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Critiques de Nathalie Démoulin (34)
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Cartographie d'un feu

La forêt s'embrase en plein hiver



Autour d'un feu de forêt qui prend en plein hiver dans la forêt jurassienne et provoque de gros dégâts, Nathalie Démoulin a construit un roman à l'atmosphère lourde. Un drame qui va déchirer une famille et réveiller bien des fantômes.



«Les arbres meurent debout. Ils ne gardent que leurs branches principales, noires et fendues, ouvertes comme de grosses bouches ébréchées. Par endroits, on voit grouiller les uniformes, des types de la taille d’un Playmobil manœuvrent des tuyaux géants. Une flamme immense, dix mètres de largeur environ, lèche la départementale...» La forêt jurassienne brûle autour de la Cuisance, bien que ce genre de catastrophe n'est pas censée se produire en février. Si le maire parie sur des dégâts contenus, les faits ne vont pas tarder à lui donner tort. Il faut évacuer les maisons et les bâtiments qui sont proches du périmètre de l'incendie. Pour Jason, c'est déjà la double-peine. Sa maison et son usine sont menacées. Carole, son épouse, a pris les devants et s'est réfugiée chez son beau-père, au grand dam de son mari. Il aurait préféré trouver une chambre d'hôtel et ne pas se retrouver aux côtés de son père qui ne s'est jamais vraiment remis de la mort de son épouse. Il ne lui reste plus qu'à espérer que le sinistre sera vite circonscrit.

Un espoir que partagent nombre d'habitants et notamment ses employés. Car il est le premier employeur de la ville. Son entreprise, spécialisée dans les assemblages mécanosoudés et les superalliages, fournit l'aéronautique, le nucléaire et le secteur médical. Jason explique ainsi son activité et son succès: «Nous soudons des formes complexes, des matériaux qui seront bientôt plus précieux que l’or. Je parle de métaux de transition comme le cobalt, le titane ou le tungstène. Je parle de richesses prises aux ténèbres de la terre, de celles qui dorment dans nos montagnes. C’est moi qui ai développé la fabrication d'outils chirurgicaux. Et c’est ce secteur qui nous permet aujourd’hui une croissance exceptionnelle à deux chiffres.»

Dans cette atmosphère particulièrement tendue, chacun essaie de trouver de quoi apprivoiser sa peur. Carole se plonge dans son travail, une étude sur le peintre britannique Peter Doig. Mais à ses feuillets raturés et froissés, on voit qu’elle ne peut guère se concentrer. Il y aurait pourtant beaucoup à dire sur l’ambiance et les couleurs utilisées par cet artiste pour des toiles qui résonnent avec le drame qui se joue, avec cet univers oppressant.

La peur se fait de plus en plus présente et offre un terreau favorable à toutes les histoires macabres, aux accidents de la vie, aux disparitions mystérieuses. Chacun ressasse les pans noirs de son histoire, les rêves de gloire avortés, les amours mortes, les accidents et les flirts avec la mort «j'étais passé du côté des anges, entre les vivants et les autres, et je ne savais plus bien, dans ce coma de draps blancs et d’intraveineuses, où commençait le rêve».

Et c’est bien là le secret de l’écriture de Nathalie Démoulin, cette faculté à passer du rêve à la réalité, de la mort à la vie. Alors que les frontières s’estompent, que les personnages se perdent dans le paysage, que leur âme participe de cet incendie qui donne l’impression de ne jamais devoir s’arrêter. Alors, on se dit que les portes de l’enfer viennent d’être franchies.

NB. Tout d'abord, un grand merci pour m'avoir lu jusqu’ici! Sur mon blog vous pourrez, outre cette chronique, découvrir les premières pages du livre. Vous découvrirez aussi mon «Grand Guide de la rentrée littéraire 2024». Enfin, en vous y abonnant, vous serez informé de la parution de toutes mes chroniques.


