AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,55

sur 116 notes
5
7 avis
4
11 avis
3
12 avis
2
4 avis
1
0 avis
La Feuille Volante n° 1351 – Mai 2019.

Colette et les siennesDominique Bona – Grasset.

Ce livre est moins une biographie de Colette (1873-1954) comme Dominique Bona les affectionne, qu'une évocation de cette écrivain anticonformiste qui, à l'âge de 41 ans, d'août 1914 à 1916, alors que les hommes et particulièrement son cher mari, Henry de Jouvenel, sont au front, choisit, pour fuir la solitude, de s'entourer chez elle à Paris, à l'orée du Bois de Boulogne, de ses amies, la comédienne Marguerite Moreno (1871-1948), la journaliste Annie de Pène (1871-1918) et la danseuse de cabaret Musidora (1889-1957). L'auteure pourtant en profite pour revisiter la vie de ces quatre femmes, même au-delà de cette période, et particulièrement celle de Colette. Ce chalet parisien prend des allures de phalanstère et c'est pour elles un refuge, un univers. Ce sont des femmes au destin différent et pourtant commun tant elles étaient prédestinées à se rencontrer, qui ont une histoire personnelle mouvementée et pleine de secrets et ont, chacune à sa manière, déjà affirmé leur liberté et leur originalité par des choix personnels, même à une époque où les femmes étaient sous la tutelle des hommes. Cette liberté, à la fois amoureuse, sociale et artistique, elles l'ont payé cher plus tard par des revers de fortune et une grande solitude intime malgré leurs liens très forts et le silence qui faisait aussi partie de leurs échanges. Elles vivaient et étaient elles-mêmes dans ce microcosme en prenant bien soin de ne pas ressembler aux hommes et à tirer un trait qu'elles voulaient aussi définitif que possible sur leur vie d'avant comme en témoigne sans doute l'usage d'un pseudonyme. Scandaleuse, Colette l'avait été sur les scènes de music-hall ou de cabarets, comme elle l'a été ensuite dans ses choix matrimoniaux, ses amours saphiques et quasi incestueux ; elle se voulait indépendante dans ce chalet dédié aux femmes mais c'est un homme qu'elle attendait et qu'elle allait même rejoindre sur le front à Verdun, son mari Henry de Jouvenel. La guerre qui faisait rage obligea ces femmes à trouver des sources de revenu ce que chacune a fait, en se consacrant qui à l'écriture, qui au journalisme, qui au théâtre et au cinéma mais avec des fortunes diverses et à partir de 1916, le chalet ne sera plus pour chacune d'entre elles qu'un beau souvenir et le début d'une nouvelle vie faite de voyages, de liberté, d'aventures. La guerre a été une épreuve pour Colette qui retrouva Henry à la fin du conflit, mais cet homme volage lui échappait de plus en plus et, alors qu'elle aurait voulu lui appartenir et le garder pour elle, elle souhaitait en même temps une grande liberté pour elle-même. Elle craignait surtout la solitude, ce qui est paradoxale pour un écrivain qui en principe la cultive comme le terreau de l'écriture. Plus inattendu peut-être, pour faire échec à son isolement, elle alla même jusqu'à entretenir des relations amicales… avec les anciennes maîtresses successives de son mari ! Elle renoua avec les mondanités pour soutenir la carrière politique d'Henry et son appétit de vie l'a fait basculer dans des amours de contrebande que la morale bien souvent réprouva, surtout à cette époque. Colette connut des revers dans ces passades qu'elles auraient voulues pérennes, sa vie fut une longue recherche du bonheur émaillée de fuites, de passions, de ruptures, de trahisons, de renaissances, de divorces. A part Annie de Pène, fauchée par la grippe espagnole après la Grande Guerre, ces femmes, après cette parenthèse amicale commune, ont correspondu, se sont croisées, faisant en quelque sorte perdurer, malgré le temps, les liens tissés dans leur phalanstère. Colette reste un écrivain qui échappe aux étiquettes et ses romans se sont nourris de ses passions, de ses engagements personnels, de sa vie amoureuse par ce fameux effet miroir, cet aspect de l'écriture, à la fois prémonitoire et cathartique, cette alchimie mystérieuse et si profondément humaine qui font les bons auteurs.

