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Critiques de Vanessa Bamberger (180)
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Alto Braco

D'un passé oublié, Vanessa Bamberger nous fait traverser les étendues désertiques et minérales du haut plateau de l'Aubrac. Cantal, Lozère et Aveyron, l'auteur comble avec nous les trous de mémoire d'une triple identité : trois entités rassemblées sous la bannière de l'Auvergne, trois communautés géologiques et humaines qui forme le coeur de la France, et celui d'une femme.



Brune est une jeune parisienne privilégiée. de nature calme et rangée, elle mène une vie paisible et épanouie en tant que directrice de crèche.

La disparition de sa grand-mère risque bien de profondément bouleverser sa vie simple et tranquille.

C'est Douce, la bien nommée, et sa soeur Annie, également appelée Granita, qui ont élevé Brune après le décès très tôt de sa mère.



Aveyronnaises d'origine, leur verbe haut et imagé rythmera les souvenirs de son enfance. Des femmes fortes au tempérament bien trempé, à l'image de leur région natale : l'Aveyron sur les hauts plateaux de l'Aubrac, région volcanique et minérale, balayée par le vent, mystérieuse et âpre à l'identité secrète mais tenace.



Ma chronique :
Lien : https://www.fnac.com/Alto-Br..
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Les Brisants

Alto Braco, le deuxième roman de Vanessa Bamberger, que j’avais apprécié, se déroulait sur le haut plateau de l’Aubrac. Les brisants, son dernier, comme le titre le sous-entend, évoque la mer et ses embruns et se passe principalement sur l’île de Batz, cette île bretonne au large du Finistère.

Ces deux romans ne sont pas aussi éloignés l’un de l’autre qu’ils ne le paraissent. Ils ont en commun la beauté rude des paysages et le cheminement d’une femme en quête de ses origines et de la vérité.

Dans Les brisants, Marion, restauratrice de tableaux, délaisse ses outils pour se rendre sur l’île de Batz où vingt ans auparavant, son frère Léo, alors âgé de quatorze ans a disparu une nuit, au cours d’une colonie de vacances. Il n’est jamais réapparu et son corps n’a jamais été retrouvé. Marion en avait sept au moment du drame et depuis, leur mère Édith est envahie d’une angoisse permanente.

C’est en débutant le travail de dévernissage sur Noli me tangere, tableau de Peter Paul Rubens et Jan Bruegel le Jeune, que le choc s’est produit pour Marion. Elle a eu l’impression de revoir quelque chose de Léo. Ajoutées à cette évocation plusieurs coïncidences troublantes, et l’idée de partir en Bretagne sur les traces de sa famille voit le jour. Élucider peut-être ce mystère qui plane sur la disparition de ce frère...



La restauration des tableaux, l’allègement des vernis (titre et thème, par ailleurs, d’un superbe roman de Paul Saint Bris), le comblement des lacunes requièrent tout d’abord un long examen de la toile puis de longues heures de concentration et de patience afin de redonner son éclat à ce qui l’a perdu, voir surgir les couleurs originelles et permettre ainsi à un tableau ancien de renaître.

Peut-on faire de même avec le passé ?

Le voyage qu’entreprend Marion pour tenter de soulever le voile de non-dits, de secrets de famille, de violences tues de génération en génération, dénouer les fils d’un passé qui la consume s’apparente beaucoup au métier qu’elle exerce.

J’ai aimé ce rapprochement fait par l’autrice et l’ai trouvé très pertinent.



Cette quête de vérité, cette enquête, elle doit absolument la mener à terme, quelles qu’en soient les difficultés si elle veut devenir une femme libre.

Vanessa Bamberger en utilisant ce parallèle montre bien la délicatesse et la grande patience qui doivent être utilisée dans les deux cas.

Si Les brisants est avant tout un roman psychologique, il est également un thriller et un roman d’amour dans lequel cette terre inconnue pour Marion qu’est l’île de Batz occupe une place prépondérante. La faune, la flore et ces fameuses algues brunes contribuent grandement à cette atmosphère très mystérieuse, inquiétante et souvent oppressante dans laquelle évolue l’héroïne.

Vanessa Bamberger, avec une écriture fluide, m’a emportée avec plaisir dans cette aventure qui conte le cheminement d’une femme vers elle-même, vers les autres, vers la liberté… Une renaissance dans laquelle les couleurs sont à l’honneur. « Du ciel couleur graphite », première image, nous nous retrouvons « en pleine lumière », les mots de la fin...


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Alto Braco

L'Aubrac, ses terres rudes, ses fermes, sa gastronomie, Laguiole… Ce massif que se partagent trois départements : l'Aveyron, la Lozère et le Cantal, Vanessa Bamberger m'y a ramené, me plongeant d'abord dans une histoire familiale compliquée, puis elle a emporté mon adhésion avec son immersion dans la nature sauvage et son analyse de l'élevage.



Alto braco ne signifie pas « haut lieu » comme indiqué en quatrième de couverture, version que donne d'abord l'autrice mais qu'elle rectifie peu avant la fin : « La teinte brune de la tourbe de l'Aubrac, dont l'origine occitane, alto braco, signifiait donc « haute boue » et pas « haut lieu » comme je le croyais. »

Vanessa Bamberger mène son roman en quatre parties comme un grand repas, avec Mise en bouche, Hors-d'oeuvre, Viandes et Entremets, ainsi qu'on aime le faire, là-haut du côté de Laguiole ou Nasbinals. Pourtant, tout commence à Paris et on y reviendra régulièrement avec les limonadiers aveyronnais et cantalous qui, dans les années 1980, possédaient encore les trois quarts des cafés-tabacs de l'Île-de-France.

