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Citations de Pierre Kropotkine (169)


Lutter, affronter le danger ; se jeter à l'eau pour sauver, non seulement un homme, mais un simple chat ; se nourrir de pain sec pour mettre fin aux iniquités qui vous révoltent ; se sentir d'accord avec ceux qui méritent d'être aimés, se sentir aimé par eux - pour un philosophe infirme, tout cela est peut-être un sacrifice, mais pour l'homme et la femme pleins d'énergie, de force, de vigueur, de jeunesse, c'est le plaisir de se sentir vivre.
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De nos jours, on entend dire souvent que l'on se moque de l'idéal. Cela se comprend. On a si souvent confondu l'idéal avec la mutilation bouddhiste ou chrétienne, on a si souvent employé ce mot pour tromper les naïfs, que la réaction est nécessaire et salutaire. Nous aussi, nous aimerions remplacer ce mot "idéal", couvert de tant de souillures, par un mot nouveau plus conforme aux idées nouvelles.
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Ils préfèrent les travaux paisibles à la guerre ; ainsi le caractère pacifique de l'homme fut la cause de la spécialisation du métier de guerrier, spécialisation qui amena plus tard la servitude et toutes les guerres de la "période des Etats" de l'histoire de l'humanité.
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Les puits des mines portent encore, toutes fraîches, les entailles faites dans le roc par le bras du piocheur. D'un poteau à l'autre les galeries pourraient être marquées d'un tombeau de mineur, enlevé dans la force de l'âge par le grisou, l'éboulement ou l'inondation, et l'on sait ce que chacun de ces tombeaux a coûté de pleurs, de privations, de misères sans nom, à la famille qui vivait du maigre salaire de l'homme enterré sous les décombres.
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Chaque hectare du sol que nous labourons en Europe a été arrosé des sueurs de plusieurs races ; chaque route a toute une histoire de corvées, de travail surhumain, de souffrances du peuple.
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Si vous terminez vos études de droit et si vous vous préparez pour le barreau, il se peut que vous aussi, vous vous fassiez des illusions relativement à votre activité future, — j’admets donc que vous êtes des meilleurs de ceux qui connaissent l’altruisme. Vous pensez, peut-être : « Consacrer sa vie à une lutte sans trêve ni merci contre toutes les injustices ; s’appliquer constamment à faire triompher la loi, expression de la justice suprême : quelle vocation pourrait être plus belle ! » et vous entrez dans la vie plein de confiance en vous-même, en la vocation que vous avez choisie. Eh bien, ouvrons au hasard la chronique judiciaire et voyons ce que va vous dire la vie.
Voici un riche propriétaire ; il demande l’expulsion d’un fermier-paysan qui ne paie pas la rente convenue. Au point de vue légal, il n’y a pas d’hésitation possible : puisque le paysan ne paie pas, il faut qu’il s’en aille. Mais si nous analysons les faits, voici ce que nous apprenons. Le propriétaire a toujours dissipé ses rentes en festins joyeux, le paysan a toujours travaillé. Le propriétaire n’a rien fait pour améliorer ses terres, et néanmoins la valeur en a triplé en cinquante ans, grâce à la plus-value donnée au sol par le tracé d’une voie ferrée, par les nouvelles routes vicinales, par le dessèchement des marais, par le défrichage des côtes incultes ; et le paysan qui a contribué pour une large part à donner cette plus-value à la terre, s’est ruiné ; tombé entre les mains des agents d’affaires, perdu de dettes, il ne peut plus payer son propriétaire. La loi, toujours du côté de la propriété, est formelle ; elle donne raison au propriétaire. Mais vous, en qui les fictions juridiques n’ont pas encore tué le sentiment de la justice, que ferez-vous ? Demanderez-vous qu’on jette le fermier sur la grande route — c’est la loi qui l’ordonne, — ou bien demanderez-vous que le propriétaire restitue au fermier toute la part de la plus-value qui est due au travail de celui-ci ? — c’est l’équité qui vous le dicte. — De quel côté vous mettrez-vous ? pour la loi, mais contre la justice ? ou bien pour la justice, mais alors contre la loi ?
