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Critiques de Simon Leys (79)
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L'ange et le cachalot

Passionné de littérature, Simon Leys fit connaitre la culture chinoise à l’occident et fut aussi un navigateur entre le monde francophone et l’anglophone, comme l’illustre ce recueil de chroniques, de préfaces et de traductions publiées entre 1990 et 1997.



Deux articles ont particulièrement retenu mon attention, « Lawrence d’Australie » et « Evelyn Waugh, ou la terreur de Babel » parmi les neuf, tous instructifs.



Paru à l’automne 1993, dans la revue Commentaire, « L’Australie de D.H. Lawrence », révèle que « Kangourou » n’est pas une fiction mais une enquête sur un projet de coup d’état initié, entre les deux guerres, par des anciens combattants australiens redoutant une victoire électorale des travaillistes. Reportage qui suscita une menace d’attentat contre l’écrivain qui n’est donc pas seulement le sulfureux auteur de « L’Amant de lady Chatterley ».



Paru en mars 1993 dans « The Independant Monthly » « Terror of Babel », assène «Si l'on voulait se débarrasser de Waugh, il faudrait d'abord pouvoir se débarrasser de la langue anglaise elle-même» et précise que la première leçon qui se dégage de cette œuvre c’est la souveraine importance du style, « chaque mot est juste et occupe sa juste place ». Simon Leys compare au style d’un Graham Greene ou d’un Simenon, beaucoup moins littéraire, et donc mille fois plus simple à traduire. « La littérature n’est rien autre qu’une façon adéquate d’user du langage » résumait Evelyn Waugh s’inscrivant ainsi dans un héritage poétique.



Caustique et facétieux, le critique décape les portraits de Balzac et Malraux, puis le traducteur décrypte la théorie et la pratique de son art en rappelant qu’il vaut mieux maitriser la langue d’arrivée que la langue de départ (comme l’a démontré Marcel Proust en traduisant John Ruskin) et nous livre la lettre ouverte que Robert Louis Stevenson adressa au révérend Dr Hyde pour défendre la mémoire du père Damien, l’apôtre des lépreux.



Un ouvrage qui nourrit la réflexion grâce à des articles d’une vingtaine de pages, format que je préfère à la concision des articles retenus pour «  Le bonheur des petits poissons : Lettres des Antipodes », qui placent ce titre au même niveau que « Protée et autre essais » et font de Simon Leys un critique humaniste incontournable.



PS : Simon Leys : Navigateur entre les mondes
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Les naufragés du Batavia, suivi de :  Prosper

A l’été 1952, Pierre Ryckmans âgé de 17 ans embarque à bord du John pour une campagne aux harengs en mer du Nord. Le 15 aout 1958 il rejoint le thonier Prosper et son équipage à Ethel en Bretagne. C’est un des rares bateaux à voile encore actif et nous naviguons en compagnie de Louis « jamais ivre mais toujours imbibé », Robert, Félix, Etienne, le Patron Maurice et un mousse.



Le Prosper « bas sur l’eau, avec sa coque longue et fine et sa haute mature qui surgit d’un fouillis méthodique de haubans, étais et drisses, a vraiment fière allure », « c’est un enfant des chantiers de Camaret ».



La campagne de pêche, « la marée », éprouve les corps, Félix tombe malade et le Prosper rentre au port le déposer puis repart poursuivre sa tâche. Trois mois plus tard, Robert se pend le jour de la vente du poisson et Félix guéri assiste à l’enterrement d’Etienne, mort en testant un « radeau Bombard »…



Pierre Ryckmans est alors en l’Asie où il deviendra, sous le nom de Simon Leys, un expert de la Chine avant de succéder à Simenon à l’académie royale de Belgique au siège aujourd’hui occupé par Amélie Nothomb.



Le récit de cette « marée » évoque les romans de Pierre Loti et Roger Vercel. Il est édité avec « les naufragés du Batavia » qui préface souvent « L’archipel des hérétiques » de Mike Dash que j’ai commenté précédemment. Ce petit livre est aujourd’hui le plus lu de l’oeuvre de Simon Leys, car il est le plus abordable, mais ses autres titres conservent tout leur intérêt !



PS : ma lecture de L'archipel des hérétiques :
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La mort de Napoléon

La « résurrection » de Napoléon, consécutive à son évasion de Sainte Hélène et son apparition à Waterloo et à Paris dans les années 1820 semblèrent invraisemblable à ses contemporains qui le prirent pour un fou et faillirent l’interner mais … il était tellement inoffensif qu’on le laissa vendre des fruits et légumes … il y réussit fort bien jusqu’à ce qu’un coup de froid l’effaça des mémoires laissant place au mythe bâti par Las Cases et une armée de thuriféraires romantiques.

Uchronie aussi improbable que jubilatoire, écrite dans une langue magnifique, ces quelques pages sont une extraordinaire réflexion sur nos dirigeants, leurs images, et la réalité.

Simon Leys, nous offre un conte nourri de ses réflexions sur George Orwell et de ses observations sur la Chine Maoïste qui conserve une force éternelle.
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La mer dans la littérature française (coffret 2..

L’interview de GILL, l'un des grands experts en littérature maritime de Babelio, m’incite à naviguer dans l’anthologie que Simon Leys consacre à « La mer dans la littérature française », l’un de mes livres de chevet avec « Histoire de la littérature maritime » de René Moniot Beaumont.



