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EAN : 9782960310603
Grassroots (16/09/2022)
4.19/5   8 notes
Résumé :
PRIX DE LITTERATURE DE L'UNION EUROPEENNE 2020
La peur des Barbares est un court roman de 83 pages,
construit de deux histoires, chacune racontée par une
femme. L’une, Oxana, est Ukrainienne, l’autre, Pinelopi est Grecque. Elles vivent sur une île désertée, Gavdos, près de la Crète, en face l’une de l’autre mais ne se connaissent pas. Le roman relie leur monde éloigné : celui de l’après Tchernobyl et celui d’une communauté insulaire grecque isol... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
La peur des barbares, c'est la peur de «  L'Autre », la peur de « L'Etranger », ici évoquée par deux histoires de femmes entrecroisées. Un auteur macédonien que je ne connaissais pas, et qui m'a été suggérée par sa traductrice Maria Bejanovska que je remercie en passant. Un étrange petit roman, ou plutôt une novella de 80 pages qui reçu en 2020 le Prix Européen de Littérature.
Sur la même île-prison Gavdos , près de Crête, deux femmes; alors que Pinelopi la grecque prise dans les griffes d'un mariage forcé dialogue imaginairement avec la jeune fille, « la barbare » qu'elle a aimée adolescente, disparue, Oxana l'Ukrainienne, l'étrangère qui a fuit le désastre de Tchernobyl avec deux hommes, essayant de survivre aux hostilités des autochtones , dialogue avec une amie, aussi disparue. Deux femmes à la veine recherche nostalgique de leur passé…..
Toutes ces femmes désespérées, c'est extrêmement triste , car d'autres voix , d'autres visages se mêlent à celles de Pinelopi et Oxana, comme celle de Stella la femme du gardien de phare. Des femmes brisées par la vie, seules, abandonnées, folles ou malheureuses, emprisonnées dans cette île. La mer qui pour moi une source d'énergie sans fin, ici c'est la mort , mort du corps, mort de l'âme, même si aussi symbole de l'espoir pour la fuite de cette île devenue une prison pour tout ces personnages.
Malgré la captivante traduction de Maria Bejanovska un petit texte très oppressant, sombre, dont le titre vient d'une verse d'un poème du poète grec C.P. Cavafy. Un récit sans joie, où l'inertie née de la routine et le fatalisme qui étouffe la foi tuent le seul murmure de la vie qui vient des voix qui s'estompent du passé.
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C'est un texte terrible, une longue nouvelle plutôt qu'un véritable roman.
Il a obtenu le Prix Européens de la Littérature et son auteur est macédonien.
Retenez bien son nom (le prénom est rigolo) : Petar Andonovski

Il faut tout d'abord imaginer Gavdos, petite île au sud de la Crête. Pas la vraie Gavdos qui parait plutôt charmante, mais une île-prison impitoyable dont on s'échappe rarement et où on meurt beaucoup. Une île où les gens vivent oubliés.
Il y fait froid, c'est extrêmement venteux et tout concourt à l'étrangeté et parfois même à l'oppression.
Mais attention, attention : ce texte est très beau !
Nous allons nous intéresser au destin de deux femmes.
Oxana est une réfugiée ukrainienne. Réfugiée car ingénieure à Tchernobyl et donc contaminée. L'action se déroule quelques années après la catastrophe. Elle est venue avec Evguéni, qui est très malade, et avec Igor, le plus impétueux de ce trio maudit. Évidemment, personne ne leur parle.
Pinelopi est crétoise. C'est une orpheline qui a été recueillie dans un monastère de l'île. L'avenir est tracée : on devient religieuse ou bien on est promenée comme une bête de foire pour être vendue à un futur mari. le sien est une brute épaisse et alcoolique.
L'originalité du récit tient surtout aux rêveries que chacune distille à une amie disparue. Et cette singularité onirique va rapprocher les deux femmes et les sauver du désespoir.
Les autochtones sont franchement hostiles comme le pope ou le médecin qui fait de petits aller-retour depuis la Crête.
Et puis il y a Stella, la femme du gardien du phare, folle à hurler au bord des falaises.