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La grande bleue

«Elle s’appelle Marie... Dans sa valise, le vendredi 24 février 1967; il y a un 45 tours des Stones prêté par une copine, glissé dans un cahier de sténo.Rentrée à la maison, la première chose qu’elle fait est de s’enfermer dans sa chambre pour écouter le disque : Satisfaction. Grow up wrong. Suzie Q.» p 13



Commençé avec Les Rolling Stones symbole d’une révolte sensuelle et violente dont la provocation ouvre une brèche vers une envie d’ailleurs, un désir fou de vivre autrement et intensément, pas comme les parents refermés sur leur silence, «La grande bleue» s’achèvera au cours de l’été 1978 par l’écoute de «La fille du fumeur de joint» premier disque «d’un mec de Dole», Hubert Félix Thiéfaine lui-aussi sensuel, révolté, à l’humour parfois féroce, mais franc-comtois comme Marie. Il semble lui dire : finalement même sans aller loin on peut avoir quand même une vie, une vie à soi et la défendre et en être fier.

Il vient clore ces dix années au cours desquelles Marie se sera sauvée plusieurs fois au double sens du terme fuir et réussir à s’extraire même maladroitement des pièges de la vie, ceux qu’elle nous tend et ceux dans lesquels on se précipite soi-même sans le vouloir, parce que c’est comme ça..... Avec Marie et ses amies, ses rencontres, revivent les années 1970 jalonnées par les luttes ouvrières chez Peugeot, Lip ou Myrys.

J’en retiens la force de vie qui permet à Marie de s’en sortir dont elle n’a pas vraiment conscience. Elle naît de son désir mais serait insuffisante sans celle de tous les liens amicaux, de la solidarité, de son attachement pour ses enfants, pour son frère Ivan revenu brisé de ses deux années en Algérie ; demeure aussi, préservé, son lien jamais rompu avec la nature bien présente au cours du récit. C’est tout cela qui l’empêche de se laisser enfouir dans le sommeil et sombrer dans le désespoir quand tout devient trop dur et qu’elle se sent prisonnière de son foyer et du travail à la chaîne.



«On n’a jamais été seule en fin de compte. On a toujours été soudée aux autres, avançant avec elles, malgré tout ce qu’on était d’impossible, une petite plouc qui rêvait d’une vie à elle. Et c’est comme ça qu’on s’est dépassée, depuis le début. Un jour, on racontera, avec une fierté étonnée. On dira c’est ma vie.» (Dernière phrase)



Beaucoup de critiques mettent l’accent sur l’aspect historique de ce livre. S’il est bien inscrit dans les années 70, chacun des êtres qui le traversent a sa propre lumière et les relations des uns aux autres infusent force et beauté à ce roman où la vie explose, dont les qualités d’écriture font qu’on se dit «Vivement le prochain !!»
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La grande bleue

Une bonne surprise de la rentrée littéraire, un livre plein d'émotions sur les illusions perdues d'une jeune fille. Marie, jeune lycéenne qui s'était promise une vie différente de ses parents (nous sommes dans les années 60 en Franche Comté) va épouser l'homme qui la met enceinte et par la même renoncer à ses rêves. Commence alors pour elle une vie d'ouvrière, banale et sans éclat. Malgré tout Marie prendra son destin en mains.
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La grande bleue

Cette rentrée littéraire regorge de bonnes surprises, tout de même, non ? Et, fait assez inhabituel pour être noté, voilà que plusieurs de mes coups de cœur sont des romans français !

Dans celui-ci, la décennie 1968-1978 est vue du côté de la Franche-Comté, par une toute jeune fille. De ses dix-huit ans où elle laisse tomber ses études, pour se marier, enceinte d'un garçon rencontré lors d'une sortie du samedi soir, jusqu'à ses vingt-huit ans... Le mariage, l'installation dans la maison des beaux-parents, les bébés dont il faut s'occuper, et puis l'usine, le HLM à Vesoul, l'envie de passer des vacances à la mer, de voir enfin la grande bleue... C'est surtout de la condition féminine qu'il s'agit, de la "libération" de la femme du côté de la campagne française. Au-delà d'une fresque frappante des années 70, on entre de plein pied dans le monde ouvrier de cette décennie : Peugeot, Lip, Myrys, comme autant de balises dans un récit très poétique.

