Oscar Wilde et le meurtre aux chandelles est le premier opus d'une série de six consacrée au poète et dandy irlandais
Oscar Wilde. Il a été publié en 2007 en Angleterre et en 2008 en France. Fasciné depuis son enfance par ce personnage haut en couleur et charismatique,
Gyles Brandreth prend prétexte d'une énigme à résoudre pour plonger le lecteur dans l'Angleterre victorienne dont il restitue l'atmosphère inimitable avec beaucoup de réalisme, et pour nous faire découvrir
Oscar Wilde dans le rôle inhabituel d'un enquêteur plein de ressources et d'une vive intelligence. Il est indéniable que l'auteur britannique possède une connaissance de sa biographie très pointue et très bien documentée.
L'originalité du roman: écrit à la première personne, c'est par la voix de Robert Sherard, ami et biographe d'
Oscar Wilde, sous la forme de mémoires inédits, que le lecteur se retrouve entraîné dans leur quête de la vérité. Egalement grand admirateur de Sherlock Holmes,
Gyles Brandreth attribue à son héros les mêmes facultés de déduction dont il fait usage afin de démêler les fils embrouillés de ce crime.
De très nombreuses allusions littéraires et historiques contemporaines d'
Oscar Wilde émaillent le récit, rendant ainsi le récit très vivant, très réaliste, car le poète irlandais était un homme très cultivé. Les citations concernant aussi bien le monde littéraire ( allusions au
Henry IV de
Shakespeare; au poète Abraham Cowley; à l'opéra d'E. Chabrier " le roi malgré lui"; au Chapelier Fou et au Lièvre de Mars, personnages du roman Alice au Pays des Merveilles; au roman David Copperfield que Dickens a écrit à Broadstairs; citation du poème "The Excursion" écrit en 1814 par W.
Wordsworth; mais aussi aux romans "Une Etude en Rouge" et "Le Signe des quatre" mettant en scène Sherlock Holmes, ainsi qu'au "Portrait de Dorian Gray" qu'Oscar est en train d'écrire à l'époque où se déroulent les événements du roman)
Mais également l'érudition du poète irlandais dans le domaine de la peinture ( allusions à l'aquarelle "
Dante dessinait sur un ange " de Rossetti; à
James Whistler qui fut voisin et ami des Wilde; à Sir Godfrey Kneller, portraitiste de cour aux 17e et 18e siècles; allusion également au peintre Sir John Millais)et surtout du monde du théâtre qu'
Oscar Wilde a fréquenté autant comme auteur que comme spectateur ( apparition de l'actrice Ellen Terry, de l'acteur et directeur de théâtre Sir George Alexander, du prolifique auteur de
comédies Henry James Byron, de la grande actrice et chanteuse Marie Tempest, ainsi que de Henry Irving, acteur et directeur de théâtre très célèbre en son temps, ami d'
Oscar Wilde).
Les nombreux repères historiques permettent de donner une réelle épaisseur au récit qui ne se contente pas de présenter la résolution d'un meurtre par un personnage historique célèbre.
Gyles Brandreth propose au lecteur un véritable voyage dans le temps, une reconstitution très riche et solide s'appuyant sur l'actualité : par exemple, allusion au meurtre de Marie Aguétant que Robert et Oscar avait rencontrée à Paris, aux crimes de Jack l'éventreur d'août à novembre 1888, au scandale de Cleveland Street; mais aussi évoquant des lieux ( le Collin's Music Hall ouvert en 1862, au Cadogan Hôtel, un des hôtels de luxe les plus prestigieux de Londres) ainsi qu'à des événements touchant à la vie privée du poète ( son mariage avec Constance en 1884, son emprisonnement et son arrestation).
J'ai beaucoup apprécié ce roman policier original, aux dialogues vifs et intelligents, avec une pointe d'humour toute britannique. Malgré certains faits qui n'échappent pas au lecteur de romans policiers averti, le rebondissement final assure à l'intrigue un louable effet de surprise. Quel plaisir de déambuler aux côtés de cet homme exceptionnel que fut
Oscar Wilde!
Gyles Brandreth nous donne ainsi le regret de ne pas l'avoir rencontré au moins une fois dans la loge du Lyric Théâtre, à la table d'un luxueux restaurant à déguster des huîtres, dans son salon victorien à l'écouter pérorer sur ses contemporains...
Un bémol toutefois: la peinture par trop idyllique de la vie et du couple d'
Oscar Wilde, comme si l'auteur les avait revêtus d'un vernis très fin sous lequel pinte une réalité moins belle, plus sombre, plus conforme à la personnalité contrastée du grand poète. Cela dit, "
Oscar Wilde et le Meurtre aux Chandelles" est à savourer tranquillement assis au coin d'un bon feu, dans un fauteuil confortable avec une seule envie, dès la dernière page tournée, lire le volume suivant...
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