La narratrice, Brune Salazard, fille d'un bistrotier, est élevée par ses deux grands-mères, comme elle les appelle : Douce et Annie Rigal, cette dernière étant surnommée Granita. Elles tiennent toutes les deux un bistrot, le Catulle, rue Catulle-Mendès, dans le 17earrondissement.

C'est la mort de Douce qui va ramener Brune et Granita sur l'Aubrac, retour pour l'enterrement, à Lacalm. Cela va déclencher une avalanche de retrouvailles, de mises au point et de révélations surprenantes et bouleversantes, touchant Brune au plus profond d'elle-même.

L'autrice m'a régalée de descriptions détaillées, de précisions bien senties chaque fois qu'elle monte sur l'Aubrac ou qu'elle part en balade. Elle découvre le plateau où vit et travaille encore une bonne partie de sa famille.

C'est au cours de ses pérégrinations sur l'Aubrac que surgit immanquablement le débat sur l'élevage et sa conséquence, la consommation de viande. La recherche du profit a enclenché un processus constaté dans toutes les filières de l'élevage, absurdités dictées par l'appât rapide du gain mais contribuant un peu plus au saccage de notre planète.

« D'après Granita, sur l'Aubrac, les vaches avaient plus de valeur que les êtres humains. On y trouvait plus de vétérinaires que de médecins. » Cela n'empêche pas les éleveurs de vendre leurs veaux aux Italiens pour qu'ils les engraissent au maïs et autres ajouts dangereux pour notre santé, pratiques aberrantes pour le bien-être de ces animaux. Certains éleveurs tentent de changer, de passer à l'élevage bio, comme Clémence, ou encore à l'élevage raisonné mais reste le poids des mauvaises habitudes.



Sur fond de bonne cuisine et de consommation de viande excessive comme le constate souvent la narratrice, Alto Braco se termine de façon un peu décevante car Vanessa Bamberger prouve, hélas, que lorsqu'on est déraciné, c'est très dur, voire impossible de revenir au pays.




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Alto Braco

« Alto braco », le « haut lieu » en occitan, l'ancien nom du plateau de l'Aubrac. Brune, la narratrice trentenaire en est originaire, mais a été élevé à Paris dans le bistrot de ces deux grands-mères, ou plutôt Douce sa grand-mère maternelle et Annie sa grand-tante. Elle aussi ont quitté l'Aubrac, définitivement pensaient-elles. Brune doit y retourner pour y enterrer Douce et découvre ce territoire inconnu comme une touriste chez soi.



Les thèmes qui courent dans tout le roman et qui questionnent la narratrice sont passionnants : la transmission, le lien au pays d'origine. On suit pas à pas le cheminement intime de Brune qui ne croit ni aux gènes ni à la terre, mais découvre progressivement qu'elle s'est trompée sur ce qu'elle aime en réalisant la beauté rude et authentique de l'Aubrac et des êtres qui le peuplent. Sa quête de sens débouche sur une quête de vérité qui la mettent en face de lourds secrets de famille, de mensonges ou d'arrangements avec la vérité. Si elle veut devenir une femme entière, elle ne peut plus esquiver le passé comme l'ont fait ses deux grands-mères avant elle et comme elle l'a fait aussi, prise dans une lignée généalogique qui fait bégayer l'histoire.



Thèmes forts donc mais malheureusement, je suis restée spectatrice très lointaine de cette épiphanie de l'être. Si j'ai été touchée par les magnifiques descriptions de l'Aubrac et par les personnages fantasques des deux grands-mères bistrotières, la narratrice m'a souvent indifférée voire quelque peu agacée avec ces questionnements répétitifs et naïfs.



Je pense également que je n'ai pas accroché avec la volonté kaléidoscopique de l'auteure qui plaque sur la transformation intime et profonde de Brune une thématique plus documentaire sur l'élevage et l'industrie de la viande. Cela m'a semblé artificiel, avec des enchaînements peu fluides entre les deux univers, alors que la trame romanesque de quête de soi et des origines était suffisamment forte pour se suffire en soi.



De beaux thèmes, deux beaux personnages mais au final un roman pas assez abouti à mon goût pour me faire vibrer.
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L'enfant parfaite

Coup de coeur ! Un roman bien ancré dans la réalité de ce début de 21è siècle.





Si la pression exercée sur la jeunesse, qu'elle soit dorée ou à la dérive n'est pas une nouveauté, il semble bien quand même que le rouleau compresseur soit monté en puissance.



Pour Roxane, l ‘adolescence, c'est la lutte sans merci pour se maintenir au niveau exigé par le lycée tremplin pour les prépas, c'est un parcours en équilibre instable au rythme des alliances amicales ou amoureuse, c'est aussi le quotidien en solo avec une mère altiste et peu présente. C'est aussi la trahison sournoise d'une débâcle hormonale sous la forme d'un éruption d'acné, qui peut très bien faire basculer le tout. Malgré le conflit des parents entre la mère adepte du « zéro médoc » et le père soucieux au delà du raisonnable de l'aspect physique de sa fille, Roxane apprécie le répit que lui confère le traitement par isotrétinoine.



