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Fabienne Gondrand (Traducteur)
EAN : 9782749952338
400 pages
Michel Lafon (26/10/2023)
4.04/5   13 notes
Résumé :
Norvège, 1662. Quand Zigri, récemment veuve, s'éprend d'un homme marié, elle est emprisonnée pour sorcellerie dans la sinistre forteresse de Vardo. Faisant fi des lois et des risques, sa fille Ingeborg met tout en oeuvre pour la sauver. Dans une autre cellule croupit Anna Rhodius, la maîtresse du roi du Danemark, tombée en disgrâce et bien décidée à regagner son statut et son rang. Premier roman.
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Les sorcières de Vardø de Anya Bergman nous emmènent vers les confins septentrionaux de la Norvège du 17ème siècle dans le Comté du Finmark. Alors que la population est encore meurtrie par le souvenir du fléau de la Grande peste ou peste du Diable (1654), et subit une crise économique du aux aléas climatiques, le Roi du Danemark et de Norvège dans une société luthérienne pieuse et superstitieuse durcit la chasse aux sorcières, des femmes tenues responsables de changements climatiques, de naufrages de vaisseaux commerciaux ou de bateaux de pêcheurs sont mises en danger ... un acte de bienveillance envers ses sujets pour les protéger.

A travers trois voix féminines Anya Bergman nous immerge dans le quotidien de cette contrée reculée durant plusieurs saisons à arpenter la péninsule de Varenger bordée par la mer de Barents, de Ekkerøy à la forteresse de Vardø, à proximité des terres des Samis au-delà du cercle polaire. du vent, du froid, des nuits sans jours, des jours sans fin, des cieux immenses, des conditions misérables dans la crasse et la puanteur ou dans un décor naturel à couper le souffle.

Issues de catégories sociales différentes, l'auteur dessine des tableaux de femmes audacieuses, courageuses, imaginatives, intelligentes et indépendantes qui pour des raisons personnelles luttent pour retrouver une liberté bafouée et échapper aux accusations d'avoir pactiser avec le diable en échange de pouvoirs maléfiques.

La narration débute au printemps 1662 avec l'arrivée à la forteresse de Vardø d' Anna Rhodius, âgée de quarante sept ans, fille du médecin du Roi, herboriste et lettrée, sage-femme, reniée par son époux et disgraciée par son amant, Frederik III, fils de Christian IV (1577-1648) qui promulgua en 1617 la première loi contre la sorcellerie amorçant la vague des chasses aux sorcières. C'est grâce à ses correspondances et ses souvenirs, réminiscence de ses amours défunts et des jours heureux de son enfance que nous découvrons la cour du roi, la vie aisée menée à Copenhague mais aussi au près de sa famille en tant qu'« apprenti médecin » à Bergen. Est-elle vouée à être exécutée, cela Anna Rhodius ne le sait pas encore. Beaucoup de ruse et de patience seront nécessaires pour faire face au gouverneur danois du Finmark et de son redoutable bailli écossais pour qui le moindre désagrément ou incident ne peut-être que provoquer par les sorcières et leurs familiers (corbeaux, chats, chiens etc,,,) et qui n'a qu'une hâte, les torturer (supplice du chevalet, grésillons, vis à ailettes).

A quelques kilomètres au-delà de la Montagne du Domen, tenue comme un haut lieu du sabbat des sorcières, à Ekkerøy, nous faisons connaissance avec Ingeborg, une jeune fille faisant le deuil de son père et de son frère disparus en mer, un village de pêcheurs où de nombreuses veuves se serrent les coudes pour aller de l'avant. Mais Ingeborg elle aussi va devoir se faire violence pour venir en aide à sa mère accusée d'avoir copulé avec le diable qui n'est autre que le fils marié d'un riche et puissant marchand de la région… et qui est rapidement déportée à la forteresse de Vardø dans le trou aux sorcières, un vrai trou à rats avec une de ses compagnes.

