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sur 846 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Se retrouver après s'être entièrement occupé des autres. Trop sans doute et au détriment de soi même.

Simon Lhumain (un patronyme symbolique) est un psychanalyste investi et complètement immergé dans son métier.
Un matin, il casse le bol de son petit déjeuner, celui de son ami d'enfance. Ce geste anodin ouvre pourtant une brèche dans la mécanique bien huilée de sa routine de vie. Déclenche la quête d'autre chose. Besoin de se retrouver, de revenir sur les fêlures et les émotions enfouies de l'adolescence, de faire le point, de comprendre sa vie, de s'apaiser.
« Toute sa vie à écouter les autres. Il n'écoute plus personne. Il y a là une paix profonde et une tristesse. Aussi profonde l'une que l'autre. Il vient de déposer l'habit. Pas défroqué, non, parce que sur sa route, il n'y a ni dieu ni voeu éternel. Il s'éloigne simplement et il se sent de plus en plus nu. Parfois, une question le saisit. Écouter et parler, n'est-ce pas ce qui rend humain, chaque être ? Est-ce qu'il n'est pas en train de trop s'éloigner ? »

Il décide alors de partir sur une île japonaise où le recevront Madame Itô et son mari Daisuke. Elle collectionne les tissus anciens, et lui est spécialiste de l'art du Kintsugi. Il répare les céramiques en saupoudrant les fêlures de poudre d'or. Geste bien symbolique : ne pas dissimuler les cassures, mais les accepter et les embellir.
C'est aussi une ode au geste, à l'activité manuelle, au corps qui existe dans l'eau et permet d'apaiser et laisser les pensées affleurer, questionner, sans violence.
Simon passera de longs moments avec Daisuke. Ils ne parlent pas la même langue, mais se comprennent par l'échange du silence, du calme, de la recherche de la beauté dans la céramique sublimée.

Le charme de l'écriture de l'auteure. Simple, dépouillée et pourtant si précise et si riche. Elle a cette qualité rare de faire ressentir en quelques mots patiemment choisis, la profondeur des sentiments, les questionnements de ses personnages. Aussi profonds, l'un que l'autre.

Le temps de la pause, de la sincérité, de la résilience. Comme souvent, avec Jeanne Benameur, son personnage se cherche, se questionne mais elle nous questionne également. On avance, on s'enrichit toujours avec cette auteure.
« On n'est maître de rien. On peut juste accepter et mettre tout son art, toute sa vie, à comprendre ce qu'est le fil de l'eau, le sens du bois, le rythme des choses sans nous. Et c'est un travail et c'est une paix que de s'y accorder enfin. La seule vraie liberté. »


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Simon L'humain, psychanalyste "a longtemps tenu la place de celui qui se tait pour permettre aux autres la parole."
Un matin un bol, offert par son ami d'enfance à sa mère, lui échappe et se casse. Les souvenirs, douleurs enfouies et deuils affluent.
Il est temps de penser à se réparer, lui. Il va entamer une quête pour se retrouver, se refonder. Quelque chose s'est passé dans son adolescence, qui est resté figé au fond de lui et l'a empêché de vivre.
Lui qui n'a jamais voyagé, part au Japon, dans les îles Yaeyama, un paradis pour marcher et nager, aux traditions intactes. Il logera dans une maison d'hôtes tenue par un couplé âgé.  Madame Itô est collectionneuse de tissus anciens. Son mari Daisuke est maître dans l'art du kintsugi, qui consiste à réparer les céramiques sans masquer les cassures, au contraire à souligner d'or les lignes de faille.

"Son coeur a éclaté.  Et ici il a une chance de ne pas le défigurer par une réparation trop hâtive."

Les blessures intimes de Simon trouveront ici leur kintsugi grâce à ses hôtes et à une raie manta qui le fascine, avec laquelle il nage et se défait peu à peu de ce qui l'encombre...

