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Loulou Robert (Autre)
EAN : 9782081511163
224 pages
Flammarion (16/09/2020)
3.88/5   81 notes
Résumé :
"Je suis face à mon père et je raconte l’histoire de celle qui ne voulait pas. Celle qui n’a pas dit non une seule fois. Celle qui ne s’est pas débattue. Ils me diront : pourquoi tu n’as pas dit non ? Pourquoi tu n’es pas partie ? Pourquoi tu l’as revu après ? Pourquoi tu as menti ? Pourquoi tu en fais un drame ? Pourquoi tu fais toujours des drames ? Certains penseront que je fais des histoires pour rien. Pour moi, ce ne sera jamais rien. Il faut faire des histoire... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (20) Voir plus Ajouter une critique
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Loulou a déménagé à Tours. C'est écrit à la première page. Alors je l'ai suivi, installé à la terrasse du Pale, rue Colbert, lieu plus intime pour boire une pinte entre quatre yeux qu'une place bondée de plumes et de bruit. Et depuis je l'attends, son sourire, sa timidité, sa fragilité. Je peux l'attendre longtemps, ça fait plus de quatre romans que je l'attends, depuis son premier coup de poing qui m'a uppercuté la gueule et les tripes, plusieurs pintes se sont même écoulées comme le flot de la Loire qui s'est crue en pleine crue hivernale.

Oui, « Je l'aime » disait-elle dans son précédent roman… Moi aussi, « je l'aime », j'aime son écriture, l'émotion que je reçois en échange de ses pensées, souvent sombres, souvent tristes, mais la vie est la vie, il y a celles et ceux qui étalent leur cervelle entre les rails d'un métro, celles qui ne disent ni oui ni non mais qui depuis ont peur, peur du vide, peur du noir, peur de la vie, celles qui écrivent - foutrement bien. Alors dans de telles circonstances les pensées sont à l'image de ce sang, rouge virant au noir qui glisse le long des veines, sombres, elles entrent dans une zone grise, tu as beau croire à l'espoir ou à la colère, rien n'effacera ces images qui te hantent depuis tant d'années.

L'écriture devient ainsi une façon de se croire encore un peu en vie. Pendant une ou deux phrases, on a l'impression de vivre et de partager quelque chose. Et chaque phrase que je lis de Loulou me percute, m'assomme dans les cordes, me met un genou à terre. Mais je ne plie pas, je me relève, toujours prêt à reprendre un coup, un jab dans les côtes ou un crochet dans la face triste de mon ring. Je perçois chacun de ses romans comme un combat de boxe, sans arbitre, juste elle et moi où j'encaisse ses maux, et où ça cogne toujours plus fort en moi, à l'intérieur, là, juste là, bam bam bam, là où le coeur bat encore un peu. Loulou, elle me bouleverse, tout simplement. Alors au Pale de la rue Colbert, je l'attends (si elle me lit).
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Livre coup de poing. Pas vraiment rédigé. Balancé dans la gueule d'un certain milieu. Celui dont on entend tout le temps parler. Celui des artistes essentiellement. Les artistes du corps, de la beauté intérieure. Qu'il faut traduire par intérieur des cuisses. Au minimum.
Pas trop de réflexion dans ce brûlot, un cri. Non, un râle car il n'est pas très bruyant. Presque pas surprenant tellement on s'est habitué.
Après tous ces témoignages concordants, plusieurs questions se posent, après cette lecture, aux esprits simples (moi) :
- Où sont les parents ? Quelle a été leur éducation ? En lisant la fille, j'ai éprouvé quelque chose qui ressemble à du mépris pour le père dont j'ai pourtant apprécié le dernier livre. Se faire violer à répétition (c'est le cas, c'est écrit) depuis l'âge de 11 ans par tous les garçons qui passent exige une bonne dose de je-m'en-foutisme de la part des parents.
- Les mannequins, les Miss truc qui défilent, à la limite de poids et d'âge, c'est toujours d'actualité non ? C'est quand même bien que la beauté intérieure mentionnée plus haut fait toujours son petit effet à toute une partie de ceux qui regardent, ceux qui organisent, ceux qui se les payent (désolé, c'est le terme, même si c'est indirect et pseudo-consenti). C'est donc encouragé implicitement par les tenanciers de notre belle société ?
Allez, je parie que dans vingt ans, à l'ouverture de ma dernière session de Babélio (je suis optimiste vous notez), je tomberai sur un livre de la belle-fille, de l'ex(e) de M. le Photographe, M l'Écrivain, M. le Journaliste, M le Réalisateur, M. le Chanteur qui racontera comment elle a été victime et comment tout cela doit cesser. Hashtag mi toutou.