De même qu'on ne s'improvise pas romancier, on n'écrit pas des biographies par hasard, surtout quand, on est un auteur de fiction du talent de Dominique Bona et il est sans doute dommage qu'elle ne se consacre plus au roman comme elle l'a fait au début de sa « carrière ». Dans son précédant ouvrage (« Mes vies secrètes ») elle a confié que le biographe s'efface volontairement derrière l'écrivain dont elle a choisi de parler, mais il m'a toujours semblé que, à travers un parcours qui n'est pas le sien, même si elle garde autour de sa personne un secret de bon aloi, elle évoquait, en creux, un peu de ses passions personnelles, de ses aspirations intimes. Cet ouvrage est évidemment fort bien écrit et passionnant comme elle en a habitué ses lecteurs et c'est devenu un lieu commun que de souligner autant la fluidité du style que la richesse et la précision documentaires, jusque dans le détail, d'une biographie écrite par l'académicienne. Elle est évidemment tenue par le déroulement des événements qu'elle évoque et qui rythment la vie des personnages qui sont l'objet de son étude mais elle ne se contente pas d'énoncer des faits, elle s'approprie la vie de ses sujets, tente de les comprendre, en excuse parfois les excès, en essayant de percer peut-être leurs secrets intimes mais elle respecte surtout ce que l'histoire ne révèle pas, en s'interdisant de fantasmer sur l'inconnu. Ici, elle nous fait partager l'univers de Colette, son amour de la liberté, son papier bleu, son encre couleur d'azur, ses mots profondément humains où les cinq sens sont sollicités qui nous transmettent son sourire, sa joie de vivre malgré les épreuves que la vie lui a envoyées.

©Hervé Gautier.http://hervegautier.e-monsite.com
Commenter  J’apprécie          140
Une très belle biographie de l'amitié entre 4 femmes le seul bémol, et il est de taille : quand on a lu les oeuvres de Colette on connaît déjà ces moments de sa vie. le plus, l'auteure puise dans les autobiographies des amies.
Un bon moment de lecture.
Commenter  J’apprécie          60
J'aime Colette, que je considère comme la plus grande écrivaine française. J'ai tous ses livres bien sûr (je crois, tous dans la vieille édition poche, que j'ai achetés chez un bouquiniste lorsque j'étais étudiante), j'ai plein de gros beaux livres sur Colette, et récemment j'ai lu les lettres de Sido à Colette, c'est ici sur mon blog, mais lorsque j'ai vu passer, ci dessous le lien :

chez christlbouquine ce livre, j'ai foncé ! Incroyable, ce livre m'avait échappé ! Alors voilà. Quelques jours plus tard, et lu d'un trait, avec avidité. Voici la présentation éditeur :

"Août 1914, il n'y a plus d'hommes à Paris. Les femmes s'organisent. Dans une jolie maison, à l'orée du bois de Boulogne, Colette, la romancière, la journaliste célèbre, fait venir ses amies les plus proches. Toutes appartiennent au monde de la littérature et du spectacle. Il y a Marguerite Moreno, la comédienne. Annie de Pène, la chroniqueuse et « presque soeur ». Musidora dite Musi, bientôt la première vamp du cinéma…
Ces quatre femmes libres s'inventent une vie tendre, pleine de rêves et de douceur : les cheveux courts et sans corsets, elles n'oublient pas le ciel de Paris où passent les dirigeables, ni leur travail, ni les hommes."

IMG_4351

Ce sont ces quatre-là. Colette, Annie de Pène, Marguerite Moreno et Musidora.

