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Wolfgang Heumann (Traducteur)
EAN : 9782226472113
198 pages
Albin Michel (12/01/2022)
3/5   2 notes
Résumé :
Au sein de l’œuvre prolifique du penseur juif viennois Martin Buber (1878-1965), la spiritualité hassidique constitue une sorte de fil rouge, depuis les Contes de Rabbi Nahman (1906) jusqu’à ce Message hassidique paru en 1952 et totalement inédit en français. Ce dernier constitue avec les célèbres Récits hassidiques une seule œuvre, comme l’expose Buber lui-même. Écrit au soir de sa vie, il propose une magistrale synthèse où l’on retrouve l’apport des travaux de Ger... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Les deux freres Singer, dans leurs respectives memoires (Au tribunal de mon pere et D'un monde qui n'est plus), etaient assez critiques (surtout l'aine, Israel Joshua) de la societe hassidique dans laquelle ils avaient grandi. Je savais que Buber en donnait une image plus positive et j'ai voulu apprehender ses arguments.


Buber analyse historiquement la naissance du hassidisme, cette branche mystico-populaire du judaisme, au 18e siecle, comme une reponse a la grave crise de foi provoquee par le faux messie Sabbetay Tsvi et sa conversion a l'islam. Une reponse qui permet au judaisme de revivre, et qu'il oppose d'un cote a la secte de l'autre faux messie Jakob Frank, et d'un autre a Spinoza, qui represente la remise en question de la croyance juive en Dieu.


Buber magnifie le hassidisme, considerant qu'il porte un message universel “dont le monde a grand besoin aujourd'hui" (c'est ecrit en 1948). Un message de spiritualite et de communaute: “En un siecle par ailleurs peu productif sur le plan religieux – meme en Europe de l'Est – l'obscure communaute juive polonaise et ukrainienne realisa ce qu'il y a de plus grand dans l'histoire de l'esprit, plus grand que tout genie solitaire de l'art et de la pensee : une societe vivant dans sa foi”. Moi je ne vois pas ce que cela a de special. Des societes vivant dans leur foi etaient pratiquement partout la norme par le passe et sont encore nombreuses de nos jours. Mais peut-etre le plaidoyer de Buber tient plus du communautarisme hassidique, qui ne celebrait plus le savoir rabbinique mais mettait tous les hommes, lettres ou ignorants, sur le meme plan, et glorifiait les gestes et les pensees simples de chacun. “A la question « Qu'est-ce qui importe ? » (au sens sacramentel), la reponse est : « Ce dont on est en train de s'occuper »”. “Ainsi, les actions ethiques sont tout naturellement assimilees aux actions religieuses”. Buber cite nombre de formules de rebbes hassidiques pour appuyer ses assertions: “Rabbi Pinhas de Koretz, de la premiere generation des maitres hassidiques, extremement direct dans sa conception et son langage, se contente d'établir une echelle des valeurs. La piete, dit-il, est preferable a l'intelligence, mais l'intelligence et la piete ne valent pas la bonte”. Ou celle-ci, de Rabbi Bounam de Pshiskhe: “L'homme qui est seulement bon est un courtisan ; celui qui est seulement pieux est un voleur ; celui qui est seulement intelligent est un incroyant. Seul celui en qui toutes ces qualites sont reunies est en mesure de servir Dieu integralement”. Et il conclut: “On a fait remarquer avec raison a quel point la reconnaissance hassidique du am haaretz (l'ignorant), jusqu'ici meprise, comme membre de la communaute religieusement egal aux autres, et l'admiration hassidique pour l'homme a la foi simple avaient favorise l'essor du mouvement”.