Les barbares donc…On pense évidemment au chef d'oeuvre de Coetzee, En attendant les barbares. On pense à Sophocle bien sur. Et moi je pense beaucoup à Camus car la révolte semble imminente dans cette situation aussi absurde que consentie. C'est là où surgit l'étrange beauté de ce texte stylé et évanescent.
C'est là où surgit enfin la vie grâce à…mais on ne va pas spoiler !

Mais personne ne m'a répondu : qui sont ces barbares ? Vous, moi, eux, les hommes (les mâles) ?
Et si on décidait que le barbare c'est le lecteur lui-même !
Vous me direz, l'affaire est en cours.

Le texte est formidablement bien traduit.

Je dois cette expérience littéraire à @isacom. Qu'elle en soit vivement remerciée.

Gageons qu'on reparlera très vite de ce Petar dont c'est le premier roman. Ce sera (je sais, c'est facile mais trop tentant) alors un véritable feux d'artifice !!!
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Un court roman, étrange et beau.
Le lieu : l'île grecque de Gavdos, où "les gens vivent oubliés depuis des années".
Deux femmes s'y côtoient sans se parler.
Pinelopi est crétoise, orpheline grandie dans un monastère et douée pour le dessin, mal mariée à une brute mais qui conserve des rêves.
Oxana est ukrainienne : une réfugiée de Tchernobyl, avec Evguéni malade qui crache du sang, et Igor.
Chacune, solitaire, confie ses pensées à une amie disparue, et peu à peu l'une et l'autre se rapprochent, dans une solidarité féminine face au désespoir.
D'autres personnages, multiples : des hommes qui boivent, qui "craignent les femmes, ils s'en méfient, ils pensent qu'elles sont capables de les trahir" ; des tranches de vie et des trahisons, et des femmes surtout, des femmes rêvant de fuite et vivant d'espoirs.
Qui sont les barbares ? Les étrangers ? Les hommes ? Les personnes qui vivent différemment, pensent et rêvent différemment ?
Je tiens à remercier encore Maria Bejanovska pour m'avoir envoyé ses belles traductions de "La chair sauvage" et "La peur des barbares".

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C'est grace à la traductrice Maria Bejanovska que j'ai pu prendre connaissance de ce livre et de son auteur .

Ce n'est pas une lecture réjouissante , elle décrit l'isolement et la solitude sans espoir des deux personnages principaux , Oxana l'ukrainienne qui s'est réfugiée sur l'île de Gavdos avec Evguèni et Igor aprés l'accident de la centrale nucléaire de Tchernobyl et la crétoise Pinelopi , épouse de Michalis , mal mariée et mère d'une enfant qu'elle n'aime pas et qui semble désespérée de se trouver de nouveau enceinte . Pinelopi à donc recours à une herboriste qui lui confie un sachet de plantes , au pouvoir abortif qui peut même causer la mort si l'on dépasse la dose . Cette île semble une prison d'où l'on a envie de s'enfuir mais ceux qui s'en vont , on ne les revoie jamais ou bien morts comme ce pêcheur dont on ne retrouve qu'une planche du bateau nommé " Espoir " . Un symbole ?
L'ambiance est un peu opressante mais l'écriture est belle , même un peu onirique parfois à la hauteur des rêves nostalgiques des deux femmes . Les gens se parlent peu dans cette histoire et le lecteur en est réduit à ses propres déductions ou à son imagination .

Ici pas de cette joie de chez " Zorba le grec " mais au contraire un désespor constant . Les diverses femmes de l'histoire semblent toutes êtres des victimes , d'ailleurs les hommes leur parlent peu et s'en méfient .Seul un berger dérangé est intérressé par elles qu'il épie , mais il a l'air de faire couple avec sa chèvre .

