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EAN : 9782380822519
165 pages
Anne Carrière (13/05/2022)
4.15/5   30 notes
Résumé :
Rosy a 90 ans mais ne s’en souvient pas. D’ailleurs, depuis quelque temps, elle en a 62. La mémoire en naufrage, elle ne peut plus se raconter. Alors c’est sa fille qui prend la parole. Pour la retrouver, fixer des instants de vie, évoquer la relation fusionnelle qui les lie, l’inversion progressive des rôles et ce qu’il reste d’humour et d’amour, malgré la réalité brutale de l’effacement de soi.
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Critiques, Analyses et Avis (26) Voir plus Ajouter une critique
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Je referme ce livre. Je suis quelque part ailleurs, ému.

Thael Boost raconte sa maman et se raconte à travers elle. Au fil des pages, elles ne font qu'une, et à la fois, chacune reste unique, chacune reste femme.

C'est l'histoire d'une maladie qui fait perdre le fil à Rosy. C'est l'histoire de Thael qui, jour après jour, tente d'empêcher l'écheveau de la mémoire de se défiler. C'est un combat perdu d'avance, une victoire de tous les instants. C'est une histoire bête à en pleurer, racontée avec une pudeur immense, une vérité éclatante.

Délicat, tendre et lucide mais véritablement tonitruant, ce roman n'emprunte pas les routes toutes tracées de la facilité que pourrait invoquer son sujet, mais bel et bien celui des chemins de traverse de nos existences, entre sourire et larmes. Cri d'amour immense où chaque chapitre raconte un présent qui fait écho au passé, à cette mère imparfaite et oh combien aimée.

Ici, chaque mot est pesé, posé avec fracas et avec une infime délicatesse. On lit, on rit, on vit cette relation mère-fille. C'est un roman sur l'inconscience folle de ces années qui creusent des rides dans nos coeurs abimés et qui transforment les petites filles en mère. C'est un roman comme une confidence, à la fois universel et terriblement intime. Et finalement, c'est peut-être plus qu'un roman pour moi, puisqu'il s'est passé quelque chose de fort à sa lecture. Comme une rencontre.

Ce roman, ce sont des mots qui existent, pour toujours, afin de faire la nique à ce putain de temps qui passe.

Certainement plus qu'un hommage, un cri murmuré à plein poumons. Quelque chose qui vient du ventre et qui soulage un peu face à cette injustice que peut parfois être la vieillesse.

Lisez-le. Oui, lisez-le fort.

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« Tu as compris qu'après la mort soudaine de Papa, la solitude, les deux cancers, tu allais te faire manger le cerveau et assister vivante et impuissante au banquet au cours duquel tu seras le plat principal ».

Dans La mère à côté, Thael Boost nous fait une petite place à table, dans ce banquet aux invités multiples mais vécu à deux avec Rosy sa mère. 90 ans pour le monde administratif, mais la soixantaine pour elle depuis que les petits hommes en bleu ont décidé de mettre à mal son cerveau en cessant de l'ordonner correctement.

« Les rôles ne sont plus les bons. La pièce se joue toujours, mais les costumes ont changé ». Alors pour supporter la dérive vers le côté de cette mère fusionnelle, la fille arrivée sur le tard se tourne vers le passé pour bousculer un temps présent dont la fluidité est vacillante.

À l'unisson de ce qui se passe dans la tête de sa Mum, Thael Boost mélange alors souvenirs d'enfance et tranches de vie du présent ; petits instantanés de bonheur partagé, fragiles mais précieux ; aphorismes cinglants qui déclenchent un sourire, sursauts d'un esprit toujours aussi libre et cash qu'il le fut tout au long d'une vie atypique ; réflexions sur la place d'un âge que nous ne voulons pas voir tel qu'il s'impose à nous.

Mais le souci de la relation fusionnelle, c'est qu'elle est souvent difficilement partageable et compréhensible par autrui, en tout cas à même valeur d'intensité. Sans que cela me gêne, je me suis ainsi retrouvé plus souvent spectateur que convive de ce livre où l'émotion et l'humanité affleurent à chaque page.

Et à celles et ceux qui craindraient l'excès de pathos, sachez qu'il n'en est rien. L'auteure évite habilement le piège, zappant rapidement vers de joyeuses fulgurances quand le ton devient trop grave et sachant convoquer Dory de Nemo ou la publicité de Garbit pour l'alléger à point nommé.