François est cardiologue. En ville. Il n'a pas cédé aux injonctions de son père lui aussi médecin libéral et qui rêvait d'un fils chef de service hospitalier. Malgré tout, il voudrait bien détourner son propre fils d'un avenir de saltimbanque.



Jusqu'au drame qui vient rompre la corde tendue de cet équilibre précaire.





Aucun temps mort dans cette histoire qui alterne les personnages, Roxane et François, jusqu'au point critique qui va réunir leurs destins. La tension se majore dans un crescendo que ne dément pas la construction à la manière d'une oeuvre musicale, entre quatre mouvements.

La bande son ne s'en tient pas au classique, calquée sur le répertoire de la mère de Roxane puisqu'elle fait aussi la part belle également aux hits écoutés par les ados.



J'ai aussi beaucoup apprécié de faire une mise à jour de mon lexique « jeune », d'ailleurs proposé en annexe avec la traduction.
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Principe de suspension

Principe de Suspension, 33 chapitres aux titres de "suspension" et de "principe", déclinés dans leurs différents sens, qu'on s'amuse à en déchiffrer le sens par rapport au texte.

Normandie, la région du Hayeux, les usines désaffectées pourrissent lentement,dans le silence d'une campagne fantôme.

Un couple encore jeune, Thomas et Olivia, quinze ans de mariage, un couple en suspension*.

Thomas, "workaholic", patron d'une PME, fabrique des systèmes d'inhalation médicamenteux en matière plastique pour asthmatique, avec comme unique client un gros laboratoire du coin. Or ce dernier a des sérieux problèmes .....licenciement, délocalisation.....Bref rien de brillant en perspective. La crise des années 2008, la mondialisation......

Olivia, artiste-peintre mal reconnue, mal dans sa peau, mal dans sa famille, mal dans son couple, bref mal dans sa vie.

Vous avez compris, les choses ne vont pas fort.....et....Thomas tombe dans le coma à la suite d’une détresse respiratoire, ironie du sort, elle-même provoquée par une crise d’asthme non traitée, suspendu entre la vie et la mort....

L'originalité de ce premier roman vient de sa construction, une construction mécanique. Alternant le temps suspendu suite au silence de Thomas avec le passé proche où l'auteur nous remonte le temps.... où le temps reste toujours suspendu. Cette suspension est la force motrice, qui nous fait lire ce livre comme un thriller, jusqu'à ce que le passé rattrape le présent.

Est-ce-que Thomas va se réveiller ?

Est-ce-que le PME va pouvoir être sauver ?

Et quel sort pour le couple en suspension ?

Tout est en suspension.....mais on a beau s'agiter, tout finit par retomber à la fin......

Rien, non rien ne peut rester éternellement en suspension.



Un premier roman très réussi.



* "Le couple est une suspension. Un médicament. Un équilibre hétérogène. La dispersion d’un solide insoluble dans un milieu liquide ou gazeux. Au début, les particules restent en suspension. La stabilité est garantie. Mais avec le temps, il faut agiter le médicament pour le préserver. Sinon les particules précipitent au fond du flacon, et se séparent."







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Alto Braco

Dans Alto Braco, Vanessa Bamberger brosse un magnifique tableau de l’Aubrac.

Brune, originaire d’un petit village de l’Aveyron mais ayant grandi à Paris, y retourne pour l’enterrement de sa grand-mère, Douce. Elle ne reconnaît rien mais, petit à petit, elle va se familiariser avec ce pays d’élevage et va fleurir en elle un sentiment d’appartenance.

Si, parfois, j’ai trouvé le ton un peu trop journalistique, cette fiction est un bel hommage que rend l’autrice à l’Aubrac.

En conclusion, je dirais qu’il paraît important que chacun d’entre nous connaisse sa propre histoire familiale, que ceci est indispensable à notre épanouissement.

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Alto Braco

Voyage en terre... familière : j'ai lu avec curiosité et sans déplaisir le livre de Vanessa Bamberger qui déroule son menu roboratif construit comme un repas de noces ou plutôt,  en l'occurrence,   d'enterrement ,- des hors d'oeuvres aux entremets- , pour raconter  une saga familiale sur fond de crise de l'élevage,   entre quatre villages haut perchés de mon Aubrac bien aimé: Lacalm,  Laguiole,  Saint Urcize et Nasbinals.



L'auteur sait "documenter" un sujet et s'organiser pour que rien de cette manne récoltée par elle ne soit perdu pour le lecteur!  Un vrai dépliant touristique, assez habilement habillé en roman. Pourtant, je n'y ai pas appris grand chose, si ce n'est l'étymologie du nom, Aubrac, cet alto braco qui signifie non pas  le haut lieu mais la haute tourbière...



Un vrai roman de crises, aucune ne manque : de la crise identitaire de Brune Alazard, la parigote, petite- fille de bistrotier parisien, et descendante d'éleveurs  aveyronnais, en mal de racines, de pays natal et de ( secrets de ) famille, à la crise de la viande sur fond de malbouffe et de vache folle, en passant par la crise des campagnes pas aussi déshéritées ni désertifiées qu'elles en ont l'air, et la crise  de la capitale- proclamée-  inhabitable... mais si  addictive que Brune  n'arrête pas d'osciller entre l' Aveyron et Paris comme un pendule irrésolu!