Simon Leys (Patrick Ryckmans) connait bien la mer pour avoir, en 1958, embarqué à bord du Prosper, un des derniers thoniers à voile breton, « ces souvenirs me sont chers et ils évoquent un monde qui a disparu », récit publié en 2003 avec « Les naufragés du Batavia ». Tout au long de sa vie il a navigué, lu et sélectionné les pages consacrées à la mer. Autant dire qu’il ne se limite pas aux écrivains marins et évoque Maurice Barrés, Pierre Corneille, Alphonse Daudet, Montesquieu, Blaise Pascal, Rousseau, Saint François de Sales ou Voltaire, auteurs qui n’ont parfois jamais navigué, et dont les oeuvres ne sont pas spontanément associées au monde maritime. Duguay-Trouin, Claude Forbin, Louis Garneray, Pierre Loti, Victor Ségalen, sont recensés à juste titre et l’auteur laisse une large place à Michelet, Alexandre Dumas, Jules Verne et surtout à Victor Hugo et son incontournable « Les travailleurs de la mer ».



Consacré à la littérature française, ce recueil laisse au purgatoire Homère, Melville, Jack London, Thor Heyerdahl, (qui ont leur place dans « The Oxford Book of Sea », de Jonathan Raban) mais Simon Leys profite des échanges entre Joseph Conrad et Emilie Briquel pour honorer l’écrivain polonais qui écrivait en anglais et courtisait en français.



« Entre les hâbleries des gens de lettres (qui parlent de ce qu'ils ne savent pas) et les silences des gens de mer (qui savent mais ne parlent guère), heureusement qu'il s'est trouvé quelques marins qui se sont mis à écrire et quelques écrivains qui surent naviguer » précise l’auteur dans le liminaire et ne s’interdit pas de faire preuve d’humour en citant Henri Monnier et son Joseph Prud’homme devant la mer « une telle quantité d’eau frise le ridicule » … « et encore on n’en voit que le dessus ».



Les notes et commentaires, parfois moqueurs, de l’auteur enrichissent les extraits publiés qui sont précédés par une préface d’Olivier Frébourg, un avant propos de Nicolas Idier et complétés par un glossaire, une table des auteurs et un précieux index des noms de lieux.



Il est certes regrettable qu’aucune femme n’embarque dans ce recueil … raison de plus pour lire l’interview de Gilles et y découvrir l’écrivaine Christiane Baroche.



PS : mon appréciation de "Histoire de la littérature maritime"
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Orwell : Ou L'horreur de la politique

Dans ce court essai, publié en 1984, Simon Leys revient sur le parcours à la fois littéraire et politique d'Eric Blair plus connu sous son nom de plume : George Orwell.



« Le capitalisme aboutit au chômage, à la compétition féroce pour les marchés et à la guerre. le collectivisme mène aux camps de concentration, au culte des chefs et à la guerre. Il n'y pas moyen d'échapper à ce processus, à moins qu'une économie planifiée puisse être combinée à la liberté intellectuelle, ce qui ne deviendra possible que si l'on réussit à rétablir le concept du bien et du mal en politique ».



Cette phrase extraite des « Collected Essays » résume de manière étonnamment concise le fond de la pensée Orwellienne : une défiance marquée à l'endroit du libéralisme, une aversion féroce envers le communisme et le rêve utopique d'une forme de socialisme éclairé. Les mots employés par Orwell, qui propose de combiner « économie planifiée » et « liberté intellectuelle » désignent le paradoxe inhérent à cette troisième voie qui ressemble plus à un rêve qu'à un véritable projet politique.



La plume de Simon Leys est tout à la fois concise, ciselée et limpide ; dans cet essai, elle a surtout le mérité d'éclairer le lecteur ébloui par « 1984 » ou par « La ferme des animaux » sur la personnalité et les convictions profondes de leur auteur. George Orwell n'était pas seulement un homme qui avait saisi toute l'horreur du totalitarisme communiste et tenté de nous prévenir dans la dystopie la plus célèbre de l'histoire de la littérature contre la possibilité d'une extension à l'infini du domaine du collectivisme et ses conséquences liberticides. Il était également un homme issu d'une certaine bourgeoisie, épris d'égalité, qui a volontairement partagé la rudesse des conditions de vie de la classe ouvrière, et qui aurait souhaité pouvoir partager avec elle une forme de fraternité que son accent de la « haute » lui interdisait. George Orwell était un homme extrêmement courageux qui a participé à la guerre d'Espagne pour lutter contre le fascisme et y découvrir que le communisme soviétique constituait sans doute une menace plus pernicieuse encore pour nos libertés. Il n'était pas seulement « anti-totalitaire », il était aussi un homme de convictions, un « socialiste » qui croyait à une forme de troisième voie dans laquelle l'homme n'est pas un loup pour l'homme, et où nos libertés individuelles sont préservées.



Orwell apparaît dans l'essai de Simon Leys comme un être multiple, vivant et attachant et pas seulement comme le prophète ampoulé d'un monde inlassablement surveillé par Big Brother. Simon Leys donne ainsi envie d'approfondir la pensée Orwellienne en se plongeant dans ses essais, peu connus en France, et en relisant ses ouvrages moins célèbres comme « Dans la dèche à Paris et à Londres » où « Hommage à la Catalogne ».



