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EAN : 9782072981500
208 pages
Gallimard (03/11/2022)
3.71/5   12 notes
Résumé :
Shumona Sinha, née à Calcutta, a appris le français à l’âge de vingt-deux ans. Depuis, elle considère cette langue comme sa « langue vitale », celle qui l’a libérée, sauvée, fait renaître.
Venue vivre en France à vingt-huit ans, autrice de cinq romans tous écrits en français, elle raconte son itinéraire, semé de déceptions : les années passant, elle conserve l’image d’une femme exilée, étrangère dans un pays qu’elle avait cru celui de son émancipation.
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Elle a, comme elle dit, fait un long voyage pour chaque mot. Originaire d'Inde, notre autrice choisit sa langue d'écriture : ce sera le Français. Alors même que rien n'y prédit : sa langue natale est le bengali, l'autre langue est l'anglais, et la littérature de prédilection en Inde est plutôt russe. Elle viendra vivre en France pour parfaire ce long travail, s'expatrier pour les mots. Outre l'originalité de nous raconter ce choix, sa plume est précise, entre poétique et incisive selon les thèmes. C'est très agréable de se voir raconter notre belle langue et les efforts qu'elle réclame quand en plus ce choix est charnel. Ce récit à plusieurs sujets en réalité : d'un côté, partir de l'autobiographie (de l'étudiante à la traductrice puis la romancière - intérêt pour les fans éventuels), vers des propos plus politiques (sur le monde littéraire ou la francophonie par exemple), et, de l'autre (moments les plus attrayants), des réflexions sur la littérature, le choix des mots entre les cultures, quand on est polyglotte, le travail d'écriture. Réflexions pas inintéressantes en plus de leur justesse (en tout cas de leur vécu). Elle nous explique enfin pourquoi ce titre est à l'imparfait : parce que choisi corps et âme, son idéalisme linguistique est confronté à la désillusion du réel.. Il s'agit ici d'un essai, mais ses romans sont au rayon "Littérature française" rappelle-t-elle légitimement.
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Si on ne m'avait pas offert ce livre, il ne me serait pas venu à l'idée d'aller l'acheter. C'est ma belle-fille qui me l'a offert. Elle parle trois langues, vit au Canada et est mariée à un indien d'origine, totalement « américanisé » depuis plusieurs décennies.
Pourquoi je vous parle de ça ?
Shumona Sinha est née en 1973. Indienne d'origine, elle parle quatre langues, vit en France depuis une vingtaine d'années et s'est mariée à un français. Elle est actuellement divorcée.

Ce livre n'est pas un roman. Shumona Sinha raconte son parcours. Celui d'une jeune indienne de Calcutta. Sa jeunesse est marquée par un engagement politique, sur les pas de son père, militant communiste. Elle s'exprime en trois langues : le bengali (sa langue natale), l'hindi (la langue nationale) et l'anglais (la langue du colon).
Et puis, à l'âge de vingt-deux ans, elle va découvrir le français, la langue française, sa littérature, ses poètes… le flash : « je dévalais des kilomètres en alternant pousse-pousse, bus et taxi à trois roues pour aller vers une langue étrangère comme un naufragé vers un radeau de sauvetage . »

Une histoire d'amour avec notre langue qui va la pousser à venir travailler à Paris à l'aube de ses trente ans. Elle va fréquenter les milieux universitaires, littéraires, associatifs et se marier avec un poète français dont elle divorcera une dizaine d'années plus tard. Et puis elle va se lancer dans l'écriture. Elle va publier, en français, plusieurs romans dont la problématique est souvent centrée sur l'exil.
« Je suis arrivée au point de non-retour où mon pays natal m'est inaccessible, inhabitable, et mon pays d'adoption reste toujours inatteignable. Ma patrie n'est ni l'Inde ni la France mais la langue française. »

Shimona Sinha dresse un bilan et fait un constat en appuyant là où ça fait mal. Bien qu'elle soit érudite dans nombre de domaines touchant à la littérature et à la poésie, elle n'est généralement invitée qu'en tant qu'écrivaine indienne s'exprimant en français. « Le concept du centre et de la périphérie continue à accompagner mes livres. Ils sont aujourd'hui encore placés au rayon «  littérature étrangère » de certaines librairies françaises. Est-ce qu'on imagine la violence de ce geste qui m'ôte ma langue d'écriture, ma langue vitale, qui me renvoie à la frontière ? »

Encore aujourd'hui, il lui est difficile d'être reconnue pour ce qu'elle est : une écrivaine. Il lui faut faire face à toute une série de discriminations dont les deux axes principaux sont le sexisme et le racisme. Les préjugés ont encore de longs jours devant eux. Heureux les français de souche !
« Le privilège du passeport est une réalité. Il y a des passeports sésames qui ouvrent les portes et les frontières. Les autres provoquent soupçons, acharnements, interdits. D'un côté se trouvent les voyageurs, savants, explorateurs. de l'autre côté les immigrés. Les uns éveillent l'admiration. Les autres ne sont que des fardeaux. »