La problématique de l'élevage et celle qui lui est étroitement liée, la consommation de viande, n'est pas abordée , ici, de façon révolutionnaire: ni bio, ni intensif, l'élevage se doit d'être de qualité, tant dans le choix des bêtes que dans leur élevage proprement dit.



Étables de taille humaine, races authentiques, fourrage naturel, estives de luxe au milieu des fleurs, veaux sous la mère, engraissement sur place et abattage  intra muros: autrement dit , d'un bout à l'autre de la chaîne, responsabilité et familiarité. Style :  "J'ai bien connu la vache dans votre assiette"!



Le tour du pays, de ses us et coutumes , quoiqu'assez appuyé et exhaustif , ne manque pas de sel, la question de la viande, elle , ne manque pas  d'à propos ( à moins que ce ne soit l'inverse!) ...mais les  relations familiales et les secrets de famille, l'alibi romanesque,  sont si banals, si inutilement complexifiés qu'ils m'ont proprement rasée,  et ont encombré cette lecture didactique qui n'avait pas besoin de cet enrobage romanesque en kit pour se laisser lire.



Vous dirais-je le fond de ma pensée?



Quand il s'agit d'Aubrac, je préfère à toutes les documentations de parisienne ayant fait sciences Po',  quelques lignes des Carnets du Grand chemin de mon cher Julien Gracq qui, tout agrégé de géographie qu'il est,  ne fait jamais sentir son érudition mais ,  pour chanter le paysage, et le plateau d'Aubrac en particulier, sait y puiser ses images les plus fortes,  en distiller la poésie la plus secrète.



C'est ce qui m'a le plus manqué dans cette lecture.

Les images et la poésie. 

Autrement dit , l'essence même de mon Aubrac bien-aimé.
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Alto Braco

Dans son second roman Vanessa Bamberger renoue les fils d’une histoire familiale en retournant sur le plateau de l’Aubrac enterrer la grand-mère qui l’a élevée.



La narratrice, répondant au doux prénom de Brune, vient de perdre Douce, la grand-mère qui l’a élevée avec sa sœur Annie, sa mère étant décédée à sa naissance. Installée dans la région parisienne, elle fait partie des descendants de bougnats, ces immigrants venus des hautes terres du Massif central et qui ont petit à petit mis la main sur le commerce du bois et du charbon livré à domicile), mais surtout des boissons. Ce qui les a conduit à gérer cafés, restaurants et hôtels. Leur succès a été tel que les Auvergnats de Paris formaient dans le premier tiers du XXe siècle la communauté immigrante la plus importante de la capitale française.

Brune a promis à Douce de l’enterrer dans son Aubrac natal et si Annie, proche de ses sous, a bien rechigné un peu face à la dépense, elle a fini par accepter de prendre la route derrière le corbillard.

À l’émotion du dernier adieu vient alors s’ajouter celle de ces paysages où les racines familiales sont bien plus profondément ancrées qu’elle ne s’imagine. Brune retrouve là son taiseux de père, Serge Alazard. Il avait choisi de lâcher son bistrot pour reprendre l’élevage de ses parents à Saint-Urcize, laissant Brune avec ses aïeules.

Dans un quadrilatère composé de Laguiole, Lacalm, Saint-Urcize et Nasbinals, elle va aussi retrouver des cousins, des traditions, des secrets de famille. Et cette certitude qu’elle est beaucoup plus proche de ce coin perdu qu’elle ne l’osait se l’avouer: « J’avais raison, je venais d’ici, j’étais d’ici. Il ne faut pas oublier d’où l’on vient. Ou plutôt, il faut savoir d’où l’on vient pour pouvoir l’oublier. Je n’appartenais pas à une terre, mais à une histoire, dont je devais connaître le début pour en écrire la fin. »

Brune, qui a la phobie des couteaux et ne mange quasiment pas de viande, et surtout pas de viande rouge, va se transformer au fil des pages et au fil des rencontres. À Laguiole, avec son cousin germain Gabriel, qui travaille chez «Boyer & fils, maîtres couteliers depuis 1904» elle va non seulement apprendre à aimer les couteaux, mais aussi lever un coin du voile sur son ascendance. Douce avait été le grand amour de Maurice Boyer, mais ce dernier avait épousé Eliane. Le couple avait donné naissance à Chantal, tandis que Douce mettait au monde Rose, la mère de Brune et de Maurice. Du coup, Brune comprend mieux pourquoi Chantal avait haï Douce toute sa vie. Mais elle n’est pas pour autant au bout de ses surprises…

À Nasbinals où habite le cousin Bernard, elle va aussi rassembler des indices. Mais aussi s’intéresser à l’élevage et aux pratiques agricoles censées faire la richesse de cette région, au point de vouloir initier un projet pour transformer l’exploitation paternelle.

Au fil des pages, on comprend que le centre de gravité de sa vie s’est déplacé. Elle prend souvent la route de l’Aubrac, elle délaisse Maxime, ce cadre supérieur à la Société Générale, avec lequel elle s’est liée. Un peu comme s’il y avait urgence, un peu comme si c’était sa dernière chance de rassembler les pièces de son puzzle.

Les dernières pages sont magnifiques, riche en rebondissements et en révélations et viennent confirmer le talent de conteuse de Vanessa Bamberger.


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L'enfant parfaite

Coup de cœur pour ce roman très contemporain : Roxane , fille d’un cadre supérieur Cyril et d’une musicienne Mélanie ——-qu’elle appelle par leurs prénoms ——-intègre depuis toujours les exigences de ses parents , être la première toujours , partout , obtenir une bonne place en classe préparatoire au sein d’un lycée parisien prestigieux.