C'est le coup de maître de Nathalie Démoulin, d'avoir trouvé une manière aussi poétique de rendre compte d'un destin somme toute morne et balisé d'avance, d'avoir su toucher la lectrice que je suis, avec une histoire de gens simples dont les rêves, les aspirations et les chagrins ne sont pas moins grands que ceux de leur chefs ou de leurs patrons. J'ai été un peu déroutée au début par la forme, avant d'être complètement emportée. Des phrases courtes, très sensuelles, alternant le « elle » avec un « on » plus générique, dessinent Marie, sa famille, ses amis et collègues, avec une netteté extraordinaire. J'espère, que dis-je, je suis sûre que ce texte ne passera pas inaperçu parmi les nouveautés si nombreuses, car il mérite un très bel accueil !
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La grande bleue

En 1967, Marie a 17 ans et des rêves plein la tête. Sa vie sera extraordinaire, sans comparaison avec celle de ses parents. Mais elle épouse Michel à 18 ans, a deux enfants presque coup sur coup, comme si sa vie se déroulait à son insu. Il reste un rêve de mer et de soleil, incarné par des starlettes qui se dorent au soleil. Sans aucun doute, la vie serait plus belle au bord de la Méditerranée. Mais le quotidien de Marie, c’est Vesoul, parfois Besançon, et l’usine Peugeot. La chaîne. La chaîne du Jura ? Non, la chaîne de montage, la chaîne de conditionnement. La cadence et le rythme des battements de cœur calqué sur l’horloge du grand atelier. De temps en temps, il y a des rumeurs de grèves menées ailleurs qui font sursauter la monotonie. Tous les jours, tous les soirs, les ouvriers syndiqués appellent au rassemblement, à la lutte, mais c’est déjà tellement difficile de tenir toute la journée et de s’occuper ensuite de la maison. « Marie Brulhard qu’on appellera bientôt la Bleue, comprendre l’éternelle nouvelle, l’éternelle paumée. » (p. 89)



La vie n’est pas tout à fait pauvre, mais elle est obligatoirement laborieuse. Alors, les vacances, ces échappées de dix jours au bord de la mer, ce sont des instants trop précieux que l’on range tout de suite sous du papier de soie, comme cette robe bleue qu’on ne remettra plus, mais qui chante si fort un souvenir interdit. On n’est pas tout à fait malheureux non plus, mais on rêve d’autre chose. « Tout ce qui vit s’accompagne d’une douleur sourde dont on ne sait pas la nature. On est avide de la vie des autres. » (p. 89) Ce « on » qui rythme les pages, c’est la déshumanisation lente, la perte de soi au milieu des autres ouvriers et d’une décennie qui va soudainement trop vite. Marie voudrait se libérer, mais par où commencer ? « Il faudrait commencer par dire qu’avant tout on veut en finir avec soi-même, que divorcer c’est se donner une chance d’être la femme que l’on voit naître autour de soi, en ces années 1970. […] On a vingt-cinq ans, huit ans de mariage, noces de coquelicot, trois ans d’usine, noces de froment, et ça devrait durer comme ça jusqu’à la fin de la vie ? » (p. 148)



Cette lecture n’est ni une réussite, ni un échec. D’abord entraînée par la narration d’un souffle et les longues phrases, j’ai fini par m’empêtrer dans le ton monocorde et à perdre toute empathie pour Marie. J’ai compris le sens du « on », mais comme dans le roman de Julie Otsuka, Certaines n’avaient pas vu la mer, où le « nous » préside toute la narration, il m’a manqué une individualité plus marquée pour vraiment m’attacher au personnage. Chaque chapitre est une année, de 1967 jusqu’au tout début des années 1980 et le récit présente en filigrane la crise qui a frappé le monde industriel français. Il plane sur ce roman une nostalgie dont je n’ai pas saisi toute la portée, n’ayant pas connu les années 1970. Bref, une lecture douce-amère, pas déplaisante, mais un brin décevante.

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La grande bleue

"Une petite plouc qui rêvait d'une vie à elle" et par son obstination y parviendra, allant même vivre près de La grande bleue, mer et surnom réunis, voilà le thème du roman de Nathalie Démoulin (La grande bleue), un roman fort sur fond sociologique dur des années 60-70, le récit de dix ans de vie (entre Besançon et Vesoul) qui sonne tellement vrai que le lecteur capte tout autant le grondement des vagues ouvrières revendicatrices que les clapotis sereins (ou trop calmes) de rares et précieuses vacances au bord de l'eau!

Tout commence en 1967, où la jeune Marie et sa copine Delphine ("deux bouseuses un peu efflanquées") fuguent en mobylette (à Besançon!) rêvant de liberté, de musique anglaise aux accents sensuels et.... "d'un autre monde".

