C'est la faute a Camilleri.
Le Camilleri d'Agrigente, oui, qui dans sa biographie de Pirandello trouve le moyen de rappeler plein d'autres auteurs siciliens, meme ceux qui ont eu l'impolitesse, l'impertinence de naitre a Catane!
J'en connaissais quelques uns, le grand Verga, le courageux Sciascia, mais Brancati? Vitaliano Brancati? Et Capuana? Luigi Capuana?
Titille aux entournures, je n'ai connu de paix qu'une fois la main mise sur ce Don Juan en Sicile, le premier que j'ai trouve.
Il y est question d'un certain Giovanni (l'editeur francais n'aurait pas mieux fait de titrer: Don Giovanni en Sicile, comme en italien?), un jeune homme de Catane qui se vautre dans une beate inaction. Une visite au magasin tenu par son oncle le matin (le travail), une sieste de quelques bonnes heures (le repos du guerrier), une soiree entre amis a guetter les filles (le recueillement dans la contemplation). Guetter sans jamais les aborder, sans jamais les atteindre. Se morfondre d'amour pour toutes et chacune d'elles. Jusqu'au jour ou la plus belle, la plus piquante, s'entiche de lui, le seduit (le viole platoniquement), le traine a l'eglise puis jusqu'a Milan, ou elle l'arrache a son apathie et en fait un travailleur applique. Mais un beau jour elle decide de revenir a Catane pour des vacances. Et la, j'arrete le spoiler...
C'est une satire ou Brancati ridiculise une certaine virilite sicilienne. Une virilite grotesque et en fin de compte illusoire. Et ca marche. J'ai souvent souri. J'ai ri. Sciascia a ecrit quelque part que le fascisme et l'erotisme sont en son pays tragedie, mais que Brancati avait reussi a inclure dans des manifestations comiques meme les situations tragiques. Sciascia a surement raison.
Je conclus. La premiere moitie de ce petit livre est une piece d'anthologie. Dans la deuxieme Brancati s'essouffle un peu, bien qu'il ait quelques pages heureuses ou il raille l'intelligentzia milanaise. La premiere partie vaut cinq etoiles, a l'ensemble je n'en donnerai que trois. Il parait que Le bel Antonio est meilleur. Il parait que c'est son chef d'oeuvre. Je le chercherai.
Et bonne annee 2020 aux hommes et aux femmes de Sicile et d'ailleurs!
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