Un petit village sarde, pauvre et perdu, voit un jour arriver un groupe de migrants, un peu déçus de ne pas être "vraiment en Europe" ; ils sont accompagnés d'humanitaires un peu farfelus.
Tous, habitants, migrants, accompagnants vont devoir vivre dans le même village et s'habituer les uns aux autres ; et c'est la façon qu'a l'écrivaine sarde Milena Agus de raconter cette habituation qui est à la fois triste et comique !
Triste parce que la situation qui se révèle au fil des pages est terrible : tous ces déplacés ont fui un régime totalitaire, un dictateur, le manque de liberté, le risque d'être emprisonné ou tué, un pays pauvre et sans travail, et ont eu affaire à des passeurs...
Drôle, parce que les mots employés par l'autrice montrent qu'il y a toujours un côté cocasse même dans une situation dramatique.
Les humanitaires sont plutôt étonnants dans ce texte : une "tantine" qui fait avec un neveu, au téléphone, ses devoirs de grec ancien, un ingénieur machiste, un professeur de math dont toutes les élèves sont amoureuses, un vendeur de sex-shop à l'affût d'aventures sexuelles, et une évangélique donneuse de leçons.
Les changements ne se font pas attendre bien longtemps : plusieurs villageoises curieuses visitent les "envahisseurs" installés dans une vieille maison surnommée La Ruine, et sont reçues dans la plus belle maison du village où elles n'avaient jamais pénétré ; bientôt, les villageois qui n'avaient plus beaucoup d'entrain avant l'arrivée des étrangers se remirent à faire des projets...
L'histoire est racontée par une narratrice qui fait partie du choeur des villageoises ; il y a aussi leurs maris et puis les "envahisseurs" qui vont être nommés au fur et à mesure qu'ils cesseront d'être des étrangers pour devenir des personnes connues, même "l'enfant le plus antipathique du monde"...
En plus de nous raconter l'histoire d'un village moche et délaissé "assailli" par des migrants, cet écrit est un prétexte pour parler de grandes choses sérieuses tout en utilisant un ton plutôt naïf et fantaisiste : Dieu, Allah, les relations hommes/femmes, la famille, la politique, les réfugiés, les amitiés et l'exil et ses espoirs bien sûr.
Premières phrases : " Les jours d'avant, debout devant nos armoires, nous avions interverti nos garde-robes, celles d'été au-dessus, celles d'hiver en dessous. Cette tâche accomplie, nous éprouvâmes la satisfaction de voir chaque chose à sa place, alors que bientôt, plus rien ne le serait. Les envahisseurs débarquèrent et nous prirent par surprise.
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