Le temps de cette courte plongée dans la vie et l'oeuvre de George Orwell, on saisit les raisons de son aversion viscérale contre toute forme de totalitarisme, et l'on ne peut s'empêcher de songer aux terribles prophéties de 1984. Non, le totalitarisme communiste ne s'est pas répandu à la surface du globe, c'est son exact opposé, le néo-libéralisme des années 80 qui l'a emporté. Nous ne vivons pas dans un monde collectiviste où la privation est le quotidien de chacun mais dans un monde individualiste qui vénère la consommation.



Pour autant, qu'en est-il de nos libertés ? Ne sommes-nous pas placés sous la surveillance constante de ces caméras qui ont envahi nos villes et de tous ces écrans dont nous sommes devenus esclaves ? Ne sommes-nous pas envahis par le vertige du Big Data, toutes ces informations collectées à chaque instant par les nouveaux maîtres invisibles de notre monde ? Rien ne leur échappe, la situation de notre compte en banque, nos déplacements, nos achats, nos e-mails, et même cette chronique qui contrairement au carnet secret que tient Winston, le héros valétudinaire de 1984, est à présent visible par tous sur la toile qui risque un jour de se refermer sur nos libertés oubliées. Big Brother, oh Big Brother, are you watching me ?

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Les naufragés du Batavia, suivi de :  Prosper

Ce petit livre est édifiant. Il évoque l'histoire vraie des naufragés du Batavia, échoués en 1629 au large de l'Australie.



Dans leur malheur les passagers ont eu de la chance. Ils ont presque tous survécus au naufrage en se réfugiant sur un petit archipel proche du lieu de la catastrophe. Disposant d'eau potable ils pouvaient survivre plusieurs mois si nécessaire. Une partie des matelots va embarquer dans des chaloupes pour aller chercher du secours et faire plusieurs centaines de kilomètres à la rame.

Pendant ce temps le reste des passagers doit prendre son mal en patience. Une micro société va s'organiser et se structurer autour d'un chef et de ses lieutenants. Malheureusement l'homme va se révéler être un psychopathe paranoïaque et va méthodiquement assassiner, avec l'aide de ses assistants, presque tous les survivants du naufrage. Quand les secours arriveront ils ne pourront que constater avec effroi ce terrible massacre.



Simon Leys voit dans ce drame une préfiguration des grands génocides du XX ème siècle. Si des hommes de bien ne s'élèvent pas contre la tyrannie, la catastrophe est inévitable. Ce livre fait en tout cas froid dans le dos.
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Le Studio de l'inutilité

La table des matières de cet essai m'a donné envie de m'y plonger.

Je pouvais, en ouvrant cet ouvrage, toucher du doigt quelques écrivains-poètes, découvrir la Chine, tenter de comprendre le génocide cambodgien, naviguer aux côtés d'écrivains-marins.

Si certains chapitres m'ont passionnée, d'autres m'ont laissée sur le côté de la route. Car il faut le dire, ce livre est ardu; les références sont nombreuses, les notes de bas de pages encore plus nombreuses.

Et je dois dire qu'en cette fin d'année bien chargée, c'est d'un livre plus léger dont j'aurais eu besoin. J'ai ramé... et c'est peu dire.

Intelligent, bien construit, instructif, bien écrit, Le Studio de l'inutilité m'aura donné un aperçu du talent de Simon Leys et l'envie de découvrir d'autres ouvrages de cet auteur.
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Les habits neufs du président Mao

Sous le nom de Simon Leys se dissimule un insecte nuisible de la pire espèce : un intellectuel contre-révolutionnaire, bouffi de science bourgeoise, à la solde de la clique capitaliste internationale. Ce répugnant valet de l'impérialisme ose se présenter comme un ami du peuple chinois, mais il cache bien mal sa peur, son dégoût et sa haine des ouvriers et des paysans pauvres et moyens-pauvres... En crachant son venin contre la ligne révolutionnaire-prolétarienne du président Mao, ce démon croit pouvoir instiller la déviance droitiste dans l'âme pur du prolétariat mondial. Quel orgueil ! Un sincère ami du peuple chinois pourrait-il agir ainsi ?



L'élan unanime des masses enthousiastes pour la Grande Révolution Culturelle conduite par notre bien aimé leader le président Mao ne saurait être brisé par ce livre grotesque et perfide tissé de grossières calomnies directement téléguidées par la CIA ! La vicieuse flèche empoisonnée décochée par la bête puante visait le glorieux soleil rouge de la Révolution : elle est piteusement retombée dans le marais putride de la réaction !



Brandissons haut le glorieux étendard rouge de la pensée de Mao Zedong !

Vive l'invincible marxisme-léninisme-pensée de Mao Zedong !

Vive, vive, vive notre grandiose leader le président Mao !
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La Mer dans la littérature française, tome 2 : ..

L'été, par les premiers beaux jours, s'annonce.

A nous, bientôt, les longues journées paresseuses sur la plage !

Un livre paraît, pour l'occasion, tout indiqué :

"La mer dans la littérature française ** De Victor Hugo à Pierre Loti" de Simon Leys.

Un kilo cent de pure littérature !

La liste des auteurs choisis donne le tournis tant elle est étoffée et prometteuse.

Pourtant l'ouvrage ne risque-t-il pas de déformer le sac de plage ?

Supportera-t-il les projections de sable et d'huile solaire ?

