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sur 1725 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
J'étais à peu près passée à côté du fait divers au coeur de ce récit. 2008 : le meurtre par 28 coups de couteau d'une postière dans une petite ville de l'Ain. 2013 : l'acteur du Petit Criminel, césar du meilleur espoir 1991, Gérald Thomassin mis en examen pour cet homicide et incarcéré en détention provisoire puis libéré sous contrôle judiciaire. 2019 : il disparaît, sur le point d'être innocenté d'un non-lieu. Incroyable histoire, du César au cauchemar, nimbée de mystères.

Florence Aubenas est une formidable conteuse. Ce n'est pas nouveau, pour ceux qui ont lu le Quai de Ouistreham ou suivent son travail de journaliste au Monde. Disons que dans ce récit éminemment romanesque où tous les événements sont vrais, son talent est encore plus éclatant. L'Inconnu de la Poste se lit comme un thriller, fluide et aisé à suivre, saturé de mystères. La ligne narrative sait où elle veut conduire le lecteur tout en se remodelant en permanence au fil des rencontres et des éclairages choisis par l'auteure. Elle ouvre les tiroirs les uns après les autres tout en gardant son récit droit.

L'auteure a travaillé plus de six ans sur ce dossier. Pour autant, elle ne propose pas une contre-enquête à la « Faites entrer l'accusé ». de même, elle ne porte aucun jugement sur le déroulé de l'affaire, ne fait aucune extrapolation. Dans la lignée rigoureuse et sensible de de Sang froid ( Truman Capote ) et du Chant du bourreau ( Norman Mailer ), son True crime est une magnifique étude sociologique, celle d'une petite ville provinciale, Montréal-la-Cluse, au coeur de Plastics Valley en crise depuis les années 1990 puis carrefour de la drogue entre la Suisse et l'Italie. Comme une vue en coupe de la société française qui donne les clefs pour percevoir l'épaisseur du réel et sa complexité.

Florence Aubenas flaire dans les moindres recoins du réel et son acuité humaniste nourrit son récit de mille détails qui palpitent de vie en s'attachant à une galerie épatante de portraits. Bien sûr, Gérald Thomassin en est le point de convergence et on découvre un enfant de la DDASS que le cinéma n'a pas sauvé, dont le parcours chaotique de marginal entre drogue, alcool et RSA, en a fait un parfait gibier de potence. « Attachant et décourageant » comme le décrit le cinéaste Jacques Doillon.

Mais au-delà de la trajectoire cabossée de Thomassin, Florence Aubenas donne une voix à tous ces protagonistes qui n'ont pas l'habitude de se raconter ou d'être racontés : les habitants de Montréal-la-Cluse, la bande de copine de la postière assassinée, les copains marginaux qui traînaient avec Thomassin, les les derniers fermiers du village vivant comme des reclus avant de tout lâcher. Catherine, la postière a droit à un portrait complet qui résonne avec les failles de l'acteur. Et puis, il y a son père, notable du village. Acharné, ne tenant que par sa quête de vengeance, s'accrochant à ses croyances, obsédé par Thomassin en lequel il ne voit qu'un assassin avéré. On est chez Chabrol ou Simenon.

Tout est passionnant dans ce récit à l'humanité brute et nue qui ne verse jamais dans le sensationnalisme.



