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sur 103 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Bienvenue à l'Africa Museum qui fut autrefois Musée du Congo belge, puis Musée royal de l'Afrique Centrale, édifié à la gloire de l'empire colonial belge. Fermé en 2013 pour « réparations » il a été rouvert en 2018 et Christophe Boltanski a décidé d'y passer la nuit. Il arrive par un petit chemin, et découvre des tombes où sont enterrés des Africains jadis « exposés » dans le musée. Puis direction, le sous-sol où sont entassés statues, masques qui étaient exhibés autrefois à la gloire du colonialisme.

Puis ses pas le conduisent au pied de celui qui fut le symbole du musée, King Kasaï, un éléphant abattu puis empaillé en 1956.

"Je suis allongé en chien de fusil devant l'un des plus grands éléphants d'Afrique. Eu égard à son rang et en raison de ses origines, il a été baptisé King Kasaï"

L'auteur nous raconte l'histoire du musée, la manière dont le Congo est devenu propriété personnelle de Léopold II, roi des Belges qui était vexé de ne pas avoir d'empire colonial. On apprend, au passage qu'un village « typique » avait été créé les Africains étant habillés comme dans leur pays (avec la différence de température, on imagine leur ressenti !) cela fait froid dans le dos.

On va ainsi connaître l'histoire coloniale, mais aussi le pillage du Congo belge, devenu Zaïre, puis RDC, les massacres d'animaux à visée « taxidermiste » ce qui nous permet de faire la connaissance de quelques-uns de ces massacreurs tel Léon Rom qui chassait les crânes humains, comme d'autres les papillons, qui a inspiré à Joseph Conrad le personnage de Kurtz dans son roman « Au coeur des ténèbres » ?

Christophe Boltanski évoque également, outre le pillage des sols, le calvaire des Africains chargés de récolter le caoutchouc, les châtiments encourus quand le rendement n'était pas celui escompté : mains coupées par exemple (c'est certain, on est plus efficace, les mains en moins !).

Ce petit livre (160 pages) est un véritable uppercut, dans l'exploration de la colonisation et des horreurs commises au nom de la suprématie blanche, sur fond de racisme profond et de haine, à l'heure où l'on déboulonne les statues, mais est-ce vraiment la solution ? Ce passé a bel et bien existé et ce n'est pas en effaçant qu'on peut se faire pardonner. Il faut expliquer encore et encore comme pour la Shoah.

Une petite note d'humour (on rit jaune c'est vrai) à la manière dont Hergé a conçu « Tintin au Congo » sans jamais mettre les pieds en Afrique, mais uniquement inspiré par le musée.

Ce livre m'a donné envie de lire « Au coeur des ténèbres » qui ne me tentait pas tellement jusqu'à présent, et aussi « La cache » de Christophe Boltanski qui attend toujours dans ma PAL.

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Stock qui m'ont permis de découvrir ce livre et son auteur.

#kingkasaï #NetGalleyFrance !
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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Le journaliste et écrivain Christophe Boltanski s'est plié au jeu de la magnifique collection Ma nuit au musée des éditions Stock et a passé une nuit dans le Musée royal de l'Afrique Centrale rebaptisé AfricaMuseum, dans la banlieue de Bruxelles. J'ai redécouvert grâce aux déambulations socio-historiques de l'auteur, l'histoire de la colonisation violente du Congo belge par le roi Léopold II qui avait eu l'idée de ce musée comme d'une vitrine. Aux pieds de cet immense éléphant qui résiste comme il peut aux assauts du temps grâce à la taxidermie, nous partons sur les traces du chasseur missionné par le musée pour en rapporter son futur trophée, des exploitants de caoutchouc et d'Hergé, le père de Tintin . C'est brillant, passionnant, cultivant, il faut absolument le découvrir.

📖 King Kasaï de Christophe Boltanski a paru le 11 janvier 2023 aux éditions Stock. 160 pages, 18,50€.

🔗 Service de presse adressé par l'éditeur.
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Je retrouve avec un grand plaisir de lecture, le dernier roman-récit paru dans la collection "Une nuit au musée" aux éditions Stock.
Cette collection est une très belle initiative et un beau projet, mêler la grande Histoire et le vécu des auteurs.

J'avais lu le précédant, celui de Lola Lafon qui se passait dans l'annexe où
Anne Frank a vécu ses derniers instants de vie.
Ce témoignage et les propres souvenirs de l'auteure m'avaient bouleversée.