Est-il Waterproof ?

Autant de questions qu'il indispensable de se poser avant d'aller passer l'après-midi à "la porte aux dames" ou "aux épis".

Si la leçon de littérature est riche de par sa matière, elle est pourtant par trop austère.

L'auteur n'a sûrement pas assez parcouru ses "Lagarde et Michard" !

De nos jours, le lecteur veut de l'illustration.

C'est sûr !

Il ne veut plus étouffer dans des centaines de pages dont les paragraphes ne laissent passer aucune respiration.

C'est promis, cet hiver, à petits coups, au coin du feu, je lirai ces pages qui sont extraites des plus beaux morceaux de la littérature française.

En attendant, pour aller bronzer et me baigner, je vais me relire quelques une des aventures de Jo Gaillard, me plonger dans un livre de Jean Merrien ou de Claude Farrère, appareiller avec Henry de Monfreid ou Roger Vercel ...

Peut-être même vais-je entamer quelques révisions avec le manuel de lecture consacré à la mer par Armand Moreau et Paul Deguet.

Ça peut pas faire de mal ! ...





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Les naufragés du Batavia, suivi de :  Prosper

« Tout ce qu'il faut pour que le mal triomphe, c'est que les braves gens ne fassent rien. »



En 1629, le Batavia, Indiaman affrété par la compagnie néerlandaise des Indes orientales, fait naufrage à proximité de la côte australienne. Les rescapés trouvent refuge sur des ilots. Ce naufrage qui est déjà une catastrophe en soi, devient très vite un enfer. Un enfer animé par un triste personnage, Cornelisz. Il n'est pourtant qu'un lâche, il ne tient ni du conquérant ni de l'aventurier, pourtant, il va semer la Terreur sur son petit royaume.



L'ilot où se sont mis à l'écart certains rescapés qui obéissent à l'autorité naturelle et juste du courageux militaire Hayes, leur aurait permis de vivre tranquillement, on peut même dire de trouver le bonheur, en attendant les secours. La solidarité, l'amitié, l'ingéniosité auraient pu naître à travers cette épreuve.



Pourquoi des hommes ont-ils laissé leur sauvagerie prendre le dessus, sous l'emprise de Cornelisz ?

Pourquoi un seul homme, à la doctrine diabolique, un psychopathe libéré des lois de la société a-t-il pu régner en maître ainsi ?



Hélas il n'y a pas de pourquoi à la bestialité de l'homme. On ne peut pas expliquer sa perte d'humanité, son aveuglement.

Ce qui s'est passé sur ses ilots en 1629, ressemble, à une plus petite échelle, à la barbarie orchestrée par Hitler à une autre époque.

Les siècles se suivent, les scénarios se répètent … Les braves gens laissent faire.



Une courte histoire qui invite à lire l’œuvre de Mike Dash, le livre que Simon Leys aurait voulu écrire, si Mike Dash ne l'avait pas devancé.



La seconde histoire, Prosper, nous apaise après la lecture de ce terrifiant naufrage.

Prosper est l'un des derniers voiliers, à la haute voilure rouge, qui fait fièrement face aux nouvelles pinasses. Le capitaine n'arrive pas à décrocher. Il navigue à l'estime. Il ressemble à son voilier. Son équipage est composé de vieux marins, qui, une fois la "marée" faite, font le tour de tous les bars du port d'Etel. Ils sont un peu rustres mais ils sont braves. Une belle histoire d'un thonier breton et d'hommes solides comme des rocs, formant une famille, partageant des secrets, des bonheurs et des épreuves. Une balade sur Prosper, ce voilier que seuls les vents et les vagues gouvernent. Un peu les hommes aussi … Il a fière allure ce Prosper.

Une histoire qui nous montre les hommes autrement. Des hommes qui respectent les règles, même si elles sont coriaces.



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Les habits neufs du président Mao

Quand en 1971, en plein délire maoïste en France, les enthousiastes de la "Révolution Culturelle" se ramassèrent ce pavé sur les doigts de pied, leurs cris et lamentations envahirent l'espace médiatique de l'époque avec la réaction caractéristique des idéologues de toutes tendances, le déni. Le plus difficile étant d'apparaitre en pleine lumière pour les jobards intégraux qu'ils étaient, complices d'un des épisodes criminels les plus monstrueux de l'histoire de l'humanité. Ayant cru voir des révolutionnaires dans ce qui dans ce livre apparaissaient clairement comme les membres corrompus d'une oligarchie d'assassins.

On aurait pu penser que la leçon leur aurait servi, les amenant à adopter les règles d'une certaine modestie intellectuelle; il n'en est rien pourtant, puisque un nombre non négligeable continue, 45 ans plus tard, à encombrer les plateaux de télévision et à déverser ses certitudes sur les bienfaits de la domination contemporaine. Domination dans laquelle personne ne se surprendra plus de reconnaitre un régime prétendument "communiste" mettant en œuvre la politique du plus brutal capitalisme de notre époque.
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Orwell : Ou L'horreur de la politique

Orwell, en toute liberté.



Que peut-on écrire sur Orwell après la magistrale biographie de Bernard Crick en 1980 ? L’essayiste et sinologue Simon Leys nous invite à réfléchir sur un point essentiel de la pensée de Georges Orwell : Il adorait le politique mais détestait la politique. Il était passionné par la façon dont les hommes arrivent à vivre en société, mais il haïssait les partis avec leurs magouilles, leurs combines, leurs ententes pratiquées toujours au détriment des individus qu’ils sont sensés défendre. C’est là le sens du sous-titre du livre de Leys : l’horreur de la politique.

