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3,81

sur 103 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Ce livre de la collection "Une nuit au musée", je voulais absolument le lire parce qu'il se passe dans un musée de ma ville, même si je n'habite pas Tervuren (qui se trouve en périphérie de Bruxelles, mais on ne va pas pinailler).

Vivant depuis plus de 20 ans à Bruxelles, j'en avais entendu parler pour la première fois par un de mes anciens collègues, qui avait sorti une blague bien grasse, bien lourde, insultante, dégradante, à consonance raciste et qui m'avait laissée, à l'époque, muette.

Un raciste ordinaire qui pense que les autres sont moins bien que lui. le genre de truc qui me hérisse le poil au plus haut point. Plus tard, j'ai entendu bien pire que sa blague grasse, et là, au moins, j'avais plus de bagage et je n'étais pas restée muette, j'avais volé dans les plumes de la personne. Hélas, impossible de faire changer les opinions de certains…

Donc, si j'ai visité quelques musées de ma ville, je n'avais jamais eu envie de mettre les pieds dans celui qui se nommait auparavant "Musée du Congo Belge". Eh oui, le Congo appartenait exclusivement à Léopold II, roi des Belges (et non De Belgique comme on fait souvent la faute), notre ancien roi.

Non, je n'en tire aucune fierté de cette ancienne possession, mais je ne vais pas me flageller pour des fautes commises par certains. Pendant que les colons belges creusaient la terre pour pilier le Congo de ses richesses, mes ancêtres retournaient leurs terres pour planter des céréales, les faire pousser avant de les récolter (oui, je descends de céréales killer) et pour eux, Bruxelles était à l'autre bout du monde, alors le Congo, vous pensez bien…

Cette lecture m'a appris bien des choses et fait remonter des souvenirs datant de mon enfance, lorsque mon grand-père me lisait "Tintin au Congo" (j'avais 5 ans), un album bourré de clichés, puisque Hergé n'a jamais mis les pieds au Congo, mais avait visité son musée… Oui, son guerrier léopard vient du musée ! J'avais même oublié combien Tintin était hautain avec les autochtones et qu'il dézinguait des tas d'animaux…

Racontant sa nuit au musée, l'auteur parlera, entre autre, du chasseur qui a abattu le magnifique éléphant qui se trouve dans la rotonde, le fameux King Kasaï, remontant aussi le fil des ancêtres de ce chasseur, surtout ceux qui ont été au Congo, sans oublier ceux qui y ont fait des carnages en tuant X animaux d'une même race alors qu'un seul aurait suffi pour la taxidermie.

Ma lecture était très instructive… Puis, au détour d'une page, les horreurs sont arrivées, elles m'ont prises à la gorge, m'ont tordu les tripes, font monter la bile dans ma bouche : l'auteur parlait des exploitations de caoutchouc, des mains que l'on coupait pour justifier des balles tirées, des têtes que l'on a coupées, des crânes qui furent exposés, sur les piquets d'une villa…

C'est une lecture dont on ne ressort pas indemne, même si l'auteur évite de sombrer dans le pathos, de donner des leçons. Il ne minimise pas, il donne les faits, parlant aussi des statues que l'on déboulonne un peu partout et qui, de ce fait, sont mises sous le feu des projecteurs.

En 160 pages, l'auteur donne un bon aperçu de l'horreur de la colonisation, sans entrer dans tous les détails sordides, bien entendu. Il réussit à faire le point sur le passé colonial de la Belgique, au travers de son roi, sans pour autant nous juger (un pays d'Europe peut-il se taguer de n'avoir possédé aucune colonie ?), sans pour autant excuser.

Une lecture coup de coeur, coup de poing, remplie d'émotions et qui m'a sans doute parlé bien plus du fait de mon appartenance au royaume De Belgique, puisque j'étais directement concernée (l'argent du Congo a enrichi le roi, une partie de ses sujets, mais aussi le pays et Bruxelles lui doit certainement la magnificence de certains endroits).

Une lecture coup de poing, une lecture qui parle des pages sombres de notre histoire à nous, les Belges, et dont nous ne sommes pas fiers (hormis les indécrottables racistes, suprémacistes, ou les descendants de ceux qui s'y sont enrichis). Une lecture des plus instructives, sans oublier émotive.