Shimona Sinha est une femme de son temps. Révoltée contre l'injustice, le racisme, l'intolérance, la machisme ambiant. C'est une femme debout qui préfère l'insécurité de la vie de célibataire plutôt que d'être protégée par la vie de couple. « Évidemment, conformément à l'avis général, j'aurais pu éviter un tas de problèmes si je vivais avec un homme. La femme délicate et discrète, ça je ne l'aurais jamais été, même en compagnie d'un homme, mais j'aurais été protégée. C'est ça le rôle des hommes : être le bouclier des femmes. Délimiter le territoire pour qu'il n'y ait pas d'intrus. Définir les femmes. Elles sont ce qu'elles sont par rapport aux hommes. »

Shimona Sinha n'est pas tendre avec les hommes politiques de son pays et plus particulièrement avec le premier ministre actuel : « Tandis que le marché occidental est inondé par les produits dérivés du yoga et d'autres pratiques hindouistes, savamment popularisés par Modi, tandis que les pions avancent sur l'échiquier planétaire, le pays du nirvana détruit la démocratie chez lui et menace celle des autres. »

Son combat a trouvé un écho chez moi et je suis admiratif de sa personne. D'ailleurs, je suis allé sur le net et ai découvert qu'elle était passée à deux reprises à « La Grande Librairie » dont récemment avec Augustin Trapenard. On peut la voir également dans différentes interviews données sur TV5 monde et à France Culture entre autre.

Je terminerai par ce très beau néologisme qui constitue un des chapitres de son récit et qui la caractérise parfaitement : Langagement.
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Drôle de livre !
La première moitié enthousiasmante racontant avec une langue drue ses débuts à Calcutta puis en Inde son approche de la langue française. Arrivée en France, amoureuse puis mariée à un poète français, elle écrit dans un français intelligent, gourmand, charnel, plein de saveurs et d'odeurs. Un vrai plaisir !
La deuxième moitié traite des écrivains francophones de souche et des autres qui ne trouvent pas leur place, des écrivaines francophones qui se font prendre leur place par les écrivains de souche ou pas, de la colonisation, du capitalisme, etc. Mais aussi de l'émigrée qui ne trouve plus sa place ni au Bengale, ni en Inde ni en France.
J'ai adoré la première moitié, sa langue et l'analyse pertinente des qualités, des capacités, de la richesse de la langue française comparée au bengali mais surtout à l'anglais.
Je ne sais plus où est le bonheur !
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Qu'est-ce qu'une langue, quel est son pouvoir et comment nourrit-elle notre capacité à comprendre et à aimer le monde, à exprimer notre joie et à crier notre colère ? C'est à ces interrogations et à beaucoup d'autres que tente de répondre la romancière Shumona Sinha dans son dernier livre L'autre nom du bonheur était français, qui vient de paraître aux Éditions Gallimard.
Lien : https://lettrescapitales.com..
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critiques presse (2)
Bibliobs
22 décembre 2022
Née à Calcutta, installée en France à l’âge de 28 ans, la romancière fait le récit enchanté et désenchanté de sa jeune vie d’exilée et de son apprentissage du français.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
LaCroix
21 décembre 2022
Née en Inde, Shumona Sinha a choisi le français comme langue d?écriture. Un chemin semé de joie et de déception.
Lire la critique sur le site : LaCroix
Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Je suis arrivée au point de non-retour où mon pays natal m’est inaccessible, inhabitable, et mon pays d’adoption reste toujours inatteignable. Ma patrie n’est ni l’Inde ni la France mais la langue française — cette déclaration jubilante que j’ai faite il y a quelques années est devenue une vérité triste. Et cette patrie elle-même subit désormais des attaques.
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Je ne cesse de me demander comment elle serait, ma langue française, si je retournais vivre en Inde, si je la protégeais de la crasse et de la boue du quotidien à la française. Oui, elle demeurerait soignée, respectable et respectée dans la vitrine de la société mondaine de là-bas. Elle serait purement littéraire, académique, sophistiquée. Les dégueulasseries lubriques et les vitupérations racistes à la française me révoltent parce qu’elles salissent l’image idéalisée que je me faisais de la langue française, parce qu’elles détruisent l’espoir que la langue française soit le moyen de mon émancipation, en tant que femme, en tant qu’écrivaine.
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Je suis persuadée que le travail du romancier est un acte fondamentalement altruiste. Glisser dans la personnalité des autres, emprunter le corps des autres, lire dans, leurs pensées, deviner leur existence, inventer leurs destinées.
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Une autre interprétation est celle de la trahison de mon peuple. Ce à quoi je réponds volontiers que je n’ai aucune solidarité ethnique, aucune ethno-rigidité, car pour moi ce serait le début du racisme.
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Pour marquer notre rupture, mon père et moi, nous avions décidé de nous infliger le châtiment suprême : le silence...
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Videos de Shumona Sinha (11) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Shumona Sinha
Shumona Sinha présente son sixième livre, "L'autre nom du bonheur était français", édité par Gallimard. Ce récit autobiographique raconte son parcours depuis l'Inde de son enfance jusqu'à la France. Ce texte est dédié à la langue française, qu'elle considère comme sa "langue vitale", sa langue d'écriture. 
Son amour pour la langue française est venu d'un amour pour la France, lui-même guidé par son premier amour qui est celui des livres et de la littérature.
Retrouvez l'intégralité de l'interview ci-dessous : https://www.france.tv/france-5/la-grande-librairie/
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