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EAN : 9791094810491
122 pages
zonaires éditions (06/05/2023)
4.3/5   5 notes
Résumé :
Une grande perte est capable de vous pétrifier des années, la vie parfois, pourtant une pichenette pourrait vous faire sortir de votre sclérose si le doigt du hasard vous la décochait au bon moment. Pour Stéphane, l'ex paysan reconverti dans les voyages organisés, c'est le harcèlement d'une de ses passagères sur l'abattage de son troupeau durant la vache folle. Pour Paul et Raymonde, une insulte raciste dans une fête foraine pendant les "événements" en Algérie. Pour... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Un vrai bonheur littéraire filé à la grâce d'une poésie qui ne dit pas son nom et de métaphores très personnelles (comme ces coquelicots qui auraient dormi tout habillés).
Remarquable entrée progressive de "La Part manquante", cette façon de faire sentir sans le dire le drame qui s'est déroulé, le trauma qui revient avec le morceau de chocolat, en phrase nominale, formidable, dans le rythme, l'écriture, le sens du moment, le recours à des termes d'argot inconnus (savater, jambonner). Cette histoire est un crève-coeur, bien plus que tous les reportages qu'on a pu voir ou lire sur le sujet de la douleur des agriculteurs. Si bien décrit : le retour du refoulé par petites vagues, ce sentiment de vide intérieur, ce réal distancié…
Également un crève-coeur, "Il ne veut rien demander" qui décrit trop bien la faim.
Pour chacune des nouvelles, une façon d'entrer de plain-pied dans une situation, un moment, de le prendre au vol d'entrée de jeu, formidable, dans le sens où c'est un moyen de ne pas raconter par le menu — fonction du roman— mais de faire vivre, d'immerger, de rendre le lecteur actif qui doit mener cette mini-enquête de reconstitution des événements, se poser cette question essentielle de toujours, que s'est-il passé ? Tout l'art de la nouvelle est là, dans le sens aigu de la concision alliée à l'intensité.

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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
IL NE VEUT RIEN DEMANDER

Disparu à l'âge de 26 ans. Totalement. A tout laissé en plan, épouse et enfants. [...]
George Poulain progresse dans la rue vers la place Puvis de Chavanne. Veston, cravate, une casquette. Quand il croise quelqu'un, la personne s'écarte. Il pue. Il marche lentement. Depuis son AVC il y a 3 ans, il n'a plus de souffle. Il effectue ses derniers pas comme un noyé sortant de l'eau, tend la bras, attrape le dossier de la chaise paillée de jonc plastique couleur safran, souffle un instant.

*

L’ÉCHAFAUDAGE

Il marchait devant moi depuis un bon moment. Mais, il me ressemble ! me suis-je dit. Même nuque courte, même profil, même stature, même costard, un velours à fines côtes, même façon d’avancer en se prenant les pieds l'un dans l'autre donnant l'impression qu'à chaque pas nous risquons de nous ratatiner. Le regardant, j'ai eu la sensation de me voir de dos, d'être derrière moi-même. J'ai craint d'halluciner. Alors j'ai décidé de me retourner pour en avoir le cœur net.
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VOUS ALLEZ LES DÉRANGER

Cette partie du département de l'Allier semble avoir été déchirée en petits morceaux jetés n'importe comment. Les bicoques sont basses, les prairies vides mangées de touffes d'orties vivaces, les arbres croulent sous le gui ou s'effondrent sous le lierre. Notre père était passé dans ce coin sur la route de la grotte aux fées de Châtelperron, il y avait un panneau de vente du moulin. Une ruine, déjà à l'époque. Il en était tombé dingue, il aimait la pierre à l'état géologique, les éboulis, les chaos, la lave, les châteaux cathares, les chapelles à corbeaux, les pétrifications, les souterrains, Lascaux, Solutré et par-dessus tout le profond, les cavernes, les grottes, se balader très loin de la surface.
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MANÈGES

Paul tenait ma main de deux doigts seulement, comme encore timide. C'est moi qui l'étais. Et je craignais qu'il doive s'en accommoder, non que je fusse prude, mais j'avais une retenue dont je ne me suis jamais débarrassée. Elle est mon caractère. J'aurais détesté grimper dans la chenille, à cause de cette joie furieuse qui la faisait follement tourner, ou dans ces boîtes à sardines des auto-tamponneuses qui se fonçaient dessus devant le théâtre. Pourtant, à cette fête qui était notre première sortie - il était venu me chercher tout à l'heure, en costume et cravate, demandant l'accord à mon père - , j'aurais dû être plus hardie. Paul était rappelé. Ce soir même, il repartait en caserne pour des mois, peut-être, ou pis, "là-bas", personne ne savait. Cette pensée me traversait continûment telle l'ombre mouvante de la grande roue qui arrachait à chaque passage un lambeau de chair à mon cœur, je découvrais l'insupportable intrusion de l'angoisse dans notre amour à peine né.
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LA PART MANQUANTE

Ils ont tué vos bêtes, articule la femme avec son accent terreux depuis le fond de l'autocar remué par les bourrasques. Elle demeure immobile, lourde, échouée au centre de la dernière rangée de sièges bleu pétrole, sa tête sans cou coincée entre sa mise en plis et sa gabardine qu'elle garde depuis le matin. Ils sont seuls dans le véhicule. La pluie trace des pointillés argentés sur les vitres, les voyants verts et rouges du tableau de bord luisent en bas du pare-brise. Stéphane évite à dessein de lever les yeux vers le rétroviseur, il devine fixé sur lui le regard de la femme.

Incipit
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JOUER EN HAUT DES PONTS

La semaine dernière, une tempête a traversé la France. Le vent venu de l'Atlantique a monté en force toute la nuit, dévasté la Vendée, l'Anjou, la Touraine, est arrivé ici. Le lendemain, quand il a ouvert ses volets, il a découvert l'arbre couché, comme un cheval mort. Il a ressenti une fêlure dans sa poitrine à l'endroit du sternum. Il a téléphoné à son fils.
Les branches résistent, freinées par l'herbe, se courbent puis reprennent leur place contre le tronc avec un claquement soyeux. [...] Le pied de l'arbre bute contre la remorque. On ne voit plus ni les racines ni leurs enveloppes terreuses, son père les a empaquetées dans un pansement de sacs de jute qu'il a ficelé de sangles. Ils s'arc-boutent pour le hisser sur le plateau. A l'entrée de l'autoroute, des lambeaux de musique échappés de la guérite du péage entrent dans la voiture.
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