Commenter  J’apprécie          20031
En quelques phrases, Florence Aubenas sait nous faire comprendre ce qui sépare Gérald Thomassin du reste de la société. Cette société qui l'a adulé un temps, (allez jeter un oeil sur la page Wikipedia ou l'IMDB de Gérald Thomassin), à laquelle il n'a jamais su se conformer et qui l'a rejeté en le soupçonnant du pire, le meurtre de la postière de Montréal-La-Cluse en 2008.
N'a-t-il pas été le petit criminel dans le film de Jacques Doillon, vous diraient ceux qui au moyen-âge jetaient des pierres sur l'acteur qui jouait le rôle de Judas lorsque la Passion du Christ était mis en scène sur le parvis des cathédrales ?
Il a préféré disparaître en août 2019. Il obtiendra un non-lieu en octobre de la même année. Depuis personne ne sait où il se trouve. Une information judiciaire pour enlèvement et séquestration est ouverte.
« Montréal-La-Cluse est devenu un bourg ouvrier, mais le temps s'y écoule comme à la campagne, entre la maison et le jardin.
S'occuper du bois, savoir conduire très vite sur la neige ou éviter de nuit un sanglier garde ici tout son sens.
(…)
Personne n'a jamais vu Thomassin dans l'eau, ni même en maillot de bain. Les jours et les nuits, il les passe avec quelques gamins du camping, collé devant des jeux vidéo, à écluser des bières. »
En 2007, Thomassin s'installe dans cette région de Nantua où après le miracle économique de l'industrie du plastique, tout « a été compressé, délocalisé, précarisé, fermé. » où, « Bientôt il faudra du piston pour avoir sa chimio »
Par miracle, Montréal-La-Cluse a pu maintenir son agence postale. Autour de la postière, « Catherine Burgod, 47 ans, des faux airs de Sophie Marceau », les anciennes copines de lycée se retrouvent pour un café matinal tous les jours à 8h30.
Dans le village, Thomassin se lie avec Tintin et Rambouille « On était les Dalton » dit Tintin.
Au yeux des deux autres Thomassin brille, c'est la vedette !
Autour de ce fait divers, Florence Aubenas nous livre une véritable chronique de la France du XXIème et du fonctionnement de la justice. Ça se lit comme un polar, mais ça fait froid dans le dos.
Avec une grande précision et un vocabulaire sans détour, elle analyse le contexte des itinéraires respectifs de Catherine Burgod et Gérald Thomassin. Tout les oppose. Elle, la petite fille gâtée par son père qui ne lui refuse jamais rien, malheureuse malgré les apparences, court après un bonheur qui lui échappe. Lui , l'orphelin de la DASS qui ne s'est jamais remis de son abandon malgré ses récompenses cinématographiques vit dans une réalité qu'il est seul à percevoir. Deux personnalités opposées qui se retrouvent dans les blessures que la vie leur a infligées.
Le village prend fait et cause pour Catherine contre Thomassin.
« Peu à peu, dans cette paisible communauté villageoise, la méfiance entre voisins s'est installée, les anciens se sont remis à raconter la guerre, « le seul épisode comparable, dit l'un. »
Thomassin coche toutes les cases, il est étranger, habite juste en face de la poste, parle beaucoup sans que l'on sache si c'est l'auteur ou le personnage qui parle. Les mots n'ont pas le même sens pour Jacques Doillon ou pour un habitant Lambda de Montréal -La-Cluse !
Thomassin n'est jamais dans la réalité, il joue en permanence. « Il n'y a pas plus attachant, dit Doillon. Pas plus décourageant non plus. » Entre lui et la société c'est une question d'indifférence et d'attraction. « Ce monde lui paraît étranger et à la fois secrètement familier. »
Sur les témoignages de Tintin et Rambouille l'enquête concentre sur Thomassin. Son expérience d'acteur fait dire aux gendarmes« Il a pu tenir ce rôle du meurtrier puis s'en extraire en se persuadant ensuite que ce n'est pas lui qui a agi. » Manquent les preuves. Il donne du grain à moudre aux gendarmes car « (…) « simplement » n'existe pas dans le monde de Thomassin. »
Garde à vue le 26 juin 2013, il passera presque trois ans en prison.
Les traces d'ADN du véritable coupable retrouvées sur la scène de crime matchent avec celle d'un habitant de la vallée. Thomassin est disculpé, mais le doute demeure.
L'analyse des magistrats diverge sur le sujet.
A la fin de cette lecture, on hésite entre Entre colère et chagrin.
La presse n'a pas hésite à écrire « (…) l'acteur du Petit criminel, « un film dont le titre résonne tragiquement aujourd'hui »
Pendant des années la justice a considéré un coupable parce que son parcours en faisait un coupable crédible.
Un livre hallucinant sur une affaire qui ne l'est pas moins.
Du grand Florence Aubenas !
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Je connais Florence Aubenas pour avoir lu , entre autres , son très intéressant " Quai de Ouistreham" dans lequel ses qualités journalistiques s'étalaient au grand jour pour notre plus grand plaisir . Par contre , je n'avais pas connaissance de la parution de son dernier roman " L'inconnu de la poste " que la " main providentielle " de ma fille a sorti des rayons de sa librairie préférée afin de me l'offrir . le titre déjà, me semble alléchant, porteur de sens , fleurant bon le mystère et la " province " . Oui , la province , vous savez , un de ces villages ou gros bourgs où l'on peut encore boire un demi au " bar de la poste " , cette poste qui sert ( ...ou servait ) de phare salvateur aux touristes égarés, comme l'église ou la mairie . Lieu de rendez- vous . Un bureau de poste qui , d'ailleurs , justifie bien ici sa fonction de lien social puisqu'une aimable " bande de femmes " s'y réunissent tous les jours autour de Catherine Burgod , la postiére, belle femme " complexe " , fille d'un notable local .Ce village de montagne , c'est Montréal la Cluse , près du lac de Nantua . Un décor splendide, attirant surtout les familles pour l'activité de ses usines de plastique et situé à mi- chemin entre Lyon et la Suisse sur la route des trafiquants de drogue . Tout un programme ....C' est là que Gérald Thomassin , un acteur reconnu et primé d'un César du jeune interprète , vient s'installer pour vivre sa " marginalisation " et oublier un passé et un présent peu attrayants car compliqués . Et bien entendu , l'attirance pour Tintin et Rambouille , eux - mêmes " marginaux du village " , va encore plus focaliser l'attention des autochtones sur sa personne . Ben , oui , comme partout .. Bienvenue dans la Grotte , juste en face ...de la poste .

