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EAN : 9782081383760
252 pages
Flammarion (22/11/2017)
4/5   103 notes
Résumé :
« Ceci n est pas un livre. C'est un voyage au centre d'une terre nouvelle, ce sont des pas sur une route à inventer, c'est un rêve pour affronter la réalité. »

Il y a cinq cents ans, en 1517, l'Europe découvrait Utopia de Thomas More, publié à la fin de l'année précédente. Dans cet ouvrage visionnaire, More dénonçait les dérives des pouvoirs monarchique et religieux en vigueur et proposait un modèle de société radicalement nouveau, reposant sur la sol... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (13) Voir plus Ajouter une critique
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Attention, ce billet pourrait sembler violent et partisan à certains d'entre nous. Si violence il y a, elle n'est que dans la remise en cause de notre mode de vie, de nos formatages et de nos lâchetés. Si parti pris il y a, il est assumé.

Utopia XXI, d'Aymeric Caron. Pas facile de commencer un billet car l'utopie prête à sourire dans le meilleur des cas, voir à la moquerie allant jusqu'au dénigrement. Quand à ça on ajoute Aymeric Caron que la plupart d'entre nous définissent comme un bobo arrogant, méprisant et donneur de leçons, ça n'aide pas.
J'hésite à adopter la méthode de Notre Dame de Babélio qui avait fait de son billet sur « Antispécisme » un réquisitoire contre l'homme Caron sans avoir lu le livre, en me faisant « avocat » d'un homme de conviction dont j'ai lu le bouquin. J'avoue avoir été très tenté de répondre ici puisqu'on m'a interdit l'accès là bas (il y a longtemps) mais le si agressif Caron a par sa pensée imprimée sur papier, réussit à me faire adopter un angle plus modéré et de laisser de coté l'ironie qui me titille.

Avec Utopia XXI, Aymeric Caron continue de prouver qu'il est un homme de convictions. C'est probablement ce qui nuit à son image. C'est vrai qu'aujourd'hui mettre en accord ses actes et sa pensée devient un bien de plus en plus rare (perso, j'ai souvent du mal dans certains domaines) surtout quand il s'agit de la vie de la cité pour ne pas dire de la planète.
Utopia XXI à première vue c'est de l'enfonçage de portes ouvertes, des évidences. Mais…

— Quand il pleut, ça mouille.
— Oui merci t'es gentil mais te vexe pas, c'est pas un scoop. Et puis fais pas chier, je suis trempé.
— ???
— Ben il pleut...
— Et t'avais oublié que la pluie ça mouille.
— Euh… ta gueule.

Voilà, après quelques pages, bien trempé, on s'enrhume et on se dit que oui tout est évident, que tout n'est que bon sens et pourtant nos sociétés sont en rade en panne des sens.

Le livre est construit en trois parties. Songe, Mensonges, Rêves.
On commence le Songe par une interview imaginaire d'un habitant (descendant de Thomas More, auteur d'Utopia il y a cinq siècles déjà…) de l'île Utopie qui évoque la vie chez lui et met le doigt sur les aberrations de notre système. Caron se met dans la position de l'intervieweur contradicteur en opposant à l'utopiste les objections les plus courantes faites en général par la bien pensance ambiante dans nos pays soit disant développés…
Quelques claques plus loin (j'avais prévenu que ça allait être violent) avec des sujets comme l'argent, le logement, l'écologie, le droit des animaux, le travail, la justice, la liberté, le temps libre, le communisme, le religion et quelques autres réjouissances, les deux hommes se séparent d'accord sur la conclusion à tirer de ce choc des consciences et inconsciences de l'homme. C'est pas gagné mais ça vaut le coup d'essayer d'aller à contre courant.

Cette petite introduction de 120 pages nous amène naturellement au constat à charge (comment pourrait-il en être autrement) sur notre société, sur notre quotidien, notre soumission, notre passivité, en un mot sur notre responsabilité.
Les Mensonges que sont les concepts de la démocratie, du travail, de l'argent, du terrorisme, de la nation, de la liberté, de l'égalité, de la fraternité pour ne citer que les grandes lignes, sont disséqués un à un par l'auteur avec nombre d'exemples (avec références) venant appuyer une plaidoirie sans faille contre notre système sclérosé par l'argent, le pouvoir, la bêtise et la peur.
A la fin de chaque sujet, des propositions « utopiques » bien argumentées qui feraient grincer des dents bon nombre de « non futurs lecteurs » s'ils se plongeaient dans ce livre. Des propositions qui tiennent la route bien mieux que ce qu'on nous explique à longueurs d'éditoriaux, de discours politiques, de journaux télévisés et autres instruments de lobotomisation.
Quelques exemples en vrac :
Un permis de voter après petit questionnaire au sujet du vote parce qu'il est vrai qu'on a tous un avis sur tout mais qu'on ne maitrise pas tous les sujets et que de s'en remettre à une traduction faite par un homme politique ce n'est même plus de l'irresponsabilité, ça relève de la connerie chronique aigue.
Plus aucun élu ne sera professionnel de la politique, semaine de quinze heures, revenu universel, salaire maximal, frontières abolies tout comme le scrutin majoritaire à deux tours, … oui j'entends quelques rires, quelques sarcasmes. Dit comme ça, je comprends mais ayez un peu de curiosité et lisez UtopiaXXI, seule une mauvaise foi de compétition peut trouver des objections valables aux arguments de Caron. On peut ne pas adhérer à tout (moi le premier, sur le mariage ou la justice par exemple) mais au moins y réfléchir même si on a pris l'habitude qu'on réfléchisse pour nous depuis toujours.