Lien : https://thecanniballecteur.w..
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Ce livre appartient à la collection « Ma nuit au musée ». En l'occurrence l'auteur va passer une nuit au "Musée royal de l'Afrique centrale", rebaptisé vilainement "AfricaMuseum", situé à Tervuren dans la banlieue de Bruxelles. Ce musée fut pensé à l'origine comme la vitrine du colonialisme belge en Afrique, mais sa conception a depuis été revue.
C'est l'occasion pour l'auteur de se pencher sur les méthodes et les visées impérialistes et intéressées du roi Léopold II à l'origine de l'entreprise coloniale belge dont il dresse un portrait sans complaisance.
L'auteur nous présente également quelques protagoniste de cette entreprise, dont Antoine de Boekhat, aristocrate viandard sans limite et pourvoyeur de dépouilles animales pour les taxidermistes européens, et Léon Rom assassin raciste hallucinant.
Les immenses richesses du Congo sont mises en évidence par le musée, sans que les conditions d'exploitation soient évoquées ; l'auteur fait heureusement la lumière sur celles-ci.
Ce musée témoigne donc à tout oeil critique de la prédation insensée et sans limite du colonialisme occidental, et de ses méthodes inhumaines.
Le livre de référence sur ce sujet reste "Congo – Une histoire" de David van ReyBrouck. À tout lecteur intéressé qui serait rebuté par ses 700 pages et plus, le livre de Christophe Boltanski est une parfaite alternative.
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Suite de cette formidable collection, qui propose à un écrivain de passer une nuit dans un musée. j'ai été très émue par le texte de Lola Lafon et sa nuit avec Anne Franck.
Cette fois-ci, nous allons passer la nuit avec Christophe Boltanski à Bruxelles à l'Africa museum.
Avec une exergue de Frank Fanon et dans sa poche, le roman "au coeur des ténèbres" de Conrad, Christophe Boltanski va nous raconter le passé colonial de la Belgique et en particulier du fameux Congo belge de Léopold II.
D'ailleurs, ce musée a changé de nombreuses fois de nom : du musée du Congo Belge au musée royal d'Afrique centrale et maintenant, après des travaux, l'Africa muséum. Fermé en 2013, il était le dernier musée colonial du monde et a réouvert en 2018.
"Ces changements d'appellation (.../...) visent à faire oublier ou, du moins, à estomper le projet initial, celui d'un musée entièrement dédié à une colonie." p19
En 1897 et l'exposition universelle de Bruxelles, Léopold 2 est un "montreur d'hommes". Dans son domaine de Tervuren, un Congo miniature va être présenté aux belges. 267 hommes, femmes et enfants vont être "exposés" dans trois "villages négres". En 1899, 400 africains vont aussi être exhibés aux Invalides lors de l'exposition universelle de Paris.
30 000 personnes défilent dans le parc de Teruren. Puis un palais va être construit par l'architecte parisien Charles Girault (il avait crée le Petit Palais et le musée belge est une copie de ce bâtiment).
Avant de rentrer dans le musée, C Boltanski arrive par un chemin et va trouver les tombes de 7 morts, des africains "exposés" et enterrés dans le jardin du musée. Puis nous allons le suivre dans les sous sols, les couloirs, les salles de ce musée.
Des images impressionnantes jaillissent de ce texte. Il est seul, quasiment dans le noir, avec la torche de son téléphone portable. Dans le sous sol, il va trouver des statues du musée initial, mises au rebut, "de fait de préjugés et stéréotypes profondément ancrés qui ont contribué au racisme de nos sociétés modernes". "Une forêt de statues, des capitaines, commandants blancs et des êtres nus, vernissés de noir, des masques mortuaires".
Puis les salles rénovées et il va se coucher quasiment dans les pattes du king Kasai, un éléphant empaillé qui fut longtemps le symbole du Musée royal de l'Afrique centrale.
L'auteur va aussi nous parler de la famille de Boekhat, qui ont été parmi les colonisateurs du Congo, à l'époque de Léopold 2 mais aussi récemment avec un des descendants, qui a été mercenaire pour les entreprises minières belges.
L'auteur se questionne sur la colonisation, en se souvenant de ses lectures des Tintins, lors de son enfance : d'ailleurs Hergé a visité plusieurs fois ce musée pour ensuite écrire son fameux 'Tintin au Congo", sans jamais être allé en Afrique.
Ce texte nous questionne sur l'histoire des colonies et comment appréhender cette histoire.
A une époque où on déboulonne certaines statues, comment raconter ces histoires, ces conquêtes, l'exploitation de ces terres (qui perdurent d'ailleurs avec les mines qui sont exploitées par de grands groupes internationaux et où les conditions de travail sont ignobles). Que faut il faire des représentations de l'époque, les cacher, les flouer, les annoter ?
Christophe Boltanski essaie de comprendre, de raconter.
J'ai aimé passer cette nuit de questionnements, dans les sous sols, dans les couloirs, dans les salles de cet étrange musée, étrange car c'est un musée ethnographique (des masques, des statues) et d'histoire naturelle, avec des animaux empaillés. Christophe Boltanski nous parle aussi de personnages de l'époque et de ces aventuriers, dignes personnages du roman de Conrad (dont je vais profiter pour le relire)
Peut être que ce texte est moins personnel que les précédents, mais il donne un point de vue sensible, parfois drôle, de nos questionnements sur la colonisation, décolonisation et nos façons de ne pas oublier ces périodes et surtout comment les "raconter".