Pourtant depuis la rentrée en classe de première scientifique, rien ne va plus: ses amies, ses amours , son apparence physique .



Elle doute, se sent cobaye, tyrannisée , jouet piloté sélectionné par les profs, triés , conformes , génération anxiété …

Son organisme constamment sous pression ne doit pas lâcher …..

Pour soigner l’acné qui enflamme son visage , elle n’a d’autre recours que de solliciter un ancien ami de son père François devenu médecin.



«  Mon acné est l’acmé de la maladie d’amour pour toi, maman » .



C’est un livre à la langue orale intense , au verbe franc , slamé , direct , qui raconte la pression scolaire , l’adolescente et notre époque.

N’en dévoilons pas plus .



Un message percutant juste et sensible criant de justesse qui interroge le culte de la perfection et de la performance de la société contemporaine .



Il interroge l’amour et les attentes parentales angoissées ,nous rappelle la fragilité de l’adolescence et l’imperfection ,à propos de cette période si particulière, délicate ….

Un texte douloureux , méticuleux , rythmé , acéré , percutant , à la précision incroyable qui nous parle au cœur.

L’auteure en croisant deux histoires: médicales et scolaires nous bouleverse , nous interpelle , nous questionne .

Un livre à la partition juste , humaine , qui devrait résonner comme un avertissement !

Chacun devrait le lire .
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Alto Braco

Quoi de plus merveilleux pour un lecteur que de contempler en direct les paysages décrits par le roman que l'on est en train de lire? C'est ce qui m'est arrivé il y a une semaine; de séjour dans l'Aveyron nord, j'ai pu découvrir le venteux et sauvage Aubrac.



L'auteure, à travers ses personnages, raconte la région de sa famille, et l'on sent combien elle y est attachée. Le style est souvent poétique et rend bien la beauté particulière et dépaysante des lieux.



La narratrice, élevée à Paris par sa grand-mère et sa grand-tante, très originales propriétaires d'un bistrot de quartier, retourne sur les terres de l'Aubrac, à la mort de sa chère mamie, Douce. Elle n'y était plus venue depuis l'enfance.



J'ai beaucoup aimé ce retour aux sources, cette remontée vers les origines, qui s'accompagne d'un dévoilement de secrets douloureux. S'y greffe une analyse intéressante de l'élevage, principale activité de l'Aubrac, les procédés malhonnêtes de certains pour rentabiliser la vente des bêtes, la volonté d'autres de préserver le bien-être animal et la nature. Cependant, cela a un peu court-circuité l'histoire personnelle des personnages, c'est dommage. Et on perd en émotion.



Un bel hommage sensible à l" Alto Braco", cet haut plateau aveyronnais au charme fou. A découvrir!
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L'enfant parfaite

Roxane, 17 ans, vient tout juste d'intégrer la 1ere S au lycée Sully, grand établissement parisien, le lycée Sully et se destine à une scolarité portée par une obligation d'excellence qui l'habite depuis toute petite.



Mais ses parents ont récemment divorcé, son père est parti vivre dans le Sud de la France tandis que sa mère, musicienne, la laisse souvent seule à gérer des angoisses de plus en plus présentes.



Ses notes baissent et peu à peu, Roxane semble de plus en plus avoir de mal à résister à la pression.



Un beau jour, son chemin croise celui de François, ancien camarade de classe devenu médecin cardiologue.



Roxane, qui en plus de ses angoisses, souffre de poussées d'acné importantes, va lui demander une prescription qui va bousculer leur vie à tous les deux.



L'enfant parfaite fait alterner les deux voix, un chapitre reprend le journal de Roxane en 2017 tandis que celui d'ensuite nous plonge dans les pensées de François, qui, deux ans plus tard, est sommé de comparaitre devant le Conseil de l'ordre des médecins suite à cette fameuse prescription.

Vanessa Bamberger, dont on avait beaucoup aimé le précédent roman Alto Braco il y a deux ans, touchante et lumineuse ballade auvergnate, change de ton, de lieu et de thématique pour son nouveau roman.



Si on veut paraphraser un peu le film de Jacques Audiard, "L'enfant parfaite," c'est un peu "Regarde les ados sombrer". Vanessa Bamberger sonde avec acuité et sans jugement aucun la jeunesse d'aujourd'hui, une génération sous une pression constante qui ne semble pas vraiment être écoutée par les adultes et qui ne se ménage pas forcément elle-même.

Roxane devient un peu l'incarnation de ces jeunes dont l'horizon professionnel semble tant bouché que la pression est énorme et que les enseignants et parents leur font croire qu'ils jouent toute leur vie alors qu'ils ne sont pas encore majeurs.



En parallèle, les chapitres consacrés à François permet à la romancière de dire également des choses pour le moins pertinentes sur cette judiciarisation qui menace la médecine d'aujourd'hui et la part de responsabilité d'un médecin, sujet forcément d'actualité depuis la dernière crise sanitaire; thèmatique que Thomas Lilti abordait à sa manière dans le récent "Le Serment ."



Avec "L'enfant parfaite", roman assez glaçant mais qui laisse en même temps advenir l'empathie pour ses personnages, et où la musique occupe une part prépondérante, Vanessa Bamberger permet à ce qu'un dialogue entre deux générations a priori éloignées sur pas mal de choses puisse tenter de se (re)nouer...