C'est donc que cela aura continué ?
Évidemment car il n'y a qu'un seul moyen de faire cesser cela. C'est d'abolir les rapports de domination. Tous les rapports de domination. Voilà pourquoi cela continuera, sous une forme, sous une autre, et que les bonnes âmes qui s'en émeuvent médiatiquement perpétueront à leur échelle les causes de ces drames individuels.
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Qui ne dit mot consent ?
La fille qui ne disait jamais oui, mais qui ne savait pas dire Non.
Sois belle et tais-toi.
Je peux en trouver des titres à ma chronique de Zone grise de Loulou Robert.
Un récit émouvant, éprouvant, choquant parfois.
Pas une vengeance.
C'est l'histoire d'une vie volée, une vie violée.
Sous sa plume, pas de hurlements.
Juste la douleur, juste la haine, contenues.
Chaque lecteur appréciera à sa façon.
Moi, cette lecture m'a troublé.
Parce que je suis un homme, un père, et même un grand-père.
Ce livre, c'est son "J'accuse".
Pourtant, elle ne donne pas de nom, pas plus qu'elle ne portera plainte contre ceux qui ont abusé d'elle.
Notamment, ce photographe dont elle cache l'identité derrière une seule lettre.
Comme pour les autres, d'ailleurs.
Petite fille, ado, jeune femme, ils se sont servis.
Le mot est fort ? C'est volontaire.
Une main, un doigt, une langue, une verge.
Parce qu'innocente, parce qu'ignorante, parce que silencieuse.
Parce que petite fille elle ne savait rien et s'imaginait grandir.
Parce qu'ado elle avait envie de découvrir.
Parce qu'adulte elle faisait confiance.
Elle est belle Loulou, si belle qu'on va en faire un mannequin.
Ne t'inquiète pas, tout ira bien.
Il faut se déshabiller ?
Pour la beauté de l'image ?
Pour l'art ?
Alors, s'il faut, soit.
Pourtant quand le photographe devient entreprenant, le doute s'immisce. Mais s'il le fait, c'est sûrement que c'est normal.
Il n'y a pas de violence, jamais.
Il n'y a pas de plaisir, surtout pas pour elle, mais elle enchaîne pourtant les séances.
Elle veut réussir dans le métier.
Ce livre ?
C'est sa révolte.
C'est son cri.
C'est sa haine.
C'est sa liberté.
Elle a compris maintenant.
Elle ose.
Elle maudit sa naïveté  mais elle sait son pouvoir.
Le pouvoir de dire NON.
Offrir sa nudité au nom de l'art, ne veut pas dire s'offrir à celui qui la dévoile, pas plus qu'elle ne rêve de s'offrir aux hommes qui s'enivrent et nourrissent leurs fantasmes devant ces photos.
D'ailleurs, derrière les sourires de façade, avez-vous remarqué la tristesse de certains regards, tout n'est pas que strass et paillettes.
Un jour elle s'est décidé à parler, pour révéler,  dénoncer.
Pointer du doigt ces hommes, conscients, mais qui s'autorisent à prendre son corps
Ceux qui abusent, ceux qui refusent de voir.
Ce livre, c'est son tribunal.
Elle ne veut pas de procès.
Ne pas affronter les regards.
Peur de ne pas être comprise, voir, d'être accusée de mentir, de corrompre ou de provoquer.
Non, elle veut juste tourner la page.
Maintenant elle aime, elle est aimée et...elle écrit.
Est-ce que cette thérapie suffira ?
D'ailleurs a-t-elle entrepris cette démarche comme une thérapie ?
Loulou Robert a choisi d'écrire comme je viens de le faire pour cette chronique, par petites phrases.
Comme des coups de poing dans un mur.
Pour briser le silence.
Raconter ce qu'elle a vécu, subi, tu pendant trop longtemps.
C'est fini maintenant, elle peut commencer une nouvelle vie.
Je suis sûr qu'elle va nous écrire de belles choses encore... fini les cauchemars, place aux rêves...
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PatriceG, auteur de la "critique" précédente, ayant effacé mon commentaire et m'ayant interdit de le reposter, je me permets de lui répondre ici:
"Cher Patrice,
Comment pouvez-vous écrire un tel texte, à savoir, avec d'autres mots, que si une femme en minijupe se fait violer, c'est bien fait pour elle, elle n'avait qu'à s'habiller décemment ? Comment pouvez-vous baser votre argumentation sur une hypothèse : Loulou Robert est une vamp, et c'est son état naturel ? Ah, la femme tentatrice qui corrompt l'homme vertueux ! Oui, bon, Eve, quoi. le péché originel. On dirait que vous en êtes resté à ce stade.