#kingkasaï #NetGalleyFrance
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La collection Ma nuit au musée est passionnante...
Après la nuit dans l'annexe d'Anne Frank avec Lola Lafon, j'ai passé la nuit dans l'Africa Museum à côté de Bruxelles avec M. Boltanski....
Incroyable atmosphère...

La description du musée et de ce qui l'entoure est Immersif.
Et le fait de retracer l'histoire du Congo Belge est très très intéressante.
Encore une fois, le désir de pouvoir, de réussite individuelle, de richesses est un moteur de l'inhumanité...
Le Congo n'appartenait pas à la Belgique mais carrément à son roi, Leopold II. J'ai mis du temps à réaliser ce que cela impliquait... Déjà être la colonie d'un pays ne s'est jamais passé de façon globalement positive pour les peuples concernés... Mais la ! Être la propriété d'un Roi : quelle horreur !

Ce livre m'a emportée, cultivée, impressionnée et c'est une belle réussite.
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L'écrivain Christophe Boltanski passe la nuit dans « l'Africa Museum » : au milieu des animaux empaillés, il songe à la colonisation, à Léopold II et à ses rêves chimériques …

J'aime beaucoup cette série qui a eu l'idée originale d'enfermer un auteur une nuit dans un musée. Les pages sur la mort de l'éléphant m'ont beaucoup touchée. Au fil des pages, surgissent des explorateurs ( Stanley), des écrivains (J. Conrad) …et bien sûr le Congo , tel qu'il est …ou tel qu'il est perçu , dans les albums de Tintin par exemple. Même si mes préférés restent ceux écrits par L. Slimani (« le parfum des fleurs la nuit ») et L. Lafon (« Quand tu écouteras cette chanson »), ce livre-là ne démérite pas !
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Dans le cadre de la collection Ma nuit au musée, l'auteur décide de passer la nuit à l'Africa Museum de Bruxelles à Tervuren.

J'ai donc découvert un musée, ou plutôt ce que l'auteur a bien voulu m'en dire.

J'ai trouvé que Christophe Boltanski s'est focalisé sur la lignée des Boekhat, grande famille belge qui compte quelques explorateurs dans ses rangs.

J'ai souri que l'auteur s'interroge sur le fait que l'entrée se fasse par le niveau -1. Un peu comme au Louvre, non ?

J'ai découvert les dioramas, et me suis rappelée certains mises en scène du Musée d'Histoire Naturelle de Londres ou de New-York.

J'ai été étonnée que l'auteur ne prévoit qu'une bouteille d'eau et pas de lampe de poche, et qu'il soit obligé de s'éclairer avec la lampe torche de son téléphone portable, ce qui réduit son exploration du musée.

J'ai aimé que le livre s'ouvre et se ferme sur Sambo, Zao, Ekia, Pemba, Kitoukwa, Mibange et Mpeia, les sept congolais du zoo de Tervuren, mort en Belgique.

L'image que je retiendrai :