Dans un texte magnifique, Jeanne Benameur nous conte la renaissance de cet homme grâce à la rencontre avec ce couple japonais, dans une nature préservée. Ils lui offrent une incursion dans leur intimité avec bienveillance et créent avec lui une belle et profonde relation. Simon est parti au bout du monde pour enfin, dans ce pays où tout lui est étranger, se retrouver face à lui même, comprendre les raisons de son mal-être, si longtemps refoulé au fond de son âme... Ce voyage introspectif est une réflexion profonde et pleine de douceur sur la vie portée par une plume splendide, sobre, précise, délicate avec des personnages terriblement humains et émouvants...
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Première lecture de cet auteure… Et quelle belle découverte !

Ces lignes sont une invitation à la douceur, au partage et à la réflexion. Jeanne Benameur nous offre la possibilité d'apercevoir la profondeur des mots, entre absence et présence, écriture et parole… Les mots sont là et, pour Simon le personnage principal, ne se contentent plus de rester au bord. Ils s'approchent alors de l'étendue de sa vérité, le ramenant non sans peine, sur le chemin de son désir.

C'est un livre au rythme particulièrement délicieux, bordant une invitation à l'introspection et au temps psychique. Un temps où rien n'est donné d'emblée, dépouillé de l'apparat de l'immédiateté. Une courte et agréable pause dans nos quotidiens qui laisse une place de choix au temps et aux pensées.

Entre patience et réflexion, c'est tout l'art de « s'extraire » du temps de l'agir que dépeint avec subtilité l'auteure. A défaut de « prendre » le temps, l'idée serait peut-être de trouver « son » temps. Vaste programme… Il est temps de s'y mettre.

Je recommande vivement cette lecture.
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Jeanne Benhameur évoque, à travers Simon, d'une plume subtile et poétique, son expérience de psychanalyse et de sa psychanalyste à laquelle elle rend hommage, de son cheminement intérieur personnel , et plus loin, de son moi profond.
Simon est resté assis de longues journées à écouter les autres : Son corps refuse cet immobilisme et son cerveau est saturé de mots, il ressent un impératif besoin d'une rupture pour évacuer ce trop plein. Il s'est focalisé sur les mots, il en a fait son métier, sur le silence qui enveloppe le mot qui va sourdre des limbes de l'inconscient, le souffle qui va expulser le mot, acceptant de vivre en retrait pour libérer la parole de l'autre. Son chez-soi à lui c'est un cabinet de psychanalyste, dans une lumière tamisée propice à l'introspection, au silence.
Alors, il va partir en maison d'hôtes sur une île isolée au Japon. Total dépaysement sur un bout de terre entouré d'eau, pour une retraite dans un monde minimaliste et intemporel : il part sans but précis, sans rien chercher particulièrement, comme ces patients pour qui s'allonger sur un divan c'est s'ouvrir à un voyage dans l'inconnu des profondeurs de son inconscient…à chaque séance un nouveau voyage, une exploration dans le monde du silence, pour retrouver un chez-soi intime.
Il va rencontrer des similitudes dans sa pratique avec la philosophie japonaise qui ne jette pas un objet mais le répare, par respect pour le travail des artisans qui ont fabriqué les céramiques, « les coutures d'or du kintsugi ». C'est un cérémonial lent et minutieux, qui requiert de la concentration et de la patience en s'immergeant dans la pleine conscience du moment présent. Une céramique brisée ne signifie pas sa fin ou son rejet, elle devient autre, renouveau et continuité dans son utilisation, sans cacher les réparations.
Le Japon, adepte de l'art de sublimer toute chose, le geste dans les céramiques japonaises, la parole, la nature et aussi l'imperfection qui incite à aborder les échecs, blessures et autres maux de la vie d'une nouvelle manière, « le kintsugi », ou l'art de sublimer les blessures, transcender nos épreuves. Il nous rappelle que nos cicatrices, qu'elles soient visibles ou invisibles, sont la preuve que nous avons surmonté nos difficultés. de même, « le wabi sabi » prône le minimalisme et le retour à l'essentiel : Vivre avec ses imperfections dans une vie patinée par le temps qui passe et qui répare.
Au cours de ce séjour sur l'île, il va s'avouer qu'il est passé à côté de ses deux amis d'enfance, Louise et Mathieu, qu'il n'a pas su les comprendre. Et que son travail de perfectionnement était inachevé. Car les pensées, « Un jour, on ne sait pas pourquoi, elles reprennent vie. de toute leur force. Elles atteignent notre attention profonde, celle qu'on ignore la plupart du temps, et c'est le bon moment. Ce ne sont pas nos mains qui les ont réchauffées, c'est le temps, la friction avec d'autres mots, d'autres phrases entendues, ou lues, enveloppées du silence des livres. Les mots adviennent alors avec toute leur puissance. Il fallait juste attendre d'avoir la force de les entendre », le corps et l'esprit sont mû par une pulsion de vie qui nous effraie par sa puissance, les mots n'ont que faire de nos peurs, ils surgissent, ils jaillissent comme un geyser.
Une belle découverte, je ne connaissais pas Jeanne Benhameur, « qui a l'art des phrases simples et profondes. Il faut du temps pour arriver à ça… ».
J'ai aimé être baignée dans cette philosophie du bonheur inspiré des moines bouddhistes et du taoïsme. L'asymétrie, l'impermanence, les déséquilibres, les formes incomplètes, les fêlures et les cassures qui, en mettant le réel à distance, peuvent sublimer la vie pour peu qu'on prenne le temps de l'entendre et la considérer.