Ici je retrouve un écrivain, journaliste et enquêteur, C.Boltanski dont le premier roman "La cache" m'avait fortement intéressée et secouée .
Un récit autobiographique qui raconte le parcours de sa famille fantasque pendant l'occupation.
Pour avoir eu la chance de côtoyer l'auteur, il déborde d'humanisme.
Le musée qu'il occupe pendant une nuit pluvieuse est celui du "Musée royal de l'Afrique centrale, rebaptisé "Africa Museum", situé à Tervuren à Bruxelles.
Cet endroit crée en 1910 est dédié à la gloire du colonialisme et du roi des Belges, Léopold II, seul monarque propriétaire personnel d'une colonie.
Ce monument impressionnant par sa taille a été entièrement transformé de fin 2013 à fin 2018 avec un investissement de 74 millions d'euros,
pour une nouvelle approche ouverte et constructive sur la restitution du patrimoine culturel africain.
Le sujet est plus que délicat alors laissons l'écriture à C.B. qui tient son rôle d'enquêteur sensible.
Récit interpellant et pas seulement pour les Belges mais universel.
On sait que ce passé colonial est tragique et honteux.
Qui est King Kasaï ?
Un immense éléphant chassé en 1956 et empaillé à la demande du musée pour impressionner les visiteurs.
C.Boltanski s'est intéressé au chasseur meurtrier, c'est son angle d'attaque pour raconter son voyage de nuit au Congo.
Et c'est surtout l'entame d'une histoire tragique et violente des peuples africains, ignorés dans leur culture et leurs traditions, considérés comme des non-humains, esclaves maltraités et tués, ces mots me semblent
extrêmement faibles.
Tout cela pour l'enrichissement des puissances européennes.
J'ose un petit clin d'oeil à la BD, Tintin au Congo, paru en 1931 avec recul
bien-sûr comme C.B. lecteur des aventures de ce petit reporter.
Les musées sont habités.



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« Je me dirige vers une énormité. Un empire comprimé dans une boîte, une encyclopédie en trois dimensions, une arche qui contient tout. Faune, flore, hommes et dieux. Toute la mémoire d'un monde rassemblée dans un même écrin.
Je m'apprête à passer la nuit à l'intérieur d'un bâtiment monumental et aux prétentions exorbitantes. Appelé à l'origine « musée du Congo belge», puis «musée royal d'Afrique centrale», il a été rebaptisé depuis peu «Africa Museum» en anglais (ou en latin); ça fait tout de suite plus classe. »

King Kasaï, Christophe Boltanski @manuitaumusee @editionsstock

Sortie le 11 janvier 2023. #rentreelitteraire #janvier2023

Il est des musées dont on ne sort pas indemne, dont l'histoire, chargée d'un lourd passif, nous bouleverse et nous révolte à la fois! Il est des récits, alimentés par diverses sources, qui nous habitent et nous hantent, longtemps après que l'ultime page du livre ait été tournée… Il était une fois le Congo belge, raconté par Christophe Boltanski, à travers sa nuit passée à l'Africa Museum de Tervuren @africamuseumbe

En tête-à-tête avec King Kasaï, l'éléphant qui trône à l'entrée de la salle aux animaux empaillés, l'auteur parcourt les grandes lignes de l'origine de ce musée: Léopold II, sa colonie personnelle, l'horreur de celle-ci qui, par-delà la mer, a mené à l'exposition d'êtres vivants comme bêtes de foire…

« Il y a des montreurs d'ours ou de singes savants. le deuxième roi des Belges est un montreur d'hommes. »

L'innommable est présenté sans filtre, sans fioriture! Dans toute sa laideur!

« Durant un été, on les a exposés. À tout. À la curiosité des foules, au voyeurisme, aux quolibets, aux sarcasmes, aux intempéries, à la maladie, et enfin à la mort. Ils font bien partie du musée.
Ils racontent son histoire ou plutôt sa préhistoire.
Leurs tombeaux en constituent, pour ainsi dire, la première pierre. L'acte inaugural.
De ces gens, on ne connaît que des bribes.
Aucun détail sur leur vie, leur âge, le métier qu'ils exerçaient. On sait, en revanche, d'où ils viennent: de l'unique colonie au monde devenue la propriété d'un seul homme. Ils n'étaient pas des citoyens, ni même des sujets, mais des objets vivants. Léopold II disposait de leur personne, comme du reste. »

Ce livre fait pour moi écho à celui que j'ai lu il y a quelques mois: Notre royaume n'est pas de ce monde, Jennifer Richard. Ici aussi l'auteur aborde l'histoire réelle de cette colonie belge et, de manière plus large, de la colonisation en Afrique…

