’histoire ; au-dessus je développe des thèmes. » : quelle méthode bête et absurde ! Il suffit de se la représenter concrètement, à l’heure où la pensée d’un récit se constitue dans l’esprit de l’auteur : « Tiens, j’ai l’histoire ! Pourquoi n’y mettrais-je pas à présent des thèmes, mais à un niveau supérieur ? » ! Et quand on lui demande d’expliquer ce que c’est qu’il appelle un thème (c’est même une faveur qu’on lui fait, à mon avis, pour interrompre et faire oublier l’abominable idiotie qu’il vient de proférer), il a l’heureuse simplicité de répondre, comme si c’était d’une évidence générale, comme si le mot n’avait pas été évidemment détourné pour faire savant : « Un thème, c’est une interrogation existentielle. » : eh bien ! heureusement qu’on lui a demandé ! j’éviterai à l’avenir d’utiliser le mot ! Mais qu’on revienne particulièrement sur ce que traduit psychologiquement cet aveu des différents « niveaux » dans la composition littéraire s’agissant de l’écrivain : cette façon suppose un esprit particulièrement scindé, presque impossiblement dédoublé, d’une forme illogique en soi, parce qu’il faut entendre une chose toute simple, c’est que le choix d’une intrigue (d’une « histoire ») dépend en tout premier lieu des idées (des « thèmes ») qu’on envisage d’y mettre ! il n’y a donc pas de succession là-dedans (de « niveaux »), ces strates ne se juxtaposent ni ne se superposent ! Un esprit scindé, disais-je, dédoublé, mais entre quoi et quoi ? Là est le plus fascinant, le plus indicateur, le plus révélateur de ce jeu de pure posture auquel se livre Kundera en écrivant : c’est qu’il sait que l’histoire ne suffit pas, il n’a pas la moindre intuition d’intrigues riches, pas vraiment d’envies particulières d’exposer une situation (en quoi je suppose, mais ce serait à vérifier, que ses récits sont pauvres d’originalité et d’émotions), alors, ce que l’auteur envisage l’instant suivant, pour compenser cette insuffisance qu’il se pressent et ce peu d’ambition, d’intuition ou de spontanéité intérieure, c’est rien moins qu’une façon intellectuellement valorisante d’exposer ces scènes aussi piètres, en ajoutant en quantité des concepts qu’il n’avait pas prévus d’emblée au cours de la projection du récit, et dont la recherche laborieuse, en « second niveau », ne sert évidemment ni son plaisir ni l’art – à aucun moment jusqu’à la page 104 Kundera ne parle de beauté, et les extraits cités de ses œuvres sont tous extrêmement plats – mais une sorte de réputation, d’image de soi-même, d’élévation artificielle de sa personne. Représentez-vous, pour l’exemple, une champêtre et banale scène d’amour naissant, et dites-vous alors, avant d’écrire : « Non, ça ne va pas encore, c’est pauvre décidément comme tout ce que j’imagine ! Quelle idée mettre là-dedans pour que ça fasse distingué et intelligent, quelle « interrogation existentielle » ? Tiens, et si j’y incluais à la fois la peur de mourir et le souvenir d’un deuil ? »

Ah ! détestable manœuvre ! quel assemblage ! quel trucage ! La littérature comme prétexte à briller d’esprit à dessein d’acquérir un titre de professeur honoraire ! Horreur ! c’est promis, jamais je ne lirai Kundera : c’est sa faute ! il n’avait qu’à ne pas parler si mal de son travail, à disséquer si atrocement son œuvre ! Le goût du docteur en est définitivement entré dans mes narines, avec toutes ses potions infectes et ses manières affectées de vous les administrer, et je sais que, si j’en consommais, j’aurais l’impression de fournir bien de la dignité et de l’honneur à quelque charlatan plumitif !
Lien : http://henrywar.canalblog.com
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L'Art du roman

Sans doute un de mes essais préférés. Peut-être parce que comme le montre l'excellent Xavier de la Porte, mon grand âge me conduit à préférer l'essai au roman. Un essai sur le roman comble donc les deux âges de ma vie.



Cet essai est tellement riche en pensées fertiles que je n'ai qu'une chose à en dire : lisez-le. Et évitez de croiser mon chemin s'il venait à vous déplaire.



A l'inverse, s'il vous plait, ruez-vous sur "Les Testaments trahis".



https://www.nouvelobs.com/bibliobs/20220710.OBS60773/pourquoi-lit-on-moins-de-romans-quand-on-vieillit.html
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