Décembre et son odeur de clémentine et de cannelle, son vert sapin qui se pare de rouge et d'or, sa chaleur réconfortante et ses effluves de chocolat se prêtent particulièrement bien à la découverte de "
Magic Charly", qui se dévore emmitouflé sous un plaid, un chat ronronnant sur les genoux de préférence. Ne manque au tableau que la théière perpétuelle de Maître Lin, qui n'apparaît qu'une fois ou deux dans le roman, mais qui, moi, m'a fait l'effet d'une bombe.
J'ai dévoré ce premier tome des aventures de l'apprenti magicier avec plaisir et gourmandise, et même si je ne suis pas de l'avis de ceux qui clament que Charly vaut bien Harry et que Sapotille peut se mesurer à Hermione (Dans vos rêves! Poudlard, c'est Poudlard et il n'est de plus grande magie), je lirai volontiers la suite des aventures du petit Vernier.
Charly est un adolescent comme les autres et sa vie n'est pas bien différente de celles de ses pairs.
A quelques exceptions près.
Sa mère, fantasque au possible, est la principale du collège qu'il fréquente, collège dans la cour duquel un dragon de pierre fait office de fontaine.
June, sa meilleure amie, est une tornade ambulante, mi-rebelle, mi-mademoiselle catastrophe.
Sa grand-mère, qu'il n'a pas revu depuis cinq ans parce qu'elle avait disparu dans de bien mystérieuses conditions, est revenue vivre chez sa fille et son petit-fils sans sa mémoire, dispersée aux quatre vents.
Quant à Mandrin, son chat, il est aussi caractériel qu'original: un chat qui suit son maître comme un petit chien, a-t-on idée?
Parce qu'il est doué d'une sensibilité peu commune et que l'apathie de sa grand-mère lui brise le coeur, Charly décide de tout faire pour aider cette dernière à retrouver sa mémoire. Si seulement elle pouvait aller un peu mieux. Rien qu'un peu, cette grand-mère dont il se souvient qu'il l'a tant aimé autrefois...
Cette résolution bouleverse la vie de l'adolescent qui au gré de ses questionnements et de ses recherches se rend compte qu'il fait partie de tout un monde dont il ignore tout: celui des magiciers.
Pour sauver sa grand-mère rongée par une malédiction aussi magique qu'inquiétante et survivre lui aussi, Charly n'a d'autre choix que de s'approprier ce monde étincelant et parfois cruel et d'effectuer son apprentissage de magicier. Il ne sait pas encore que tandis qu'il ensorcelle une serpillère qui se révèle -contre toute attente- terriblement attachante une ombre plane sur la ville et qu'un complot machiavélique est en train d'étendre ses ramifications, bien au delà de Thadam, étrange capitale d'un monde magique régi par des lois incertaines voire iniques.
Si le roman n'est pas parfait (et je serai bien en peine d'expliquer pourquoi de façon rationnelle... J'ai eu la sensation qu'il me manquait quelque chose après l'avoir fini... Quelque chose, mais quoi?), il met tout de même en place des enchantements efficaces, des sorts au charme solide et pailleté. L'écriture est belle, fluide, piquetée de nombreuses touches d'humour qui font mouche à chaque fois (je me suis surprise à éclater de rire parfois) et tisse une intrigue plus profonde et complexe que je ne le craignais au départ. Elle est véritablement prenante et prend corps dans un monde un peu baroque, farfelu, foisonnant et pour autant complètement maîtrisé. Cet univers, qui fait des emprunts assumés à Harry Potter ou encore au Disque-monde, est à mon sens la plus grande réussite de "
Magic Charly" tant il confère au texte de la tendresse, de la drôlerie et de la poésie. Je me suis attachée à Pépouze et j'ai adoré Justine, les pâtisseries de Dame Mélisse m'ont faite saliver plus que de raison, j'ai adhéré mille fois au fonctionnement de la magie présentée comme une denrée rare et précieuse et à la dénonciation de la corruption des élites magiques... Les jeux de mots et autres subtilités de langage m'ont séduite également: il y a de l'esprit dans cette narration vitaminée, rythmée, fantasque et un peu du "Château Ambulant" et des merveilles de
Pierre Pevel! Pour autant, tout n'est pas léger et sous le vernis doré, c'est un monde plus sombre qui se révèle. J'ai aimé cette tension entre ces deux aspects, tout comme j'ai aimé la construction des personnages, très réussis et assez loin des stéréotypes.
C'est frais, c'est foisonnant et ça pétille.
Et puis les chats et le thé y sont omniprésents...
Il m'a juste manqué un petit supplément d'âme...
Peut-être que j'aurai aimé une trame plus puissante, moins noyée par l'univers aussi passionnant fut il. Peut-être aussi que j'aurai voulu trouver, sous les multiples inspirations, quelque chose de foncièrement nouveau.
Peut-être.
Il n'empêche: quel bon moment!