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EAN : 9782072995194
368 pages
Gallimard (02/03/2023)
3.59/5   133 notes
Résumé :
Née dans une tribu amérindienne du Canada, Fille-Rousse grandit avec les garçons, s’ adonnant avec joie à la chasse, la pêche et la course. Lorsqu’ elle observe les groupes de femmes, elle pense que rester au campement n’ est pas fait pour elle !

Dans l’ esprit du chamane de la tribu émerge alors l’ idée que la petite fille, dont la naissance est nimbée de mystère et dont le parcours étonne, pourrait être une Peau-Mêlée, ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (32) Voir plus Ajouter une critique
3,59

sur 133 notes
La scène inaugurale, extraordinaire de violence inouïe, semble prévenir le lecteur : si tu continues, tu sais ce qui t'attend, sans masochisme mais tu vas être bousculé dans tes certitudes dans une expérience de lecture atypique et tellurique. L'auteur ne cache pas ses intentions et en même temps, il offre tellement plus que de la violence, aussi de la poésie dans la description d'un univers d'une sensualité folle. Et surtout le portrait d'une femme que l'on voit naître puis grandir.

Grand nord canadien, XVIème siècle. Fille-Rousse vit au sein de la tribu des Yeux-Rouges, en guerre permanente avec celle des Longues-Tresses. C'est une de ces héroïnes inoubliables. En rupture avec les injonctions faites aux femmes, dès son enfance, elle s'oppose aux normes de genre et veut nager, chasser, parcourir la taïga, plonger comme les garçons. Suite à une naissance nimbée de mystères au pied de l'Arbre colère sur une île sacrée, le chaman reconnait en elle une élue des Esprits, une Peau-Mêlée abritant un esprit masculin et féminin dans le même corps. Elle est ainsi autorisée à joindre le groupe des garçons mais tout le monde dans la tribu ne croit pas à cette prophétie.

«  Moi j'ai la forme d'une fille qui coule dans une rivière de garçon. Les années qui passent m'ont fait creuser ce lit. »

Passée la scène inaugurale qui m'a hypnotisée, je me suis interrogée sur le côté hybride du texte qui ne se revendique ni roman historique ni ethnographique. Etant passionnée par la culture amérindienne, j'ai été troublée et gênée de ne pas savoir quels rites ou rituels décrits relevaient de la fiction, lesquels correspondaient aux traditions innues. Il m'a manquait une bibliographie à la fin, des sources. Je me suis également interrogée sur le potentiel anachronisme de la thématique du genre qui court durant tout le récit ... tellement présente aujourd'hui mais l'était-elle au XVIème dans la culture autochtone ?

Et puis, j'ai lâché prise, le plaisir de lecture a pris le pas sur un certain purisme car Guillaume Aubin déploie une écriture d'une grande force évocatrice à coups de phrases brèves faites de mots simples mais qui disent si bien le ressenti de Fille-Rousse. Que l'on soit dans la violence la plus crue ou dans la poésie de la nature, c'est tout le monde sensoriel de l'héroïne qui s'ouvre au lecteur, avec son rapport très charnel à tout ce qui l'entoure, faune, flore, hommes. Les phrases rythmées à fleur de peau de l'héroïne emportent totalement un lecteur quasi hypnotisé.

Et puis, j'ai écouté une interview en ligne de l'auteur qui en évoquant le thème central du genre explique comment il a découvert le concept de bispiritualité présent chez plusieurs peuples autochtones comme les Innus. La bispiritualité reconnait que certaines personnes peuvent à la fois abriter un esprit masculin et féminin dans le même corps. Ces personnes se voient attribuer un rôle cérémoniel et social proche de celui d'un chaman. Sachant cela, évidemment que s'éloignent suspicion d'anachronisme et crainte de récupération opportuniste.

Fille-Rousse est une héroïne passionnante que l'on voit grandir animée par un esprit de rébellion qui s'oppose aux normes du genre. Elle imagine ce que c'est d'être un homme, de vivre comme un homme, chasser, parcourir la taïga, nager, courir, le découvre, a l'impression qu'elle a gagné en allant dans la virilité puis s'en désenchante. Elle enflamme le récit, que ce soit dans des scènes animistes en symbiose avec la nature, de combats, de sexualité ou de vengeance, ne revendiquant rien d'autre que la liberté d'être et d'exister.