Dans ce court essai, on retrouve toute la personnalité d’Orwell : sa générosité, sa liberté, son humanisme, son honnêteté, son courage. Pour lui, toute vérité est bonne à proclamer et ce vieux fond anarchiste lui a attiré beaucoup d’ennemis. Sa « révélation » se produit en 1936 pendant la guerre d’Espagne. Il est engagé avec les anarchistes. Mais il se rend très vite compte que le fanatisme de ses alliés communistes est plus fort que l’intérêt des Républicains eux-mêmes. Cette expérience lui ouvre les yeux, le marque à tout jamais et fait de lui un homme sans illusion mais jamais désabusé.

Quand Eric Blair choisit comme pseudonyme Georges Orwell, il ne s’agit pas seulement d’un déguisement ou d’une protection quelconque, il transfère sur ce personnage qui signe ses productions littéraires toutes les exigences et les qualités que doit posséder un écrivain idéal selon lui : la littérature, doit devenir le véhicule irréprochable de ses pensées. En fait, l’homme et l’écrivain ne se dissocient pas, il ne peut et il ne doit y avoir qu’un minimum d’écart entre la pensée et l’action. L’homme ne peut être que le prolongement de sa pensée.

On peut considérer qu’Orwell a produit 2 types de littérature. Au début de sa vie, une littérature « journalistique » avec Les Quais de Wigan, et Hommage à la Catalogne et vers la fin de son existence, des romans : 1984 et la Ferme des Animaux. Venu à l’écriture par le journalisme, il est considéré comme le fondateur du roman-sans-fiction (bien avant Truman Capote ou Norman Mailer), mais qu’on ne s’y trompe pas, ses récits ne sont pas de simples reportages réalistes, ils sont le fruit d’une mise en scène savamment orchestrée de façon à mettre en valeur la vérité que révèle les faits dont il a été témoin. Le déroulement des événements ne doit jamais constituer une contrainte pour qu’un récit soit réussi.

Leys nous livre une évocation vivante et engagée d’un authentique auteur en mettant en relief les différents aspects de l’homme attachant (Eric Blair) et de l’écrivain exigeant (Georges Orwell), indissociables l’un de l’autre. Il nous laisse l’image d’un écrivain pour qui l’écriture est une forme de combat et d’exigence. Il faut être à la fois réaliste et juste, ce qui n’empêche pas certains aménagements de mise en scène qui, loin de dénaturer la réalité, en dégagent les aspects essentiels. Orwell, par ses techniques littéraires autant que par ses convictions, demeure le maître incontestable d’une lutte pour la liberté des hommes face aux régimes politiques qui cherchent à les opprimer. Sans être individualiste, il apparaît aussi comme le détecteur infatigable de toutes les circonstances qui pourraient empiéter sur le libre arbitre.

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Le bonheur des petits poissons : Lettres de..

Un recueil de délicieuses chroniques parues dans le Magazine littéraire (le vrai!) en 2005-2006, sous le titre Lettres des antipodes.

L'auteur, Simon Leys, pseudonyme de Pierre Ryckmans, d'une culture littéraire sans pareille, fut sinologue et professeur en Australie. Il était né à Bruxelles.

On y trouvera de très belles réflexions sur la création littéraire et artistique. Ce n'est jamais lourd, mais toujours curieux, et souvent légèrement ironique. On y sent un certain conservatisme de lettré. Mais cela n'est pas gênant et se lit donc avec beaucoup de plaisir et d'intérêt. Et surtout on y apprend tant de choses comme en passant. Alors pourquoi se priver?
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Ombres chinoises

Le lecteur de 2020 de ce second livre sur la Chine maoïste verra d'abord comment Simon Leys renouvelle profondément le genre du "récit de voyage". La Chine de 1972 qu'il nous décrit, au lendemain des désastres de la "Révolution culturelle", n'est plus le pays d'aujourd'hui, et cette description a acquis avec le temps une grande valeur historique.



Voyage et séjour paradoxaux que fit Simon Leys, "sinologue qui sait lire le chinois", à l'opposé de tant de maoïstes spécialistes occidentaux, puisque son premier chapitre nous décrit la vie quotidienne des étrangers en Chine totalitaire, enfermés dans une bulle étanche et préservés de tout contact avec le peuple, ce peuple au nom duquel le régime prétend gouverner. Ses déplacements, soigneusement contrôlés, sont conçus pour l'empêcher de voir les ruines laissées par la Révolution culturelle, et la défiguration d'une Chine qu'il aime et connaît. Les chapitres sur les bureaucrates, les universités, la vie culturelle (enfin, ce qui en subsiste) abordent thématiquement la société chinoise, par des portraits et des analyses incisifs et drôles. Enfin, la partie intitulée "Bâtons rompus" contient pensées et observations diverses. Les épilogues et postfaces abordent des sujets aussi variés que la Veuve Mao, Lu Xun ou la fin du maoïsme.