Sachez, cher monsieur, que Loulou Robert a posé nue, certes, mais jamais dans aucun magazine porno comme vous l'affirmez, et toujours devant l'objectif de photographes reconnus. Vous avez le droit d'avoir un avis négatif sur les femmes qui posent nue, sur la place de l'érotisme dans la société, celle de la pornographie, mais parce qu'une femme pose nue, elle aurait le droit d'être prise sans son consentement ? N'aurait pas le droit de dire qu'elle l'a été ? Dans un récit, d'ailleurs, pas dans un roman – aveuglé par votre colère, vous n'avez même pas poussé votre étude jusqu'à la couverture de l'ouvrage on dirait… Et dans un récit dont le style colle au propos : direct, rythmé, intense. Violent. Que vous avez le droit de ne point goûter, bien sûr, mais il paraît peu probable que vous l'ayez ouvert. Or Babelio est un site où l'on critique les ouvrages, pas leurs auteurs.
Je terminerai en vous proposant un rendez-vous chez l'opticien, ou un détartrage de la sensibilité ; car si vous estimez que Loulou Robert a des « rictus carnassiers », ressemble à « une veuve noire » ou une « femme fatale », c'est vraiment que vous avez un problème de vision (brouillée par vos a priori ?...) ou d'empathie.
Cordialement malgré tout"

J'ai quant à moi lu le récit de Loulou Robert. Un livre puissant, intense, sans une once d'auto-apitoiement ni de rancoeur. Un texte bouleversant, dérangeant, nécessaire, qui questionne et interroge, pour qu'enfin les choses changent.


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Il y a une grande violence dans cet ouvrage, pas celle de l'autrice, mais celle qu'on lui a infligé et qui ressort avec rage et désespoir.
Je ne jugerai pas de la qualité d'écriture, je ne peux pas. Ce n'est pas un roman, c'est un cri de douleur qui résonne en chaque femme. du formatage à l'enfance jusqu'au moment où on nous brise.
Chaque jour, quelqu'un ou quelque chose nous rappelle que notre corps ne nous appartient pas, que nous ne pouvons pas le protéger, notre voix ne nous appartient pas non plus, la chasse aux sorcières n'est pas finie, on nous brise encore et encore et on nous dit que nous l'avons bien cherché. Les poupées, les premières expériences, le dégoût de soi, tout est là.
Le livre est ponctué de paroles d'hommes publics qui font froid dans le dos, des extraits de procès, d'argumentations, de défense qui souligne cette réalité qu'on nous accuse de fantasmer.
Oui elle parle de consentement mais aussi de déni, de sidération et d'une culpabilité qui ne devrait pas être la nôtre.
Trop dénudée, trop sexy, trop femme, elle l'a bien cherché. Trop masculine, trop laide, personne n'a pu la toucher (oui oui, deux hommes ont été acquittés pour ce motif)
Il n'y a pas de bonne façon d'être une femme dans ce monde. Toujours dans notre tort.
Elle raconte comment le "non" peut ne pas sortir, comment les femmes sont éduquées pour ne pas parler de leur désir et de leur non désir, formatée pour se sentir en trop, gênante, inutile, faible, nulle. Un objet qu'on peut utiliser. Un objet ça ne parle pas, ça ne dérange pas.
Elle parle du cerveau qui nous protège, qui veut oublier, rend flou, déforme. On nous accuse alors de ne pas être clair, d'avoir tout inventé.
Être belle, objet de désir. Vivre sous le regard des hommes et celui, jaloux, des femmes qui ont échoué à remplir les critères. Ce sont ces regards qui sont censés faire de nous une femme. La petite fille qui jouait à la poupée est devenue l'une d'elle. C'est un succès, qu'elle en soit heureuse ou non, qu'elle l'ait voulu ou non, la société a gagné.
Plus je lis, plus je me dis que cette fille est détruite, sans estime, sans confiance en elle. Je reconnais les symptômes et j'ai mal pour elle. Je souffre pour elle. Elle est la raison pour laquelle je me bats, pour laquelle je veux brasser du vent jusqu'à ce que mes mouvements malhabiles se transforment en coup de poing.
Elle raconte comment le piège se referme, mélange de culpabilité et d'emprise. Elle raconte le réveil et comment elle doute de sa propre vérité et moi je me demande comment on peut encore en être à douter, les victimes, tandis que les agresseurs se trouvent des raisons, des excuses, une belle histoire à raconter. Pourquoi toutes ces femmes ne sont pas capable de le dire avec force et conviction ?
