On écrit parfois dans nos chroniques de manière imagée qu'on ne ressort pas indemne de tel ou tel livre. Mais pour ce livre inutile d'attendre la fin, on est tout de suite bousculé par la violence, la haine et la perversité entourant Andréas. Malheureusement, ici, nulle fiction- tout n'est que réalité- violente et pénible réalité vécue par
Andréas Altmann, l'auteur, au cours de son enfance et son adolescence.
Le tyran, c'est Franz Xaver Altmann- père et mari humiliant, autoritaire, haineux et d'une violence inouïe. Apprécié dans la sphère publique, despote sans vergogne en privé. Ses martyrs: Andréas et sa mère- mère humiliée en permanence, soumise, incapable de résister et de protéger ses enfants.
Alors comment peut-on grandir dans cet univers familial, dont le relais est pris par une éducation catholique toxique car aliénante, fanatique, perverse et elle aussi violente?
Andréas a choisi la résistance morale et intellectuelle, la désobéissance, une volonté de fer, un courage exceptionnel et une certaine dose de désinvolture. Car Andréas est un garçon qui n'a jamais baissé les bras, mu par une impressionnante force mentale qui lui a toujours permis de garder la tête hors de l'eau.
Sa désinvolture se lit dans le ton employé. Son approche de sa condition, de celle de son père et de sa famille, est un mélange de cynisme et d'ironie (voir le titre), fuyant le larmoyant mais n'empêchant nullement l'empathie du lecteur.
Ce livre est très très impressionnant- pour ce qu'il raconte (la violence y est vertigineuse, parfois à la limite du supportable), pour ce qu'il dit de la très laborieuse construction de l'enfant et de l'adulte soumis à la privation de tout sauf des coups et de l'épuisement. Mais il est aussi impressionnant de l'avoir écrit. "La plume est la langue de l'âme" disait
Cervantès. L'âme d'
Andréas Altmann est une plaie ouverte qui s'ouvre par cette autobiographie sur le monde- pour crier la nécessité de fuir, toujours se relever et être libre ...
Il faut parler de ce livre