Anya Bergman joue de l'alternance des voix au fil des pages qui peu à peu se chevauchent puis se rencontrent, les fils de leurs destins tenues par les Hildres se tendent jusqu'au jour du procès du 3 avril 1663. L'atmosphère lugubre dans lequel vivent les détenues dans l'attente de leur jugement et d'une aide extérieure permet de mieux cerner la peur, la détresse de ces femmes et jeunes filles ainsi que l'acharnement et la haine de leurs accusateurs dans cette région isolée loin du pouvoir central de Copenhague.
Anya Bergman dans ce cauchemar tragique vécu par les sorcières de Vardø essaime des moments lumineux avec l'évocation du folklore, des légendes, des mythologies nordique et same mais aussi de la sororité, source d'espérance et de force.

La figure de Maren, personnage solaire et flamboyant, vivant en harmonie avec la nature et les éléments qui porte le lourd fardeau d'être la fille d'une sorcière célèbre et déjà condamnée, une paria, représente tout au long du récit un symbole de résistance.

Inspiré de faits réels, Les Sorcières de Vardø de Anya Bergman relate la dernière chasse aux sorcières du Finmark lors des procès de 1662 à 1663. L'auteure en ranimant l'esprit de ces femmes détentrices de savoirs qui menaçaient le prestige d'hommes cupides, engoncés dans un esprit étroit couvert de religiosité et de superstitions et qui dérangeaient l'ordre social leur rend ici hommage. C'est en visitant le Mémorial de Steilneset, monument érigé à Vardø en commémoration des victimes brûlées en ce lieu que Anya Bergman a été interpelée « Si la torture ne suffisait pas à extirper les confessions voulues, la Cour pouvait ordonner le supplice de la nage: on jetait l'accusée à la mer pieds et poings liés et, si elle flottait, c'était la preuve qu'elle était bel et bien une sorcière. "L'eau était considérée comme un élément pur qui rejetait les impuretés", relate Liv Helene Willumsen. Au Finnmark, toutes les suspectes flottèrent et furent ensuite torturées… Peu en réchappèrent, les autres finirent au bûcher. » Soit soixante quatorze femmes de tout âge et quatorze hommes sames.

Les sorcières de Vardø fruit de recherches passionnées menées par Anya Bergman, lectures des comptes rendus du procès, collaboration avec l'historienne Liv Helene Willumsen de l'Université de Tromsø et Jorunn Jernsletten conservatrice au Várjjat Sámi Musea montre l'absurdité et l'obscurantisme du temps de ces chasses aux sorcières programmées qui s'appuyait sur le Malleus Malifecarum (« marteau des sorcières »), traité dont l'objectif était de démontrer leur existence et d'enseigner aux magistrats la façon et la manière de les identifier, interroger et condamner.

Roman historique emprunt de réalisme magique le tambour du noaidi, chamane sami, résonne longtemps apaisant les âmes en peine accompagné d'un joik s'élevant aux dessus des falaises déchiquetées, des bruits assourdissants des vagues et des cris incessants des oiseaux marins.

Une lecture immersion sur des terres arctiques longtemps assimilées à l'antichambre de l'enfer, le Nordkalloten fantasmé, occupé aussi par les Sames, peuple de magiciens et de sorciers et donc à éliminer.
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Derrière les réécritures des procès de sorcières se cachent bien souvent des tragiques destins de femmes fortes et courageuses, faisant peur aux hommes mais surtout à leur autorité mais également de séduisants récits à l'ambiance envoûtante et immersive. Éléments que j'ai retrouvé dans Les Sorcières de Vardø qui a su me séduire grâce à ses pertinents portraits même si je m'attendais à une tonalité plus forte et percutante.