Ces femmes vont se retrouver, au début de la guerre 14/18 seules, sans mari, sans compagnons. Tous les hommes sont mobilisés. le mari de Colette a cette époque, Henri de Jouvenel, est envoyé à Verdun. Colette qui, comme on sait, n'a pas du tout la fibre maternelle, a envoyé sa fille d'un an, "Bel-Gazou"(Colette de Jouvenel, comme sa mère) en Corrèze dans la famille De Jouvenel. Annie de Pène, elle, a carrément fui son mari et ses enfants pour être libre, à Paris. Marguerite Moreno n'a pas encore de "régulier", Musidora est la muse de Pierre Loüys.

Elles sont les scandaleuses. Cheveux coupés à la garçonne bien avant que "La Garçonne" existe. Elles fument. Elles portent toutes un pseudo. Elles ne portent pas de corset, et ont toutes un métier. Colette et Annie sont journalistes, l'une au Matin, l'autre à l'Aurore. Marguerite et la très jeune Musidora sont comédiennes, Marguerite Moreno est même Sociétaire à La Comédie Française. Elles vont toutes vivre dans le XVIe arrondissement, et passer leurs journées chez Colette, dans son chalet de Passy, avec son jardin, chalet disparu depuis.

C'est l'histoire de leur amitié, fondée là dans ce "phalanstère". Où l'on verra qu'elles vivent pour leur liberté. Qu'elles s'écrivent, qu'elles passent des heures et des jours à discuter, rire, manger, et ranger. Puis chacune de partir qui en tournée, qui en reportage.

On y apprend bien des choses. Sa parenthèse saphique. Sa longue liaison avec la Duchesse Mathilde de Mornay, qui bravait la loi en s'habillant en homme, homme qu'elle se sentait être.

Où l'on comprend que Colette, bien avant Annie Ernaux, est la pionnière et la plus prolifique des écrivaines d'autofiction.

Où l'on apprend que Colette s'est fait faire un lifting... en 1921 ! Et des tas d'autres secrets. Une merveille de lecture pour les passionnés, comme moi, de Colette.

Colette et les siennes - Dominique Bona, editions Grasset, 2017, 410 pages + énorme bibliographie.


Lien : https://melieetleslivres.wor..
Commenter  J’apprécie          52
Lecture mitigée de cet essai biographique où l'auteur adopte parfois un ton romanesque mêlant à la vérité et à la réalité interprétations et extrapolations.
Colette et ses trois amies ressuscitent sous nos yeux. Nous découvrons ce "gynécée" et les conditions de vie d'une époque dramatique (14-18).
Le style heurte parfois : "La silhouette "un peu trapue, dodue", sans encore de graisse indésirable..." (p.56)
Quelques élans lyriques et quelques effets un peu trop faciles émaillent le texte.
La rigueur manque :
p.133 - rue Cortambert où l'on aperçoit le "Fanal bleu", n'était-ce pas plus tard au Palais-Royal?
p.149 - 1914 - Liane de Pougy se prépare à entrer dans les ordres. Relire ou lire "Mes Cahiers bleus".
p.163 - le délicat poète de la "Chanson d'Eve", Charles van Lerberghe est rebaptisé Charles Lesberthe!
p.303 - 14-18 : Willy a perdu son fils (mort en 1975)
p.402 - Plage de la Toussais (Plage de la Touesse)
...
J'arrête, il y en a d'autres.

