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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Le livre s'ouvre sur une belle marche en forêt, hors des sentiers balisés. Un massif où des taillis succèdent aux marécages cernés de ronciers. Les jumelles en bandoulière, Claire et son père observent un grimpereau. À Claire, Monsieur Godion, notre narrateur, a donné le goût des longues randonnées dans les bois jouxtant leur campagne. Ils sont des observateurs uniquement préoccupés à capter de leurs yeux toutes les espèces de faune et de flore, la parole rare pour ne rien perdre de cette vie forestière.
Des notes portées par un filet d'air arrivent jusqu'à eux, une flûte qui joue quelques mélodies.
Au bout de leurs jumelles, un homme nu (ses habits sèchent), cheveux, barbe et poils de toute blondeur. Il semble vivre là, sur un petit bout de terre de l'étang de la Marouille.
Quelques jours après, la chasse est ouverte et le « farfelu qui prolonge ses vacances en jouant les Adam, sans Eve, dans la nature » est blessé à la jambe par une erreur de trajectoire de balle. Transporté à l'hôpital, il refusera farouchement de se nommer.

Insolite dans ce village où tout le monde connaît le nom de tout le monde, cet homme sans nom inspire une grande méfiance, la crainte d'un maraudeur qui risque de piller les possessions des uns et des autres.
Et dans notre société, un inconnu ne peut demeurer un inconnu.
Alors tout le monde y va de son interprétation. Vouloir, avec une telle obstination, garder son anonymat est-ce de la provocation, un amusement, un grain de folie, une amnésie, une vocation d'ermite ou bien plus vraisemblablement une fuite pour échapper aux sanctions de terribles méfaits ? L'amnésie sera une hypothèse vite balayée car avec une économie de mots bien contrôlée le blessé y répondra « Je me souviens trop bien de tout. »
Reste que ce cas est bien embarrassant. Que faire d'un homme sans état civil ?
A travers M. Godion, Hervé Bazin nous fera part ironiquement de son étonnement face à « la férocité du Code envers les démunis » alors qu'une simple caution « fournit l'absolution ! »


Piqué d'humour, parfois délicieusement ironique, ce roman est un écrin d'où émane l'amour de l'écrivain pour cette nature à prendre telle qu'elle nous est offerte. On retiendra son souffle devant l'envol d'une bécassine ou plus rarement celui d'une marouette qui surgira d'une haie de joncs. Se faisant d'une butte recouverte de genévrier un mirador, on guettera le cerf. On s'attendrira devant Claire qui repère les différents pièges et annule leurs méfaits sur la faune évitant ainsi quelques innocentes futures victimes. C'est aussi un cri contre la chasse où la faune devient gibier, la chasse pour la gloriole, uniquement faite pour aligner ses trophées.
J'ai pris énormément d'intérêt et de plaisir à déambuler dans la forêt, le verger, le potager et l'atelier de reliure de Claire. Avec le vocabulaire bien étoffé de l'auteur (qui a nécessité plusieurs recherches de définitions !) l'atmosphère de chacun de ces lieux explose au travers de cette si merveilleuse érudition.
Très peu de phrases concernent le mépris des hommes pour cette nature, les souillures qu'ils laissent sur leurs passages, les yeux qui demeurent clos devant ces beautés gratuites, mais elles ne sont que plus frappantes. Que dirait Hervé Bazin du saccage toujours plus avancé de la nature actuelle ? de tous ces sites hautement touristiques qui sont devenus des poubelles à ciel ouvert ? Je me le demande…
Bien sûr, la réflexion principale est celle sur le renoncement à son identité. Est-ce un refus d'appartenance à l'espèce ou juste un rejet de la société telle qu'elle est aujourd'hui ? Peut-il exister un droit à disparaître ?
L'homme qui désire taire son nom et vivre en marge est inévitablement soupçonné de malhonnêteté. « Plaquer la société ça marque mal, c'est un impardonnable désaveu : ne vous étonnez pas qu'elle vous cherche des noises…»
On demeure dans le déni de la situation inverse où la société, loin d'être innocente de tous méfaits, devrait être elle-même sur le banc des accusés…