Si la variété domine dans cet ouvrage, si le lecteur ne succombe jamais à l'ennui, la description de la Chine sous la coupe du PC est accablante, d'autant plus accablante que Simon Leys, sinologue, célèbre cette "plus ancienne civilisation vivante", ce peuple souffrant et spirituel dont il fait l'éloge et qu'il voit défigurer par "un régime social-fasciste de caractère féodal", comme osèrent le qualifier de courageux colleurs d'affiches. Seuls des occidentaux de gauche stipendiés ou imbéciles pouvaient ignorer cette pensée de Lin Biao : "Le pouvoir politique, c'est le pouvoir d'opprimer les autres."



Cette histoire est-elle révolue ? La mafia communiste a-t-elle relâché son emprise sur la Chine ? Il suffit de se renseigner. Et parfois, les descriptions des librairies de 1972, des procédures de recrutement des étudiants, de la politique culturelle, font étrangement écho à ... la France d'aujourd'hui. Comment s'en étonner ? Les mêmes qui encensaient Mao et injuriaient ses victimes sont encore en poste, et ont produit des héritiers fort bien placés dans l'université et le pouvoir culturel. La Chine de Simon Leys n'est pas si périmée, ni si éloignée, qu'on pourrait le croire.
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Les habits neufs du président Mao

Ce livre d'histoire consacré à la révolution culturelle chinoise, paru en 1971, est lui-même un événement historique. Cela se voit aux nombreuses annexes, notes et mises au point que l'auteur a ajoutées au fil des années, en réponse aux attaques des "maoïstes mondains" d'Occident, qui persécutèrent l'auteur coupable de dire la vérité sur leur idole du moment, coupable du même crime que la petite fille du conte d'Andersen, seule à voir que les habits neufs du roi n'existent pas et qu'il est nu.



Simon Leys, à la différence de ses détracteurs, savait le chinois et put suivre les événements qu'il relate depuis Hong Kong, puis sur des sources originales. Son analyse de la révolution culturelle n'en conte pas seulement le déroulement mois par mois, acteur par acteur (voir le petit dictionnaire biographique en fin de volume), mais en dégage les causes profondes : Mao perdait le pouvoir, suite à la catastrophe du Grand Bond en Avant, et il le reconquit en s'appuyant sur une jeunesse fanatisée, qui élimina ses adversaires et le remit en selle. Il put ensuite se débarrasser de ses jeunes exécutants grâce à l'armée. Il ne s'agit donc ni d'une révolution, puisque "les masses" furent employées à des intrigues de Palais, ni de "culture", puisque la civilisation chinoise eut à souffrir énormément du vandalisme fanatique des communistes.



Trois points me semblent notables, entre autres qualités : d'abord, l'étude, en début de volume, de la mégalomanie de l'artiste raté Mao, poète et calligraphe médiocre, semi-intellectuel jaloux de ses collègues, frustré, prenant la Chine pour la feuille blanche où il écrira ce qu'il voudra. Simon Leys ouvre une piste de réflexion remarquable sur le rôle historique des artistes ratés, qui se vengent en politique de leur échec personnel : on pense évidemment à Hitler, mais on rencontre en sa compagnie, à des degrés différents d'échec ou de réussite esthétique, Jules César, Frédéric II, Napoléon, Churchill, De Gaulle ; Néron, Louis II de Bavière, Li Yu, Song Huizong (héros du merveilleux Palais des Nuages de Patrick Carré), sont à l'inverse des gouvernants ratés mais des artistes, au moins en ambition. L'autre enseignement précieux du livre est l'analogie entre la politique de Mao et ses modèles chinois antérieurs : l'impératrice mandchoue Cixi organisa elle aussi une révolution culturelle, celle des Boxers, pour éliminer ses ennemis et rester sur le trône ; et enfin l'empereur Qin Shihuang, (Mao ne manquait pas de s'y référer) qui fonda dans le sang et la terreur le premier empire chinois unifié au III°s av.J.C. D'ailleurs, Qin, lui aussi, extermina la classe intellectuelle et tenta de brûler tous les livres (Mao se vanta de faire plus et mieux que lui). Si la dynastie Qin dura peu, et fut violemment rejetée par le peuple, son idée impériale, nous dit Simon Leys, dura deux mille ans. Enfin, en troisième lieu, on a pieusement enseigné et appris dans les universités occidentales que ce ne sont pas "les grands hommes" qui font l'histoire, mais "les masses" ou des processus inconscients et de longue durée. Soit. Ce livre administre cependant la preuve que l'histoire de la Chine communiste, comme celle de la Russie soviétique ou du Cambodge de Pol Pot, sont l'oeuvre d'individus d'exception, et ces "grands" hommes faisaient des masses, prétendument actrices de l'histoire, ce qu'ils voulaient.



Alors, je laisse à d'autres le soin de déplorer le dévoiement du mot "révolution" : les idéalistes pleurent sur les leçons du réel (même parfois Simon Leys, tributaire du langage de son temps). On sort de ce livre un peu moins naïf, un peu moins bigot, en somme un peu moins de gauche. C'est une lecture salubre.
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Images brisées

"Images brisées" est le troisième recueil d'essais que le grand sinologue Simon Leys consacre à la Chine maoïste, en 1976, année de la mort du Grandiose Timonier. le livre se clôt sur cette remarque plutôt drôle, ou sinistre : "Les experts en pékinologie ont bien de la chance : le public ne leur applique jamais les élémentaires critères de compétence professionnelle qui sont normalement requis des garagistes ou des plombiers. Nous congédions les techniciens qui ne réussissent pas à réparer nos autos ou les fuites de nos tuyauteries, mais quand la réalité politique dément les analyses de nos experts, nous congédions la réalité."