Voilà pourquoi ma lecture fut mitigée en contrariant mon souci de l'exactitude.
Comme lorsque cette phrase "La mort ne m'intéresse pas, la mienne non plus" (La Naissance du jour-Colette) devient en dernière page de "Colette et les siennes" - Dominique Bona : "La mort ne m'intéresse pas, et surtout pas la mienne".
Commenter  J’apprécie          50
Quatre femmes se retrouvent en ce chaud mois d'août 1914 dans un chalet de Passy, propriété de Henry de Jouvenel. Il y a Colette, l'hôte des lieux, et ses trois plus chères amies, la journaliste Annie de Pène – sa presque soeur en littérature – , la comédienne Marguerite Moreno et la jeune artiste Musidora. Quelle est leur vie à l'aube de la grande guerre qui les prive de leurs maris ou amants ? Que vont-elles devenir au fil des mois quand les théâtres vont être désertés ainsi que les salles de spectacle, quand la pénurie de papier va peser sur les tirages des journaux. Elles n'ont pas de fortune personnelle et vont devoir se débrouiller comme tant d'autres femmes dans un monde brusquement privés d'hommes.
L'enquête de Dominique Bona est passionnante. Tout d'abord parce qu'elle connaît bien l'oeuvre de Colette et qu'elle peut nous éclairer sur les nombreux allers-retours entre la vie de l'écrivain, intime comme sociale, et son travail de création littéraire, l'oeuvre se nourrissant des expériences vécues mais les livres annonçant aussi les étapes tumultueuses d'une existence bien remplie. L'autre attrait du livre de Dominique Bona est de nous retracer le destin de quatre femmes exceptionnelles en leur temps et qui ont incarné la modernité avant de représenter le féminisme à venir. Ces femmes étaient liées par une amitié indéfectible où la jalousie n'a jamais eu sa place.
Il faut lire ce livre pour savoir ce que nous devons à ces pionnières qui ont arpenté avant bien d'autres les chemins de la littérature, de la presse, du théâtre et du cinéma. Rien que cela ? Tout cela, pour notre plus grand bonheur.
Commenter  J’apprécie          40
Le livre débute avec le commencement de la Première Guerre mondiale, et le rassemblement de Colette et de ses amies - Annie de Pène, Marguertie Moreno, Musidora - dans son petit chalet parisien. On découvre alors la vie de ces jeunes femmes, toutes artistes des mots ou du corps, qui ont pour la plupart déjà la quarantaine, un métier, un mari, des enfants. Contestées souvent, par leur audace ou leur volonté d'émancipation, elles ne sont pas pour autant des féministes chevronnées - bien au contraire - mais elles tendent à chercher leur place dans un monde masculin.

L'auteure s'attarde donc sur la vie en temps de guerre pour des femmes esseulées qui, bien que savourant une certaine forme de liberté, se rendent compte de la difficulté de vivre dans un monde dépeuplé de ceux qui en avaient les ficelles. Au début, la légèreté, puis la pauvreté, les ruptures de stock, la peur, les couvre-feu, le manque de travail pour les artistes. Et ensuite, les premières victimes de la guerre dont il faut s'occuper, les premiers reportages de guerre - dont Annie de Pène sera la première femme à l'oser -, la peur que la guerre n'en finisse pas.

Et, pour apporter également une note plus légère et découvrir un peu plus la vie de ces femmes, nous entrons un peu dans leur intimité, leur vie privée et amoureuse, jalonnée de déceptions, d'ennui, d'abandon, mais aussi de délices et de volupté, de chaleur féminine, de moeurs plus légères. On y voit le soutien sans faille que les femmes savent s'apporter, en amour comme en amitié, et l'importance de pouvoir être soi dans un monde qui cloisonne, voire emprisonne, de façon subtile ou carrément outrancière, ces femmes vues comme des enfants, voire des objets.

Enfin, une grande partie du livre s'attarde sur la vie professionnelle de ces femmes qui sont sorties du foyer pour endosser des rôles auparavant occupés par des hommes, dans la rédaction des journaux, dans la publications de romans, mais aussi pour poser un pied sur scène, dans le théâtre ou le cinéma, que ce soit devant ou derrière la caméra - le courage et la volonté de Musidora, ses apparitions et son oeuvre personnelle ont de quoi faire rêver, un premier temps.