Un vrai défi d'écriture, j'aime lorsqu'on ne sait pas qui écrit ( homme, femme, blanc, amérindien etc ). Un récit original qui ne cède à aucune mode, ne cherche pas à imiter le style des auteurs amérindiens. Les thèmes servent le récit et non l'inverse, l'altérité radicale de Fille-Rousse permettant d'assoir une réflexion profonde sur l'articulation des libertés individuelles avec les principes de la vie collective.
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****

Née au milieu de la forêt, au pied d'un arbre, tirée du ventre de sa mère, Fille-Rousse est élevée par la tribu des Yeux-Rouges. Son histoire est entourée de mystère, sa vie est une légende... Homme dans un corps de femme, c'est une Peau-Mêlée. Mais elle va devoir lutter pour trouver sa place, pour la garder et la légitimer. Elle devra faire des choix, parfois difficiles, mais son envie de liberté la guidera tout au long du chemin...

Ce qui frappe dans le premier roman de Guillaume Aubin, c'est ce rapport au corps, cette lecture toute en sensation. Tout au long des pages, on perçoit le souffle du vent, la chaleur du feu, le froid de l'eau vive ou la grandeur des arbres de la forêt. On vit pleinement aux côtés de ces tribus semi-nomades des Premières Nations canadiennes.

C'est un langage particulier qu'a choisi l'auteur pour nous emmener sur les pas de cette jeune fille. C'est une héroïne à la fois impressionnante par son courage et sa force, touchante par sa grande solitude et imposante par sa volonté sans faille.

C'est un récit qui nous éclaire sur un monde de légendes, de croyances et où tout à son origine, son explication. C'est un environnement qui peut être aussi chaleureux que brutal. Y évoluer n'est pas chose facile, y trouver sa place encore moins.

Fille-Rousse restera longtemps dans ma mémoire. Elle sera l'image de l'affranchissement, la possibilité d'être soi dans toutes ces contradictions et ces dissonances. Elle sera le souvenir de la liberté gagnée...
Lien : https://lire-et-vous.fr/2022..
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Nous suivons Fille-Rousse, jeune Amérindienne dont la naissance est nimbée de mystère et qui, malgré son corps de fille, aime jouer avec les garçons et souhaiterait vivre comme un homme quand elle sera adulte.

Elle fait partie de la tribu des Yeux-Rouges, peuple semi-nomade belliqueux en guerre contre les Longues-Tresses. Les deux peuples se battent pour le Qaa, plante hallucinogène, à la fois toxique et bénéfique, qui leur permet de communiquer avec les esprits. En contact constant avec la nature et la forêt, leur culture est animiste. L'eau, comme le poisson, comme la montagne, sont pour eux des esprits.

En grandissant, Fille-Rousse est considérée comme une Peau-Mêlée par le chamane. En elle, se côtoient le féminin et le masculin. Elle inspire tour à tour l'admiration et le rejet.

C'est un texte brut et violent, certaines scènes n'épargnent pas le lecteur, encore moins la lectrice. Mais heureusement, la plume est belle et nous fait sentir cette nature immense et vierge.

Je ne suis pas sûre que ce texte reflète une quelconque réalité historique, il s'agit d'une fiction et cela ne m'a pas dérangée. le décor tribal est bien planté : les rites, les guerres, la chasse, les sacrifices y sont décrits avec réalisme.

Je recommande l'arbre de colère pour ressentir la beauté des paysages et pour vibrer auprès de cette héroïne forte et combative. L'écriture est superbe et immersive.

Il s'agit là de la centième publication de la Contre-Allée qui, pour l'occasion, nous met entre les mains un très bel objet-livre à la qualité littéraire indéniable.

Je dis oui !
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Revenir à l'origine des maux de la terre. Là où le commerce devient domination
Là où les hommes venus d'ailleurs écrasent et génèrent de futurs génocides.
La souveraineté des peaux puise loin dans l'absurde, rejaillit sur les décennies qui coulent sages et attentives mais prête à l'attaque.
Nous sommes une résultante de tout ce qui se joue là. Latence et prémisse d'un appel sociétal qui écrase.
Un texte et une série de documentaires pour apprivoiser ce que l'on pense connaître.
De la fiction et pour l'accompagner une réalité brute et cinglante qui boit les larmes.

L'arbre de colère de Guillaume Aubin se mêle à la nature avec virtuosité, il crache la violence des corps. Il panse les silenciés de n'avoir pas été assez entendu. Un petit moins pour ce grand roman: parmi une poétique indéniable du texte, un choix de certains mots parfois étonnant (moderne/licencieux ?). Un premier roman qui donne le ton de langue et d'humanité.

