Une fille sans fusil

Un roman très court, mais intense d'émotions brutes, une histoire de femme.

Une dame âgée, dans un « conteneur » ou dans une chambre d'hôpital psychiatrique puisqu'on ne sait jamais s'il s'agit de la réalité ou de souvenirs. Sur le mur de sa cellule, des films passent sans cesse et ajoutent à la confusion dramatique.

Chaque jour, elle rencontre un « docteur » qui lui demande de se raconter. C'est douloureux, elle a du mal à le faire. Elle se voit jeune comédienne qui se rend chez un auteur dont elle doit déclamer une oeuvre. « — Vous avez été violée, madame », lui dit le médecin.

Elle raconte la fois où des paroles… et sa rencontre avec.. et aussi la fois où il a… Et cette agression qu'elle est encore incapable de raconter.

Les filles devraient avoir des fusils pour se défendre, être des Jeanne d'Arc courageuses, mais elles ne sont que des petites Huguette, sans fusil, qui n'arrivent pas à se défendre.

Un roman très court, mais intense d'émotions brutes, l'histoire de toutes les femmes.

Huguette, parvenue à l'aube de la vieillesse vit dans un conteneur. Elle vit enfermée dans la noirceur de ses souvenirs. Elle est en thérapie et pense que nommer et partager les souvenirs qui ont entaché sa sexualité lui permettra de s'en libérer, que cela ouvrira une fenêtre dans son conteneur sans lumière. Elle finira par nommer treize abus ou agressions. Il y en a bien un quatorzième mais il restera en suspens.
Les souvenirs tournent en boucle dans son esprit mais les mots pour les dire ne sont pas faciles à trouver. Au début de la thérapie « Il y eu un silence. le mot tonitruant est apparu à côté du mot silence. C'est ce qui envahit habituellement l'espace sonore, quand on ne peut pas dire ce qu'on veut dire, et qui reste là, immobile et glacé, dans ce pays dans lequel je vis, le tonitruant silence. »
Le style du livre est vif, incisif. Les paragraphes courts et d'une densité extraordinaire.

Dans le conteneur d'Huguette, un film en continu met en gros plans les malheurs et la détresse qui ravagent aujourd'hui notre planète, réfugiés de la mer engloutis par les vagues, parents essayant de sauver leurs enfants des horreurs de la guerre ou de la famine. Elle espère que ces images la sauveront « avec des malheurs plus grands que le mien. » L'auteure relativise donc et banalise les traumatismes de son héroïne qui doivent être également les siens. Bien sûr, il y a pire que nos malheurs et quand on se compare, on se console. Bien sûr, elle n'est pas la seule à avoir vécu de telles souillures. C'est le lot de beaucoup de nos contemporaines.
Pourtant Huguette, même si elle a survécu à toutes ces agressions, traine depuis son enfance un chagrin sans nom qui alourdit encore son quotidien. Honte, culpabilité et colère l'ont empêchée de profiter des beautés du monde et lui ont sans doute rendu l'accès à l'amour plus difficile. Elle traîne à la patte, par un fil, une cabane à oiseau en forme de coeur.

Une fille sans fusil est tout sauf pleurnichard ou revanchard. Ce n'est ni Huguette, la renonçante ni Jeanne d'Arc, la guerrière. C'est un livre douloureux certes mais aussi un récit d'accomplissement et de liberté.

A l'heure ou le parlement Suisse discute des notions de viol et de consentement, la lecture de ce tout petit livre m'a semblé absolument d'actualité.

Par petits bouts, une femme en psychothérapie parle des agressions sexuelles, viols et harcèlements dont elle a été victime plus jeune

Un micro roman glaçant. Elle voulait être Jeanne d'Arc, donnez-lui une épée !
Lien : https://www.noid.ch/une-fill..

Je tiens d'abord à remercier Babelio et les éditions Les Herbes Rouges pour l'envoi de ce livre dans le cadre de la masse critique québécoise. On y retrouve Huguette et ses souvenirs, soit les agressions qu'elle a subies. C'est un roman très court, mais oh combien rempli d'émotions. C'est violent, c'est cru et malheureusement d'actualité. Malgré le court nombre de pages, on s'attache au personnage. Un roman qui n'est pas facile à lire, mais qui aborde un thème très important, surtout à notre époque.