Et puis, j'ai été véritablement charmée par l'écriture d'Hervé Bazin. Au-delà de l'extrême richesse du vocabulaire j'y ai trouvé une syntaxe élaborée que l'on ne rencontre plus dans les écrits contemporains. Dommage car bon nombre de ses romans ne sont plus édités et heureusement que les trouvailles d'occasion continuent à faire circuler cette si jolie plume.
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Tel un Adonis , un homme bondit hors des roseaux .
Il est nu , doré par les dards du soleil .
En virtuose , il joue de la flûte sous l'oreille attentive et charmée de son seul compagnon : un houret .
Ce chien sauvage n'est pas le seul à être subjugué par le phénomène .
Claire et son père , ancien directeur d'école , sont des passionnés de la forêt et notamment de ces endroits difficiles d'accès . Ils restent cois ; osent à peine respirer .
Une rencontre fugace , une brindille effleurée et notre olibrius disparaît tel un chevreuil aux aguets .
Nos deux promeneurs , hébétés s'en retournent chez eux, le regard amusé , le père murmurant " apprivoiser le houret , c'est du travail d'Orphée " p. 23 .
Bientôt , la nouvelle gagne le village .
On le cherche. On le traque . On le blesse .
Et badaboum ! il gît , blessé à la jambe par un chasseur maladroit .
Conduit à l'hôpital , sans papier d'identité , l'éphèbe hermétique est tourmenté par la maréchaussée .
Qui est-il ?
Un vagabond ? Un braconnier ? Un assassin ? Un ermite ?
Et...
A vous de découvrir son devenir !

Aujourd'hui , plus que jamais , l'être humain est soumis à maintes pressions : appauvrissement de la Terre , disparition de la faune et de la flore , raréfaction de l'eau potable , pollution .
Mais il est collé , presque jour et nuit , à la téléphonie , aux réseaux sociaux : un monde artificiel !
Même les pays pauvres s'y sont mis .
Et ce marché de consommation où les individus sont servis sur un plateau d'argent : le plaisir et le confort , toujours plus !
Que devient l'imagination ? Qui communie encore avec la Nature ?
A force de tout accepter , l'espèce humaine finirait-elle comme dans le film " Soleil Vert " , sorti dans les années 70, quand la Terre se meurt et que les grands et cyniques profiteurs d'une usine fabriquent "des soylent green " à base de cadavres euthanasiés .

Qui pouvait mieux qu'Hervé Bazin , poète et terrien dans l'âme parler avec autant d'amour et de connaissances de la forêt , de ses habitants , tels que la marouette , le grimpereau , la genette ou le butor etc....
Alors que beaucoup d'espèces n'existent plus , ce livre est un véritable album-photos dont un dictionnaire serait le bienvenu .

Il est logique que l'auteur ait campé son personnage principal parmi les chants et les odeurs de la forêt , cet endroit qui lui est si cher .
Un homme qui fuit la civilisation ; qui refuse de porter un nom car il se considère comme " personne " ; juste un frère de la Nature .

Comment un livre d'une richesse pareille , au point de vue des descriptions variées , précises , colorées et insolites ,grâce à un style élaboré , certes , mais ironique , savoureux , gai malgré le sujet , n'a pas eu plus de succès ,
surtout que le thème est grave .




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Suite à un accident de chasse, un jeune homme vivant en ermite au milieu d'une forêt est conduit à l'hôpital.  Il refuse de donner son nom,  ne plie pas sous les menaces, sera incarcéré mais rien n'y changera, il ne révélera pas son identité. Accusé de tous les maux (bétail volé, braconnage), on ne peut concevoir qu'un individu refuse la société, il sera accueilli par l'ancien directeur d'école et sa fille où il essaiera de préserver son anonymat.