En dehors de quelques mots à propos de Tchernobyl et de la chute du mur de Berlin , les évenements du monde ne semblent pas parvenir jusqu'à cette île .

Les barbares sont-ils les autochtones méfiant des étrangers vivant autrement qu'eux , les étrangers eux-mêmes , les hommes qui tous boivent un peu trop de raki ou les allemands dont un avion s'est écrasé sur le sommet de l'île ? je pense que les barbares , ce sont les autres qui toujours ici font peur .

Expérience littéraire intriguante mais non dénuée d'attraits que ce livre du macédonien Petar Andonovski .
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Une nouvelle maison d'édition vient de voir le jour, pas n'importe laquelle puisqu'elle – Les Editions Flora – a décidé d'ouvrir le bal avec un auteur macédonien, Petar Andonovski, traduit par Maria Bejanovska, que je remercie encore, car elle m'a permis de découvrir et de lire ce beau roman. Pour rappel, Maria Bejanovska a également traduit Dragan Velikic pour Agullo Editions, Rumena Buzarovska chez Gallimard, Goran Stefanovski chez L'Espace d'un Instant. Pour revenir à Petar Andonovski, il a été lauréat du Prix de Littérature de l'Union européenne grâce à ce court roman, qui lui a apporté une reconnaissance internationale, déjà reconnu en Macédoine par les titres qu'il a pu publier là-bas auparavant. Beaucoup d'éléments concordants, le prix littéraire, la qualité des titres traduits par Maria Bejanovska, la curiosité pour la littérature macédonienne, pour me donner envie de lire ce titre et de découvrir encore une voix d'une littérature peu connue ici.


Le roman est court, il est composé de chapitres dont les focalisations alternent et sont axées selon deux différentes femmes : Oxana et Pinelopi. Comme leur prénom respectif le laisse supposer, la première est ukrainienne, d'origine de Donetsk, la seconde est grecque. Oxana a quitté son pays pour aller vivre sur une île grecque, en compagnie d'Evguéni et Igor. le trio s'est rencontré à la faculté, tous trois destinés à travailler à la centrale nucléaire Lénine, plus connue sous le nom de Tchernobyl. Nous n'avons pas d'indication précise sur la date de l'action, nous devinons que l'histoire est postérieure à 1986, de quelques années probablement. Evguéni étant malade, le trio part sur Gavdos en Crète dans l'espoir qu'Evguéni guérisse du mal que les rations lui ont infligé. Sur la même île, il y a Pinelopi, épouse de Michalis.

Les deux récits, de femmes qui ne se rencontrent que de vue, se complètent l'un l'autre : si Oxana évoque la catastrophe nucléaire, Pinelopi évoque elle la chute du mur de Berlin. Les événements historiques qui ont remodelé l'Europe leur arrivent par vague, sur l'île, comme l'onde de choc d'un tsunami, ils en ont que les dernières vagues, faibles et sans incidence. Presque sans incidence, puisque la vague d'étranger qui va perturber leur vie quotidienne dans un entre-soi presque incestueux. L'inconnu fait peur, d'autant plus quand on vit dans les limites très resserrées de son confort, l'image des jumelles est d'ailleurs très évocatrice, l'une enfermée depuis toujours dans sa maison, elle-même recluse sur cette île paradisiaque, qui fait le paradis des trois Ukrainiens.

Ici, les gens vivent oubliés depuis des années, l'Histoire les a obstinément contournés, même la lèpre et la faim les ont contournés, et juste au moment ou ils pensaient qu'il en serait ainsi, une fois de plus, Spiro était entré dans la taverne et s'était mis à crier : « Ils sont arrivés ! Les voilà, ils s'approchent du port ! » Et sans demander qui ils étaient, ils se sont tous dirigés vers le port de Karave. C'est alors que, venant du large sous la forme d'une barque, la peur avait commencé à s'approcher d'eux.

