Citations de Philippe Grimbert (344)
"Un "m" pour un "n", un "t" pour un "g", deux infimes modifications. Mais "aime" avait recouvert "haine", dépossédé du "j'ai" j'obéissais désormais à l'impératif du "tais". JE TROUVE CETTE PHRASE M-A-G-N-I-F-I-Q-U-E !!!
L'oeuvre de destruction entreprise par les bourreaux quelques années avant ma naissance se poursuivait ainsi, souterraine, déversant ses tombereaux de secrets, de silences, cultivant la honte, mutilant les patronymes, générant le mensonge. Défait, le persécuteur triomphait encore.
Pour autant je ne succombais plus sous le poids de ce silence, je le portais et il étoffait mes épaules.
Mon père m'a aimé aussi, je veux le croire, surmontant sa déception, trouvant dans les soins, l'inquiétude, la protection, de quoi nourrir ses sentiments. Mais son premier regard a laissé sur moi sa trace et régulièrement j'en ai retrouvé l'éclair d'amertume.
Une impalpable barrière laissait à bonne distance de moi oncles, tantes, grands-parents, interdisant les questions, repoussant toute confidence. Une société secrète, liée par un deuil impossible
L'essentiel n'est pas que je pense à toi - chacun peut bien penser à qui il veut en faisant l'amour - mais que tu le saches... et que je sache que tu le sais !
Je ne pouvais pas savoir qu'on ne gagne jamais contre un mort
Hannah la timide, la mère parfaite, s'est transformée en héroïne tragique, la fragile jeune femme est soudain devenue une Médée, sacrifiant son enfant et sa propre vie sur l'autel de son amour blessé.
Il ne peut se défaire de l'image du pantin sinistre dont les vociférations lui ont rendu odieuse une langue qui jusque-là l'avait bercé de ses lieder, des ses opéras, l'avait nourri de sa littérature et de sa philosophie.
Dix-sept mille ans avant Jésus-Christ, dans l'obscurité des cavernes où ils avaient trouvé refuge, nos ancêtres éprouvèrent l'irrépressible besoin de donner forme à leur ressenti [...].
Loin d'être une occupation marginale, distraction de retour de chasse, la peinture s'imposait à nos ancêtres comme une nécessité absolue. Formes et couleurs venaient ainsi satisfaire un besoin fondamental de l'humanité, tout aussi pressant que le sexe et la faim : la représentation.
La faune est abondamment figurée dans les premières oeuvres picturales de l'humanité où pullulent bisons, mammouths et bouquetins d'un réalisme prodigieux. Les hommes, en revanche, s'y font rares et se réduisent à des esquisses, si épurées qu'on croirait apercevoir dans les quelques traits qui les représentent un début d'alphabet. Un détail cependant n'y est pas oublié : leur sexe, qui se distingue par cette particularité d'être représenté en érection.
(p. 17)
Son journal restait le miroir d’une relation qu’il voulait fusionnelle, sans concessions. Une phrase en témoignait : c’est cela l’amitié vraie : être l’autre absolument. Il en a toujours été ainsi entre nous deux, et il en sera ainsi jusqu’à la mort, au-delà même. P 62
'La petite mort', dit-on pour évoquer l'orgasme : pense-t-on avec ce terme au bref anéantissement de la conscience que provoque l'acmé du plaisir ou bien fait-on plutôt référence à ce moment où le 'germen' se détache du 'soma', la pérennité du premier s'opposant à la mortalité du second ? C'est bien, en effet, dans l'instant exquis venant couronner l'acte sexuel que se rappelle à nous l'inévitable échéance : la vie s'échappe de notre corps périssable (soma) pour se poursuivre ailleurs (germen) et perpétuer notre espèce.
(p. 95)
Des années après que mon frère avait déserté ma chambre, après avoir mis en terre tous ceux qui m' étaient chers, j' offrais enfin à Simon la sépulture à laquelle il n' avait jamais eu droit. Il allait y dormir, en compagnie des enfants qui avait connu son destin, sur cette page portant sa photo, ses dates si rapprochées et son nom, dont l' orthographe différait si peu du mien. Ce livre serait sa tombe.
J'avais beau souffrir de ma maigreur, de ma pâleur maladive, je voulais me croire la fierté de mon père.
Ne te fais pas si grand, tu n’es pas si petit.
Il m'a dit qu' Echo était mort par sa faute. Je me suis entendu lui dire que c'était vrai, qu'il était responsable de cela, mais de cela seulement.
Plus tard il dira en souriant, parlant de ma conception, que cet enfant lui a échappé.
Louise m’avait permis de reconstituer l’idylle de mes parents coupables. J’avais quinze ans, je savais ce que l’on m’avait caché et à mon tour je me taisais, par amour.
« Il n’y a pas eu de filles dans cette histoire .
Juste deux garçons et ça n’a pas été plus simple pour autant. Bien sûr , les années passant ,une ou deux beautés y font leur apparition , trois petits tours et puis s’en sont allées » .
Sais tu, Baptiste, que ceux qui viennent la nuit habiter les rêves, qui y surgissent comme des étrangers pour y accomplir parfois d'atroces forfaits, ne sont en fait que des incarnations du rêveur lui-même ? Il en est ainsi des personnages d'un roman qui, du héros jusqu'aux figures les plus secondaires, sont tous issus de la chair de l'auteur, boules d'argile extirpées de ses entrailles et auxquelles son souffle a donné vie.