Elles reviendront vite au bercail et si Delphine, ouvrière d'usine, réapparait parfois comme une bouffée d'air salvatrice,c'est surtout aux pas de Marie que s'attache Nathalie Démoulin. Marie "yeux clairs et charbonneux", très vite enceinte,qui épouse un gentil Michel bucheron (bientôt ouvrier) et quittera vite la campagne pour un petit logement bruyant. Marie qui "rêve d'une existence à elle" et fantasme sur la relation Romy Schneider Alain Delon dans La piscine.Marie qui travaille en usine et veut devenir "la femme réinventée" promise à toutes par un cadre de la CGT.Marie qui prend la pillule.Marie qui apprend à conduire.Marie qui aime en cachette.Marie qui n'aime plus.Marie qui materne,déprime,perd,veut divorcer,culpabilise,déménage,travaille et travaille encore et toujours...mais existe,enfin!

Ce roman est authentique même si Marie est inventée, Nathalie Démoulin sait nous la rendre vivante.C'est une femme avec ses joies,ses doutes et ses peines qui a du mal à émerger de son milieu social modeste et perturbé (une mère qui boit,un frère fou,une belle soeur stérile douce dingue...)

La grande bleue c'est aussi un pan d'histoire de la France: le frère de Marie qui a fait l'Algérie et s'est fait "des bougnouls" (et en est ressorti complètement félé), Nordine le bel Arabe qui a quitté le bled pour travailler en France et attire Marie,le passage du monde de la terre au milieu ouvrier, les usines (Lip, Peugeot,Myris..),l'exploitation en usine,les progrés,l'évolution (la mob passe à la deuch,la 4 L, la Dauphine,la DS..) l'émancipation de la femme,le nucléaire,les hippies...

Richement documenté, bourré d'émotions,écrit parfois dans un langage familier (et des mots chocs) et toutefois alerte où le "on" rend cette femme presqu'anonyme parmi les femmes de sa condition, je recommande fortement La grande bleue (roman lu dans le cadre du comité de lecture de la Médiathèque de Bandol).

Nathalie Démoulin est également l'auteur de Après la forêt et de Ton nom argentin.
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Bâtisseurs de l'oubli

Bâtisseurs de l'oubli est une sorte de fresque en creux, l'histoire d'un entrepreneur venu d'Algérie et qui s'est fait sa place au soleil en bâtissant dans le Languedoc à grand renfort de béton. Mais la narration n'est pas vraiment ce qui intéresse Nathalie Démoulin qui enchaîne les monologues en alternant les voix, d'où d'ailleurs la principale difficulté du roman qui se situe plus dans le domaine du descriptif que du récit linéaire, le lecteur devant se contenter de bribes d'histoire, à charge pour lui de reconstituer le puzzle. De Sète à la Grande-Motte, ce livre, très méditerranéen, plonge aussi dans le passé de cette région, marqué notamment par l'Empire romain et s'attarde sur le personnage de la belle-fille du héros, femme endurcie et désabusée par ses amours et la fin de son groupe de musique. Le parallèle est là entre le grignotage des illusions de l'une et la mer qui attaque les constructions du littoral désormais menacées. Comme si tout, nos vies et la trace que l'on essaie de laisser, n'étaient bâties que sur du sable. Le style de Nathalie Démoulin est souvent étouffant, avec de belles phrases un brin emphatiques où des mots savants apparaissent soudain. La romancière a certes le mérite de persévérer dans un mode de récit exigeant mais on a le droit de le trouver parfois redondant et sans progression suffisante pour ne pas s'y ennuyer quelque peu.




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La grande bleue

L'Histoire, la grande, vient s'immiscer dans ces vies quotidiennes marquées par les rotations à l'usine et le bruit des presses sur la tôle.



Pour nous raconter cette histoire, les choix que Marie fera au fur et à mesure des années qui s'égrennent sur le papier, Nathalie Démoulin utilise une écriture vive, rythmée, qui m'a par moment fait pensé à celle de Valentine Goby dans L'échappée, une écriture maîtrisée qui nous fait sentir l'angoisse de Marie, ses inquiétudes, ou au contraire ses soulagements. Ses phrases courtes, cadencée, rappellent la vie de l'ouvrier rythmée par le nombre de boulons à visser à la minute, ou les mots économisés de ces travailleurs de la terre et du bois qui peuplent la région... Nathalie Démoulin n'hésite pas non plus à utiliser de manière très régulière le pronom "on", donnant une sorte d'universalité à son texte. En dépersonnalisant le quotidien de Marie et de Michel, elle permet presque au lecteur de s'y glisser lui aussi...
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Ton nom argentin

Excellence pour cette chanson, ce clip qui circule sur internet.