Tout ca c'est tres joli mais je ne peux m'empecher de penser que le cours du temps a fini par gacher cette idylle, y faisant naitre (ou se devoiler) des contradictions intrinseques: comment est-il possible que cette communaute d'egaux venere un chef qu'elle qualifie de “tsaddik” (=juste), en qui elle voit un saint, qu'elle glorifie et presque idolatre, et dont chaque parole est un conseil qui devient commandement? Comment se fait-il que cette fonction de guide spirituel et ethique soit vite devenue hereditaire? Comment excuser l'explosion en une multitude de cours, de dynasties hassidiques qui se disputent les ouailles (et leurs oboles), se dedaignent, se denigrent, et arrivent a inspirer des fois de reelles batailles rangees? Buber analyse, compare a d'autres communautes religieuses, developpe et commente et glose, sans me donner ne serait-ce que l'amorce d'une explication convaincante. Il ne fait que repeter le sens que donnent les hassidim au tsaddik, a leur “admor" (abbreviation de Adoni Mori = mon seigneur et mon maitre): si traditionnellement c'etait un homme lie a Dieu d'une maniere particuliere et qui, de ce fait, non seulement connaissait ses mysteres mais etait investi des pleins pouvoirs pour agir en son nom, dans le hassidisme, il devient, en plus de tout cela, celui qui conduit la communaute a la place de Dieu, qui remplit la fonction de mediateur entre Dieu et la communaute. Et il ajoute: “Alors que le pretendant messianique est naturellement unique, la « tsaddikité » s'incarne naturellement dans une pluralite d'hommes contemporains les uns des autres, entre lesquels la communaute est pour ainsi dire repartie.” Naturellement? Naturellement on passe d'une communaute d'egaux a de grands hommes qui dominent et se repartissent la communaute? Drole de nature!


Bon, vous avez bien compris: je ne deviendrai pas un adepte du hassidisme. Il est tres probable qu'a ses debuts c'etait ce que Buber encense, mais cela a d'apres moi vite degenere, des que les communautes se sont separees en cours differentes, suivant des lignages differents. Dans certains passages Buber admet que “l'union du domaine ethique et du domaine religieux … se realisa exemplairement dans le hassidisme, bien que pendant une courte periode de floraison seulement”, et aussi que le mouvement etait devenu “vers le milieu du XIXe siecle, une formation spirituellement figee”. C'est ce qu'exprimait deja a cette epoque Y. L. Peretz, malgre son empathie envers les masses populaires des shtetles. C'est ce qu'avaient ressenti, au debut du XXe, les freres Singer. C'est ce que j'avais ressenti a leur lecture, sentiment qui n'a fait que se renforcer apres celle-ci. Et je me dis que ce n'est pas le seul mouvement religieux ou social dont le grand-age a trahi la jeunesse historique, loin de la, mais que c'est toujours triste, pour tous les cas, d'en etre averti.

Et la societe ou nous vivons, ou en est-elle? Ou en sont ses ideaux? Lesquels sommes-nous en train de trahir?
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Robert Bober Il y a quand même dans la rue des gens qui passent - éditions P.O.L où Robert Bober tente de dire comment et de quoi est composé son nouveau livre "Il y a quand même dans la rue des gens qui passent", et où il est notamment question de son précédent livre "Par instants la vie n'est pas sûre" et la poursuite de sa conversation avec Pierre Dumayet, d'identité indéterminée et d'identités, d'innocence et de bonté, d' enfance et de rencontres, du yiddish et de Georges Perec, de Seth et de Julien Malland, de Martin Buber et de Gaston Bachelard, de Cholem Aleikhem et du film "Tevye le laitier" de Maurice Schwartz, de Zozo et de la rafle du Vel d'hiv, d'images et livres, de Robert Doisneau et de la photographie, de Pierre Reverdy et de la librairie du Désordre à la Butte aux Cailles, à l'occasion de la parution de "Il y a quand même dans la rue des gens qui passent" en octobre 2023 aux éditions P.O.L, à Paris, le 10 janvier 2024

"– Alors, toujours aussi gros ? – Et toi, toujours aussi con ? C'est comme ça que j'ai compris qu'ils étaient copains. le gros, derrière son comptoir, c'était le patron du bistrot-guinguette « Chez Victor » situé derrière la place des Fêtes au fond de l'impasse Compans. le con était accoudé au zinc en attendant d'être servi. Plus tard, bien plus tard, je suis retourné voir le bistrot « Chez Victor », je ne l'ai pas retrouvé. Tout le quartier avait été détruit."
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