La dernière partie, Rêve, est une petite conclusion où Aymeric Caron explique un peu le cheminement de sa pensée et de son militantisme à travers son parcours. Je précise que ça ne fait qu'à peine vingt pages, ça évitera peut être à certains de parler de son égo…

Ce livre est à la fois déprimant et rassurant. Déprimant parce que malgré les évidences nous continuons à baisser la tête en allant droit dans le mur et rassurant parce que certains continuent malgré les embûches à croire qu'on peut changer les choses et à apporter sa contribution à un monde juste loin des considérations économicomerdicopolluantes.

J'ai fait long alors je vais terminer comme se termine le livre.
« Imaginons. Proposons. Risquons. Tant pis s'il nous faut pour cela sacrifier un morceau de carrière et quelques relations sociales. A quoi servent nos pas sur Terre, si nous passons pour nous taire ?
Réveillez vous, rêvez.
Début »
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Un livre que l'on m'a prêté. Très rapidement j'ai eu envie de cocher des passages. Et plus j'avançais, plus il y en avait. Si bien qu'à un moment, je n'ai pas pu résister, j'ai coché, encore et encore. Et du coup, j'ai acheté le livre pour en rendre un intact à la personne qui me l'avait prêté.
Bravo monsieur Caron !
Une mine d'informations, de références, de Montesquieu à Marx, jusqu'à des économistes, des philosophes contemporains.
Aymeric Caron aborde tous les sujets politiques, sociaux et économiques, d'une manière si limpide que, malgré des sujets aussi complexes, on comprend tout.
C'est bourré d'évidences, de solutions simples et justes. Utopiques, pas tant que ça, mais difficilement réalisables dans le sens où les puissances financières ne sont pas prêtes à lâcher le morceau, si lucratif.
Pratiquement tous les sujets d'actualité sont abordés et traités d'une manière très objective et pertinente.
512 pages, sans que ce soit lassant ou hermétique.
L'auteur a mis en mots pratiquement tous mes ressentis et mes impressions sur la société actuelle.
Mais le plus, c'est qu'il propose des solutions qui, dans l'absolu, sont réalisables.
Je rêve d'un monde comme il le propose.
Le plus rageant, c'est que c'est possible, c'est faisable.
C'est un ouvrage extrêmement complet qui représente un travail colossal.
CA… RON ….PRE…SI…DENT…..
Et la France, et le monde, seraient tellement plus justes
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Cet essai est une mine dans les deux sens du terme. D'une part il renferme des idées et des concepts explosifs et inflammables, d'autre part il est un puits d'information sans fond et une source de discussions intarissable. le lire c'est l'assurance de faire émerger des débats passionnants avec son entourage au cours des six prochains mois ! Voici un essai qui va vous secouer, vous agacer parfois, mais qui va surtout élargir les champs du possible.

Toutefois, ce qui m'étonne, c'est qu'on n'en recense que cinq critiques (toutes positives) sur Babelio. Franchement, ce livre mérite davantage d'intérêt et d'égards. Pourquoi me direz-vous ? Eh bien simplement parce que chacun peut y trouver des réponses originales aux questions qu'il se pose un jour ou l'autre : vivons-nous bien dans une démocratie ? Travailler dur est-ce la garantie d'une vie réussie et pleine de satisfactions ? La manière dont nous gérons notre temps permet-elle un vrai épanouissement ? Etc.

Incontestablement, le questionnement le plus éclairant de cet ouvrage est : existe-t-il une alternative positive et réaliste à notre monde actuel ? Et là, à mon grand soulagement, la réponse est OUI !