Voilà au moins un message intelligent au milieu de ces humains pitoyables dans cette France d'aujourd'hui qui n'arrêtent pas de dire des mauvaises choses.



Un couple de personnes âgées vivent leurs derniers instants ensemble ..



>>>>

Et si soudain le temps nous est compté

Rappelle-moi tous les mots qu'on se disait

Que le ciel m'emporte à tout jamais

Quand j'oublierai ton nom



Je me déleste des futilités

Qu'en restera-t-il c'est dur à dire

Des images pour ne pas oublier

Tout ce qui souvent m'a fait souffrir



>>>



Le comédien du clip ressemble à s'y méprendre à Kad Mérad qui serait grimé : Arthur Morel. A un moment on le voit fixe en gros plan, le regard vitreux, il est seul dans son malheur. Le regard inquisiteur de la caméra arrive à transpercer sa détresse : image culte.



Vitaa et Renaud Rebillaud signent la chanson du clip : Ton nom



Amel Bent qui chante la chanson est sublime.



Les commentaires du clip sont extrêmement touchants. Ils renvoient bien souvent à leur histoire personnelle. Ce qui en ressort est que les gens ne sont pas heureux dans cette France d'aujourd'hui et que cette séquence leur transperce le coeur. "Les mouvements du coeur forment l'essentiel d'une vie humaine", dit Dominique Fernandez
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La grande bleue

Onze ans de la vie d'une femme (1967-1978) : Marie Zedet, fille de paysans jurassiens, mariée à dix-sept ans, devenue ouvrière chez Peugeot à Vesoul, à la grande époque du boom de l'automobile. La vie se passe entre chaîne et enfants, avec quelques échappées vers la mer, cette mer toute bleue entrevue en ouverture d'un film, "La piscine", avec le bel Alain et la belle Romy. Cette Méditerranée, qu'elle associe à la beauté de la vie, va lui donner un jour l'envie de prendre le large, de larguer les amarres, vers la grande bleue de ses rêves. Le travail en usine va la reprendre, ailleurs, au bord de la mer cette fois : il faut bien vivre, et Marie est une très bonne ouvrière, rapide et sûre, mais qui ne s'en laisse pas conter. Elle va être des grandes grèves des années 70, celles qui ont inspiré les auteurs-chanteurs-interprètes de ces années-là. Nathalie Démoulin sait raconter le labeur quotidien, les espoirs, les déceptions de cette femme qui veut mordre dans la vie sans jamais renoncer à ses principes. Un beau portrait de femme, écrit dans une langue rare, peut-être un peu trop affectée à mon goût, mais qui ravira le lecteur amoureux des belles lettres…
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Bâtisseurs de l'oubli

L'histoire folle d'une aventure urbaine hors du commun. Sur une terre presque déserte, un visionnaire fou fait naître un projet hors du commun...

Au détour de portraits sans concession, et avec une écriture dense et exigeante et beaucoup de talent Nathalie Démoulin nous donne à lire une le détail d'une ambitieuse entreprise qui n'est pas exempte d'une grande poésie.
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La grande bleue

1967, Marie et Delphine ont 17 ans ; Lycéennes, elles rêvent de s'échapper de la campagne de Franche Comté pour vivre une autre vie que celle de leurs parents attachés à la terre. Marie la rêveuse, Délphine la battante sont deux amies unies par le même espoir de "vivre une vie à soi".

Pourtant, tout va très vite à l'aube des grandes manifestations de 1968. Toutes les deux quittent le lycée. Marie amoureuse de Michel ouvrier chez Peugeot qu'elle épouse et avec qui elle a deux enfants ; Delphine pour se faire embaucher à l'usine.

En 1970, à 20 ans, le constat est amer "On voudrait être vierge, à nouveau, sans le poids de tout ce que l'on vient de vivre, en trois ans, qui nous a non seulement changée, mais perdue".

