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sur 521 notes
Les oubliés, ceux de la rue Léon, quartier de la Goutte d'or, Paris, un monde sans rondeur ni souplesse, abrupt, vif et brutal. On y crève. Les mômes, les putes, la drogue et la secte qui t'embrouille les neurones pour mieux t'embrigader, c'est le quotidien ; faut survivre. Abad raconte.

Lui est lucide. Ce n'est pas là qu'il pourra s'en sortir, même avec les services sociaux sur le dos, la psy du mardi soir ou les voisines qui le guident. Il a mal aux hormones, imagine l'amour, s'y cogne. Il rêve et promet, quand il sera grand, ce sera différent, il agira. Mais le quartier l'enferme. L'enferre. L'enfer.

Les mots sont les siens. Bruts. La langue du quartier, la vie sans mensonge, une survie.

Il y aura le Liban, la grand-mère, lui, ses parents, la trop belle Gervaise, Odette ou celles que l'on voile, d'autres aussi, des existences sans importance, là où on remplace, là où personne ne vient. On étouffe, on suffoque, on s'évade sur les toits ou dans l'Arak ; on s'écrase parce qu'on calanche.

Ce roman est celui des silences d'un quartier qui se gangrène, une parole violente et directe donnée à ces oubliés d'un Paris faussé, d'une France laissée à l'agonie, auto-nécrosée. L'auteure, reporter radio, maîtrise l'art du mot, de la phrase choc, fougueuse et impatiente, poétique dans la crudité. Elle nous happe et nous retourne, nous sensibilise et nous informe.

Un premier roman intense. Indispensable.
Lien : http://aufildeslivresblogetc..
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Je viens de lire le premier roman de Sofia Aouine mais je sais qu'il ne sortira que le 29 août. Je viens de lire cette "Rhapsodie des oubliés" et j'ai envie, besoin, d'en parler là maintenant tout de suite. En parler du mieux que je peux pour que d'autres lecteurs l'ouvrent, le découvrent et soient happés à l'intérieur des mots comme je l'ai été.
Voilà donc Abad, 13 ans, arrivé du Liban avec sa famille et installé rue Léon, Paris, XVIIIe arrondissement, qui raconte et qui nous fait pénétrer dans son quartier, dans cette rue qui "raconte l'histoire du monde avec une odeur de poubelles". Oui, les images sont crues, osées, aussi violentes que la réalité quotidienne que ce gamin doit affronter en essayant de ne perdre ni son âme, ni sa liberté. Son âme, c'est avec Gervaise la belle tapineuse camerounaise qu'elle parvient à s'envoler ; c'est avec Odette, la vieille dame aux milliers de chansons et de livres, qu'elle se nourrit ; c'est avec Mme Futterman, la psy avec "une valise qui hurle dans un coin", qu'elle "s'ouvre du dedans". Et c'est avec Batman, la jeune fille voilée de l'appartement d'en face, avec Colette, avec toutes ces filles et ces femmes rencontrées, croisées, observées, qu'elle apprend à se rebeller.
Comme la rue Léon, le roman de Sofia Aouine contient l'histoire du monde, d'un monde étroit et mal foutu qui, comme un ogre, dévore l'enfance avant qu'elle ne s'épanouisse et avilit le corps des femmes pour mieux dissoudre leur souffle. Avec ses mots de gamin malicieux et lucide, dans une langue colorée de multiples influences, Abad nous emmène au coeur de la misère, là où justement il n'y a guère de coeur. Et le roman se construit comme une tapisserie où se cousent l'une à l'autre différentes voix, des temporalités éclatées, des histoires déchirées que le récit raccorde entre elles et à celles de cet Antoine Doinel du XXIe siècle. Pas de dolorisme, pas de lamento ! Une énergie incroyable émane du personnage et de l'écriture, une volonté prête à bouffer tous ceux qui seraient susceptibles de l'empêcher d'avancer, de grandir, d'être l'homme qu'il veut être.
Cette langue ravageuse, rebelle, se fait souple pour s'adapter aux histoires qui influent sur celle d'Abad. D'une ironie mordante quand il s'agit d'évoquer l'influence des intégristes, elle se fait poétique pour raconter le passé de Madame Futterman, rageuse pour retracer la vie de Gervaise, désespérément hilarante pour décrire l'arrivée en Picardie. C'est une langue protéiforme qui vit et qui change au gré des situations, des descriptions, des personnages... et du point de vue du narrateur. Une langue d'aujourd'hui qui ne craint pas de se frotter aux classiques (les noms des personnages et les différents exergues y incitent aussi), Zola, Ajar-Gary, Proust, Hugo, Truffaut..., pour s'en repaître, de la même manière qu'Abad se nourrit et s'élève en lisant et en écrivant dans son carnet noir. Emportée par l'urgence d'une vie à vivre loin de la rue Léon, l'écriture parvient à ramasser tous ces lambeaux d'existence pour donner son unité et sa solidité au roman.
Histoire, construction, personnages, écriture, rythme, sujet... tout, absolument tout, m'a épatée dans ce premier roman ! Et, malgré la violence qui en émane, malgré la tristesse et la colère désespérée, je garde de cette lecture une impression d'optimisme revigorant. Cette "Rhapsodie des oubliés" à l'énergie prodigieuse va chanter longtemps dans ma mémoire !

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Barbès- Rochechouart, fragments de la vie d'Abad dans le quartier de la Goutte d'or. Un quartier où même les gens honnêtes ont l'air de voleurs, alors Abad jeune poulbot de treize ans vit son âge et sa pauvreté et fait donc pas mal de conneries. En chemin il croise, Gervaise une belle de nuit qui a laissé Nana sa fille au pays. Nana, Gervaise, finalement le XVIII éme arrondissement de Paris n'a pas beaucoup changé depuis « L'assommoir » de notre cher Émile.

Rhapsodie Rap, approche poétique et documentaire d'un quartier et d'une époque, Sofia Aouine à la langue bien écrite et son petit héros, turbulent et tendre pose un regard sans concession sur le monde qui l'entoure. Abad c'est le petit frère de Momo de « La vie devant soi » et le petit cousin d'Antoine Doinel.

Impossible dans l'épilogue de « Rhapsodie des oubliés », ne pas imaginer le long travelling de la course d'Antoine pour voir la mer, il ne manque que le regard caméra. Fort et poignant.

Sofia Aouine aime Jean Cocteau, François Truffaut et Romain Gary, ça tombe bien, nous aussi.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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C'est un livre écrit en noir et blanc, une rhapsodie littéraire naturaliste où se mêlent plusieurs écritures. Un mélange de slam, de hip hop, de langage cru, langage de rue, et puis parfois des parties plus littéraires.
On connait ce quartier parce qu'on nous conseille de ne pas y traîner...
Mais Abad, nous prend par la main, et nous fait ressentir, rencontrer, cette rue où il vit, ces personnes qu'il côtoie, qu'il craint, qu'il aime.
Il y a plein de misère, de drogues, d'odeurs, de peurs, mais il y a surtout des gens, l'enfance, l'amour, la souffrance et l'envie d'un ailleurs.
Évidemment j'ai pensé à Zola en le lisant, à sa Gervaise...
Évidemment j'ai pensé à Dolto, à son écoute des enfants, à son désir de leur donner des outils.
Et bien sur, j'ai pensé à Truffaut et ses 400 coups.
Un livre qui ne passera, selon moi, pas inaperçu dans cette rentrée littéraire.
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Un livre avec un regard acerbe, des odeurs, des émotions. On est happé par l'ambiance, l'univers.
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