Comme dans son roman précédent,
Olivier Bourdeaut manie avec talent l'ironie et la tendresse. Il sait créer des univers particuliers dans lesquels on éprouve à la fois de l'empathie et un certain agacement envers ces personnages.
Le roman se déroule en Loire-Atlantique où Michel, agent immobilier prospère, passe des vacances dans un luxueux hôtel. Un matin, après une nuit très alcoolisée, il se réveille aux abords d'un marais salant, sur un des « mulons » de Jean, paludier de son état. Cette première rencontre est explosive : Jean constate que le « type avait pissé sur son gros sel. Ce gros porc avait pissé sur son travail ». le moins qu'on puisse dire est que la réaction est à la hauteur de l'outrage et que Michel rentrera à son hôtel en mauvais état.
Jean et Michel vont néanmoins tenter de faire connaissance sur des modalités plus sereines et, après des excuses de part et d'autres, se retrouver autour d'un repas. On suit avec surprise – et quelques craintes aussi, compte-tenu des deux premières pages du roman – et intérêt la relation des deux hommes dont les trajectoires et personnalités sont vraiment originales et on sourit souvent de l'excès dont ils font preuve tant dans leurs beuveries que dans leurs échanges. C'est explosif, la conversation menace de dégénérer à tout moment, la confrontation est drôle mais sauvage. Involontairement, ou pas, ce qu'ils représentent agresse l'autre, le remet en question, le fragilise.
Le lecteur est donc tendu de la première à la dernière page, la construction du roman s'y prête. On ne sait pas où nous emmène l'auteur mais on se laisse volontiers embarquer, on a envie que ces deux-là fraternisent, dépassent leurs apparentes différences. C'est un roman original, qui ne peut laisser indifférent. Bourdeaut est pour moi un auteur à suivre, qui sort des sentiers battus, tant par ses intrigues que par son style.