Dominique Bona retrace donc des parcours de femmes, dans tout ce que ça peut impliquer comme difficultés, petits bonheurs, réussite méritée et complicité, avec la volonté d'en faire un tour assez complet. le récit d'une époque, d'un milieu, d'une société aujourd'hui révolues, qui nous rappellera à quel point il y a encore de quoi se battre, s'offusquer, mais aussi se réjouir de ce qu'enfin les femmes ont pu commencer à s'émanciper et à devenir ce qu'elles souhaitaient, dans la joie ou la misère, coûte que coûte, et tant pis pour les mauvaises langues - sans aller jusqu'à parler de féminisme, toutefois, dont le concept pouvait faire crisser les dents de ces dernières. Pour ma part, j'ai eu du mal à rentrer totalement dans le récit, et je ne saurais pas trop dire pourquoi - soit parce qu'à vouloir recouvrir tous les thèmes ils ne sont donc que survolés, soit parce que je n'accroche pas bien avec les biographies qui s'attardent trop sur la vie privée, soit parce que ce monde est trop éloigné de moi, soit encore parce que je ne voue pas un culte à Colette. Beaucoup de détails, de descriptions, qui tendent à toucher la corde sensible mais qui ne disent pas grand chose. L'écriture ne m'a pas transcendée, mais je me suis quand même laissée attrapée, par le parfum des fleurs ou l'envie de découvrir des figures de femmes qui ont marqué leur temps.
Lien : http://lecombatoculaire.blog..
Commenter  J’apprécie          40
2023 marque le 150ème anniversaire de l'écrivaine et journaliste Colette. L'occasion idéale d'honorer la production littéraire d'une anticonformiste du XXe siècle qui a considérablement marqué son époque. Bisexuelle affirmée, elle a activement participé à l'émancipation des femmes. C'est ce qu'analyse Dominique Bona, de l'Académie française, dans « Colette et les siennes ».

Été 1914, la plupart des hommes sont partis à la guerre. A Paris, il ne reste que les trop vieux ou trop jeunes… et les femmes qui sont désorientées. le 25 août paraît un article dans le journal « le Matin », dans lequel Colette défend le rôle des femmes patriotes comme l'ensemble de la population française. Mais la guerre est un ennemi en soi, car elle menace le bonheur et la vie quotidienne…

Ayant peur de revivre la situation du siège de Paris de 1870 et la famine qui s'ensuivit, beaucoup de femmes quittent la capitale. Colette, elle, se réfugie avec ses meilleures amies dans un chalet situé dans le XVIe arrondissement, près du Bois de Boulogne. le chalet sera une sorte de cocon de bonheur au milieu de la guerre.

Ses amies appartiennent au monde marginal de la littérature : Annie de Penne, journaliste très appréciée dans la presse de l'époque et également romancière, sans doute la plus proche de Colette; Marguerite Moreno, comédienne, à la Comédie française ; Musidora (dite Musi) à l'âge d'être la fille des trois autres. Comédienne, elle deviendra célèbre en 1915 au cinéma.

Même si l'angoisse est présente, ayant toutes un homme sur le front, les quatre amies ont décidé de continuer à vivre. Elles le prouvent dans leurs occupations, les rêves, les plaisanteries, les chansons, la difficile continuité de leur vie professionnelle ou même leur vie quotidienne (courses, ménage, repas, etc.)

Atypique pour son époque, Colette s'impose déjà comme une 'femme libérée' : divorcée, remariée, portant les cheveux courts et pas de corset. Elle représente une pionnière des droits des femmes.

Pourtant, ce livre est moins une biographie de Colette qu'une ode à cette amitié si singulière entre quatre femmes anticonformistes.

Ces drôles de dames émancipées, en cocooning dans un vieux chalet à Passy, vont devoir, le temps d'une guerre, s'éloigner des frivolités et joyeusetés habituelles.

Le choix de Dominique Bona est donc de nous présenter Colette, femme de lettres et artiste à la réputation sulfureuse, à travers les rapports étroits qu'elle entretint durant la première guerre mondiale avec 3 femmes : Marguerite Moreno, Annie de Pène et Jeanne Roques dite Musidora.

Ce parti pris de biographies croisées est intelligent – même s'il en résulte quelques répétitions – qui aboutit à quatre très beaux portraits de femmes aux avant-postes de la modernité et aux destins très peu conventionnels que lient leur intimité, leurs tempéraments et le goût de leur indépendance. Leurs vies de saltimbanques et d'artistes, entre cabaret et music-hall, journalisme et écriture, danse, théâtre et cinéma, pimentent la lecture.