Delphine, trahie par l'organisation despotique et les méthodes de travail au rendement.

Marie, perdue dans sa tête et dans son corps ne se reconnaît pas dans sa vie de couple "étrangère à elle même", "D'où vient qu'elle est toujours envahie, que la poussière s'accumule, que les enfants ont faim ?". Marie profondément affectée par les troubles mentaux de son frère Ivan détruit par la guerre d'Algérie.

Pour échapper à ces chapes qui l'étouffent, Marie la fugitive part voir la mer, "la grande bleue", à peine entrevue dans le film "la piscine", l'image encore floue de la liberté qui devient obsédante.

A force de volonté et de courage et malgré les obstacles, Marie veut disposer de son corps en régulant sa maternité et rentre à l'usine Peugeot où elle est "la bleue" comptant les écrous à répétition jusqu'à 20 mais libre dans sa tête.

1978, Marie est divorcée et unie avec les autres notamment avec Delphine dans le combat militant des revendications ouvrières "On a toujours été soudée aux autres, avançant avec elles, malgré tout ce qu'on était d'impossible, une petite plouc qui rêvait d'une vie à elle".



L'espace historique où se situe le roman fait résonner douloureusement les problèmes socio-économiques de notre société actuelle.

Marie est très vraie, profondément humaine et contemporaine dans la recherche de sa liberté et la volonté farouche de vivre SA vie. L'utilisation du "on" à certains endroits du texte pour signifier les pensées intimes de Marie renforce le lien du lecteur avec ce très beau personnage féminin.



Je remercie Liblfy et les éditions Du Rouergue pour ce beau moment de lecture.
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La grande bleue

Très documenté, plein d’émotions, une femme parmi tant d‘autres et pourtant un exemple de lutte !
Lien : https://www.livre-mois.fr/li..
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La grande bleue

L'histoire retrace le parcours de vie d'une femme parcourant les années 70: le départ de la ferme familiale dans les Vosges, le mariage et le travail d'ouvrière chez Peugeot près de Besançon, avant de finir dans l'Aude à l'usine Myrys, mais cette fois en femme libérée. La normalité, les espérances, les déceptions d'une femme qui cherche à s'émanciper mais sans pour autant être une révolutionnaire.
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Après la forêt

ATTENTION LE TEXTE QUI SUIT RACONTE TOUTE L'HISTOIRE

Irène est une de ces provinciales, originaire des forêts vosgiennes, qui est montée à Paris pour fuir une vie familiale pesante. Elle vit avec Soho, une étudiante d’origine chinoise avec qui elle goute aux plaisirs homosexuels. Employée chez un fleuriste elle est séduite par un homme riche et marié. Elle devient dépendante sexuellement de cet homme. Petit à petit on en apprend un peu plus sur ce qui a poussé Irène à partir : sa sœur aînée aussi est partie l’année précédente, lasse des coups reçus de son père et de son amant. Elle n’est jamais revenue, elle a voyagé jusqu’en Bretagne et s’est jetée dans la mer. Irène s’enfonce dans sa relation avec l’homme, elle quitte Soho, le souvenir de sa sœur l’obsède : c’est elle qui dénonçait ses sorties nocturnes au père, et prenait plaisir à la voir battue. Quand elle est à son tour quittée par l’homme elle finit elle aussi par se jeter à l’eau. Ce roman, malgré la violence des sujets abordés, conserve une atmosphère très calme, l’écriture est fragmentaire, on s’enfonce dans un doux renoncement, jamais une note d’espoir, la normalité de la vie en somme. Chose originale, le personnage d’Irène bégaye. En tant que narratrice son élocution est facile et imagée, dès qu’on entre dans les dialogues elle butte sur les mots, fait des phrases très courtes. Dans la narration c’est un personnage profond, dans les dialogues c’est une handicapée.
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La grande bleue

Un rétrécissement de soi qui effraie



Un chapitre par année, entre 1967 et 1978, pour une vie, celle de Marie.



De l’enfermement « dans ce temps qu’elle appelle amour » à la découverte de « la grande bleue », le divorce pour « se donner une chance d’être la femme que l’on voit naître autour de soi, en ces années 1970 », etc…



Quelques années subjectivement choisies. 1967, « amour », maternité et basculement. 1968, le travail à la chaîne, « leurs vies volées par l’usine » et ses moments dérobés « Le bonheur est un état chaotique, fait de moments volés à cette interminable perte de soi qu’est la chaîne ». 1969 et « ce visage de convalescente qui a succédé à l’éclat de ses dix-sept ans ». 1973 et Lip. 1975 et « L’overdose de se tenir à carreau, l’overdose de rester à sa place, d’être bien gentille, l’overdose ».