Roman profondément humaniste,  hymne à la Nature et à son respect, nature-writing avant l'heure, ode à l'amitié et l'ouverture d'esprit,  Hervé Bazin nous offre une belle histoire tendre et poétique au parfum de fable mais surtout une interrogation philosophique sur l'homme et son identité.
Quel plaisir de lire un roman au vocabulaire et à la syntaxe si travaillés, courant à l'époque de sa parution mais cela devient tellement rare que cela paraît extraordinaire.
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Hymne à la nature écrit comme un poème en prose, la belle langue de Bazin nous fait sentir l'odeur des bois, de la mousse, de l'herbe mouillée, entendre le chant des oiseaux, du bruit de l'eau qui coure dans la rivière. C'est aussi une jolie fresque campagnarde des années 80. Et surtout un conte philosophique sur ce que nous sommes: être social? perverti par la société de consommation? mythe du bon sauvage tel que pensé par Rousseau?
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Dans le cadre du challenge solidaire 2021 j'ai choisi ce bouquin d'Hervé Bazin que je ne connaissais pas.
Bien m'en a pris, ce livre est génial, furieusement moderne, car il interroge sur nos pratiques face à la nature, sur l'identité des êtres.
Suis-je parce que je possède ? Est-ce qu'on existe réellement si l'on n'appartient pas à un groupe ? Qu'est-ce réellement que la liberté ?
Bazin étrille les chasseurs, les bien pensants, les destructeurs de la nature. Et les descriptions de la forêt et de la campagne, un vrai régal de mots.
Ce livre date de 1981 mais aurait sa place dans les parutions d'aujourd'hui !
Gros, gros coup de coeur !
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En grand connaisseur de la nature, avec ce roman-ci Hervé Bazin nous partage ses connaissances en botanique et animaux des bois avec ce roman.
Le narrateur accompagné de sa fille lors d'une balade rencontrent un homme dévêtu vivant au milieu des bois et c'est le début d'une histoire bien racontée.
On s'occupera de l'individu, mais alors se posera la question au cours de l'histoire . Peut-on vivre, exister dans notre la société, hors de celle-ci et dépourvu d'un nom et d'un prénom ?
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Hervé Bazin : "L'Eglise Verte" en livre de poche, no 5524 - 1981

Dans le texte qui nous occupe, on verra comment la fille, prénommée Claire, d'un instituteur directeur d'école, au veston enrubanné de la Médaille de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur, M. Godion, joue auprès de son père un rôle dont la place, laissée vide par la maman disparue, est grandement et savamment occupée,

Un témoin, le jeune Léonard, est pour ainsi dire adopté par la famille, dont les journées, ponctuées de rites, mène tout ce petit monde dans une marouille, autrement dit une clairière humide d'étangs et de joncs, de caches et d'îlots au plein coeur de la forêt,

Jusqu'au jour où, surgit de nulle-part, un jeune homme nu et barbu chevelu itou plonge devant les yeux éberlués de la famille plus habituée à regarder la faune et la flore des sites, le vol des oiseaux, les champignons pousser, l'état des ramures des arbrisseaux, les lièvres et tout ce qui peuple ladite marouille, que les promeneurs sans habits,

Venu on ne sait d'où, l'huluberlu semblerait se cacher,
Mais peut-on ainsi fuir une société sous quelque prétexte sans être, sinon reconnu, du moins aperçu ?
A la défaveur d'un accident où un chasseur le pris pour gibier, nous n'en savons rien, la chasse à l'homme des bois commence,
Au-delà de la beauté du texte, on découvre que mieux vaut un feu de bois entre amis de fortune qu'un "terrier" dans la marouille fussions-nous accompagné d'un chien bien dressé,

C'est une ode à l'amitié, à l'aide entre humains, à la redécouverte des marais , au respect de la nature, aux herbiers en devenir, et surtout à cette définition à écrire :" qu'est-ce que la liberté ? " "Sommes nous libres de nos choix dans une liberté qui respecte autrui, ne rien dévoiler de soi, ni plus ni moins" ,

Comme le souligne l'éditeur tout en nous invitant à répondre pour nous : c'est quoi l'identité ? les réponses sont multiples,

L'un des meilleurs crus d'Hervé Bazin
A lire, et relire, et savourer.



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L'église verte ? On pourrait penser à la lecture de ce livre qu'il s'agit de la forêt, aimée et bien connue des personnages principaux, et refuge de l'un d'entre eux.
Narré alternativement à la première ou à la troisième personne, ce roman au vocabulaire soutenu nécessite parfois l'aide du dictionnaire.
Le sujet en est l'identité, le déclassement social volontaire, la tentative de sortir du système, et ses conséquences.
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Un peu déroutant au début: On ne sait pas trop où l'auteur veut nous emmener. Mais dès qu'on a accroché on ne peut plus le lâcher. Un livre fascinant et qui pose des tas de questions sur l'identité, avec le style si particulier d'Hervé Bazin et l'extrême richesse de son vocabulaire. Je viens de le relire ( ma première lecture date d'il y a longtemps) et j'ai été fasciné comme à la première fois
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