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Aujourd’hui, l’État est parvenu à s’immiscer dans toutes les manifestations de notre vie. Du berceau à la tombe, il nous étrangle dans ses bras. Tantôt comme État central, tantôt comme État-province ou canton, tantôt comme État-commune, il nous poursuit à chaque pas, il apparaît à chaque coin de rue, il nous impose, nous tient, nous harcèle.

Il légifère sur toutes nos actions. Il accumule des montagnes de lois et d’ordonnances dans lesquelles l’avocat le plus malin ne sait plus se retrouver. Il crée chaque jour de nouveaux rouages qu’il adapte gauchement à la vieille patraque rhabillée, et il en arrive à créer une machine si compliquée, si bâtarde, si obstructive, qu’elle révolte ceux-là même qui se chargent de la faire marcher.

Il crée une armée d’employés, d’araignées aux doigts crochus, qui ne connaissent l’univers qu’à travers les sales vitres de leurs bureaux, ou par leurs paperasses au grimoire absurde ; — une bande noire qui n’a qu’une religion, — celle de l’écu, qu’un souci, celui de se raccrocher à un parti quelconque, noir, violet ou blanc, afin qu’il garantisse un maximum d’appointements pour un minimum de travail.
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méditez sur l'origine de toutes les fortunes grandes ou petites, qu'elles viennent du commerce, de la banque, de l'industrie ou du sol. Partout vous constaterez que la richesse des uns et faite de la misère des autres
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Pendant ces périodes de sommeil, on discute rarement les questions de morale. Les pratiques religieuses, l’hypocrisie judiciaire en tiennent lieu. On ne critique pas, on se laisse mener par l’habitude, par l’indifférence. On ne se passionne ni pour ni contre la morale établie. On fait ce que l’on peut pour accommoder extérieurement ses actes à ce que l’on dit professer. Et le niveau moral de la Société tombe de plus en plus. On arrive à la morale des Romains de la décadence, de l’ancien régime, de la fin du régime bourgeois. 
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L'histoire de la pensée humaine rappelle les oscillations du pendule, et ces oscillations durent déjà depuis des siècles. Après une longue période de sommeil arrive un moment de réveil. Alors la pensée s’affranchit des chaînes dont tous les intéressés — gouvernants, hommes de loi, clergé — l’avaient soigneusement entortillée. Elle les brise. Elle soumet à une critique sévère tout ce qu’on lui avait enseigné et met à nu le vide des préjugés religieux, politiques, légaux et sociaux, au sein desquels elle avait végété. Elle lance la recherche dans des voies inconnues, enrichit notre savoir de découvertes imprévues ; elle crée des sciences nouvelles.
Mais l’ennemi invétéré de la pensée — le gouvernant, l’homme de loi, le religieux — se relèvent bientôt de la défaite. Ils rassemblent peu à peu leurs forces disséminées ; ils rajeunissent leur foi et leurs codes en les adaptant à quelques besoins nouveaux. Et, profitant de ce servilisme [sic] du caractère et de la pensée qu’ils avaient si bien cultivé eux-mêmes, profitant de la désorganisation momentanée de la société, exploitant le besoin de repos des uns, la soif de s’enrichir des autres, les espérances trompées des troisièmes — surtout les espérances trompées ils se remettent doucement à leur œuvre en s’emparant d’abord de l’enfance par l’éducation. 
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Partout où nous allons, nous trouvons la même vie du clan, les mêmes associations d'hommes, quelque primitifs qu'ils soient, en vue de l'entraide. Darwin avait donc tout à fait raison lorsqu'il voyait dans les qualités sociales de l'homme le principal facteur de son évolution ultérieure, et les vulgarisateurs de Darwin sont absolument dans l'erreur quand ils soutiennent le contraire.