Raoul peck (que je connaissais déjà avec I'm not your negro, très juste et engagé) traduit pour nous l'histoire avec cette série de documentaires : Exterminez toutes ces brutes (en ce moment sur Arte) qui s'emboite parfaitement avec cette lecture. Un complément. Il enjoint le souvenir à ne pas s'écarter pour plus d'exactitude. Abrupt, parfois insoutenable. Pas plus que la réalité. Les oeillères ne créent pas plus d'humanité.
Il serait judicieux que l'on apprenne à taire l'orgueil. La vérité d'une civilisation sourd les peuples et n'as pas valeur d'universalité. S'astreindre à la déconstruction des récits dominants.

« La connaissance est le pouvoir et l'histoire est le fruit du pouvoir. Celui qui gagne à la fin décide du récit. » Michel-Rolph Trouillot

https://www.arte.tv/fr/videos/RC-022134/exterminez-toutes-ces-brutes/
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Les prémisses de ce roman étaient prometteuses. Centième nouveauté publiée par les éditions Contre-Allée, les choses n'avaient pas été laissées au hasard. Un roman se passant dans les tribus du Grand Nord Canadien, basé sur une tradition méconnue, celle qui permet à un homme d'assumer le rôle social d'une femme ou à une femme d'assumer le rôle d'un homme. Réflexion sur le genre et l'identité sexuelle vue par le prisme d'une autre culture, tout cela était bien alléchant.
Et pourtant, je n'ai pas réussi à adhérer. La première scène est particulièrement violente, mais soit, on sait que ces populations n'étaient pas tendres, donc j'ai accepté l'idée. La seconde scène, elle, inclut un élément de fantastique, c'est étrange mais encore une fois, pourquoi pas. Si l'on considère que l'on essaie de voir les choses par les yeux des hommes et des femmes de ce lieu et de ce temps, certains événements peuvent rester inexpliqués ou paraître surnaturels.
L'enfance de cette petite fille est plutôt agréable à lire. Racontée à la première personne, on découvre le fonctionnement de la communauté en même temps qu'elle s'y fait sa place, on la voit faire des choix qui ne sont pas ceux que l'on aurait attendus d'elle. Puis vient l'adolescence, et on retombe dans les scènes crues. Pourquoi pas si c'est pour dépeindre la découverte de l'amour physique, mais là, cela tourne vite à une certaine complaisance, et tout dégénère.
De scène crue en scène crue j'ai eu l'impression que l'on s'éloignait du sujet. La distinction entre sexe biologique, rôle social et préférences sexuelles est une vraie question, un sujet de roman passionnant ; ce que coûte socialement la différence, le prix de l'acceptation, voilà un autre sujet passionnant. Et s'il y a quelques réflexions intéressantes sur le sujet, cela n'est que fugace, pour laisser la place à une histoire qui tient plus du fantasme personnel que du roman. le côté fantastique et atemporel du livre, qui me semblait une trouvaille intéressante pour donner plus de poids au propos finit par le discréditer, et c'est finalement un regard occidental et fantasmé qui nous est proposé plutôt qu'une vision autre ou nouvelle de cette question du genre.
J'ai fini ce livre avec une certaine répugnance et je suis finalement déçue car j'en attendais beaucoup plus. Dommage, l'objet livre est beau, avec sa couverture sobre au grain mat et rugueux, la maison d'édition a apporté beaucoup de soin à cette publication, mais le contenant ne peut à mes yeux racheter le contenu et cette rencontre a été pour moi une immense déception.

Merci aux éditions La Contre Allée de m'avoir permis de lire ce livre, dans le cadre de l'opération masse critique de Babelio.
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critiques presse (1)
LaLibreBelgique
29 juillet 2022
Avec ce premier roman à l’écriture aussi fluide que sensuelle, Guillaume Aubin, jeune ingénieur repenti en libraire, nous emporte dans une épopée humaine riche en péripéties, ode à la liberté.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Les Barbes volent le chant des eaux et les Barbes volent jusqu'à la mort, qui coule sans trouver de prise, sans jamais faire douter le bras qui écorche, qui perce, qui ouvre. Ils font des prières à Dieu, indifférents aux poissons qui attendent un mot d'amour pour fermer une dernière fois leurs yeux. Ils coupent des arbres pour faire une croix, ils s'agenouillent devant un tronc, sans avoir pensé à s'agenouiller quand il était encore vivant.
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Videos de Guillaume Aubin (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Guillaume Aubin
2 nov. 2021 L'Arbre de colère, Écrit par Guillaume Aubin En librairie le 14 janvier 2022
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