Ça commence comme un roman , comme une intrigue de polar mais souvenons- nous que Florence Aubenas est journaliste et c'est dans la vie réelle , dans un quotidien banal , qu'elle puise les situations , qu'elle traduit l'ambiance , les sentiments et qu'elle crée un suspense qui nous tiendra en haleine jusqu'à la dernière ligne...Les phrases courtes , sèches , taillées au cordeau nous placent au coeur d'un fait divers qui , peu à peu , prend des airs de " vrai crime " . Et oui , un vrai crime que l'assassinat de la belle postière. Pas une fiction , non , du réel, du vécu, 28 coups de couteau pour la préposée , 6 à 7 ans de travail , d'enquête , de recherches pour Florence Aubenas . Tout ça pour ça ? Oui , mais ça , vraiment , c'est " du lourd , du très lourd " comme dirait Francis Lucchini . Il y a , dans cet ouvrage , la " patte et le sérieux " d'une vraie journaliste d'investigation , qui cherche , fouille , triture , remue , et relate tout en gardant sa distanciation ( mot bien dans l'air du temps ....) , ne nous entraîne pas là " où " elle veut mais là où il faut être ...Une vraie pro , quoi , pour un régal de livre ...Enfin , ce n'est que mon humble avis , hein , et vous n'êtes pas obligés de me croire ....Je l'ai déjà dit ? Ah, oui ? Alors je me tais , dommage pour vous , j'allais vous révéler...
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Quand un essai se lit dès les premières pages comme un roman, c'est plutôt bon signe. L'inconnu de la poste de Florence Aubenas aurait fait un excellent roman s'il n'avait pas traité de la réalité. Celle du quotidien. du quotidien sordide. C'est arrivé près de chez vous, ou dans un de ces petits villages comme il y en a tant près de chez vous. C'est arrivé en France au XXIe siècle…

Souvenez-vous, Gérald Thomassin, le petit criminel de Doillon, César du meilleur espoir à la fin du siècle dernier avant de plonger dans la spirale infernale du marginalisme et du quasi-oubli. À Rochefort, puis dans le Bugey, à Montréal-la-Cluse, 3 000 habitants. Un petit studio en sous-sol, face à l'agence postale. Celle dans laquelle Catherine Burgod se fait assassiner un petit matin d'hiver. Plaçant Thomassin dans la posture du coupable idéal.