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Il y a longtemps que ce livre était dans ma tête, dans ma liste, mais allez savoir pourquoi, je me suis décidée à le lire au moment où je me suis expatriée dans les îles. J'ai été patiente, jusqu'au jour où j'ai ouvert le livre. Lire « la patience des traces » c'est prendre repos du monde, s'éloigner au sens propre comme au figuré, pour découvrir d'autres contrées. À l'image de Simon qui vivait un peu reclus, on peut décider, avec ce livre, de se cacher, de se protéger, et d'attendre le matin suivant.
Tout est dans le titre, judicieusement choisi : c'est une histoire de traces et de patience. La patience, le fait d'attendre, et de se méprendre avant de se trouver laisse-il des traces, d'ailleurs ?
Tout est beau, doux et ralenti dans le roman de Jeanne Benameur. L'histoire, les lieux, la plume, tout est poétique et guérisseur.
On peut croire, dans la vie comme dans le livre, que tout part d'une cassure, d'une fêlure, que tout laisse des traces, pour que l'on trouve enfin le véritable bout du chemin, la vraie rencontre. Ici c'est un voyage dans des îles reculées du Japon, au cours duquel on assiste à la danse des sensations, des remises en question, des émotions. Chacun des sens est mis en exergue. Sous chaque mot est traité un sujet précieux : l'amour, l'amitié, l'appréhension de la solitude, la recherche tant clamée du bien-être et du bien vivre. Tout n'est que gratitude et remerciements, on s'abreuve de thé et de couleurs. On vit près de la mer, celle sans qui on ne peut pas vivre, on définit l'ailleurs comme un meilleur.
On apprend la vie autrement, dans une autre culture, mais le récit est universel.
L'auteure a décrit ici avec justesse ce qui résonne en moi, me passionne, et me questionne. Ce que je ressens viscéralement. Qu'elle s'en voit remerciée.

« Elle savait, elle, qu'elle cherchait autre chose. Que la réalité servie chaque matin ne lui suffisait pas. Il se dit qu'elle voulait les confins. Ce qu'il y a de plus vaste que soi. Elle voulait atteindre autre chose. Plus vaste que la vie humaine bien bordée de calendrier »
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J'aime beaucoup l'écriture de cette auteure et je n'ai pas été déçue, même s'il m'a fallu un petit temps d'adaptation pour me familiariser aux phrases courtes, à l'écriture un peu heurtée du début.

Simon est psychanalyste dans une petite ville au bord de l'océan. Protégé par la voix des autres pendant des années, il décide d'aller vers le silence, de partir vers un lieu loin de la foule et des touristes. Un ami lui a trouvé ce qu'il lui fallait : une chambre d'hôte dans une petite île japonaise tenue par un couple accueillant et respectueux.

