C'est vraiment une oeuvre d'historien, plus qu'un ouvrage de vulgarisation et c'est à la fois ce qui rend cette biographie de Charles le Téméraire très complète...et parfois un peu vexante. L'auteur évoque des sujets comme s'ils étaient complètement connus du grand public, le Banquet du Faisan pour n'en citer qu'un, et ne s'arrête pas dessus, simplement une petite remarque indiquant l'importance qu'un tel événement a eu pour le Téméraire, et on se sent bien bête de ne pas savoir du tout de quoi il s'agit...
A part ce défaut, c'est une bonne biographie, sérieuse, qui s'attarde bien sur les répercussions de sa politique à travers l'Europe et sur les jeux d'alliance fort complexes de l'époque.
Pour tous les amoureux d'histoire et de grandes figures ayant marqué leur temps, et pour les nostalgiques que ce personnage de chevalier moyen-ageux né à la mauvaise époque émouvra.
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La guerre du Bien public est née de ces appétits frustrés, de ces orgueils humiliés, de ces ambitions déçues. Poursuivant la politique de Charles VII qui s'efforçait d'abattre la féodalité, Louis XI s'appuie sur le peuple pour faire aboutir les mesures qui blessent les nobles, et il devient d'autant plus populaire qu'il se montre plus sévère envers les grands. Il n'est donc pas étonnant que ceux-ci essaient de regagner le terrain perdu; mais qu'il y eût beaucoup de "vertu" dans leurs aspirations et de désintéressement dans leurs actes, non; il suffisait que le peuple le crût.
Si attaché qu'il fût, par certains côtés, aux vieux usages, le jeune duc ne reculait pas devant les procédés les plus nouveaux et les plus révolutionnaires, quand l'intérêt de l'Etat l'exigeait. De même que, comme le dit Chastellain, "il eût plutôt perdu la vie que les pays qu'il tenait du royaume", il renonçait volontiers aux préférences de son caractère chevaleresque et féodal, pour construire un Etat moderne, fort, capable de tenir en échec ses deux grands rivaux, la France et l'Angleterre. Il ne craignait pas, en cela, de suivre l'exemple donné par Louis XI qui appliquait de son côté une réforme judiciaire analogue en créant un corps de fonctionnaires, associés aux grands prévôts de l'armée, qui avaient comme eux des droits exceptionnels de haute et basse justice.
Aussi veilla-t-il soigneusement sur les finances du duché, vérifiant lui-même les comptes de ses commis, refaisant leurs additions, et ne donnant efficacité qu'aux comptes qu'il avait lui-même marqués de son sceau. La réforme la plus importante qu'il fit fut la séparation de son patrimoine privé du patrimoine public. Le premier devait être alimenté uniquement par les ressources tirées de ses domaines personnels. Alors que son père confondait volontiers sa propre bourse avec les coffres publics, Charles se montra très strict en cette matière. Les finances de l'Etat seraient entretenues par les ressources de l'Etat; c'était une innovation considérable, dont peu de ses contemporains comprenaient la nécessité.
« Vie et mort de Gérard de Nerval », conférence de Marcel Brion, à l'occasion du 100ème anniversaire de la mort de Nerval. Première diffusion le 21 mars 1955 sur la Chaîne Nationale.