Citations de Seung-U Lee (69)
Pour cesser de stagner, il faut permettre à l’eau de couler.
La vie, c'est comme la rosée sur les herbes des chemins : ce bas monde, ce n'en est que l'ombre. (p189)
Où avais-je donc vu ce film ? Sans doute dans l'une de ces salles de la banlieue de Séoul où, à l'époque de ma fugue, il m'arrivait de passer la nuit pour économiser le prix d'une chambre d'hôtel. C'était un long-métrage d'un réalisateur iranien assez connu. Son nom, Abbas Kiarostami, je l'apprendrais bien plus tard. Comme mon objectif n'était pas d'aller voir tel ou tel film en particulier, le sujet m'importait peu. J'avais entendu dire qu'il était bon, mais cela ne signifiait pas forcément qu'il visait un public cultivé. Parmi les spectateurs, les gens comme moi ne manquaient pas. Franchement, je ne comprends pas pourquoi on prétendait que c'était un bon film. En général, aussitôt dans un fauteuil, je m'endors. Mais certains soirs, mille pensées vous assaillent. Cette nuit-là, pour une fois, j'avais donc suivi les images sur l'écran, bien que de façon un peu distraite. (...) Pourquoi donc l'homme du film ne m'avait-il pas paru désespéré ? Il était tellement calme, tellement consciencieux, il avait l'air simplement d'un employé à son travail, tout dévoué à sa société, et non pas d'un gars résolu à quitter ce monde. Est-ce que, moi, je donnais la même impression ? Avais-je l'air de quelqu'un en train de faire consciencieusement un travail qu'on lui aurait confié ?
Même si aimer est une seule et même chose, les chemins de l’amour sont tous différents. Chacun sa manière. Tout amour est unique.
Dans la mythologie antique, les arbres sont des nymphes métamorphosées. Pour échapper au désir des dieux, les nymphes abandonnent leur corps et se transforment en arbres […] C’est pourquoi en tout arbre se dissimule une histoire d’amour brisé.
Au bout d'un long moment, tout d'un coup, mon père a dit : « Ta mère est pure. » J'ai été surpris. Moi, je ruminais depuis un bon quart d'heure des phrases convenues prêtes à être proférées. Mais un je-ne-sais-quoi m'empêchait de desserrer les lèvres. Mon père avait, lui, des choses à dire.
Dans la mythologie antique, les arbres sont des nymphes métamorphosées. Pour échapper au désir des dieux, les nymphes se transforment en arbres. C'est pourquoi en tout arbre se dissimule une histoire d'amour brisé.
Un peu plus tard, la main de ma mère a caressé le visage de l'invalide. Geste indiciblement doux et tendre. Ce qui en nous est le plus apte à exprimer les sentiments, n'est-ce pas la main ? De cette main, émanaient une tendresse, une affection extrêmes, perceptibles même pour quelqu'un qui regardait à bonne distance. Cette main câline et aimante glissait sur les cheveux de l'homme, ses oreilles, ses yeux, ses lèvres. Et, à chacune de ses caresses, le visage s'éclairait, s'illuminait d'or.
Le photographe s'exprime à travers l'angle de vue et par la mise au point, il fait toujours des choix. L'angle de la prise de vue et la mise au point ne sont rien d'autre que l'angle de l'éthique et la visée de la morale.
Il y a un an, je me débattais dans l'obscurité. La Parole que je gardais dans coeur ne m'a été d'aucun secours quand j'ai été confronté à la cruauté du monde. Je ne savais comment faire. Et ne sachant comment faire, je me suis mis à marcher. En tout lieu, la route m'emportait. Sur cette route, j'entrevoyais tant d'autres routes possibles. Quand on fait profondément corps avec la route, on sent très confusément comment tourne ce monde.
Au lieu, donc, de répéter sa question, il lui avait tendu les bras. Elle est entrée dans le cercle de ses bras. Ce sont leurs corps qui se sont mis à parler. Le corps est plus franc, il fait savoir exactement ce qu'il veut. Il n'y a pas de parole plus honnête. Ni plus précise.
Un monde inconnu s'étendait de l'autre côté d'un mur infranchissable. Il avait, comme son père, conscience d'en être complément coupé. Ce monde ne le concernait pas. Le monde appartenait aux autres, pas à lui. (p. 65)
Se lever à l'aube etait l'autre habitude prise. Même quand il se couchait très tard, il ouvrait très tôt les yeux le matin, et dès qu'il avait ouvert les yeux, il priait le front appuyé contre le mur, comme il faisait autrefois dans la montagne.
Ferme les yeux. Après les avoir fermés, ton esprit va les rouvrir. Incline-toi, mets-toi à genoux .incline le corps autant que possible. Lorsque ton corps sera totalement courbé, tu sentiras une grande main chaude se poser sur ta tête. Garde le silence. Lis la Bible. Lis et médite. Dieu s'adressera à toi...
Vous ne savez pas qu’en général l’amour débute par un malentendu (dans les arts classiques, on parle d’illusion, par euphémisme). Ou plutôt, qu’il y a malentendu parce que vous êtes amoureux. Vous n’avez pas conscience de cette illusion qui fait de vous un amoureux, alors qu’elle est la force fondatrice de votre amour.
Pour Milan Kundera, l’amour ne va pas sans le hasard. « Pour qu’un amour soit inoubliable, il faut que les hasards s’y rejoignent dès le premier instant »*
*L’insoutenable légèreté de l’être.
Si l’on ne souffre pas de quelque chose, à quoi bon vouloir y remédier ?
L’amour, c’est comme l’eau, on ne sait pas depuis quand il a commencé à s’infiltrer en nous.
Vous craigniez de vous engager sur « le chemin qui menait jusqu’à elle ». Sur ce genre de chemin, c’est la pensée qui s’engage d’abord, avant les pieds. Et en général, le chemin qui s’ouvre à la pensée est plus ardu que celui que foulent les pieds. Vous avez peur de sombrer dans la confusion rien qu’à l’idée de tourner votre pensée vers elle. Peur de voir votre détermination s’amollir. Peur de n’être plus maître de vous-même, dès que vos idées auraient bougé d’un iota. Il fallait donc que votre détermination soit bien faible, bien vacillante.
L'aliboufier, un arbre voluptueux, svelte et souple comme un corps de femme. Il enlaçait le pin dans une tendre étreinte. J'imagine que, sous terre, leurs racines s'entremêlaient dans une intimité encore plus scandaleuse.