S'il y a bien un contact visuel, entre étrangers et insulaires, les choses n'iront pas plus loin. Tout est histoire d'isolement, et de repli sur soi-même, dans ce roman, où les uns et les autres ne cessent de se retrancher dans leur foyer, dans le monastère, dans leur taverne. Même le médecin se refuse à venir soigner Evguéni, qui se meure. Chacune engoncée profondément dans leur solitude, les deux femmes s'adressent à une interlocutrice imaginaire, une amie perdue, témoin d'un passé regretté et heureux, face à la rudesse d'un présent qui n'est fait que disparitions, de déceptions. Deux totales étrangères qui ont pourtant bien plus en commun que ce qu'elles peuvent penser. Beaucoup de départs, au contraire ceux qui se confinent dans un cercle de plus en plus restreint, la solitude qui finit par enfermer chacun et finit par tracer comme une sorte de séparation tangible au monde, où les étrangers deviennent des barbares, indésirables et rejetés.

On ne sait plus qui sont les barbares dans cette histoire, les trois ukrainiens qui s'exilent sur cette île presque déserte, ou les insulaires, qui les rejettent sans chercher plus loin, ni à savoir qu'ils ne sont pas russes – comme ils les appellent tous le long du récit – , ni à leur apporter une aide quelconque, particulièrement médicale quant Evguéni agonise lentement. Les étrangers, ces barbares, bouc émissaires idéaux qui endossent la responsabilité de toute chose, des mauvaises pêches aux morts des uns et des autres : ce récit macédonien, entre Grèce et Ukraine, est universel, transposons-le sur une autre île d'Europe ou d'ailleurs, la peur des uns et des autres est la même, son langage est international.

Encore une fois, il ne fait pas bon d'être une femme dans cette histoire, les plus prêtes prennent la fuite de ce qu'elles présentent être une vie de contraintes et d'emprisonnements qui les attend, les autres se font prendre aux filets d'une vie à se taire. Quand ce ne sont pas la congrégation de soeurs au monastère, ce sont ces époux et ces pères qui les asphyxient, les privant du peu d'espace de liberté qu'elles ont encore, la folie pour seul espace d'expression.
Lien : https://tempsdelectureblog.w..
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Inventer les histoires est un acte de solitude, un besoin de dialogue, celui qui a inventé l’histoire devait être très seul.
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Michalis lui a jeté un regard sévère et elle s’est immédiatement levée de table pour aller dans une autre pièce. Quand il est assis à table, nous ne devons pas être assises à côté de lui, « la place de la femme est à côté de la table, pas à table », répétait il tout le temps. Il espérait que je lui donnerais un fils, alors que je n’avais même pas envie d’avoir Irini, je priais tous les soirs pour ne pas tomber enceinte et qu’il me renvoie au monastère. Quand je suis tombée enceinte d’Irini, je savais que c’était ma fin, que je ne quitterai jamais Gavdos. Je me suis assise de nouveau derrière lui en lui demandant doucement quelles étaient les nouvelles. Sans se retourner il s’est versé encore un verre de raki et s’est mis à raconter : « Cet après-midi pendant que nous étions assis dans la taverne de Kostas, il est venu, le Russe. Sans aucune gêne il s’est assis à la table du milieu. Quand il a vu que personne ne venait le servir, il a commandé à haute voix un verre de raki. Kostas lui a dit qu’il serait mieux qu’il reparte, qu’il n’y avait pas de place pour lui ici, que dans la taverne seuls les gens de l’île étaient les bienvenus.
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Ici, les gens vivent oubliés depuis des années, l’Histoire
les a obstinément contournés, même la lèpre et la faim les ont contournés, et juste au moment où ils pensaient qu’il en serait ainsi, une fois de plus, Spiro était entré dans la taverne et s’était mis à crier : « Ils sont arrivés ! Les voilà, ils s’approchent du port ! » Et sans demander qui ils étaient, ils se sont tous dirigés vers le port de Karave. C’est alors que, venant du large sous la forme d’une barque, la peur avait commencé à s’approcher d’eux.
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