Les enfants, l’accaparement mais aussi l’amitié, Delphine. Le frère, Ivan, revenu de nulle part, de cette guerre, qui ne voulait pas dire son nom, de cette guerre contre l’indépendance des algérien-ne-s, le traumatisme, la folie, puis la haine de l’autre.



Une vie, « Marie a l’impression d’être entrée ici depuis une journée entière, à moins que sa vie ne soit que ça, du temps perdu », autre que celle rêvée, la vie d’une femme, d’une ouvrière, d’une salariée, « On dira c’est ma vie ».



Le découpage et les événements sont judicieusement choisis. Un tableau intime, une image littéraire du basculement de l’espérance utopique au quotidien réel et irréel.



Pourtant, une certaine insatisfaction. L’écriture, la densité du texte reste, le plus souvent, en deçà du propos. En particulier, l’usage omniprésent du « on », justifié dans la dernière phrase citée, donne, crée ailleurs, une grande indécision pour le regard de la lectrice ou du lecteur.
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La grande bleue

Franc-comtoise Nathalie Démoulin choisi de nous " raconter " sa région et son histoire à travers celle de Marie et Michel.

Sur une décennie, nous suivrons Marie sortant à peine de l’adolescence pour entrer de plein fouet dans la vie de femme, de mère et d’ouvrière. De 1967 avant que la révolte gronde, à 1978, à l’heure des premiers bouleversements industriels, Nathalie fait revivre cette population ouvrière dure à la tâche dont la vie est rythmée par les cadences à l’usine, et les espoirs de jours meilleurs.

C’est toute cette période si particulière que dissèque Nathalie Démoulin avec précision, et sous une plume riche, et un style dépouillé. Si Ivan, le frère revenu détruit d’Algérie traverse mal cette période ; si les sœurs semblent se couler dans le moule, Marie mène en sourdine son combat pour vivre sa vie, et à s’émanciper .

La grande bleue est un très beau portrait de femme, sans ostentation, et si vrai qu’on y plonge sans retenue.


Lien : http://leblogdemimipinson.bl..
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La grande bleue

On peut avoir du mal à rentrer dans ce livre difficile. Difficile car la conjoncture économique est salement morose. La crise partout. Alors se plonger dans dix ans de travail à la chaîne... Le roman de Nathalie Démoulin n'est pas attachant. On voudrait qu'elle se rebelle son héroïne puisque le livre nous fait voir la vie par ses yeux. On voudrait qu'elle se batte plus tôt, qu'elle fasse tout autrement. Mais c'est qu'"on" a 26 ans en 2013, et qu'elle en a 17 ans en 1967 comme pourrait dire l'auteure.



En attendant, "on" s'accroche et "on" reprend le récit des mésaventures de Marie, de tout ce qui ne lui arrive pas et de ce qui va peut-être lui arriver. Les siennes de mésaventures et ceux de sa famille, de son frère, Yvan, qui revient moitié dingue d'Algérie, de ses copines d'enfance et d'atelier. Le procédé narratif du "on" persistant, permanent, m'a parfois agacée.



Mais un livre qui ne fait pas que parler de soi, mais des autres, mais de tant d'autres, c'est rare. Le "on" s'explique ! Qui parle du collectif, de lutter ensemble, de vivre ensemble. De la grande bleue : d'espoir un peu. Il mérite d'en parler, il mérite d'être lu. Attachant, finalement.
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Cartographie d'un feu

Dans son cinquième roman, Nathalie Démoulin interroge l’héritage familial avec originalité, entraînant son lecteur dans les flammes.
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Bâtisseurs de l'oubli

Arraché à sa terre natale, le Mama va se lancer dans la construction d’une nouvelle ville, architecte d’une nouvelle vie, gagnant sur la mer, gagnant sur son milieu social. Une revanche avant que le temps ne vienne balayer cette vie, comme le vent souffle le sable et rend l’espace à de nouveaux bâtisseurs. Un roman solaire.
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