Un jour au mauvais endroit… Aubenas aurait pu emprunter son titre à Calo. Reprenant le concept rigoureux de son journalisme d'immersion, elle a depuis plusieurs années, noué des liens avec Thomassin et remonté le fil complet de ce fait divers dont le coupable demeure inconnu à ce jour. Entre temps, la pression psychologique, l'opprobre collective, les gardes à vue et la détention provisoire auront eu raison des éternels espoirs de rebond que cultivait Thomassin. Il est porté disparu depuis un an et demi.

Bien sûr, comme elle le fit pour Outreau, Florence Aubenas endosse sa veste de grand reporter et décortique méticuleusement les étapes de l'enquête, questionne les faits, réinterroge les témoins et démontre sans passion les faiblesses factuelles d'un dossier exacerbé par les passions locales.

Mais comme elle le fit à Ouistreham, elle s'installe sur place, s'imprègne des lieux, rattrape leur histoire, intègre à son raisonnement les mécanismes relationnels qui régissent ce microcosme de la vallée du plastique où il faut que tout bouge pour que rien ne bouge. Et conforme à son habitude, elle s'intéresse aux gens. Aux vrais gens.

Et c'est là que Florence Aubenas donne à son livre toute sa dimension. Loin de l'enquête, elle nous raconte l'histoire simple devenue compliquée de ces esquintés de la vie, hommes aux cerveaux et aux coeurs trop pleins : trop pleins d'envie, trop pleins d'essais, trop pleins d'échecs, trop pleins d'angoisses, trop pleins de lassitude.

Loin de toute approche moralisatrice ou culpabilisante, Florence Aubenas nous propose, avec distance et élégance, une énorme bouffée d'humanité qui affleure juste au-dessus d'un contexte bien sombre, pour qui choisit de la regarder. Un grand livre.
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De cette autrice, j'avais aimé le quai de Ouistreham, une enquête minutieuse au coeur de la crise et des petits boulots mal payés.
Une fois de plus, dans L'inconnu de la posteFlorence Aubenas nous plonge dans la réalité avec ce fait divers qui s'est déroulé le 19 décembre 2008 dans le village montagnard de Montréal-La-Cluze.
L'histoire, c'est celle de Catherine Burgod, quarante ans, divorcée et mère d'une fillette. Elle tient le petit bureau de poste où ses amies aiment venir la retrouver pour papoter autour d'un café. La postière sera retrouvée assassinée de 28 coups de couteau. Crime sordide qui émeut la population et bouleverse le père de la victime, ancien maire et notable du village. Il n'aura de cesse de trouver le coupable et demander justice.
De coupable, justement, il y en a un qui ferait bien l'affaire. Il s'agit de Gérald Thomassin, comédien et marginal, Il a arrêté la drogue, prend du Subutex. On le voit trainer avec deux marginaux, Tintin et Ramboule, donc l'activité principale est la picole et la drogue. Et, pour ne rien arranger, Thomassin vit juste en face du bureau de poste. Il a eu son heure de gloire, Thomassin, a même décroché un César pour son rôle dans le petit criminel de Jacques Doillon. Tiens, justement, un rôle de criminel… Avec sa jolie gueule de sale gosse amoché par la vie, Thomassin n'attire pas toujours la sympathie.
L'enquête va trainer en longueur, il y a peu d'éléments. Florence Aubenas nous entraîne dans les méandres de cette enquête laborieuse qui prendra des années. Elle sait à merveille cerner les personnalités, épingler les absurdités, les erreurs et les malentendus. Elle nous fait entrer dans la vie des personnages, même les plus anodins, et dépeint de sa plume subtile la psychologie de chacun. Ils sont là, sous nos, yeux et on a l'impression de les avoir croisés. Elle nous raconte par le menu ce meurtre sans témoin et l'incompréhension d'une telle violence sur la victime. Sans se complaire dans le crapuleux, elle tourne autour de ce crime inexpliqué et ce fait réel se lit comme un polar psychologique. Elle campe avec réalisme cette France profonde et ses habitants qui tentent de survivre dans une région sinistrée.

