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Citations de Sarah Chiche (414)


–Qu’est-ce que tu écris, maman ?
–Tu veux essayer de lire ?
–Non, je veux pas. Je sais pas lire. Je saurai jamais lire. Léa et Arwa, elles savent déjà, et moi, j’ai l’impression que je saurai jamais.
–C’est se priver de grandes joies de croire que c’est mal de ne pas savoir une chose. En réalité tu as beaucoup de chance.
–De la chance ?
–Oui, parce que tu ne sais pas encore. C’est merveilleux de ne pas savoir encore. C’est une promesse. Le jour où ça viendra, le jour où tu sauras lire, tu ressentiras une joie immense, la joie de te rendre compte que l’instant d’avant, tu ne connaissais pas encore une chose, et que soudain, tu l’as trouvée.
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Un amour comme ça, ça n’existe pas. On n’aime plus comme ça. J’étais faite pour lui. Il était fait pour moi. Nous étions comme deux corps aimantés : ce qu’il avait à donner, j’avais à le prendre, j’en avais viscéralement besoin. J’étais une gosse. J’avais vingt-deux ans. Je n’avais jamais aimé personne.
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Peut-être avons-nous tous plusieurs vies. Il y a celle dont nous avions rêvé, enfant, et à laquelle nous pensons toujours, une fois adulte, et celle que nous vivons, chaque jour, dans laquelle nous nous devons d’être performants, responsables et utiles, et que nous terminerons jetés dans un trou.
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De Saturne, astre immobile, froid, très éloigné du Soleil, on dit que c’est la planète de l’automne et de la mélancolie. Mais Saturne est peut-être aussi l’autre nom du lieu de l’écriture – le seul lieu où je puisse habiter. C’est seulement quand j’écris que rien ne fait obstacle à mes pas dans le silence de l’atone et que je peux tout à la fois perdre mon père, attendre, comme autrefois, qu’il revienne, et, enfin, le rejoindre. Et je ne connais pas de joie plus forte.
(page 204)
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Rien n’écrase Armand, pas même l’excès de sa propre assurance. D’un mot, il taille en pièces qui lui résiste, se montre aussi impulsif que son cadet est timide, tient tête à tous, professeurs comme élèves, a des manières d’enfant gâté, et croit fermement que, de même qu’il y a des tortues et des lions, il y a des riches et des pauvres, des faibles et des forts, et si les forts écrasent ou tuent les faibles, c’est la loi de la nature.
(page 51)
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Mais ce qui tue, ce n’est pas seulement la douleur morale. Ce qui tue, c’est aussi la condescendance et le mépris de ceux qui pensent que la douleur d’un deuil qui se prolonge relève d’une paresse de la volonté ou d’une faiblesse complaisante.
(page 177)
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À l’ambition, il avait toujours préféré les mystères des étoiles, le cinéma, les livres anciens. Et puis, Ève, sa femme. Il ne verrait jamais les images de Saturne ni des autres géantes gazeuses. Il se représenta peut-être toutes les années qu’il resterait à sa famille à flotter dans le vaste océan subglaciaire de leur bon droit à être ce qu’ils étaient, alors qu’il n’y a peut-être rien, aucun Dieu, aucun sens, qui puisse justifier que le bien consiste à se conduire comme ceci ou comme cela, ni même qu’il y a un quelconque bien, ni même qu’il est pertinent de se battre pour continuer d’exister.
(pages 16-17)
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Sarah Chiche

« Les Japonais nomment Takotsubo, qui veut dire “piège à poulpe”, ce syndrome où, à la suite d’une rupture amoureuse, d’un deuil ou d’un choc émotionnel intense, le cœur se déforme, ses muscles s’affaiblissent et deviennent si paresseux que, tout à coup, littéralement, il se brise. "
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Les coups, on peut aussi les donner avec des mots. L’avantage, c’est que ça ne laisse pas de traces visibles. Ça vous fait juste exploser la tête.
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Qu’un deuil nous frappe dans l’enfance et le sentiment de la continuité d’exister n’ira plus de soi.
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La vérité était trop abominable. Elle avait trop honte. Cette honte avait fini par l’enfermer dans un triste théâtre d’affabulations. Elle avait tant dépeint sa vie sous les traits d’une autre, pour pouvoir survivre, qu’elle avait fini par croire à ses mensonges.