Elle continue de penser que c'est peut-être elle le problème. À la fin du livre, on voit bien la progression de la réflexion, elle est prête à se battre mais le doute subsistera toujours.
Elle lutte pour nommer les choses, pour comprendre ce monde qui minimise le traumatisme qu'elle a vécu mais qui pardonne à celui qui lui a imposé, celui qui ne se repend même pas.
Elle parle de ce fameux concept de la promotion canapé : toutes ces femmes qui montent grâce au sexe et font ensuite les effarouchées. Version masculine de l'histoire évidemment, celle où les femmes sont des garces aux dents longues, avides de sexe, fortes et indépendantes. Ils l'ont tellement rabâché que c'est devenu un fait sacré, une vérité, on le balance à toutes les sauces à chaque témoignage. Et la version des femmes on ne la demande pas, on ne la veut pas, on la rejette.
Loulou Robert raconte comment nous sommes rabaissées, pendant des années, jusqu'à se sentir insignifiante et tout subir sans broncher, pour plaire, pour se sentir exister, pour ne pas décevoir.
Et puis un jour, comme pour elle, les liens se font, et la rage emporte tout. Cette volonté de briser le patriarcat, cette culture du viol, de forcer le monde à ouvrir les yeux, forcer les agresseurs et leurs complices silencieux à subir la honte, la culpabilité.
Et puis elle raconte le reste, comment son appréhension de la sexualité s'est construite sur des expériences affreuses, comment on l'a brisé, sans même y réfléchir, dès l'âge de 11 ans. Parce que c'est comme ça qu'on éduque les garçons, les enfants.
Elle parle de son dégoût de ceux qui savent et ne font rien, voient mais ne disent rien. Les lâches. Elle parle de la notion de la victime idéale : celle qui pleure, se brise et se suicide. Toutes les autres ne sont pas vraiment des victimes puisqu'elles s'en sortent. Elle parle du devoir conjugale, du viol conjugal. Ce dont on ne parle pas. Là où il y a mariage il n'y a plus viol puisque la femme a signé, puisque c'est sacré, puisque dans le couple il ne peut y avoir que de l'amour, puisqu'elle lui appartient. La femme constamment la victime et la coupable idéale, toute l'éducation est à refaire.
Elle aborde la zone grise. Cette fameuse notion que j'ai rencontré pour la première fois cet été. Il fallait bien inventer quelque chose pour diminuer la gravité des actes et, comme le dit l'autrice : "C'est toujours autre chose" "Pourquoi les signaux sont-ils systématiquement brouillés ? Pourquoi toujours dans le même sens ?"
Zone grise, ça sonne mieux que viol.
Les mots de Loulou Robert sont percutants, elle les pose sur l'émotion qui m'avait envahie en découvrant cette notion : "la zone grise est un schéma qui protège les prédateurs"
Vient enfin la peur d'avoir parlé, la peur d'être celle qui fait du mal. Cette blague.
Elle assume contourner la justice, cette justice qui n'en est pas une, qui acquittera son agresseur étant donné la complexité de la situation. Elle choisit de s'affranchir et s'arroger le droit d'appeler ça un viol. Elle encourage toutes les femmes à en faire autant, à prendre la place et les mots qu'elles veulent, qu'elles ressentent au plus profond d'elles parce qu'il faut qu'on cesse de croire que le système nous l'accordera. "Mon arme : mes mots, ma liberté."
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Citations et extraits (81) Voir plus Ajouter une citation
Je ne sais pas si je pleure.
J'ai toujours pensé que la baignoire était un bon endroit pour pleurer. Tu ne mouilles rien.
Tu laves. Tu effaces. Tu relâches. Tu plonges la tête sous l'eau. Là, c'est calme. Là, tu peux laisser tout aller. T'en aller. Personne ne te voit. Tu aimes cet endroit, tu t'y reposerais bien un moment. Tu manques d'air. Tu réalises être en vie. Alors, tu surgis. Tu frottes ton visage, touches ta peau. Tu laves ton sexe. Il te pique. Tu reprends ton souffle. Tu ne sais plus si tu as pleuré, crié. Tu fais couler l'eau.
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Hier, l’affaire Adèle Haenel a fait la une des médias.
Hier, Vanessa Springora a écrit Le consentement.
Hier, Polanski a remporté le César du meilleur réalisateur.
Hier, la haine sur les réseaux sociaux. La violence. Il faut choisir son camp.
Hier, des scandales partout, tout le temps. J’ai mal à la tête.