Pari gagné pour Florence Aubenas qui mêle exactitude journalistique et profondeur littéraire, car ce récit se lit, se dévore comme un roman noir.

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J'ai reçu L'inconnu de la poste par une Masse critique de Babelio, en version audio : c'est donc tout autant du livre que de son enregistrement que je me retrouve à faire la chronique.

Le livre ? J'en avais entendu parler en bien, et je savais déjà qu'il s'agit d'une histoire dont la fin reste ouverte : normal, parce qu'aujourd'hui, en 2021, le drame hors norme qui est relaté est bel et bien toujours non résolu. Un meurtre spectaculaire commis en 2008, des suspects qui ont tous l'allure de coupables idéaux, des rebondissements qu'aucune fiction n'aurait osé imaginer... ce n'est toujours pas fini – et ça ne le sera peut-être jamais. Cela me faisait beaucoup hésiter à lire le livre : je ne sais pas pour vous, mais les livres qui ne se terminent pas sont parmi ceux qui m'énervent le plus.

Oui mais voilà, il y a l'autrice. Ce n'est pas le premier livre de Florence Aubenas que je lis : j'ai déjà adoré le quai de Ouistreham, que j'ai lu au travail, dans un labo de socio, parce que c'était une journaliste dont le travail de terrain est aussi fin que celui de sociologues de métiers, et la position scientifique, aussi sérieuse. Elle est remarquablement dépourvue de jugement. Pour autant, c'est un livre qui se lit comme un roman et donne envie de suivre l'autrice dans toute son oeuvre. Vous la connaissez ?

Cette fois, la particularité de l'histoire fait que l'enquête est à la fois plus distanciée et moins fouillée. Florence Aubenas a tissé des liens avec celui qui a longtemps été le principal suspect, et qui a aujourd'hui disparu : elle ne les cache pas, dès le début ; mais pour autant, elle ne les utilise pas dans son récit. Elle relate moins un fait divers horrible qu'une micro-société dans une zone dont la splendeur appartient au passé, touchée par la crise, mais qui reste vivante grâce à une usine de plastique qui fait encore vivre de nombreux habitants ; elle en campe les notables et les marginaux. C'est très intéressant.

Pourtant, il reste une sensation d'inachèvement... parce que l'histoire est réellement inachevée, bien sûr. Mais aussi parce qu'un coup de théâtre au bout de plusieurs années d'enquête en a complètement modifié l'allure générale, tant sur un plan individuel (avec un nouveau suspect) que social (le nouveau suspect aurait pu avoir lui aussi une allure de coupable idéal, mais il n'est apparu qu'après dix ans où c'était un autre qui jouait ce rôle). Eût-elle commencé son enquête aujourd'hui qu'elle aurait eu une toute autre allure... et cela se ressent : on est désorienté, comme le sont probablement les protagonistes de l'enquête.

En tout cas, quand une Masse critique m'a donné l'occasion de lire ce livre, je n'ai pas hésité, et j'avoue une chose : je n'ai pas vu que c'était un audio-livre que j'allais recevoir. Mon tout premier ! Et allez, j'avoue autre chose : j'ai écouté le début, et j'ai réalisé que cela allait durer 6h30. Mais quand donc puis-je dégager 6h30 de solitude pour écouter un CD, ce qui m'oblige à monopoliser mon salon ? J'ai donc acheté le livre, et n'ai écouté que des extraits.

