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EAN : 9782070704293
210 pages
Gallimard (13/05/1986)
4.33/5   3 notes
Résumé :

" La tradition est la plus noble des libertés pour la génération qui l'assume avec la conscience claire de sa signification, mais elle est aussi l'esclavage le plus misérable pour celui qui en recueille l'héritage par simple paresse d'esprit. " À travers ces textes, dont la publication s'échelonne entre 1909 et 1952, Martin Buber s'efforce de penser le judaïsme et, plus précisément, " le processus spiritue... >Voir plus
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
On a parfois considéré l’oriental comme un homme représentant un stade primitif de développement, un attardé, pour ainsi dire – ce qui est une vue étroite et schématisante. Mais il faut faire remarquer que l’époque déterminante de sa destinée intérieure, le moment qui a marqué son caractère spirituel et déterminé ses facultés créatives, l’heure de sa plasticité décisive, survient à une époque de l’histoire universelle antérieure à celle qui voit l’émergence de l’Europe. Les forces qui ont présidé à l’élaboration de la Chine, de l’Inde, de l’Égypte et de l’Asie Mineure durant le prodigieux troisième siècle avant l’ère chrétienne ne se laissent pressentir que confusément dans les vestiges des créations colossales que ce siècle et les siècles ultérieurs ont préservées.
(…)
J’aimerais définir le type humain oriental, tel qu’on peut le reconnaître dans les documents de l’Asie antique aussi bien que dans le chinois ou l’indien ou le juif d’aujourd’hui, comme un individu de type « moteur » plutôt que « sensoriel », contrastant en ceci avec l’occidental (…) l’opération psychique fondamentale de l’homme de type moteur est centrifuge : une impression procède de l’âme et devient mouvement.
(…)
L’image que l’oriental a du monde est déterminée par la nature de son âme. A l’homme de type sensoriel, qui se laisse diriger par le plus objet de ses sens, – la vue –, le monde apparaît objectivé en une multiplicité de choses qui s’étalent devant ses yeux parmi lesquelles lui-même et son corps viennent se placer. A l’homme de type moteur, le monde apparaît comme un mouvement sans limite dont il est lui-même traversé. Tout en percevant individuellement les choses, il ne perçoit pas chacune d’elles comme étant un en-soi, stable et clos, mais comme le point nodal d’un mouvement sans fin qui coule à travers lui (…) – et c’est là que se rejoignent toutes les grandes religions et toutes les grandes idéologies de l’Asie –, le monde ne doit pas simplement être appréhendé mentalement, il doit être réalisé. Il n’est pas seulement donné à l’homme, il lui est confié ; c’est son devoir de faire que le monde vrai devienne réel.
(…)
La dualité est la condition présente de l’Être ; dualité du oui et du non, d’après la formulation du chinois ; du bien et du mal, selon le perse ; du monde véritable et du monde illusoire, selon l’indien. L’homme est appelé à ramener l’Être de la dualité à l’unité ; le monde attend de l’homme qu’il l’unifie. Les sentiers qui mènent à cette œuvre sont multiples mais la voie est une, « he hodos tou theou » (Marc 12, 14), la voie de Dieu dans le monde. (pp. 47-51)
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L’époque où nous vivons sera un jour désignée comme celle de la crise de l’Asie. Les nations éclairées de l’Orient se sont d’une part soumises à la puissance extérieure de l’Europe, et d’autre part laissées submerger, à l’intérieur, par son influence. Elles n’ont pas préservé leurs richesses les plus sacrées, et même, elles les ont abandonnées de leur plein gré. La subjugation de l’Inde, l’auto-européanisation du Japon, le déclin de la Perse, et enfin la dislocation de la Chine, où l’antique esprit oriental semblait résider dans une sécurité inviolable, représentent quelques stades du processus. On est en train d’assassiner l’âme de l’Asie, et l’Asie elle-même participe au meurtre. Le monde est sur le point de perdre une richesse irremplaçable, et peu lui en chaut ; bien plus, il applaudit les nations qui consomment cette destruction. Un examen de nos consciences, un retour en nous-mêmes, un revirement sont indispensables. L’Europe doit ouvrir une ère nouvelle en vue du maintien de l’Orient et d’une compréhension mutuelle entre l’Orient et l’Occident, pour leur bénéfice respectif et en vue de leur travail humanitaire commun, une ère où l’Asie ne sera pas subjuguée par l’Europe mais se développera de l’intérieur, à partir de ses forces intrinsèques, et où l’Europe, sans être menacée par l’Asie, sera conduite par elle vers les grandes vérités de l’existence.

