A contre-courant de la majorité, je dois bien dire que je ne comprends pas l'engouement autour de ce livre qui n'est franchement pas transcendant, pour moi. Et je m'excuse de la longueur de l'avis, mais au vu du statut du livre je me dois de le développer.
Je ne reviendrais pas sur le style de
Margaret Atwood, qui est très plaisant à lire et permets de dévorer rapidement le livre. D'ailleurs je suis plus intéressé par d'autres livres de l'auteure que par celui-ci.
Car ce qui me dérange, c'est que l'histoire n'est pas passionnante, et le monde non plus. le monde présenté ici est une dystopie, mais plusieurs éléments me dérangent dans la façon de faire : le limiter à un seul pays (les Etats-Unis), le fait que le pays s'effondre tout seul (selon les notes finales), la question de la stérilité de la population qui a conduit à ce système, jamais véritablement exploité. En gros, l'idée de présenter un monde dystopique déjà installé et qui a fait suite à une problématique mondiale. L'idée est séduisante, mais je n'ai jamais senti de réelle impact de ceci dans l'univers décrit. C'est surtout un roman sur la position des femmes dans cette nouvelle société. A mon sens, ça perd de l'intérêt sur pourquoi cette société s'est développée et comment tout ceci c'est progressivement mis en place.
Mais le gros souci, c'est que ce monde dystopique n'a pas grand intérêt à mes yeux. Il est oppressif envers les femmes, oui, mais je ne vois pas quel est l'intérêt de nous présenter cet univers à part le fait de savoir que ce système ne me plait pas. Mais ça, je le savais avant de lire l'ouvrage. du coup, je m'attendais dans ma lecture à une présentation qui ferait en deux teinte, cherchant à montrer un univers pas si manichéen et qui poserait de bonnes questions. Là, j'en suis sorti en me disant qu'un système de ce genre ne me conviendrait pas du tout, qu'il m'horripile, mais c'est tout. En comparant ce dernier avec des systèmes actuels oppressant les femmes, je trouve qu'il manque réellement quelque chose, sur le côté religieux, sur la façon dont des personnes s'en sortent dans ce monde-là malgré tout ... (je pense ici à de nombreuses lectures sur l'Afghanistan ou l'Iran qui m'ont bien plus donné à réfléchir).
Et le souci, selon moi, vient de la façon de raconter : le personnage principal n'a aucun intérêt et un impact très limité sur l'histoire. Elle n'agit pratiquement pas, subissant tout aussi bien son monde que les propositions des personnes autour. Toute la question de la résistance est inutile, elle ne participe finalement à rien et je ne comprends toujours pas pourquoi la résistance tente absolument de la sauver, en dehors de la compassion envers une femme victime d'un système. Mais est-ce vraiment la meilleure personne à sauver dans ce système qui en oppresse des milliers ? Jude est importante pour le lecteur, mais je ne vois pas l'importance qu'elle a dans son propre monde.
De fait, j'ai été déçu de voir que l'histoire comporte à la fois beaucoup de flashback qui servent à mettre en relation l'ancien monde et celui-ci, ce qui ne m'intéresse que très peu puisque je vois déjà bien la façon dont cet univers m'insupporte. Et au final, le roman se finit avant qu'il ne devienne intéressant, et le monde qu'elle décrit n'a pas encore eu réellement d'intérêt. J'ai vraiment l'impression d'avoir vu le prologue d'un livre qui pourrait être très intéressant et qui exploiterait réellement ce monde.
Enfin, la partie la plus sensible de ce récit est aussi celle qui m'a le moins intéressé : la question du sexisme. Dans le récit, le monde oppressif envers les femmes. Soit, mais la question ne dépasse jamais réellement ce cadre-là, sous-entendant que cette société nuit également aux hommes. Et ? Je veux dire, en tant qu'homme, le récit n'implique jamais réellement le lecteur à se poser des questions sur notre propre monde, notre perception ou notre façon d'agir. Je n'ai ressenti aucunement d'attaque dirigée vers ce qui est notre monde actuel et le sexisme (bien réel) qu'il comprends. J'ai envie de refermer ce livre en disant : c'est un monde horrible, heureusement je ne suis pas comme ça. Ce qui est dommage, puisqu'il y a là un terreau fertile pour mettre en image beaucoup de choses qui existent dans notre quotidien, et pourrait même donner à penser aux hommes qui le lisent.
Ce qui est gênant, c'est que j'ai lu "
Les hommes protégés" de
Robert Merle peu de temps après, et que j'ai pris une claque monumentale avec ce dernier : le livre développe parfaitement son univers, s'en sert comme dénonciation du comportement des hommes et de la place laissé aux femmes, des mécanismes du sexisme inhérent et la fin est largement plus intéressante sur les questions qu'elle pose. En comparant les deux, j'ai eu l'impression de voir deux oeuvres traitant le même sujet mais avec un fossé qui sépare leurs pertinences. Hors,
Robert Merle est un homme et
Margaret Atwood est une femme. Serais-je plus sensible à ce qu'il dit parce qu'il met en lumière les comportements des hommes, sujet qui me touche plus ? Je ne sais pas vraiment.
En tout cas, je suis très peu intéressé par ce roman, mais bien plus par la série qu'ils en ont fait, où l'héroïne semble avoir plus d'impact sur le récit et fait quelque chose. L'idée de la série me semble idéal pour étirer la bonne idée de ce livre vers autre chose de plus intéressant et construit. Pour la lecture, je vais voir un autre livre de l'auteure mais je suis vraiment pas convaincu par celui-ci, avec lequel j'ai du mal et pour lequel je ne comprends pas vraiment l'engouement.