Dans un monde idéal, je prendrais le temps de l'écouter en entier : la voix nette et sèche de Fabienne Loriaux convient parfaitement au sujet ; les introductions de piano qui rythment les chapitres créent une ambiance de mystère que j'ai regretté de ne pas avoir en lisant... Mais c'est un média qui me semble convenir pour celles et ceux qui ont un mode de vie qui peut s'accorder avec : par exemple, en conduisant. Ne conduisant pas... ce n'est pas pour moi.

En tout cas, je remercie Audiolib et Babelio de m'avoir permis de faire cette découverte, et j'engage toutes celles et ceux qui conduisent ou ont des plages de détente solitaire à occuper intelligemment, à essayer les audio-livres. Et bien sûr, j'engage tout le monde à commencer par celui de L'inconnu de la poste ! A moins que... suis-je la seule à n'en avoir jamais écouté avant ?
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Florence Aubenas a mené une enquête serrée d'où il ressort que le suspect, Gérald Thomassin, a pu confondre Patrick Swayze avec Patrick Suze ou Justin Bieber avec ce qu'il était au moment des faits et tout au long de la procédure: juste imbibé.
Malgré la distance journalistique qui sied au genre grand reportage, l'émotion qui habite certaines pages à l'évocation du parcours de la postière Catherine Burgod et surtout de l'acteur Gérald Thomassin vous étreindra peut-être. Enfin, moi, j'ai été touché par l'une et par l'autre.

Sale affaire Burgod par bien des aspects. le crime de cette postière est crapuleux, l'enquête repose des sables mouvants, le mis en examen est pitoyable et les enquêteurs, puis les juges, pas cleans non plus.
D'aucun conclurait que la justice a sali tout ce qu'elle a touché, sans oublier elle-même.
Quant à Florence Aubenas, je ne tarirai pas d'éloges sur son travail, méticuleux. Aux détails de l'affaire, s'adjoignent les descriptions de quelques habitants remarquables, sans oublier la situation du village, près de Nantua et de son lac, au sein une région industrielle appelée Plastic Vallée.
D'emblée j'ai été séduit par l'écriture de Florence Aubenas qui en plus de mener une enquête, sait si bien la retranscrire.
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En rencontrant Gérald Thomassin, Florence Aubenas lui a expliqué qu'elle n'écrirait pas sa biographie mais un livre sur “l'assassinat d'une femme dans un village de montagne, affaire dans laquelle il était impliqué.”
Alors faisons un rapide point biographique Wikipédia. Thomassin est l'acteur principal du film “Le petit criminel” de Jacques Doillon.
Sa prestation lui vaut le César du meilleur jeune acteur masculin en 1991.
Tout en menant une vie marginale, il continue à tourner de manière irrégulière.
Il est accusé du meurtre de Catherine Burgod, commis en 2008 à la poste de Montréal-la Cluse.

Le reste, vous le trouverez dans ce récit journalistique très documenté et pourtant captivant.
Pour le rôle d'un gamin paumé qui fait un braquage pour retrouver une demi-soeur inconnue, Jacques Doillon voulait un acteur jeune et vrai, “pas un petit bourgeois parisien qui jouerait les prolos” dira-t-il. le cinéaste s'est mis alors en tête de trouver son “petit criminel” dans les centres pour mineurs de la région parisienne. “Au foyer, un éducateur propose de présenter Thomassin à l'équipe. D'ailleurs, il n'en voit pas d'autre. On court chercher le gamin, qui tire franchement la gueule d'avoir été interrompu dans un jeu de copains. Il va sur ses seize ans, l'air d'en avoir douze. Un casting ? le mot lui est inconnu, il croit à un examen médical. Il finit par se décider, en apprenant que le studio pour les essais se trouve sur les Champs-Elysées ? Voilà qui est plus excitant.”

Florence Aubenas ne veut pas imposer une analyse psychologique, ni son point de vue, elle met en lumière des personnages avec acuité.
Elle illustre sans concession l'itinéraire erratique de Thomassin mais aussi le combat du père de la fille assassinée et toute la société de cette petite ville de l'Ain.