En vue de cette mission historique universelle, l’Europe dispose d’un peuple médiateur qui a acquis toute la sagesse et la compréhension de l’Occident sans perdre son caractère oriental originel et qui est appelé à relier l’Orient et l’Occident dans une réciprocité féconde, qui peut être appelé à fondre l’esprit de l’Orient et l’esprit de l’Occident dans un nouvel enseignement. Comment cela pourrait-il survenir ? On ne peut aujourd’hui le discerner. On peut toutefois dire ceci : Jérusalem est encore, aujourd’hui plus que jamais, ce qu’elle était considérée être dans l’antiquité : la porte des nations. Elle est l’éternel passage entre l’Orient et l’Occident. C’est vers elle que l’ancienne Asie dirigea ses pas, sous Nabuchodonosor et Cyrus, dans son avance victorieuse vers l’ouest ; c’est vers elle que l’Europe d’Alexandre et des Romains s’engagea, lorsqu’elle envisageait de subjuguer l’Orient. Le premier état juif s’effondra sous l’assaut de l’Est contre l’Ouest, et, sous l’assaut de l’Ouest contre l’Est, le second. Depuis lors, la signification de la Palestine pour le monde s’est accrue et approfondie. Aujourd’hui Jérusalem est la porte des nations d’une manière plus profonde encore, plus lourde de sens, de menaces et de promesses. Il nous appartient de chercher son salut, qui est aussi le salut des peuples. (pp. 63-64)
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Aucune des grandes doctrines religieuses n’a pris naissance en Occident. L’Occident les a accueillies, a remanié le matériau que l’Orient lui présentait, l’assimilant à ses façons de penser et de sentir, le remodelant afin de leur rendre conforme ; il est parfois parvenu à le développer, mais il n’a jamais réussi à construire sa propre symbolique en regard des édifices imposants de l’Asie, à élever sur un terrain supra-rationnel et inébranlable l’univers cohérent d’une doctrine concernant Dieu. L’Europe possède des idéologies d’une incomparable pureté, d’une certitude, d’une consistance remarquable, mais aucune d’entre elles ne possède la puissance élémentaire des grandes doctrines. Elle a produit des œuvres poétiques témoignant d’une imagination élevée, mais aucune de celles-ci ne connaît ce discours métaphorique sur l’Innommé qui constitue le langage des grandes doctrines. Elle peut s’enorgueillir légitimement des génies religieux de la plus authentique grandeur, mais aucun d’eux n’a, de lui-même, tiré le mystère de l’abîme pour le placer dans l’univers de l’homme ; tous ils l’ont reçu, assumé, défendu, fait connaître, – et le plus grand d’entre eux, Eckhart, n’est qu’un émissaire tardif du maître oriental. (p. 56)
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Robert Bober Il y a quand même dans la rue des gens qui passent - éditions P.O.L où Robert Bober tente de dire comment et de quoi est composé son nouveau livre "Il y a quand même dans la rue des gens qui passent", et où il est notamment question de son précédent livre "Par instants la vie n'est pas sûre" et la poursuite de sa conversation avec Pierre Dumayet, d'identité indéterminée et d'identités, d'innocence et de bonté, d' enfance et de rencontres, du yiddish et de Georges Perec, de Seth et de Julien Malland, de Martin Buber et de Gaston Bachelard, de Cholem Aleikhem et du film "Tevye le laitier" de Maurice Schwartz, de Zozo et de la rafle du Vel d'hiv, d'images et livres, de Robert Doisneau et de la photographie, de Pierre Reverdy et de la librairie du Désordre à la Butte aux Cailles, à l'occasion de la parution de "Il y a quand même dans la rue des gens qui passent" en octobre 2023 aux éditions P.O.L, à Paris, le 10 janvier 2024

"– Alors, toujours aussi gros ? – Et toi, toujours aussi con ? C'est comme ça que j'ai compris qu'ils étaient copains. le gros, derrière son comptoir, c'était le patron du bistrot-guinguette « Chez Victor » situé derrière la place des Fêtes au fond de l'impasse Compans. le con était accoudé au zinc en attendant d'être servi. Plus tard, bien plus tard, je suis retourné voir le bistrot « Chez Victor », je ne l'ai pas retrouvé. Tout le quartier avait été détruit."
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