« Caoutchouc signifie
«le bois qui pleure». C'est ainsi que les Indiens du Pérou baptisent sa résine. À la longue, les arbres n'ont plus de larmes. Alors, on oblige les hommes à s'enfoncer encore plus loin dans la forêt et on punit de mort les récalcitrants, on retient leurs femmes et leurs enfants en otages, on tue, on tranche, on brûle. »

Je suis belge, il est vrai, et ce récit me touche sans doute différemment du fait qu'il concerne l'histoire de mon pays! Mais je pense que, peu importe le pays, l'histoire des colonies s'est partout illustrée dans l'horreur, la cruauté, la déraison de l'homme qui se croyait supérieur, devenu bestial, sauvage, primitif!

« Léon Rom est un collectionneur. Il pratique la décapitation à titre de passe-temps.
Il accumule des crânes humains comme d'autres des timbres-poste. Il étudie leur taille, leur forme, leurs protubérances, leur poids. Il fait partie de ces gens qui proclament la supériorité de l'homme blanc à l'aide d'équerres et de bouts de ficelle. En digne représentant du progrès, il joue au naturaliste amateur. »

Cette nuit au musée n'est pas comme les autres: elle renvoie à notre côté sombre d'être humain et, à la noirceur de la nuit, répond celle de l'âme humaine dans ses plus sombres tréfonds!
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Je découvre avec ce titre, la collection « Une nuit au musée » dont le principe est de planter un écrivain dans un lieu clos empli d'histoires pour qu'il en raconte une : exercice de style de double fond assez tordu pour me donner envie de voir ce que cela pouvait donner, surtout quand il se déroule dans un musée de la mauvaise conscience.

Le musée choisi par l'auteur se situe en Belgique, sur le domaine de Tertuven. le château musée est hanté par la mémoire d'un barbe bleu, Léopold II, une boite qui enferme la mémoire d'un monde disparu, la Belgique coloniale qui en a fait disparaitre un autre, un territoire qui s'est appelé le Congo belge, par la volonté de ceux qui l'on découpé. Même l'édifice a mauvaise conscience. d'ailleurs, on l'a plusieurs fois changé de nom : musée du Congo Belge, à la gloire des maitres, il est devenu ensuite » le musée royal d'Afrique centrale », une tentative de neutralité hypocrite, et aujourd'hui, « L'Africa museum », le latin ça vous redonne un vernis à la honte, faut croire … Il n'y a pas que le nom qui changé mais aussi l'agencement des salles et la politique de l'exhibition. Mais le sens de la visite ne change rien aux cauchemars qui sont montrés et le récit de C. Boltansky fait ressortir les fantômes de partout.

Le musée qui a exposé les biens spoliés comme des trésors, ne sait plus trop quoi faire de ses reliquats devenus honteux. Alors que au temps de la victoire de la civilisation sur la sauvagerie, les bustes des gloires militaires étaient mis sur l'avant scène, aujourd'hui, ce sont les victimes qui accueillent le visiteur. Les statues de Sambo, Zao, Ekia, Pemba, Kitoukwa, Mihange, Mpéia, évoquent la mémoire de ces hommes et femmes qui furent exhibés dans le village nègre du musée. Morts dans l'anonymat, l'indifférence, le mépris, leurs silhouettes sont montrées comme un repentir. Mais toujours exposées finalement, alors que leur corps gisent quelque part dans la forêt du domaine et que l'orthographe de leur nom reste incertaine. Alors, que montre-t-on ?

L'auteur souligne le paradoxe et l'ambiguïté dérangeante de ces stèles mais aussi de l'ensemble des pièces commémoratives, souvenirs d'une curiosité morbide et aujourd'hui stigmate de la repentance contemporaine. Car, effectivement, que faire de ce Léopold avait conçu comme une vitrine, un dépliant géant à la gloire de la puissance coloniale, que faire de ces traces de massacres, d'humiliations, de spoliations d'une culture, de la richesse d'une faune et d'une flore exploitées par un tyran qui se disait philanthrope ? Ces traces, en effet, ont été photographiées, sculptées, ramenées comme des titres de gloire, alors, même si on ajoute des encarts explicatifs, cela reste des images des victimes représentées par ceux qui les exploitent. Les regards des hommes qui rapportent à leurs exploiteurs des paniers emplis de mains coupées, sont des regards de vaincus que l'on expose, peu importe la légende qui accompagnent ces représentations.