A ce stade, je vois venir l'objection de certains fatalistes qui se prennent pour des réalistes : « Ça y est, encore un essai naïf qui promet le paradis sur terre au gogo de service... »

Détrompez-vous, vous n'y êtes pas du tout ! En s'appuyant sur un important travail de recherche documentaire, Aymeric Caron commence par mettre le doigt sur toutes les « petites choses » qui devraient nous surprendre par leur iniquité, mais auxquelles on a tous appris à s'habituer faute de mieux. Ces bénignes avaries de nos démocraties parlementaires, lorsqu'on les place bout à bout, débouchent en réalité sur d'énormes problèmes sociaux, une perte d'espoir profonde par rapport au sens de la vie et un sabotage programmé de notre environnement naturel, humain et finalement économique.

L'essai débute par un état des lieux cinglant de la société dans laquelle nous vivons : « En France, la liberté est toute relative, l'égalité n'existe pas, et la fraternité deviendra bientôt un gros mot, tant elle est attaquée et discréditée par nos représentants politiques. On pourrait en dire autant de la justice, de l'empathie, de la compassion, de la générosité, de la non-violence (...)
Le tour de force des dictateurs aux petits pieds qui nous dirigent est d'avoir instauré un régime à leur service sans que nous, citoyens anonymes et tranquilles, nous nous soyons aperçus du coup d'État : nous avons doucement basculé vers un totalitarisme soft, bon teint, une tyrannie 2.0 où le costume-cravate remplace l'uniforme militaire. L'oligarchie au pouvoir a réussi avec brio son hold-up sur nos vies, en imposant son modèle politique et économique unique et en persuadant une grande partie d'entre nous qu'aucun autre n'est possible. »

Une fois ce décor peu reluisant (mais assez réaliste) campé, l'essayiste entame un dialogue à bâtons rompus avec un habitant actuel d'Utopia, une île isolée au milieu de l'Atlantique dont l'existence avait été « révélée » par Thomas More au XVIe siècle. Installés dans une confortable brasserie parisienne, les deux protagonistes vont échanger durant des heures sur des sujets aussi variés que l'argent et la propriété privée, le travail et le salariat, le temps libre, la justice, la démographie et l'écologie. A chaque fois, il s'agit de comparer la vie dans les pays dits « développés » avec celle sur Utopia.

Et, rapidement, on s'aperçoit que les différences sont importantes et rarement en notre faveur ! Alors, fort de ces pistes de réflexion, l'auteur nous présente une série de situations emblématiques du monde dans lequel nous vivons pour les questionner sans craindre de se mettre certains lecteurs à dos. En voici un exemple. « Le peuple des classes modestes et moyennes constate et subit l'évident échec des politiques néolibérales à l'oeuvre depuis trente ans. Il voit le droit du travail qui rétrécit, les libertés individuelles qui sont grignotées, les difficultés grandissantes pour se loger, la pollution qui empoisonne, les salaires qui sont bloqués et l'emploi qui ne revient pas. Et en parallèle, il observe, médusé, les cadeaux consentis à ceux qui sont déjà plus riches que les autres. »

Fort heureusement, Caron ne s'arrête pas à ce type de discours qu'on pourrait qualifier de démagogique. A travers la bouche de son interlocuteur utopiste, il propose aussi des solutions parfois très innovantes. Un exemple parmi les dizaines dont ce livre regorge : la gestion du temps libre qui serait dégagé par une diminution conséquente de l'horaire de travail.

« Nous nous occuperons de nous, de nos proches et des inconnus qui ont besoin d'aide. Nous essaierons d'être heureux en choisissant enfin les activités dont nous souhaitons remplir notre existence. En multipliant les occasions de sociabilité, nous briserons la solitude qui s'abat sur des millions de personnes isolées. Nous ferons du sport ce qui nous permettra de réduire les coûts de la santé. Nous lirons ces livres laissés fermés sur la table de nuit. Nous apprendrons. Sans cesse. Et surtout, nous nous informerons afin de faire de la politique en lieu et place des professionnels qui nous gouvernent depuis des décennies en toute incompétence.
Ne voyez-vous pas qu'un emploi à plein temps nous empêche d'être de véritables citoyens ? Épuisés à la tâche, nous préférons déléguer la prise de décision à d'autres personnes qui, elles, bizarrement, ne travaillent pas. Certes, elles nous dirigent, mais elles ne produisent rien... »

Le grand mérite de cet essai c'est ainsi de mettre en relief les dysfonctionnements de la société dans laquelle nous vivons, puis de proposer des solutions parfois radicales pour en venir à bout. On peut y adhérer ou pas, là n'est pas l'essentiel. Par contre, ce qui est sûr c'est que cet ouvrage est « bon pour la tête », car il stimule notre capacité de réflexion et favorise le débat en couple, en famille ou en société de thèmes qui nous touchent tous, quel que soit notre obédience politique ou notre niveau social.