Pour ne pas "congédier la réalité" du totalitarisme chinois, Simon Leys se garde d'échafauder de vastes théories d'ensemble, mais collationne articles et essais particuliers écrits sur la Chine entre 1974 et 1976. La première partie est consacrée à des témoignages individuels, toujours éclairés par la réflexion de l'intéressé et de l'essayiste. Ils ont la saveur amère du vécu, que l'on trouve aussi dans L'Archipel du Goulag. La seconde partie rassemble des études sur la situation culturelle du désert chinois : musées, littérature, et ravages irréparables du communisme dans les esprits, les villes et les paysages. La partie "Politique" sera pékinologique : il s'agit de décrypter les grandes campagnes médiatiques par lesquelles le pouvoir manipule le peuple dans l'intérêt de certains dirigeants (par exemple, faire passer l'assassinat de Lin Biao par Mao). Enfin, "Nécrologie" et les Annexes creusent la perspective temporelle avec une étude sur Chiang Kai-Shek et plusieurs sur Mao lui-même. Ces essais, qui n'ont rien d'austère, sont traversés de figures cocasses de maolâtres occidentaux, parfois encore en service de nos jours.



Nos yeux fascinés par les médias, qui prétendent nous informer sur "l'actualité", sont détournés de ces événements. On nous fait croire qu'ils remontent à une lointaine préhistoire, car la tâche propre de la propagande est de périmer le passé pour l'empêcher d'éclairer le présent, où sa domination est pérenne et installée. Or, les morts et les camps de concentration en moins, nous vivons dans un régime qui a emprunté au communisme nombre de ses méthodes. Mais la domination est désormais intériorisée, elle ne s'exerce plus du dehors par la brutalité, et nous sommes changés en victimes consentantes et surtout, bien nourries. En charge de cette domination, on trouve les mêmes qui prirent leurs leçons en URSS et en Chine, et qui ont formé leurs disciples à des techniques éprouvées et à peine modifiées. D'où le grand intérêt des livres de Simon Leys.
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La forêt en feu

Zhou Lianggong, un célèbre lettré du XVII°s, raconte cette fable : un vol de palombes avait pour un temps élu domicile dans une certaine forêt. Plus tard, repassant dans la région, les palombes s'aperçurent que la forêt avait pris feu. Elles s'élancèrent aussitôt vers la rivière, y trempèrent leurs ailes et revinrent secouer les gouttes d'eau de leurs plumes au-dessus de l'incendie. Comme elles s'affairaient à ce manège, Dieu leur dit : "Votre intention est certes touchante, mais je crains fort qu'elle ne serve pas à grand-chose." "On s'en doute un peu, répliquèrent les oiseaux. Mais, que voulez-vous, nous avons habité cette forêt et ça nous fend le coeur de la voir ainsi ravagée."



Ainsi commence le recueil d'essais sur la Chine, le quatrième, que publia Simon Leys en 1983. Cet apologue de la forêt en feu et de la fidélité des colombes place l'auteur non parmi les passéistes, les traditionalistes, mais suffit à faire sentir qu'il n'est pas de ces "progressistes" qui se réjouissent de la destruction du monde humain que les générations avaient construit. Ce monde, ici, est celui de la plus ancienne civilisation vivante, comme il l'écrit, celle de la Chine, qu'il commence par évoquer dans un premier chapitre sur la poésie et la peinture, du niveau de François Cheng ou de Jean-François Billeter. Le second étudie les missions chrétiennes en Chine au XIX°s, par la figure haute en couleurs d'un prêtre gascon, le Père Huc, et permet de mesurer à quel point les missionnaires, après les figures lumineuses des Pères Jésuites du XVII°s, ne comprenait plus que la Chine était une civilisation. Mépris fatal dont Simon Leys s'amuse à suivre les traces jusque dans le discours sinologique, "pékinologique", des maoïstes occidentaux qui occupèrent, et occupent encore, les postes clés des médias francophones et anglophones. Les chapitres "Politique " et "Hygiène" analysent la libéralisation du régime communiste après la mort de Mao et l'élimination de sa veuve : l'auteur reste sans illusions sur la capacité d'un régime communiste totalitaire à se réformer lui-même, et fait écho aux méfiances des Chinois eux-mêmes. Il semble que les années qui suivirent lui donnèrent raison. Le chapitre "Hygiène" contient une savoureuse critique de Mme Han Suyin qu'on lira pour se détendre, et d'autres experts maolâtres bien de chez nous. Enfin le lecteur trouvera en annexe des propos du grand écrivain Lu Xun (que je goûte peu) et l'appel de Wei Jingsheng à la démocratie, dont on sait ce qu'il devint.



Les staliniens amateurs affirmaient que l'âme russe s'accommodait mieux que la nôtre de la tyrannie. Les sinologues maoïstes tenaient semblables propos sur la longue habitude chinoise de l'oppression. Simon Leys

fait justice de ces sottises germano-pratines et rappelle, à l'encontre de la pensée totalitaire et identitaire, que les identités ne justifient pas les crimes. Pourquoi, dit-il, ne pas justifier Auschwitz au nom de la manière typiquement allemande, culturellement germanique, de traiter les Juifs ?
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Les idées des autres : Pour l'amusement des l..