Ce n'est là pas le moindre de ses mérites...




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Alto Braco

Pour son deuxième roman, Vanessa Bamberger explore le monde des éleveurs de l'Aubrac. avec son héroïne, Brune, fonctionnaire de 35 ans élevée par sa grand-mère et sa grand-tante, deux sœurs auvergnates et bistrotières, au caractère fantasque.



A la mort de l'une d'entre elles, elle va partir à la quête de ses origines.et va creuser le sillon de cette Auvergne qu'elle connaissait si mal.



Sans trop y croire au départ, ce retour aux sources fait vaciller les certitudes de Brune. alors même qu'elle ne croyait pas particulièrement aux racines terriennes, persuadée que le sentiment d'appartenance n'existait pas vraiment .



Brune va alors découvrir un Aubrac bien vivant (Alto Braco, «haut lieu» en occitan, l’ancien nom du plateau de l’Aubrac.) et va rencontrer ses cousins qui lui révèlent des secrets de famille -



Cette découverte de son son histoire intime va finalement la soulager et lui faire comprendre ce qui l'a bloqué jusqu'alors.



En découvrant son passé auvergnat, l'avenir de cette Parisienne purs jus se libère totalement de ses chaines.



Sur une histoire largement autobiographique - la grand-mère maternelle de l'auteur y avait passé son enfance et elle y est retournée à sa mort, Vanessa Bamberger nous livre une ballade touchante sur le destin d'une jeune femme qui se révèle à elle même et à ses ancêtres.
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Alto Braco

Mère, père et… terre ! Comme le dit la grand-tante de la narratrice au début du roman : à la campagne, les psys ne sont d’aucune utilité. Brune, l’héroïne, interroge sa mémoire, celle de sa mère morte en couche, celle de son père qui a fuit le malheur et les responsabilités. Il lui reste ses aïeules… et la terre de l’Aubrac. La terre suffit, elle est le début et le commencement de tout. La terre et les sacrifices qu’elle demande à ceux qui la sollicitent, son ingratitude, sa dureté, sa bonté aussi, quand le fruit du labeur nourrit et donne un sens à la vie. Brune croyait refermer le livre de son histoire familiale en enterrant sa grand-mère mais elle en découvre de nouveaux chapitres en arpentant les terres austères de l’Aveyron. Plus elle en apprend sur cette terre, ses secrets inavouables, ses hommes, ses animaux (« ici les vaches sont plus importantes que les le gens »), plus elle prend conscience de son identité et de son lieu d’appartenance (on dirait where I belong, en anglais). Et si le fait d’appartenir à une terre et d’y grandir un peu nous marquait à jamais, en produisant une « épimutation » ? Dans une écriture raffinée et une tradition qu’on n’avait perdue depuis des auteurs comme Genevoix ou Vialatte, Vanessa Bamberger se risque à nous parler de racines et du retour aux sources. Le pari était osé, il est réussi. On ne s’ennuie jamais, on s’éprend des personnages et on apprend beaucoup (l’Aubrac, les bougnats de Paris, l’élevage, la viande, le bio...) On sent que Vanessa Bamberger a potassé son sujet et qu’elle a l’ambition de nous transmettre l’intégralité de son savoir – c’est l’unique reproche que je lui ferais. On lui pardonne volontiers, à une époque où les écrivains se prélassent dans une autofiction qui ne sort pas du périph’. Le voyage, qu’il soit aux antipodes ou dans l’Aveyron, est toujours salvateur.
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Alto Braco

Sa mère étant morte dans les jours suivant sa naissance, Brune, la narratrice, a été élevée par ses deux grands-mères, à vrai dire par sa grand-mère et sa grand-tante, deux soeurs originaires de l'Aubrac et venues dans les années soixante s'établir bistrotières à Paris, dans la plus pure tradition auvergnate. Fantasques et terribles, mais si humaines et attachantes, les deux « maîtresses-femmes » se sont consacrées sans relâche, avec acharnement et souci de bien faire, à leur travail et à l'éducation de Brune, en faisant une petite Parisienne bien éloignée des racines familiales dont elle ignore quasiment tout.





Lorsque sa grand-mère décède en exprimant le souhait d'être inhumée en terre natale, c'est pour Brune une profonde remise en cause de toutes ses certitudes qui l'attend au berceau familial. Dans ces paysages à la beauté et à l'âpreté climatique si particulières de l'Aubrac, l'attend une famille dont elle ignorait les secrets très longtemps cachés et dont les révélations vont bouleverser sa vie. Elle y découvre aussi un univers qui ne la laissera bientôt plus indifférente : celui de l'élevage bovin, producteur de ces résistantes vaches rousses aux grands yeux ourlés de noir, comme maquillés de khôl, et aux longues cornes en forme de lyre, que l'on appelle les reines d'Aubrac.





Au thème intimiste de la filiation et de la transmission, se mêle une réflexion sociale sur le délicat équilibre entre rentabilité économique et respect de l'animal et de la nature. Si l'émotion largement autobiographique de ce vibrant hommage aux terres d'Aubrac est contagieuse, le déroulement du raisonnement écologique, par ailleurs tout à fait intéressant, m'a semblé trop rapidement plaqué sur l'histoire personnelle de Brune pour ne pas conférer à l'ensemble un certain sentiment d'artifice, un peu comme si la journaliste tendait à l'emporter sur la romancière.