En 1914, les hommes viennent de partir au front. Elles, restent et continuent de livrer combat sur un terrain social, professionnel, familial et artistique. Cela donne lieu à de nombreuses anecdotes, d'extraits de correspondances des amies entre elles mais aussi de connaissances – amis ou ennemis – de Colette. Cela permet de redécouvrir l'auteure sous un nouveau jour et sous différentes facettes mais toujours avec ses mots d'esprit et le regard si particulier qu'elle porte sur la vie. On fait par la même occasion connaissance de trois autres femmes passionnées et passionnantes avec cette impression de faire partie - pour quelques instants - de leur société.

Un récit instructif, intéressant et accessible malgré certaines répétitions. Un livre passionnant, qui donne envie de se plonger dans l'oeuvre de Colette…et de visionner les films de Musidora !
Lien : https://www.instagram.com/p/..
Commenter  J’apprécie          30
Une découverte que ce style de biographie, en effet le lecteur découvre à la fois une époque, celle de la première guerre mondiale, et de son actualité avec la vision de 4 femmes au destin et à l'histoire familliale particuliers; dans la bulle privée qu'elles se sont crées avec et autour de Colette de cette époque sanglante et spécifique.

Dominique Bonna nous plonge dans les hésitations, les peurs, les paris, joies et déceptions de ces féministes de l'époque et bien évidemment les relations si particulières qui se nouent autour de Colette. Comment et pourquoi la société qu'elles côtoient dans une période chahutée et encore très patriarcale et conservatrice va - t'- elle s'en accommoder ? Entre puritanisme, conservatisme mais à l'aube d'un nouveau monde, cette cellule matriarcale, fraternelle et d'intérêt comme de résistance à un monde viril, va y puiser un nouvel essor et un certain assouvissement à la passion de chacune. C'est l'enjeu et la trame de ce récit.

Intéressante lecture, parfois un peu trop de détails, mais diablement actuelle.
Lien : http://passiondelecteur.over..
Commenter  J’apprécie          30
Colette et les siennes est une biographie publiée en 2017 chez les éditions Grasset. Écrite par Dominique Bona, le récit s'attache surtout à décrire la vie de l'autrice à partir de la première guerre mondiale en 1914 et jusqu'à sa mort en 1954.

Comme son titre le laisse entendre, Dominique Bona en plus de décrire une Colette qui est au coeur de l'ouvrage, va évoquer sa cohabitation avec trois de ses proches amies. Les hommes étant tous partis faire la guerre, elles se regroupent dans un chalet aux abords du Bois de Boulogne. Toutes sont des artistes et des intellectuelles. Annie de Pène est écrivaine et journaliste. Marguerite Moreno est comédienne et actrice. Musidora – la plus jeune – est actrice, réalisatrice et muse pour toute une génération de surréalistes.

Colette et les siennes font souvent scandale. Elles sont en avance sur leur temps, adoptent la coupe « à la garçonne » bien avant que celle-ci soit à la mode, vivent comme elles l'entendent – tout en se défendant d'être féministes ! À l'époque des premières manifestations pour les droits des femmes afin d'obtenir le droit de vote, elles assument leur besoin d'être gouvernées par un homme. Elles sont libres. Et amoureuses.

La bisexualité de Colette est abordée ainsi que l'amour sans limite dont son capables – selon elle – les femmes. Elles comblent son besoin éperdu d'être aimée et sa peur de la solitude. Colette a eu de nombreuses relations avec des femmes et notamment Mathilde de Morny avec qui elle a choqué nombre de ses contemporains. Puis elle rencontre Henry de Jouvenel, qu'elle épouse peu avant la guerre où il sera envoyé. Elle le rejoindra en secret à Verdun avant d'être reconduite manu militari à la gare. Les compagnes des soldats sont interdites, accusées d' »amollir » le courage des troupes.