Simon va pouvoir lâcher la barre, se laisser aller. C'est un homme qui a beaucoup écouté. Là, il se sent en paix, il prend le temps de contempler, de savourer. le couple de japonais veille sur lui. Ils se distinguent chacun dans un domaine : lui dans l'art ancestral du kintsugi (kin l'or et tsugi la jointure) qui consiste à réparer un objet brisé en soulignant ses fissures avec de l'or, et elle dans la collection de tissus anciens.

Les mots tissés lors des séances sont comme les tissus précieux d'Akiko.
Son coeur éclaté qu'il apprend à reconstruire est comme les céramiques soulignées de lignes d'or de Daisuke.

Ce temps d'introspection lui permet de revenir sur les coups reçus dans sa vie. Il va apprendre à coudre les bords ouverts de ses blessures.

Un très beau livre. Peu de pages, mais que d'intensité
Lien : http://lesfanasdelivres.cana..
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Il suffit parfois d'un rien, un bol cassé ou un acte manqué, pour bouleverser une vie. C'est ce qui arrive à Simon bien installé dans ses repères et ses défenses : sa solitude, son métier, ses aventures, ses amitiés. Et puis, la rupture, le départ, l'ailleurs. C'est là, loin de tout, qu'il arrive à se retrouver, à sur vivre, à appréhender sa vie passée, comprendre et envisager un nouvel élan, un nouveau départ, son retour et l'avenir.
Avec une infinie délicatesse, Jeanne Benameur fait l'éloge de la lenteur, du silence et de l'introspection. Par le choix subtils des mots, elle décrit les paysages et activités découvertes au Japon qui font écho au voyage intérieur du personnage principal, entre souvenirs d'analyse et notes de carnets. Tout se construit d'une narration en même temps que Simon réapprend à vivre autour de thèmes tellement humains : l'amour, la mort, la culpabilité, le désir, la gratitude et le pardon.
Très très beau roman d'une autrice que je continue de découvrir et d'apprécier.
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A lire à haute voix, pour profiter de la poésie du texte.
Nous aimerions connaitre ce couple et leur maison d'accueil pour aller y passer un séjour et se laisser chouchouter.
Tout est calme, serein. On peut prendre le temps, celui de se taire, de faire une sieste, de boire un thé, de dormir à la belle étoile, de voyager et de faire des rencontres.


Lien : https://www.babelio.com/monp..
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Un bol, auquel Simon attachait une valeur sentimentale, tombe et se brise. La consequence est pour lui le début d'un voyage initiatique au Japon.
Simon va, dès son arrivée sur l'île du Soleil levant, se souvenir de ses patients venus se confier à lui le psychanalyse. Mais aussi se retrouver sur les traces de ses ses amours, ses passions auxquels il n'attachait pas toujours l'importance qu'il aurait dû.

Avait-il rêvé, imaginé l'accueil de Akiko Iiô et Daisuke son mari, ses hôtes ? Il apprendra en leur compagnie la quiétude de vivre, l'art de la fabrication et la coloration des tissus teints avec de couleurs issues des forêts d'une île voisine. Il ira se baigner à dans les cascades et espaces d'eaux chaudes.
Il prendra contact avec la douceur de vivre, le respect des autres.....

Voila pourquoi j'aime tant Mme Benameur, la douceur de ses mots, la façon elle retrace les images de ce merveilleux pays qu'est le Japon et ses habtants
Quel beau livre !


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Un bol cassé et la décision de partir au Japon, de rejoindre cette civilisation où les choses sont plutôt suggérées que dites. Et là-bas la découverte de l'art japonais du « kintsugi », de réparer un bol avec un léger fil d'or afin que la blessure devienne un ornement.
Tout dans ce livre est contenu dans cette métaphore du bol cassé, qui représente l'objectif de ce voyage pour mieux réparer les blessures du passé et mieux repartir.
Un livre magnifique qui oscille entre la poésie et la présentation d'une autre approche de l'analyse psychanalytique à travers le dépouillement de soi : « Retrouver l'état sauvage d'avant l'alphabet. Ce moment où la pensée sait, d'un savoir archaïque, qu'elle est du corps. Avant tout du corps. Il est en train d'en faire l'expérience. Et il éprouve par son corps ce que c'est. Un état précieux. Celui d'avant toute chose désirée. La matrice de tous les désirs. Elle est là »
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