Je referme donc Alto Braco avec une impression mitigée, touchée par ses personnages et éblouie par la majesté de l'Aubrac, mais avec le regret que la trame trop manifestement journalistique ne se soit pas davantage transformée en « oeuvre littéraire ».
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Principe de suspension

Thomas est le patron d’une PME de trente-sept employés dans le domaine de la plasturgie, dans une zone de l’ouest de la France où l’industrie se manifeste surtout par des usines désaffectées. L’activité de son entreprise est elle aussi menacée par son unique client, qui a trouvé un fournisseur moins cher dans les pays de l’Est de l’Europe. Thomas a bon espoir que le brevet de son responsable R&D Loïc puisse fournir de nouveaux débouchés. Mais sa santé est gravement affectée par ces problèmes professionnels, et, de plus, son couple bat de l’aile. ● Ce roman permet de voir sous un jour renouvelé la fonction de chef d’entreprise. Thomas se bat pour sauvegarder l’activité et l’emploi dans son usine. Il n’est pas aidé par les représentants syndicaux qui ne veulent pas reconnaître la sincérité de son combat et préfèrent lire les événements à travers une grille de pensée préétablie. ● Le titre du roman, Principe de suspension, est décliné au début de chacun des courts chapitres avec des définitions différentes, ce qui a dû représenter pour l’auteur un travail certain, mais le résultat n’est pas très convaincant, car cela ne colle pas vraiment et paraît artificiel. Et c’est assez révélateur de l’ensemble du roman qui a un côté appliqué, démonstratif et corseté nuisant au développement du narratif et au plaisir du lecteur. Les recherches qui ont été menées en amont sont trop visibles et le parallèle entre la santé du patron et celle de son entreprise trop flagrant. Il en ressort un assez bel objet trop dépourvu d’affects et donc assez souvent ennuyeux. ● Je trouve également dommage que le roman ne soit pas davantage centré sur le problème de l’entreprise et ses répercussions sur les employés. Il aurait pu être intéressant d’entrer également dans l’intimité de ces employés, pas seulement du patron, et de voir comment ils vivaient les difficultés évoquées. Sur ce thème, j’ai préféré Les Vivants et les Morts de Gérard Mordillat, roman qui se passe d’ailleurs lui aussi autour d’une usine de plastique.
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L'enfant parfaite

Parfaite à tout prix.



Plus rien ne va dans la vie de Roxane. En première dans un lycée prestigieux, ses notes sont en baisse, ses amours et ses amitiés vacillent, et elle a de l'acné. Le drame n'est pas loin.



Coup de cœur ! Nous suivons alternativement Roxane, lycéenne, et François, le médecin qui lui a prescrit un médicament contre l'acné. Qu'est-il arrivé à Roxane ? Nous l'apprenons peu à peu au fil des pages.



Roxane semble avoir tout pour réussir: très bonne élève, elle est dans un des meilleurs lycées de Paris. Son destin semble tout tracé: bonne prépa puis Polytechnique. Elle fait la fierté de ses parents. Mais que veut Roxanne réellement ?



Cela n'a aucune importance, seule compte la perfection. Roxane est condamnée à réussir. Pour ses parents seul compte l'apparence, l'épanouissement est accessoire. Entre une mère dépassée et un père manipulateur, Roxane n'est qu'un trophée de plus pour eux.



Le style est excellent. Les parties concernant Roxanne sont un slam agrémenté d'argot adolescent. Celles concernant François sont plus classiques, mais tout aussi touchantes.



Quelqu'un de parfait peut-il aller mal ? Roxane cache ses vrais sentiments à ses parents. Seul François verra la faille. Le drame n'est pas loin.



Bref, une lecture très émouvante.
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Alto Braco

« Alto braco》, le « haut lieu》en Occitan, l'ancien nom du plateau de l’Aubrac. Un nom mystérieux et âpre, à l'image des paysages que Brune traverse en venant y enterrer Douce, sa grand-mère.

Après la mort de sa mère, elle a grandi à Paris, au-dessus du Catulle, le bistrot tenu par Douce et sa sœur, Granita, qui vont l'élever.

Au fur et à mesure du roman, on va découvrir la vie de ses tantes, son enfance, la vie de son père et les secrets de famille.

Brune va se familiariser avec cette région et découvrir l'élevage et les différentes façons dont sont nourris les veaux. Comment la viande part en Italie. Elle va s'attacher à cette terre sauvage.

Un livre qui rend hommage à l’Aubrac et dont l'écriture est enveloppant et chaude. On s'attache au personnage de Brune qui est à la recherche de ses racines.

Un livre qui m'a donné envie de lire ses deux autres romans.

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Alto Braco

Savourer un aligot accompagné de viande d'Aubrac, arrosé d'un verre de Marcillac et suivi d'un morceau de Laguiole, ça vous tente ? Alors attablez-vous devant ce roman proposé comme un repas complet. Entrée, plat, dessert, vin compris pour 19 euros, vraiment pas cher pour bien manger !

Pour découvrir ce menu, il faut suivre Brune, une jeune femme issue de la "bistrocratie" auvergnate régnant sur Paris, qui retourne sur la terre de ses ancêtres afin d'y inhumer sa grand-mère. Sous la protection de Granita, sa grand-tante, elle (re)découvre ses véritables origines et le pays d'Aubrac qu'elle ne connaît que peu pour n'y avoir passé que quelques semaines pendant les vacances d'été quand elle était enfant. Vingt trois ans qu'elle n'y avait pas mis les pieds !