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Quand nous nous élevons plus haut et que nous disons : "Le bonheur de chacun est intimement lié au bonheur de tous ceux qui l'entourent. On peut avoir par hasard quelques années de bonheur relatif dans une société basée sur le malheur des autres ; mais ce bonheur est bâti sur le sable. Il ne peut pas durer ; la moindre des choses suffit pour le briser ; et il est misérablement petit en comparaison du bonheur possible dans une société d'égaux.
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En jetant par-dessus bord la Loi, la Religion et l'Autorité, l'humanité reprend possession du principe moral qu'elle s'était laissé enlever afin de soumettre à la critique et de le purger des adultérations dont le prêtre, le juge et le gouvernant l'avaient empoisonné et l'empoisonnent encore.
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Si l'homme distingue entre le bien et le mal, disent les hommes religieux, c'est que Dieu lui a inspiré cette idée. Utile ou nuisible, il n'a pas à discuter : il n'a qu'à obéir à l'idée de son créateur.
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Il y a droits et droits. Il y a des droits pour lesquels le peuple est toujours resté froid, parce qu’il sent parfaitement que ces droits ne sont qu’un instrument entre les mains des classes dominantes pour maintenir leur pouvoir sur le peuple. Ces droits ne sont pas même des droits politiques réels, puisqu’ils ne sauvegardent rien pour la masse du peuple ; et si on les décore encore de ce nom pompeux, c’est parce que notre langage politique n’est qu’un jargon, élaboré par les classes gouvernantes pour leur usage et dans leur intérêt.
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(Décharge des obligations humaines d'entraide par l'État et l'impôt, p. 286)
L’absorption de toutes les fonctions par l’État favorisa nécessairement le développement d’un individualisme effréné, et borné à la fois dans ses vues. À mesure que le nombre des obligations envers l’État allait croissant, les citoyens se sentaient dispensés de leurs obligations les uns envers les autres. Dans la guilde – et au Moyen Âge, chacun appartenait à quelque guilde ou fraternité – deux « frères » étaient obligés de veiller chacun à leur tour un frère qui était tombé malade ; aujourd’hui on considère comme suffisant de donner à son voisin l’adresse de l’hôpital public le plus proche. Dans la société barbare, le seul fait d’assister à un combat entre deux hommes, survenu à la suite d’une querelle, et de ne pas empêcher qu’il y ait une issue fatale, exposait à des poursuites comme meurtrier ; mais avec la théorie de l’État protecteur pour tous, le spectateur n’a pas besoin de s’en mêler : c’est à l’agent de police d’intervenir, ou non. Et tandis qu’en pays sauvage, chez les Hottentots par exemple, il serait scandaleux de manger sans avoir appelé à haute voix trois fois pour demander s’il n’y a personne qui désire partager votre nourriture, tout ce qu’un citoyen respectable doit faire aujourd’hui est de payer l’impôt et de laisser les affamés s’arranger comme ils peuvent. Aussi la théorie, selon laquelle les hommes peuvent et doivent chercher leur propre bonheur dans le mépris des besoins des autres, triomphe-t-elle aujourd’hui sur toute la ligne – en droit, en science, en religion. C’est la religion du jour, et douter de son efficacité c’est être un dangereux utopiste.
