Attention !!! Nouvel horaire pour l'émission "Le coup de coeur des libraires" sur les Ondes de Sud Radio. Valérie Expert et Gérard Collard vous donnent rendez-vous chaque samedi à 14h00 pour vous faire découvrir leurs passions du moment !
Retrouvez leurs dernières sélections de livres ici !
le Dipoilocus et autres dinosaures méconnus: et autres découvertes saugrenues de Lise Beninca aux éditions Hélium
https://www.lagriffenoire.com/encore-plus-de-dipoilocus.html
Encore plus de Dipoilocus de Lise Beninca et Clémence Lallemand aux éditions Hélium
https://www.lagriffenoire.com/encore-plus-de-dipoilocus.html
Prout ! Prout ! de Sandrine Lamour et Marianne Barcilon aux éditions Lito
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C'est super d'être petit ! de Hervé Eparvier et Soledad Bravi aux éditions EDL
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Moi, Mouth ! de Grégoire Solotareff et Soledad Bravi aux éditions EDL
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Les discours les plus éloquents - Décryptage en BD par Soledad Bravi de Soledad Bravi, Romain Boulet aux éditions le Robert
https://www.lagriffenoire.com/les-discours-les-plus-eloquents.html
Les Mauvaises Epouses de Zoe Brisby aux éditions Livre de Poche
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La Double Vie de Dina Miller de Zoé Brisby aux éditions Albin Michel
https://www.lagriffenoire.com/la-double-vie-de-dina-miller.html
le Lâche de Jarred McGinnis aux éditions Points
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Monsieur Vénus/Madame Adonis de Rachilde et Martine Reid aux éditions Folio Classique
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Rachilde, homme de lettres de Cécile Chabaud aux éditions Écriture
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Pour que chantent les montagnes de Phan Que Mai Nguyen aux éditions Points
https://www.lagriffenoire.com/pour-que-chantent-les-montagnes-1.html
Là où fleurissent les cendres de Nguyen Phan Que Mai et Sarah Tardy aux éditions Charleston
https://www.lagriffenoire.com/
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Portant au fond de ses yeux assombris je ne sais quel reflet de la mare lointaine.
Arrivé derrière lui, je tâchai de me rendre compte de ce qu’il pouvait lire tous les soirs avec tant de persévérance. La bibliothèque contenait beaucoup de bouquins, toute la ribambelle qu’ordonne la marine soucieuse de distraire les prisonniers du large, des livres de science, des récits de voyage, et des histoires d’amour pas trop brûlantes : Robinson Crusoé, Paul et Virginie, les Fables de La Fontaine. Mais ce petit bouquin-là vous avait une forme de catéchisme ou mieux d’un… Je me redressai, le frisson dans le dos. J’avais bien vu. C’était… l’Alphabet. Le père Barnabas, le gardien-chef du phare d’Ar-Men, ayant fait ses études et obtenu son diplôme depuis longtemps, lisait… l’alphabet, par conséquent ne savait pas lire !… Pourquoi que cela me donna la chair de poule, au lieu de m’amuser ?
Ce vent nous fournissait, d’ailleurs, tous les agréments d’une bataille en règle. Notre grue d’arrimage cassa par le milieu, et il me fallut grimper aux échelons extérieurs pour en ficeler les deux morceaux. Cette épissure me prit toute la journée pendant que le vieux me criait, du bas, des gros mots de vieille femme furieuse, gueulait comme la mouette à travers les tempêtes. Je savais bien qu’il devait cacher plus d’expérience que moi ; pourtant, j’aurais voulu l’y voir, son expérience, sous la rafale, avec des coups de fouet de la corde restée libre qui me brisait les reins, avec les douches salées qui m’inondaient la bouche et les yeux, un pied recroquevillé entre deux crampons de fer, lesquels devenaient brûlants tellement je les serrais dans ma plante douloureuse, un bras tenant le mât et l’autre outillant pour presser les uns contre les autres les anneaux du filin. Je n’y voyais pas, je n’entendais plus, je me sentais tourner autour du phare comme un oiseau cherchant à se rôtir définitivement aux feux de ses lampes.
Mais que m’importaient les extravagances du vieux et la tristesse de la mer ?
Je connaissais une femme !
Ce fut, durant près d’une semaine, mon magasin de joies. Je n’osais pas parler de mes espérances, car je redoutais les plaisanteries. Je les tenais cachées au fond de ma poitrine comme on tient des oiseaux, seulement ceux-là ne se battaient point dans la cage de mon cœur. Ils demeuraient blottis, préférant ma chaleur naturelle au grand jour du soleil. Ils roucoulaient, ils répétaient de jolies phrases et embrouillaient mes gestes de leurs coups d’ailes. Si j’étais sur le chemin de ronde, le vent sentait le lilas, et quand je descendais pour déjeuner dans les puanteurs de la salle basse du phare, une saveur de crème fraîche hantait ma bouche.
L’Amour ? J’ignorais son existence avant d’avoir souffert de l’attendre.
Je me surprenais à fredonner, moi aussi, des refrains sans queue ni tête. Car le jeune fou qui aime est semblable au vieux fou qui se souvient.
Et tous les deux meurent un peu chaque jour d’avoir trop attendu.
Il faut même être un véritable agneau pascal pour épouser M. de Saint-Charles
Il n'est pas très frais votre prétendu de cinquante hivers !
- Il n'en a que quarante-cinq, docteur !
- Depuis un lustre, je sais, mais ça ne le rajeunit pas et vous avez de la chance que le pays ne vous oppose aucun Don Juan plus présentable. Louvette n'a pas le choix. Moi je la plains de tout mon cœur, et si elle regimbait, j'en serais bien aise.
- Un établissement inespéré, Servière, s'écria Mme de Valrasse d'un ton subitement suraigu. Les Don Juan viendront sans doute après. Nous aurons assuré le présent et l'avenir ne regardera plus que le mari.
Servière serra son chapeau entre ses genoux comme s'il avait voulu le réduire à l'état de galette.
- Ceci est profondément immoral, Madame, et je m'étonne de vous l'entendre dire !
- Mon cher ami, je ne connais que le devoir du présent. Les complications de l'avenir sont du ressort de Dieu.
Sur mer, la nuit ne vient jamais d'en haut, elle monte des vagues, et on dirait que l'eau devient les nuages, un ciel renversé.
Il y avait, ce matin-là, Mère Marie de la Miséricorde, supérieure du couvent voisin, une figure figée aux paupières en capote qui ne semblait voir les humains que derrière un rideau. Elle parlait lentement pour ne pas dire grand' chose mais ne perdait pas un coup de fourchette. Elle était grande, osseuse, d'apparence vulgaire et savait mener sa communauté aussi adroitement que Mme Valrasse conduisait le char de sa fortune.
Le salon, chez les provinciaux, c'est un lieu sacré, ne servant à rien comme presque tous les lieux sacrés. On vient là pour y échanger des propos inutiles, se tenir sur ses gardes en ne disant jamais le fond de sa pensée. On y reçoit les ennemis intimes avec une cordialité encourageante et on y conclut souvent des affaires dangereuses : locations d'immeubles, ventes de terrains ou fiançailles de sa fille unique.
Tout en montant, Sandric m'expliqua que le tube central avait deux fois la hauteur de cette ex-tour Eiffel, aujourd'hui couchée sous la poudre de sa propre rouille au fond d'un chantier de démolition, où on la montre pour quelques centimes aux amateurs de ce dernier panache du pittoresque inutile et de la gloriole réactionnaire.
"Le Tout-au-Ciel"