En leur compagnie, cette balade sur un plateau d'altitude blanc l'hiver, vert l'été - à la fois aveyronnais , cantalou et lozérien - entraîne le lecteur à la découverte d'une région riche en traditions et en produits de terroirs, notamment sa vache aux yeux noirs, belle et fière, qui règne depuis plusieurs siècles sur les pâturages d'Aubrac. 

J'y ai passé un agréable moment même si la cuisine proposée par Vanessa Bamberger m'a parue un poil trop bourrative. Son côté parfois fort didactique , surtout en ce qui concerne la vacherie, m'a gênée même si son propos est extrêmement intéressant. Ses révélations peu appétissantes sur l'élevage bovin m'ont trop pesé sur l'estomac pour me permettre d'atteindre les sommets de gourmandise littéraire que j'attendais.
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L'enfant parfaite

On ne ressort pas indemne de cette lecture.

Parce que c'est un drame humain. Parce que, bien que fictionnel à priori, c'est un drame malheureusement réaliste. Et parce que la société dans laquelle nous vivons pose tous les jalons d'un tel gâchis.



Vanessa Bamberger déroule un récit à deux voix. Celle de Roxanne, lycéenne de 17 ans. Et celle de François, médecin expérimenté. Leurs narrations respectives interviennent à deux ans d'écart.



C'est tout d'abord celle de Roxanne, rythmée, presque slamée, avec un langage propre à sa génération, qui raconte son quotidien. Tout n'y est que pression et obligation de performance et d'apparence Ses parents divorcés maintiennent une pression constante afin que ses résultats scolaires soient brillants. Ses profs, pour certains humiliants, pratiquent l'élitisme à outrance. Point de salut en dehors de la sacro sainte prépa.

Quant aux relations avec les autres élèves, et accessoirement amis, la moindre faille, le plus petit faux pas est monté en épingle et provoque moquerie et mise à l'écart sociale. Les amours sont bégayantes, et la plupart du temps, si on passe par la case sexualité, c'est plus pour gagner en popularité que par sentiment amoureux. Quant aux amitiés, elles sont fluctuantes, loin d'être un rempart contre les soucis ou un vrai réconfort.



On est loin du tableau idyllique d'une jeunesse dorée, biberonnée à la XBox et au smart phone.



Et comme si l'état des lieux de cette jeunesse sommée de "réussir" n'était pas encore assez déplorable, l'ultime affront à la légèreté et l'insouciance, qui devraient être l'apanage de cet âge, survient sous la forme d'une crise d'acné. À l'âge des complexes, ce n'est pas un petit désagrément anodin. D'autant plus quand votre propre père vous exige non seulement brillante scolairement, mais aussi jolie.



Cet engrenage d'obligation de réussir, combinée à la peur du regard des autres fait se focaliser Roxanne sur son acné, sûrement car elle pense pouvoir juguler au moins ce problème-là, contrairement à tout le reste, tellement écrasant...

Roxanne se fera prescrire un traitement anti-acnéique, contenant de l'isotrétioïde, mais qui n'est pas sans effet secondaire.

Chronique d'un naufrage annoncé.



Le recit de François interviendra donc deux ans après. Malgré lui, cet homme aura un rôle à jouer. Il ne fera qu'ajouter la dernière pièce sur un échiquier déjà bien ordonné. Son point de vue, exprimé à la 3ème personne, constitue en réalité la seule voix vraiment adulte de ce drame.



En effet, l'auteur ne juge jamais les parents, mais il devient difficile au lecteur de ne pas le faire. Roxanne dérive entre une mère anxieuse, souvent absente attendant de cette enfant parfaite qu'elle se débrouille seule, et qui a déjà bien du mal à s'assumer elle-même et un père, à distance depuis le divorce, mais toujours assez proche néanmoins pour dispenser à Roxanne ses injonctions d'être une enfant parfaite, continuum et vitrine de sa propre réussite à lui. L'égoïsme des adultes est saisissant, leur absence de repères et de valeurs indécente : ils exigent beaucoup mais offrent peu. Où est leur amour ?

Ils se font finalement le relais d'une société où l'individu n'est défini que par ses performances, alors qu'ils devraient en être le paratonnerre. Et Vanessa Bamberger prête cette réflexion terrible à Roxanne :

"Notre adolescence porte au paroxysme les maux de votre société déliquescente. Société de la perfection individuelle, société de la peur, de la comparaison, pas assez de place pour tout le monde, bientôt la fin du monde. entre-temps vous reproduisez les élites comme à l'usine, sur le même modèle, avec élimination des pièces défectueuses, pour ne pas ralentir la machine. C'est pour ça que toutes nos phrases commencent par moi je. Au sommet de la pyramide il n'y en aura qu'un."



Je n'ai plus 17 ans depuis un moment, et les références musicales m'étaient inconnues, le vocabulaire, spécifique à cette jeunesse, impénétrable, comme une volonté finalement de ne pas utiliser le même code de communication que cette société peu engageante. Malgré mes deux fois et demi 17 ans, comment ne pas être en empathie avec Roxanne. Ce roman m'interpelle en tant qu'adulte et bien évidemment en tant que maman. Un roman lanceur d'alerte.
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