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(Vitalité artistique des cités médiévales et des guildes, p. 268-270)
Comme l’art grec, [l’architecture médiévale] jaillissait d’une conception de fraternité et d’unité engendrée par la cité. Elle avait une audace qui ne peut s’acquérir que par des luttes audacieuses et des victoires ; elle exprimait la vigueur, parce que la vigueur imprégnait toute la vie de la cité. Une cathédrale, une maison communale symbolisaient la grandeur d’un organisme dont chaque maçon et chaque tailleur de pierres était un constructeur ; et un monument du Moyen-Âge n’apparaît jamais comme un effort solitaire, où des milliers d’esclaves auraient exécuté la part assignée à eux par l’imagination d’un seul homme – toute la cité y a contribué. Le haut clocher s’élevait sur une construction qui avait de la grandeur par elle-même, dans laquelle on pouvait sentir palpiter la vie de la cité ; ce n’était pas un échafaudage absurde comme la tour en fer de 300 mètres de Paris, ni une simili bâtisse en pierre faite pour cacher la laideur d’une charpente de fer comme le Tower Bridge à Londres. Comme l’Acropole d’Athènes, la cathédrale du Moyen-Âge était élevée dans l’intention de glorifier la grandeur de la cité victorieuse, de symboliser l’union de ses arts et métiers, d’exprimer la fierté de chaque citoyen dans une cité qui était sa propre création. […] Les ressources dont on disposait pour ces grandes entreprises étaient d’une modicité étonnante. La cathédrale de Cologne fut commencée avec une dépense annuelle de 500 marks seulement ; un don de 100 marks fut inscrit comme une grande donation […] Mais chaque corporation contribuait pour sa part en pierres, en travaux et en inventions décoratives pour leur monument commun. Chaque guilde y exprimait ses conceptions politiques, racontant en bronze ou en pierre, l’histoire de la cité, glorifiant les principes de « Liberté, Égalité et Fraternité », louant les alliés de la cité et vouant ses ennemis aux feux éternels. Et chaque guilde témoignait son amour au monument communal en le décorant de vitraux, de peintures, de « grilles dignes d’être les portes du Paradis », comme le dit Michel-Ange, ou en décorant de sculptures en pierre les plus petits recoins du bâtiment. […] « Aucune œuvre ne doit être entreprise par la commune si elle n’est conçue selon le grand coeur de la commune, composé des coeurs de tous les citoyens, unis dans une commune volonté » – telles sont les paroles du Conseil de Florence ; et cet état d’esprit apparaît bien dans toutes les œuvres communales d’une utilité sociale : les canaux, les terrasses, les vignobles et les jardins fruitiers autour de Florence, ou les canaux d’irrigation qui sillonnent les plaines de Lombardie, ou le port et l’aqueduc de Gênes, bref tous les travaux de cette sorte qui furent accomplis par presque toutes les cités.
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Le peuple, à une époque de lutte, et plus tard les historiens aussi, aiment à personnifier chaque conflit dans deux rivaux. C'est plus court, plus commode dans la conversation, et c'est aussi plus "roman", plus "drame". C'est pourquoi la lutte entre ces deux partis fut souvent représentée comme le choc de deux ambitions, celle de Brissot et celle de Robespierre. Comme toujours, les deux héros dans lesquels le peuple a personnifié le conflit sont bien choisis. Ils sont typiques. Mais, en réalité, Robespierre ne fut pas aussi égalitaire dans ses principes que le fut la montagne au moment de la chute des girondins.
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Les révolutions se font toujours, ne l'oublions pas, par des minorités, et alors même que la révolution a déjà commencé, et qu'une partie de la nation en accepte les conséquences, ce n'est toujours qu'une infime minorité qui comprend ce qui reste à faire pour assurer le triomphe de ce qui a été fait, et qui a le courage de l'action. C'est pourquoi une assemblée, représentant toujours la moyenne du pays, ou plutôt, restant au-dessous de la moyenne, fut de tout temps et sera toujours un frein à la révolution, mais ne deviendra jamais l'instrument de la révolution.
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Ceux qui font aujourd'hui les discours anniversaires de la révolution préfèrent se taire sur ce sujet délicat et nous parlent d'une unanimité touchante qui aurait existé entre le peuple et ses représentants. Mais Louis Leblanc avait déjà très bien souligné les peurs de la bourgeoisie aux approches du 14 juillet, et les recherches modernes ne font que confirmer ce point de vue. Les faits que je mentionne ici, concernant les journées du 2 au 12 juillet, montrent aussi que l'insurrection du peuple de Paris suivit, jusqu'au 12, sa ligne de conduite, indépendante des bourgeois du Tiers.
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