La qualité de l'auteur est de rester sur le fil l'écriture journalistique avec ses informations mais aussi ses manques et de nous passionner pour cette histoire à hauteur d'hommes et de femmes qui sonne vrai.

Je rajoute une demi étoile à ma notation initiale pour essayer de vous persuader de toutes les qualités de ce travail d'investigation qui m'a passionné.
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Voici mon retour de lecture sur L'inconnu de la poste de Florence Aubenas.
L'autrice revient sur un fait divers qui a bouleversé le village de Montréal-la-Cluse en décembre 2008.
La victime, c'est Catherine Burgod, tuée de vingt-huit coups de couteau dans le bureau de poste où elle travaillait.
Ce livre est donc l'histoire d'un crime.
Il a fallu sept ans à Florence Aubenas pour en reconstituer tous les épisodes – tous, sauf un.
L'inconnu de la Poste est un ouvrage qui m'a captivé. C'est un mélange de fait divers et d'enquête policière mais pas uniquement, car l'autrice dresse le portrait d'une France que l'on aurait tort de dire ordinaire.
Nous découvrons sous sa plume acéré le quotidien de gens comme vous et moi. La postière c'est quelqu'un qui n'a rien demandé à personne mais elle va mourir dans des conditions abominables. Pourquoi ? Par qui ? Son père, qui a un certain âge, veut à tout prix découvrir qui a pu faire ça.
Florence Aubenas creuse et revient pour nous sur ce crime qui ne peut pas nous laisser indifférent.
J'ai apprécié le ton de ce livre, la façon de l'autrice de monter les faits, l'enquête.
C'est un très bon ouvrage et même si je suis pas une grande amatrice de ce genre ici j'ai totalement adhéré à ma lecture, que je note cinq étoiles.
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J'ai acheté ce roman avec mon crédit audible mensuel, sans grande conviction, et un peu par dépit ne trouvant rien d'autre dans les nouveautés. Et quelle surprise ! C'est un vrai coup de coeur et je l'ai dévoré en trois jours à peine.

Florence Aubenas, en excellente journaliste, retrace un fait-divers : l'assassinat de Catherine Burgod, dans son petit bureau de poste rural, tuée de 28 coups de couteau. Très vite, les soupçons pèsent sur Gérald Thomassin, acteur montant du cinéma dans les années 1990, porté disparu depuis deux ans.

Sans jamais prendre parti, elle retrace le crime, puis l'enquête policière. C'est ensuite au lecteur, tel un membre d'un jury populaire lors d'un procès d'assise de se faire son intime conviction.

On découvre une partie de la France rurale et montagnarde, dépendant du secteur du plastique et de ses usines, une France meurtrie, qui se réfugie dans l'alcool et la drogue qui transite à la frontière avec la Suisse. On rencontre des individus tombés trop tôt dans l'alcool, la drogue et la petite délinquance, des enfants de la DDASS, victime de viols et de maltraitances qui tentent tant bien que mal de se faire une place en tant qu'adulte. C'est un récit extrêmement touchant dont on ne sort pas indemne.

La version audio, lue par Fabienne Loriaux, accentue l'effet d'une longue confidence, d'une quête de la vérité remplie de fausses pistes, d'erreurs judiciaires et d'incohérences. On ressort révolté par la lenteur de la procédure, par les faux témoignages et l'identité du meurtrier toujours non dévoilé. Il y a forcément quelqu'un quelque part qui sait quelque chose et qui se tait. Qui se tait sur le meurtre de Catherine Burgod bien sûr. Mais aussi, je suis toujours sidérée que de nos jours, avec tous les téléphones portables, ordinateurs, vidéos de surveillance, un individu peut se volatiliser sans aucune trace…

C'est donc une affaire bien complexe, dont on se saura sans doute jamais la vérité qui nous est raconté à merveille par Florence Aubenas. Un récit qui lui a pris six longues années à écrire et que je vous conseille vraiment si vous ne l'avez pas encore lu.

Lien : https://missmolko1.blogspot...
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