Et puisqu'il faut conclure, laissons à Thael le soin de le faire : « On ne quitte jamais l'enfance. On s'en persuade pour se donner une autre contenance. Quand l'âge a décidé de nous rattraper, on y retourne bien vite. Parce qu'au final, que reste-t-il, à part l'amour, la littérature et le vin ? ». Et un peu Rouen aussi, non ?
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Voyage où la conscience n'est plus ou si peu, entre deux eaux, deux portes, deux mondes, « La mère à côté » côtoie la vie de celle qui s'absente tenue d'un fil par celle qui reste. Thael maintient les pièces qui une à une s'échappent, colle et colmate, face à la plaie d'un mal gourmand. Il prend ce traître, ce mal irrévocable, et vide la substance. La mémoire s'efface laissant les mots se briser sans suite, sans entendement, la carcasse se plier. Elle ignore où se poser, comment, pourquoi. L'esprit tricote.
Bouleversant témoignage de l'amour que l'on porte à sa mère, du temps qui grignote, des souvenirs que l'on contient pour que rien ne s'échappe alors que tout se délite, ce texte tisse le quotidien de la vieillesse et de celle qui l'entoure et l'accepte au-delà de son propre chagrin.
J'ai été profondément émue par le livre de Thael Boost qui, sans fard, écrit la vie comme on l'occulte : ces « vieux » à la tête perdue, ces corps déloyaux avec lesquels il faut composer. A travers les souvenirs, elle trace l'histoire universelle de l'âge, de la maladie et des sentiments. Une histoire d'amour incommensurable collée à la béance d'une cicatrice. Les mots font mal, le chagrin se dessine.
Thael Boost tient un compte instagram où chaque aventure de Rosy, âgée de plus de 90 ans et nommée #têtedemum, est croquée. La vraie vie s'y écoule entre la course aux chaussures et les mots qui se mixent. Véritables instantanés, les posts rendent hommage à celle qui reste une femme de caractère malgré la douloureuse progression de celui qu'on appelle Alzheimer. A lire !
Une lecture « coup de coeur »



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La narratrice à travers ce premier roman autobiographique, évoque les mémoires : celle de sa mère Rosy âgée de 90 ans, dont la mémoire s'efface peu à peu, atteinte de la maladie d'Alzheimer, mais également la sienne en tant que fille de Rosy, de sa jeunesse auprès de celle-ci, mais également de sa relation actuelle face à une femme qui navigue dans un entre-deux où les mots se mélangent comme les souvenirs, les personnes, les noms, les époques.

Dans ce premier ouvrage, l'autrice aborde avec sensibilité et l'humour nécessaire pour éviter le pathétique, la relation difficile entre une mère qui devient une enfant celle-ci devenant l'ancre qui maintient le navire familial à flot, détentrice du passé oublié, des questions restées à jamais sans réponses, du fil ténu qui relie encore l'une à l'autre.

En de courts chapitres, au fur et à mesure des visites à l'Ehpad, elle mêle présent et passé afin de dresser le portrait d'une mère qui n'existe plus en tant que telle, qu'elle ne reconnaît plus, qui ne la reconnait de moins en moins, d'une mère qui s'efface peu à peu du monde pour s'enfoncer dans un autre monde où le passé est plus souvent le présent et où le futur ne sera qu'absence.

C'est un très bel hommage, un joli portrait de femme et de mère que Thael Boost rend à celle qui, bravant les avis, lui a donné vie sur le tard, mais également affronté l'hostilité d'après guerre vis-à-vis de ses origines germaniques, une femme au caractère déterminé qui lui révèle ses ultimes pensées lucides, parfois confuses, incomplètes ou déformées, sur son existence.

Ce n'est jamais totalement triste car Thael Boost a su trouver le dosage précis pour éviter tout ce qui pourrait sombrer dans ce que la maladie a de plus sordide sans pour autant le masquer mais en faire un témoignage lucide et touchant, rendant visage et corps à une femme, une mère, qui n'est plus que l'ombre de ce qu'elle a été.

Lecture dans le cadre de la Masse Critique Babelio que je remercie ainsi que les Editions Anne Carrière


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Avec Thael, je ne partage pas seulement des secrets pour un teint parfait. Pas de faux-semblants, oui, j'ai aussi partagé spritz et champagne avec l'autrice. Mais, je partage surtout un lien fort aux femmes qui m'entourent. Et elles sont nombreuses. J'ai même parfois eu l'impression de grandir au milieu d'un gynécée. C'est une des raisons qui a fait que j'ai tardé à lire La mère à côté. Si le sujet est intime pour Thael, il l'est aussi pour moi, à un degré de différence. Alors, ma mère l'a lu d'abord. Tout est toujours histoire de transmission. Elle l'a aimé, beaucoup. Elle s'est retrouvée dans cette histoire, énormément. Et c'était donc à mon tour.