On pourrait croire qu'il n'y a pas plus fidèle portrait d'un homme et d'un esprit que la liste des citations et extraits d'auteurs qui ont compté dans sa formation. C'est sans doute vrai de certains. Pour ce qui est de Simon Leys, il est merveilleusement présent dans ses livres sur la Chine, où il met son ego au second plan ; mais ici, chaque citation est classée, sélectionnée et recopiée en fonction des choix personnels de l'auteur ("idiosyncratiquement compilées" dit le sous-titre) et l'on s'ennuie à lire cette collection de lieux communs d'un intérêt inégal. On en vient à se demander comment ce témoin si lucide des mensonges de la Chine communiste, a bien pu faire pour y voir clair avec ce bagage et ces goûts. On se demande où est passée son ironie. En somme on ne le reconnaît pas. Cette déception peut s'expliquer, peut-être, par la place très marginale qu'occupent la Chine et la culture chinoise dans ce livre écrit par un sinologue. Beaucoup d'auteurs et moralistes anglo-saxons assez plats (Thoreau, Emerson, Conrad), quelques très rares antiques, peu développés, presque rien de la foi et de la tradition catholiques (à part Léon Bloy) qui étaient celles de l'auteur, beaucoup de Valéry dans sa forme sentencieuse, en somme, peu d'auteurs ou d'extraits intéressants et de révélations. J'ignore si ce petit livre manifeste les limites du genre, ou celles de l'auteur, ou encore, celles du lecteur.
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L'ange et le cachalot

Le grand sinologue Simon Leys s'est attiré la haine des "maoïstes mondains" français (Sollers en tête) et de la gauche institutionnelle, qui brisèrent sa carrière en pays francophone et l'obligèrent finalement à faire profiter l'Australie et le monde anglo-saxon de ses lumières. Dans les années où il vécut, un esprit libre et lucide y rencontrait moins d'aversion et de haine que dans le milieu intellectuel français, prêt à toutes les allégeances aux dictateurs marxistes.



Cela nous vaut, dans ce petit recueil d'essais, de remarquables textes, brillants d'intelligence et de bon sens (vertu inconnue des universitaires de gauche), sur la littérature de langue anglaise : D.H. Lawrence, Evelyn Waugh, R. L. Stevenson, R. H. Dana et d'autres sont évoqués et analysés par un Simon Leys critique et traducteur. Certains essais sont traduits directement de l' anglais. La part de la Chine et de la sinologie est plus restreinte : une introduction à l'édition américaine des Analectes de Confucius, un compte-rendu de lecture pour la New York Review of Books du magnifique "Art chinois de l'écriture" de Jean-François Billeter, et la traduction des "Trente-trois délices de Jin Shengtan". Seuls trois textes concernent des auteurs français : Balzac, Malraux, Simenon, et là encore, tout comme avec le Maoïsme et le gauchisme culturel, ou avec toute religion officielle, Simon Leys fait preuve d'une liberté d'esprit rafraîchissante.



N'en déplaise au lecteur français, ces études de Simon Leys révèlent qu'il doit sa lucidité et sa liberté d'esprit à son ferme ancrage dans le catholicisme, qui transparaît discrètement, parfois, au détour d'une page (voir l'essai sur E. Waugh). Certaines fidélités aident à voir clairement que "le roi est nu" (Les habits neufs du Président Mao) et que les idées du moment sont des idoles sans consistance.
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Les naufragés du Batavia, suivi de :  Prosper

J’aime la littérature marine, celle qui me fait naviguer sur les flots, celle qui me fait sentir les embruns, celle qui me fait veiller sous les étoiles, celle qui me fait vomir toute la bile par temps de forte houle. Je crois que je rêverais d’être un marin, petit mousse avec son pompon rouge ou capitaine barbu, bourru et bourré. Une vie à bord d’un bateau, cela a quelque chose de fantastique, une grande aventure qui entre deux escales fouette et chevauche les flots.



Bien avant le Titanic, un naufrage marqua aussi fortement l’imaginaire du public. Nous sommes en 1629.



Le Batavia, navire marchand hollandais, fait la route vers Java, mais sombra au large des côtes australiennes. L’histoire aurait pu s’arrêter là : un banal naufrage comme il y en eu tant à l’époque. Des noyés certes, mais aussi des survivants, qui auraient peut-être mieux fait de se laisser aller à la noyade, car leur destin fut encore bien plus cruel qu’une agonie sous-marine de quelques minutes.



Simon Leys retraça l’histoire de ce naufrage et surtout de l’après… L’île sur laquelle se réfugient les naufragés a tout pour être paradisiaque. Aux alentours, on y trouve de l’eau potable, des fruits sauvages, des kangourous, des poissons et de succulentes langoustes. Et pour organiser cette nouvelle vie, un chef parmi les naufragés se désigne tout naturellement… Ce chef sera autoritaire, sanguinaire, totalement dépourvu de bon sens et sombrera dans la folie dictatoriale. Mais je ne vous en raconte pas plus… « Les Naufragés du Batavia », montre l’Homme, tel qu’il est lorsqu’il s’éprend du pouvoir, comment une idéologie peut transformer le Paradis Terrestre en enfer damné loin de toute rationalité.
Lien : http://leranchsansnom.free.f..
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