(page 118)
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On prétend que c’est en revivant, par le souvenir, toute la complexité de nos liens avec la personne disparue que l’on peut supporter de la perdre, accepter de s’en détacher, et, un jour, retrouver le goût de vivre, la joie d’aimer. C’est exact, la plupart du temps.
Mais ce que vivent les gens comme moi, c’est autre chose. Pour nous, le temps du deuil ne cesse jamais. Car nous ne souhaitons surtout pas qu’il cesse. Nous ne voulons pas de son évacuation forcée. Nous ne tenons pas à surmonter la perte. Nous n’aimons pas être consolés, séparés de la chose perdue. Nous vivons, en permanence, dans et avec nos morts, dans le sombre rayonnement de nos mondes engloutis ; et c’est cela qui nous rend heureux. De Saturne, astre immobile, froid, très éloigné du Soleil, on dit que c’est la planète de l’automne et de la mélancolie. Mais Saturne est peut-être aussi l’autre nom du lieu de l’écriture – le seul lieu où je puisse habiter. C’est seulement quand j’écris que rien ne fait obstacle à mes pas dans le silence de l’atone et que je peux tout à la fois perdre mon père, attendre, comme autrefois, qu’il revienne, et, enfin, le rejoindre. Et je ne connais pas de joie plus forte.
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Et sur la route où je pars, seule, mais avec mon père, seule, mais avec ceux que j’aime, seule, mais avec les mélancoliques, les amoureux, les endeuillés et les intranquilles, seule, mais cachée dans la foule des vivants et des morts, tout est perdu, tout va survivre, tout est perdu, tout est sauvé. Tout est perdu. Tout est splendide.
(page 205)
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Je n’ai jamais bien su pourquoi j’ai survécu à ce dont, d’ordinaire, on ne revient pas.
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Le flot doré de ses cheveux tombe sur ses yeux. Par quels chemins, par quelles errances a-t-elle bien pu passer pour devenir elle ? Terriblement solitaire, dépendante comme une enfant des mots d’amour et de la tendresse. Brusquement pudique dans l’obscénité.
(page 98)
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Elle avait écrit un livre sur Madeleine Brès, la première femme autorisée à exercer la médecine à la condition expresse qu’elle ne s’occupe que de bébés, de mères et d’allaitement ; même si depuis les années 1960 les femmes avaient pu investir la médecine générale, racontait Léa, on entendait encore toutes sortes d’horreurs sur leur présence dans les cabinets. Tantôt on disait qu’elles s’installaient à domicile pour s’occuper de leurs enfants. Tantôt on leur reprochait de travailler cinquante heures par semaine et de sacrifier leur maternité. À l’occasion de la parution de son livre, Léa avait accordé un entretien qui avait fait grand bruit. Au journaliste qui lui demandait si, compte tenu de son engagement auprès de ses patients, elle n’avait pas l’impression de passer à côté de la maternité et de sacrifier sa vie personnelle, elle avait répondu : « Si j’étais un homme, jamais vous ne me demanderiez si, médecin avec un enfant en bas âge, je ne crains pas de passer à côté de la paternité. Je ne sacrifie pas ma vie personnelle. La médecine est ma vie personnelle. »
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Cheikh Raymond, l’un des plus grands maîtres de la musique arabo-andalouse, adulé par les communautés juives et musulmanes qui, en pleine guerre, continuait à chanter, avec une ferveur surnaturelle, l’amour courtois et l’élan vers Dieu, a été abattu d’une balle dans la nuque, la veille, en plein jour, dans le souk de Constantine, alors qu’il faisait ses courses. Son meurtrier a disparu dans la foule.
(pages 60-61)
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Sarah Chiche
Mais ce qui tue, ça n'est pas seulement la douleur morale. Ce qui tue, c'est aussi la condescendance et le mépris de ceux qui pensent que la douleur d'un deuil qui se prolonge relève d'une paresse de la volonté ou d'une faiblesse complaisante.
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On sait ce qu’est la dévalorisation. Plus perçante est la haine de soi. Elle méduse. On se regarde comme les autres vous regardent, comme un être qui aurait tout pour être libre et heureux, et qui rencontre cette haine féroce de soi, dans laquelle toutes vos pensées se réfugient pour vous faire mourir de l’intérieur.
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Jusqu’à quel point la manière dont nous pensons que nos parents se sont aimés façonne-t-elle notre propre degré d’idéalisation de l’amour ?
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