Thael et Rosy. Mère et fille, fille et mère. Quand Alzheimer se pointe, tout se confond, les liens s'emmêlent, les mots se brouillent, les prénoms se font la malle. L'histoire, on la connaît tous. Ce qu'on connaît moins, ce qu'on lit moins, c'est le rapport à la féminité. Au féminin qui est effacé. Pour ne devenir qu'un corps machine qui se doit d'être fonctionnel. Quitte à nier la femme à côté. Il n'est plus tellement question de mère et de fille, mais de femmes entre elles. Dans un univers, celui de la grande vieillesse, où les hommes ne sont pas nombreux (mais encore au coeur des préoccupations).

Pour retrouver la femme, Rosy jeune est de tous les chapitres. Une mère pas comme les autres, parisienne, allemande, anticonformiste, entêtée. Une femme, mère de deux filles. Avec tout ce que cela dit. Et tout ce qui ne se dit pas. Chaque chapitre nous fait passer d'une Rosy à une autre, la construction du récit en flashback donnant l'impression que rien n'est perdu, que la vieillesse ne prendra pas tout. Qu'elle ne prendra pas non plus le souvenir de l'homme aimé, dont elle garde précieusement les lettres.

C'est un récit très intime, trop par instants, peut-être. Mais puisque j'y reconnais ma mère et ma grand-mère, mes soeurs et moi, il est tout autant universel. Réticente, j'ai finalement été émue. Par Rosy, cette femme qui a presque traversé un siècle, par sa fille qui la raconte, par ce lien fusionnel, par mes propres souvenirs. L'éclat secret ne se niche pas toujours au fond d'un tube d'Erborian.
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Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
Incipit :
Je déteste le mercredi.
Tu nous emmènes faire du shopping et je sais que cela va être long et ennuyeux. Je vois bien l’excitation dans vos regards, à ma sœur et toi. Votre fébrilité. Lécher les vitrines. Quelle est cette expression ? Je colle ma langue sur le verre pour voir quel goût ça a, tu m’ordonnes d’arrêter immédiatement, c’est sale, les chiens pissent dessus. J’ai beaucoup de mal à parler votre langage. J’essaie, pourtant, mais vous ne m’aidez pas vraiment. Vous vous arrêtez devant une boutique et, le temps que je comprenne ce qui peut attirer votre attention, vous êtes déjà reparties. Je suis en décalage horaire constant.
Je vous ai perdues. Résignée, je vous attends. Près d’un manège, la jeune vendeuse m’offre une glace pour me consoler. Je suis au paradis ! Elle est jolie, me sourit et me rassure. Lorsque vous me retrouvez, vous ne me reprochez rien. Je ne sais pas laquelle d’entre nous a eu le plus peur. Nous partons toutes les trois boire un coup pour nous remettre de nos émotions. Seul cet instant du mercredi me réjouit. Tu prends une bière pression, ça ne se fait pas tellement pour une femme, une mère de famille. Les autres clients nous regardent avec un air pincé. Moi, je suis fière de cette maman différente, farfelue. Tu termines toujours une journée shopping par une terrasse qui me réconcilie avec toi, tu sais y faire.
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Sans le savoir, en devenant mère, en apprenant les gestes, en apprenant l’attention, en apprenant l’amour, j’ai aussi appris à devenir la mère de ma mère. Et même si l’idée de te perdre est insupportable, je m’y prépare. Et même si l’idée m’empêche de dormir, elle m’aide aussi à jouir de tous ces instants précieux avec toi, dans l’urgence de vivre.
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Aujourd’hui, nous n’allons plus faire de shopping et boire un verre en terrasse. C’est moi qui te surveille quand tu sors pour ne pas avoir à te retrouver près d’un manège, c’est moi qui t’offre des glaces. Tu t’accroches autant que tu peux. Chaque jour, les souvenirs se délitent, un nom que tu ne connais plus, un objet sont tu ne comprends plus l’usage. Hier, l’extincteur est devenu rouge, sa fonction a disparu, simple objet réduit à sa couleur. Aujourd’hui c’est le jus qui est devenu de tomate, de citron, rose ; tu tournes autour de l’orange, insaisissable, elle n’est plus à sa place.
J’observe cette version inversée de l’enfance où chaque jour est une découverte, devenue négatif de tout ce que la mémoire refuse de livrer.
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On ne quitte jamais l’enfance. On s’en persuade pour se donner une certaine contenance. Quand l’âge a décidé de nous rattraper, on y retourne bien vite. Parce que au final, que reste-t-il, à part l’amour, la littérature et le vin ?
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L'enfance et le grand âge constituent les deux faces d'une même pièce. Le regard que tu poses sur la vie, tes yeux emplis de questions tournés vers moi comme si je détenais toutes les réponses, ce sont les mêmes que ceux que je levais vers toi, enfant.
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