En effet et non sans être des plus plaisante à parcourir, il est vrai que la plume d'Anya Bergman n'est parvenue à pleinement me séduire comme d'autres avant celle-ci. Un je ne sais quoi, que je ne sais d'ailleurs décrire, m'a parfois manqué et j'avoue regretter ce constat qui se veut à l'opposé de ce que je pensais ressentir. Néanmoins et malgré cette absence, j'ai été sensible à l'implication réalisée par la romancière quant à la passion que celle-ci ressent et met, merveilleusement, en valeur envers cette funeste et sombre période vécue par les nombreuses victimes de ces tristement célèbres procès. En ce sens, je ne peux qu'approuver le salut et la rédemption que l'auteure permet à ces martyrs en leur offrant à leur tour la voix et surtout les témoignages que ces dernières n'ont jamais pu exprimer. Ainsi et bien que violent et difficile à découvrir, je me suis imprégné des destins d'Ingeborg et d'Anne, toutes deux devant se dresser face à une société les condamnant de tous les maux.

Bien que je reste toujours aussi effaré des conditions de vies de l'époque et encore plus en ce qui concerne celle des femmes, je reste tout de même impressionné par la place importante des superstitions en ces sombres temps et nos dames ne dérogent nullement à la règle. Ainsi et piégées par leurs conditions mais aussi par le patriarcat de l'époque, c'est une véritable chasse à l'homme que nous dresse Anya Bergam. En s'inspirant de faits réels, cette dernière dévoile une touchante et authentique, parfois ponctuer de quelques longueurs il est vrai, intrigue dans laquelle il est impossible de ne pas faire preuve d'empathie envers les personnages devant tant d'injustice. Néanmoins et malgré les épreuves qui attendront ces derniers, il est vrai que je ne suis, également, pas parvenu à m'attacher totalement à elles deux. Ainsi et sans être des plus déplaisantes, il est vrai que je pensais être plus ému par ma lecture quand bien certains passages restent bousculants et parfois surprenants de part les quelques révélations avant-gardistes et pertinentes effectuées de la part d'Anya Bergman. Cette lecture m'a souvent fait écho à celle de Kiran Millwood Hargrave et son oeuvre, Les Graciées synonyme de rendez-vous manqué pour ma part.

Finalement et bien que j'ai apprécié Les Sorcières de Vardø, il m'a manqué un je ne sais quoi pour être totalement convaincu et touché par ce roman. La plume de l'auteure est loin d'être désagréable et son oeuvre déborde de passion et d'inspiration. C'est pourquoi et si le sujet vous intéresse, je suis certain que le travail effectué par cette dernière mérite d'être découvert.
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Les sorcières de Vardo s'inspire de faits réels et c'est l'une des grandes forces de ce roman : il donne une voix à celles qui ne sont plus, depuis des siècles, qu'une liste de noms, et leur façonne une histoire.

Ce qui m'a embêtée : la narration à la première personne d'Anna Rhodius. Pourquoi elle et pas les autres ? de plus, le fait qu'elle écrive des lettres à son roi me laisse dubitative, car elle lui rappelle des événements qu'il doit fort bien connaître. Parfois ça se justifie (elle lui dévoile son point de vue) et d'autres fois non, car il s'agit de narration, utile au lecteur mais pas aux personnages.
Les éléments magiques aussi m'ont déplu, parce que ça tourne encore et toujours autour du soit-disant pouvoir des femmes. Quand est-ce qu'on nous expliquera que nos forces sont réelles, plutôt que de rêvasser à des dons qui n'existent pas ? En quoi ça nous aide ?
D'autant plus que le roman est très réaliste, par ailleurs, il s'ancre dans L Histoire.

Ce qui m'a plu : des personnages très bien écrits, très différents et tous crédibles, dont les actes, méprisables ou héroïques, s'ancrent dans leur propre histoire, qui les explicite sans pour autant les justifier. Elles sont ce qu'elles sont, ce qu'elles peuvent. La brutalité de la domination masculine est telle que certaines l'ont intégrée, d'autres s'en défient, d'autres encore s'y résignent.