J’ai terminé d’écrire ce livre en juin 2019. Depuis, je fuis mon ordinateur et ma pensée. Depuis, j’ai déménagé à Tours. Depuis, j’ai adopté un chien. Depuis, j’ai peur. Peur de replonger dans le noir.
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D est vraiment malheureux. Il veut de l’érotisme. Sa copine n’a plus de désir. C’était ses fesses en photos dans son appartement. Celles que j’ai regardées pendant qu’il m’auscultait. J’ai des hanches. Des formes. Il les prend. Je suis une belle poupée. Je suis remplie de tendresse. Il le sent. Je peux lui faire du bien. Je suis innocente. Il le sent. Il me dit que j’ai les cheveux d’une enfant, fins, doux comme des plumes. Il me respire. Il est si grand. Est-ce qu’il a enlevé son pantalon à ce moment ? Est-ce que c’était un short ? Il me répète à quel point je suis belle. À quel point je lui plais. De le prendre dans mes bras, allez, il a besoin de moi. Allez, tout ira bien. C’est bon, que c’est bon d’être avec moi.Il veut me lécher.Il veut être dur et fort.Il veut s’enfoncer en moi.Il veut m’écarter les fesses avec ses mains.Il veut s’enfoncer plus profond. Il jouira comme ça. Il explosera et ça lui fera tellement de bien.Il veut. Il veut. Il veut.Il va. Et moi ?Qu’est-ce que je veux ? Qu’est-ce que je fais ? Est-ce que ça me fait du bien ? Est-ce que j’ai envie de son sexe dur et grand ? Est-ce que sa langue m’excite ? Est-ce que je ressens quelque chose ? Est-ce que c’est mouillé ? Mes yeux ou mon sexe ? Est-ce que je parle, respire ? Est-ce que je fixe un point ? Est-ce que je regarde la porte de
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Matin, soir, le pire c’est à seize heures. Je déteste cette heure. Ni trop tôt ni trop tard. On ne boit pas d’alcool à seize heures. On est au milieu de la journée. Je n’aime pas l’entre-deux. J’ai peur de rester coincée. Je suis paralysée, j’attends que l’heure tourne. Dépêche-toi. Allez dépêche-toi.
[…]
Je ne suis pas en colère. Alors qu’est-ce que je suis ?
A l’arrêt.
J’ai envie de boire. Il est dix-sept heures.
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Le mannequinat devient mon identité. Je suis une photo. Je suis un corps. Je suis un objet. Je suis refus. Je suis un compte dans une agence. Je suis un chiffre. Je suis la Française. Je suis intelligente. Je suis chiante. Je suis angoissée. Je suis trop sensible. Je suis la douleur des autres. Je suis mal peignée. Je suis irritation de la peau en hiver. Je suis cheveux électriques. Je suis trop petite. Je suis belle. Je suis Lolita. Je suis rien. Je suis joli accent. Je suis fauchée. Je suis compliquée.Je suis celle qui arrive en pleurs à l’agence.Je suis celle qui pose des questions.Je suis celle qui fait chier.Je suis ce week-end avec ce photographe.Je suis les photos qu’il a prises de moi.Je suis tout ça, juste ça. Je me rappelle ce casting.C’est l’un de mes premiers castings. Nous sommes en 2011. Mon agence de l’époque m’envoie au rendez-vous. Le photographe est un copain de mon agent. Je fais confiance, je me rends seule chez lui. À partir de là, l’histoire commence.Je comprendrai plus tard qu’elle avait déjà commencé.À partir de là, je ne me souviens pas de tout.Des bribes. Images. Lumières. Sons. Sensations.À partir de là, je plonge dans le coma.Je supprime certaines pièces au puzzle.Il m’en manque encore aujourd’hui.
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Vidéo de Loulou Robert
« J'aurais pu être un millier de choses, mais j'ai choisi de consacrer ma vie à aimer. » Dès qu'elle le voit, elle scelle un pacte avec elle-même : il sera à elle. Il lui prend la main. Elle le suit à Paris. Il devient journaliste. Elle, sa groupie. Elle l'aime, le hurle, le pleure. Rien d'autre n'a d'importance. Elle est jalouse, dangereuse, prête à tous les excès. Elle veut qu'il la regarde encore, qu'il l'aime comme elle l'aime. Sans limites. À coups de phrases courtes et sans artifices, Loulou Robert fait ici le récit d'un amour sacrificiel, tragique et sublime, un amour au quotidien, taillé pour l'éternité. Elle raconte les failles, la folie et la dévotion d'une femme pour un homme. Elle dit la maternité, la vieillesse, la solitude, l'usure d'un couple. Elle dit la vérité d'un corps et de ses cicatrices. Toute une vie à aimer.
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