Celle de l'éléphant à l'oeil triste qui donne son nom au livre.
Lien : https://alexmotamots.fr/king..
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C'est une bien jolie collection que celle qui nous est proposée par les éditions Stock. Dans "Ma Nuit au Musée" un auteur ou autrice nous fait découvrir un musée de son choix, musée dans lequel il ou elle passe une nuit, et tire de ses rêveries muséales un petit ouvrage.
C'est ainsi que, après Eric Chevillard à la Grande Galerie de l'Évolution ou Zoé Valdez au musée Thyssen-Bornemisza (entre autres), Christophe Boltanski se rend à l'Africa Museum de Tervueren (près de Bruxelles).
Anciennement Musée de l'Afrique, l'Africa Museum est, depuis son édification sous les ordres de Léopold II, souverain mégalomane et maitre d'oeuvre d'atrocités dans ce qui fut "son" Congo, le reflet de toute l'horreur de l'entreprise coloniale. Il est ici principalement question de la colonisation de l'immensité congolaise par le Roi des Belges (et ensuite l'état belge) mais ce que Boltanski raconte concerne l'ensemble de la colonisation, française, portugaise, espagnole, britannique. Partout où ils ont été, les colons ont pillé, détruit, violé, tué, au nom de la civilisation et de la science.
Les musées comme celui de Tervueren montre ce pillage et cette mentalité: exhiber les humains comme de vulgaires trophées, comme des animaux qui, comme le géant King Kasai (l'éléphant géant longtemps symbole du musée), a été tué, dépecé et puis rempaillé pour montrer au monde l'immensité de la civilisation occidentale, et sa puissance.
Ce livre ne laisse pas indifférent. Boltanski réussi en 150 pages à faire le lien entre les premières missions d'exploration de Stanley et l'exploitation actuelle des mines de cobalt ou autres minerais nécessaire à la "civilisation", et qui, comme les entreprises de caoutchouc du début du 20ème siècle, sèment misère et désolation, mort et exploitation.
Un livre à mettre dans toutes les mains, jeunes et moins jeunes pour de rendre compte des monstruosité de notre histoire.
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J'étais curieuse de lire cet opus de la série « La nuit au musée », ayant passé beaucoup d'heures de mon enfance dans le musée de Tervuren, récemment rebaptisé Africa Museum.
Le ton est différent des deux précédents tomes que j'avais lus (Bilal et Slimani)… Il me semble que le propos est plus étayé ici; nous ne sommes pas dans une sorte de rêve éveillé, de rêverie artistique, mais plutôt dans un cauchemar historique. L'auteur dénonce, il fait un réquisitoire à charge, dûment documenté de ce qui est à l'origine de ce musée : l'appropriation du Congo par Léopold II.
C'est glaçant mais passionnant.
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Pour tout dire, cet ouvrage m'a laissé sur ma faim. Peut-être parce que je visite régulièrement les lieux. J'aime beaucoup l'écriture de l'auteur. On sent une recherche bien menée sur les protagonistes. À l'écoute de quelques interviews, je m'attendais peut-être à en apprendre davantage sur les oeuvres d'art africain qui sont exposées. Merci d'avoir mis des noms sur les morts des zoos humains.
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Sur le bandeau de couverture, on retrouve une reproduction d'une peinture de l'excellent peintre congolais, Chéri Samba. À l'intérieur, c'est Christophe Boltanski qui s'en va passer une nuit au musée.

C'est à l'extérieur de l'Africa Museum que le voyage de l'écrivain français débute, là où se trouvent les tombes de Congolais morts pendant l'exposition universelle de 1897. « Pourquoi m'enfermer dans une salle obscure alors que la visite qui m'est proposée commence dans cette nécropole oubliée, envahie par les herbes folles et les roses trémières ? » 267 congolais sont venus et ont été exposés aux regards curieux de la foule. 7 d'entre eux sont morts.

C'est un voyage dans le passé colonial que va poursuivre l'auteur des vies de Jacob. D'abord musée du Congo Belge, puis Musée de l'Afrique Centrale, l'Africa Museum n'obtient que son nom actuel que récemment lors de sa première restauration en 2018. Jamais, il n'avait changé depuis son ouverture en 1910. Comment décoloniser un musée colonial ? Christophe Boltanski évoque le passé de la Belgique, un passé sombre et raciste qui fascine Hergé notamment. L'auteur de Tintin se rend plusieurs fois dans ce musée sans même se rendre au Congo pour créer ses aventures. L'auteur évoque la mémoire, l'histoire d'un pays à travers la création d'un musée voulu par le roi Léopold II afin de promouvoir sa collection de chasseur. Des espèces, il y en des centaines et c'est devant l'éléphant Kassaï que Bolanski « s'apprête à passer le reste de la nuit devant un éléphant qui a été tué pour le bénéfice et l'édification du genre humain, autant dire pour moi et mes semblables. »

C'est un essai remarquable sur l'Histoire. Cette histoire qui a longtemps été enterrée dans les profondeurs les plus obscures, dans des fosses communes. Avec ce livre, l'auteur français exhume le passé colonial de la Belgique pour donner à lire notre vision occidentale du Congo. Enquêteur hors-pair, conteur magnifique, Boltanski nous emmène dans le passé pour ne pas oublier les atrocités.
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