Dans la mémoire de l'auteur, reviennent Tintin au Congo, Au coeur des ténèbres de Conrad, sa mémoire de cette histoire mais aussi d'autres histoires, dont celle des belges qui ont ont fait du Congo un terrain de chasse et d'aventures exotiques, comme les Bookat, Alphonse l'ancien et Alphonse le jeune. Ce dernier fut le tueur de King Kasaï, l'éléphant qui trône aujourd'hui dans la galerie, au milieu des trophées empaillés. Figure emblématique du pillage, figure pathétique, dont l'auteur souligne la décrépitude : peau sèche et crevassée, oreilles élimées, défense pendante. Ces mémento mori d'une faune massacrée et rapportée en triomphe sont aujourd'hui des fantômes qui embarrassent. Alors, autour de la pièce maitresse de l'éléphant géant, les autres dépouilles animalières donnent l'illusion d' une jungle ordonnée, une pseudo galerie de sciences naturelles.

Le texte est court, mêlant descriptions, souvenirs personnels, analyses des différentes strates de l'histoire et de la poussière sous le tapis. Il illustre toute l'ambiguïté de la problématique mémorielle : reléguer des statues dans les purgatoires, voiler les allégories glorieuses, inverser l'ordre des salles et recouvrir la honte par la bien pensance, parait ici être une autre relecture de l'histoire. Un texte sacrément instructif et dérangeant.
Lien : https://aleslire.wordpress.c..
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« King Kasaï » est le quatrième livre de la très belle collection « ma nuit au musée » qu'il m'est donné de lire. Cette fois, les éditions Stock ont proposé à Christophe Boltanski de passer une nuit à l'« Africa Muséum » de Tervuren, ancien « Musée royal de l'Afrique centrale », qui a réouvert ses portes en décembre 2018 après plusieurs années de travaux. Si ces travaux avaient pour but la rénovation du bâtiment, il s'agit également d'une volonté affichée de « décoloniser » ses collections. En effet, faisant suite au succès de l'exposition universelle de 1897 au cours de laquelle le roi Léopold II avait souhaité « présenter » le Congo belge, il initie, en 1905, la construction du bâtiment actuel. Ce musée constitue en fait, initialement, une « vitrine » de cette colonie, propriété privée du roi des belges et illustration abominable, s'il en est, des dérives et des horreurs perpétrées au nom d'une soit disant volonté d'éducation et de civilisation de la population autochtone. En traversant les pièces de ce bâtiment l'auteur nous fait découvrir les objets ou les oeuvres que l'on a souhaité mettre en valeur ainsi que celles que l'on a « volontairement » souhaité cacher ou rejeter dans un but didactique, destiné à condamner, à postériori, les actions des colons.
Christophe Boltanski évoque également de manière respectueuse et très documentée les souffrances endurées par la population congolaise sans occulter la cruauté et les égos surdimensionnés de ceux qui en firent leur victime. Si l'on comprend aisément la nécessité qui s'imposait de restructurer cet établissement et l'intention d'en faire une sorte de « musée d'histoire naturelle », l'on réalise très vite que cette part très sombre de l'histoire plane encore très intensément entre ses murs.
La plume élégante et sobre de l'auteur m'a permis de découvrir ces faits historiques que je ne connaissais que très peu et que l'on a malheureusement trop souvent voulu masquer ou effacer. Un livre qui allie la beauté de son écriture à la nécessité de sa lecture.
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L'auteur s'apprête à passer, selon la formule consacrée, une "nuit magique" dans un musée, et pas n'importe lequel. Christophe Boltanski va avoir ainsi le privilège de découvrir une fois la nuit tombée et les lieux désertés, les espaces et collections de l'ancien "Musée du Congo Belges", remis au goût du jour. Les pièces emblématiques à l'époque, qui glorifient le colonialisme, sont aujourd'hui exposées en sous sol, reléguées dans des salles souterraines pour ne pas tomber pour autant dans l'oubli. Ce bâtiment démesuré dans les faubourg de Bruxelles avait été construit par Léopold II, avide de faire étalage des trésors de sa colonie. Capitaliste convaincu cet homme ambitieux va exploiter toutes les ressources disponibles sur ces terres luxuriantes, déportant même des populations entières qui sont ensuite exhibées dans des ersatz de villages typiques. Dans ce récit l'auteur revient ainsi sur le passé trouble et peu glorieux de son pays. Il laisse libre cses réflexions à mesure qu'il déambule s'émaillent de souvenirs, en particulier ceux liés à ses lectures de Tintin au Congo...
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