Pourquoi exhumer un roman de 1990 (1985 en VO) qui, il faut être honnête, n'a pas déchaîné les foules et fait l'objet ici de multiples critiques dithyrambiques ?
La raison tient en trois mots : Bowie Book Club.
Alors que je pleure encore, deux ans après, la mort de mon héros
David Bowie, son fils, Duncan Jones, a la riche idée de remettre au goût du jour un club de lecture à la mémoire de son père. le but : lire ou relire les 100 livres préférés de Bowie, dont il avait fait la liste en 2013. Premier titre choisi : Hawksmoor de
Peter Ackroyd.
Forcement, je suis de l'aventure !
Je vous passe le compte rendu de mes difficultés pour trouver en français cet ouvrage, évidemment indisponible en librairie, difficilement trouvable sur le net, peu diffusé en audio livre (en français tout au moins) et dont les rares exemplaires encore en circulation ont connu une hausse exponentielle de leurs prix ces dernières semaines, jusqu'à atteindre 300 dollars aux États-Unis !
Mais bon : j'ai obtenu mon ouvrage, heureusement sans endetter ma fille et mes éventuels petits-enfants sur 70 ans.
«
L'Architecte assassin », comme son titre français l'atteste, s'attache à la légende qui voudrait que, lors de la construction de monuments symboliques, un sacrifice humain soit fait, volontairement ou non, afin de garantir la pérennité de l'oeuvre architecturale.
Nous suivons donc, dans les années 1710 à Londres, l'architecte Nicholas Dryer, chargé de la réalisation et de la construction de sept nouvelles églises dans la cité. En parallèle, de nos jours (enfin dans les années 1990), nous suivons également l'histoire de l'inspecteur Hawksmoor, qui enquête sur des morts mystérieuses survenues aux abords de plusieurs églises de la ville.
Très vite il apparaît que Dryer et Hawksmoor, totalement obsédés par leurs missions respectives, perdent peu à peu le fil de la réalité, franchissent la frontière du fantastique et se retrouvent connecter malgré le temps qui les sépare.
L'ouvrage de
Peter Ackroyd n'est pas d'un accès aisé, ni sur le fond, ni sur la forme.
Question forme,
Peter Ackroyd a rédigé la partie consacrée à Dryer en ancien anglais... La traduction en tient donc compte et la langue, alambiquée et altérée, n'est pas facile à lire. Cependant une fois que le lecteur a pris le pli, cette difficulté n'en est plus une, et donne au contraire un cachet original.
Autre embarras, suivre le cheminement d'esprit de Nicholas Dryer, qui a une fâcheuse tendance à sauter du coq à l'âne régulièrement, évoquant trois sujets en parallèle tout en faisant quelque chose d'autre... La concentration est donc de mise.
Question fond, «
L'Architecte assassin » se tient à la frontière du roman fantastique, avec les sous-entendus, les mystères laissés en suspens propres à ce genre littéraire. le lecteur cartésien risque donc d'être passablement frustré de cette absence volontaire d'explications. Cette enquête policière n'en est pas vraiment une et le nom du coupable ne sera jamais écrit noir sur blanc : au lecteur de se faire sa propre idée !
Le roman de
Peter Ackroyd est donc surtout un roman d'ambiance, à l'atmosphère étouffante, sinistre et angoissante, jouant avec les impressions, les sensations, les troubles de la perception, que renforce une écriture dense et parfois opaque.
Une bonne dose de vigilance est demandée de la part du lecteur, ainsi qu'une connaissance de base de l'histoire de la capitale anglaise et de sa disposition (une carte suffit, n'exagérons pas !), ainsi que quelques notions de mysticisme et d'occultisme.
En bref, une lecture qui m'a paru confuse, vraisemblablement à cause d'un manque de références de ma part, mais qui a l'avantage d'évoquer le thème de la construction symbolique et architecturale des églises de Londres.
Cet ouvrage de
Peter Ackroyd ne fera donc pas partie de ma liste des 100 meilleurs ouvrages lus. Mais comme vous l'avez remarqué, je ne suis pas
David Bowie !
Seul clin d'oeil qui m'a particulièrement touchée : la croyance dans la persistance des âmes à travers des objets symboliques... Je ne vais plus regarder mes Cds de Bowie avec le même regard !