Ca se passe à Uzès, où un couple est venu vivre à la retraite, depuis une douzaine d'années (ils sont octogénaires). Lui était universitaire, elle restait à la maison. Ils se sont connus très jeunes, ont depuis le premier jour formé un couple harmonieux, et uni. Ils n'ont pas voulu d'enfants. Leur passion commune, qui n'a jamais faibli, c'est l'ornithologie. Ils ne reçoivent jamais chez eux, ni à Paris pendant la carrière de Monsieur, ni à Uzès où ils fréquentent pourtant du monde : Madame bridge trois à quatre fois par semaine. Ils prétendent avoir un appétit de moineau, et se contenter de picorer à la maison. En revanche, ils apprécient les bonnes tables étoilées ou non et ne refusent jamais une invitation chez quelqu'un. Ils arrivent toujours d'ailleurs avec un présent parfait, issu des meilleurs artisans. Ils ne sont ni pingres ni égoïstes, ils vivent selon leurs propres normes, bourgeoises et quelque peu solitaires tout de même.
Un jour, ils vont tomber en amour avec un jeune homme. Alain
Rachet, comme il se fait appeler, a quelque chose comme vingt-cinq, trente ans. Il a le type italien, ou espagnol, il ne dément pas quand on le prend pour un latin, se fait passer pour un écrivain. En réalité, il a fui un pays où la violence et la mort était devenu le quotidien. En France, il n'a pas voulu se vendre ou se prêter à de quelconques exactions pour survivre. Il s'est dit que s'introduire dans la vie de personnes âgées était un moyen, peut-être, de souffler, d'être au calme, de se rassurer.
Entre ces trois-là se développe, malgré l'intention préalable, une vraie relation. Amitié, amour filial, personne ne sait très bien comment l'appeler ou la classer, mais le lien existe, il est fort, et il est sincère.
Est-il pour autant « autorisé » ?
…
Je suis tombée complètement sous le charme de la plume de
Michèle Gazier qui raconte ici une histoire simple et forte. C'est tout-à-fait hors du temps, un petit peu suranné mais d'une psychologie très actuelle et le style est d'une délicatesse délicieuse. Je n'aurais pas cru un jour me sentir aussi émue en lisant un compte-rendu ornithologique (un épilogue parfait !).