Le contexte de Paris durant la guerre est passionnant et est l'occasion de parler de ces femmes qui sont restées dans la capitale et qui s'en sortent tant bien que mal dans un quotidien fait de « débrouillardises ». Leur vie d'avant-guerre n'est plus, elles doivent s'adapter et trouver d'autres moyens pour gagner de l'argent, trouver de la nourriture, l'accommoder, etc. Et toujours s'entraider, continuer à vivre en épicuriennes qu'elles ont toujours été.

Colette continue de se produire au music-hall, vit de sa plume en tant que journaliste et bien sûr grâce à ses romans. Pour ces derniers, elle s'inspire de sa vie, de ses expériences et de ses amours. Ses personnages sont bien souvent des prolongations d'elle-même, ses récits sont emprunts de son vécu et parfois même annonciateurs de ce qui va se passer dans sa vie. Ainsi, Mitsou (1919) est une star du music-hall qui reprend goût à la vie grâce à l'amour d'un homme, situation que connaît bien Colette. Chéri (1920) décrit la relation d'un jeune homme avec une femme plus âgée et fait écho à sa relation nouvelle avec Bertrand, le fils aîné d'Henry de Jouvenel. Elle va d'ailleurs s'inspirer du récit de l'amour d'enfance de son jeune amant pour l'écriture du Blé en herbe en 1923.

La biographie est alimentée de nombreuses anecdotes, d'extraits de correspondances des amies entre elles mais aussi de connaissances – amis ou ennemis – de Colette. Cela nous permet de redécouvrir l'auteure sous un nouveau jour et sous différentes facettes mais toujours avec ses mots d'esprit et le regard si particulier qu'elle porte sur la vie. Nous faisons par la même occasion connaissance de trois autres femmes passionnées et passionnantes avec cette impression de faire partie pour quelques instants de leur société.
Lien : http://ivredelivres.com/coll..
Commenter  J’apprécie          31
Dominique Bona n'écrit pas une biographie complète de Colette mais a choisi un de commencer l'histoire à un moment bien précis dans la vie de l'écrivain et de s'intéresser à l'amitié qui la lie à quatre femmes d'exception.

Nous sommes en 1914, les hommes sont à la guerre et Colette vit près du bois de Boulogne où elle se retrouve avec trois de ses amies proches.

Il y a là Musidora et Marguerite Moreno, comédiennes, Annie de Pène, journaliste et romancière comme Colette. Un quatuor de femmes libres, fortes, sachant s'imposer dans un monde encore dirigé par les hommes.

Dominique Bona s'attache à raconter leur histoire, leurs relations, leurs combats, leurs douleurs et leurs bonheurs dans un livre érudit et passionnant à lire.

Si je savais déjà beaucoup de choses sur Colette qui est une auteure que j'aime beaucoup, j'en savais peu sur Musidora et Marguerite Moreno et encore moins sur Annie de Pène, le presque double de Colette, que j'ai à présent très envie de mieux connaître.

Dominique Bona dresse quatre portraits de femmes modernes dont l'amitié reste sans faille malgré les éloignements, les changements dans leurs vies, les épreuves.

C'est vivant, habité par ces quatre personnalités à la fois anticonformistes (elles ont jeté leurs corsets aux orties, portent des pantalons, divorcent, ont des amants et des maîtresses, font des métiers d'hommes) et porteuses de tous les combats des femmes.

Dominique Bona les fait revivre dans leur intimité, avec beaucoup de détails passionnants que j'ai pris beaucoup de plaisir à découvrir.
Commenter  J’apprécie          20




Lecteurs (312) Voir plus



Quiz Voir plus

Les écrivains et le suicide

En 1941, cette immense écrivaine, pensant devenir folle, va se jeter dans une rivière les poches pleine de pierres. Avant de mourir, elle écrit à son mari une lettre où elle dit prendre la meilleure décision qui soit.

Virginia Woolf
Marguerite Duras
Sylvia Plath
Victoria Ocampo

8 questions
1726 lecteurs ont répondu
Thèmes : suicide , biographie , littératureCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..