Pour un premier roman en tout cas, je l'ai trouvé assez remarquable, fort bien écrit et documenté. Les descriptions sont pleines de poésie et traduisent bien la majesté et la rudesse des paysages norvégiens.
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Norvège 1662.
Des femmes adultères ou simplement différentes sont condamnées pour sorcellerie et enfermées sur une île du nord du pays. Entre jalousie et entraide, les pauvres femmes vont subir les pires infamies.

Dans ce premier roman historique, l'auteure retrace l'histoire de ces femmes, ayant vraiment existé, qui ont enduré les pires horreurs pendant des semaines, voire des mois, enfermées et torturées dans des geôles nauséabondes appelées trous à sorcières.
Le tout dans les paysages magnifiques du fjord de Varanger où l'histoire du peuple Sami nous est également contée.

Un premier ouvrage plutôt réussi même s'il reste perfectible.

J'ai passé un agréable moment de lecture avec ce récit ponctué de féminisme et d'un peu de magie.

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Un roman-hommage à toutes ces femmes sacrifiées par les flammes

Cette réécriture palpitante et émouvante des procès des sorcières de Vardø nous emmène au coeur des terres de légendes et de mythes du grand Nord. Au milieu des tempêtes de neige des nuits éternelles, bercés par les histoires au coin du feu, accompagnés par les cris des oiseaux lors des jours sans fin, nous suivons Ingeborg fille de pêcheur et Anna femme noble en exil. Ballottées par les remous des accusations de sorcellerie, leurs destins se rencontrent et nous laissent chamboulés.
Entre réalité et fiction, pragmatisme et magie, un appel à réveiller la sorcière en chacun de nous. Pour toutes ces femmes brûlées et pour toutes celles qui continuent de brûler à l'intérieur de nous.
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critiques presse (1)
LeJournaldeQuebec
11 décembre 2023
"Les sorcières de Vardø", un roman historique captivant, remarquable, choquant, qui fait écho avec les luttes contemporaines des femmes.
Lire la critique sur le site : LeJournaldeQuebec
Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Les rayons bas d'un soleil d'hiver Invisible se reflétaient sur le fjord de Varenger. Des volutes de fumée s'élevaient du littoral à l'endroit où la glace se frottait à la mer dans un brassage digne de l'Enfer. Le souffle du Démon. Ingeborg était assise sur la bordure glacée tandis que les dernières lueurs disparaissaient. Le ciel était paré de bleu, la neige virait au rose. C'est là que la glace brûlait, que l'air était fin et cassant.
Un autre endroit au monde dégageait -il une telle puissance ? Elle l'éprouvait dans le fourmillement de ses doigts, dans le picotement de sa peau. Oh, dompter ce pouvoir et souffler le feu. Si seulement elle pouvait faire fondre les lieues sans fin de glace et de neige qui la séparaient de sa mère.
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- Qui sont les sorcières selon toi, Ingeborg?
- Je ne sais pas. Pas ma mère …
- Les sorcières sont les parias. Celles qui sont différentes. Rejetées. Souillées et maltraitées. Ensemble si nous nous redressons, nous nous donnerons de la force.
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.. Il était plus facile d'accuser le Diable de toutes les traces de coups sur leurs femmes et leurs filles ; plus facile d'accuser les sorcières d'avoir vidé leurs fûts de bière. Plus facile de traiter de disciples du Diable les domestiques aux grossesses non désirées.
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- Il n'y a pas de sorcière dans notre village, Ingeborg, mais le Diable existe bel et bien. Regarde nos accusateurs droit dans les yeux et tu verras.
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- Vous aviez mon corps, ma loyauté et ma vie entière entre vos mains, murmura la sorcière qui n'était plus qu'un amas de douleur sur les dalles du château.
- Mais tu ne m'as jamais donné ton consentement, rétorqua le maître avec fureur.
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