Pour conclure, je vais citer encore une fois Aymeric Caron : « L'histoire nous enseigne que les rêveurs sont ceux qui ont permis à l'espèce humaine de tendre vers le meilleur d'elle-même, en gommant certaines de ses laideurs. Et, contrairement à l'idée reçue, celui que l'on désigne comme un utopiste appréhende très souvent la société avec plus de clairvoyance que ses contemporains. Il identifie avant les autres un dysfonctionnement profond et s'évertue ensuite à le faire comprendre à la majorité. L'utopiste s'autorise à voir le monde tel qu'il est vraiment, afin de pouvoir le changer (...) A quoi servent nos pas sur Terre, si nous passons pour nous taire ? Réveillez-vous, rêvez. »
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Alors, là, c'est du très lourd, il n'est que de lire les critiques ou regarder les émission de télé sur le sujet. Ce livre, qui n'en est pas un, dixit Caron, déchaine les passions et c'est bien compréhensif tant il provoque sur tous les sujets. Mais c'est justement ce que j'ai adoré, c'est que rien n'est tabou, tout est analysé et amène à la réflexion, même si on n'adhère évidemment pas à toutes les propositions
, ni même à tous les constats. le livre commence par une interview, fausse, on le découvre au fur et à mesure, celle d'un habitant d'UTOPIA interrogé par l'auteur. Les réponses et la description de la vie en Utopie font rêver parce que tout est fait pour le bonheur de ses habitants. Et ensuite tout y passe : la liberté, le travail, la justice, la religion, le terrorisme, l'argent, les animaux, etc., etc... Et les "Propositions utopiques" fusent : le permis de voter, le choix de l'utilisation de ses impôts, la semaine de 15 heures, la richesse plafonnée, le quotient de bonheur à la place du PIB, et tant d'autres ! C'est un livre qui fourmille d'idée, utopistes pour la plupart, mais parfois pas tant que ça. Quel déferlement d'incitations à réfléchir sur ce qui nous parait, dans bien des cas, la normalité. J'ai adoré.
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Un livre providentiel, en avance sur son temps. Très en avance sur ses contemporains. Un livre courageux, solide et ambitieux, qui se penche sur notre humanité et respire la sincérité.
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Citations et extraits (34) Voir plus Ajouter une citation
Il est des évidences dont on peine à croire qu’il faille les expliquer. Personne ne conteste le fait que si je me promène sous une averse sans parapluie, je serai mouillé. Ou que si je roule sur une route à 60km/h plutôt qu’à 40km/h, j’arriverai plus vite à destination. De la même manière, imaginons que j’aie un travail à faire effectuer qui requiert, disons, 560 heures de travail. J’ai également un impératif de temps : ce travail doit être effectué en une semaine. Si je décide que mes employés peuvent travailler 40 heures par semaine, alors il me faudra quatorze personnes. Si en revanche je limite la durée de travail hebdomadaire à 35 heures, alors il me faudra seize personnes. Deux emplois en plus. Parfois c’est simple l’économie.
(…)
C’est une évidence : les dominants ne souhaitent pas réduire le temps de travail des dominés car ils n’en retireraient aucun avantage. L’intérêt du patronat et des financiers réside au contraire dans un chômage de masse qui rend les travailleurs particulièrement vulnérables (les chômeurs constituent ce que Marx appelait « l’armée de réserve du capital »). C’est extrêmement simple à comprendre. Si, dans une entreprise, un salarié est mécontent de la manière dont il est traité, son comportement différera en fonction des possibilités d’emploi à l’extérieur. En situation de plein emploi, le salarié en question pourra retrouver un emploi ailleurs sans difficulté : il est donc en position de discuter son salaire, ses conditions de travail ou une progression hiérarchique. En revanche, en contexte de chômage massif, lorsque les emplois disponibles sont largement inférieurs à la demande, le salarié mécontent est prié de se taire puisqu’il « ne trouvera pas mieux ailleurs » et que « beaucoup d’autres candidats attendent pour prendre sa place ». Pire : ceux qui attendent la place, désespérés et lâches, sont prêts à accepter des conditions que leurs ainés jugeraient indignes, exerçant ainsi une pression sur ceux qui occupent les emplois. Ceux qui acceptent de travailler pour moins d’argent, plus longtemps, avec moins de garanties, alors qu’aucun motif sérieux ne le justifie, sont des complices des exploiteurs.
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Le mensonge du terrorisme (…)
Il est compréhensible de craindre, pour soi et pour ses proches, la mort qui touche par surprise, dans le plus injuste des contextes. Mais la vérité est que chacun d’entre nous a beaucoup plus de risques d’être tué par l’industrie agro-alimentaire, par la pollution, par la misère, par la route, par l’alcool ou le tabac, que par une bombe ou une kalachnikov. Mettez l’émotion de coté et regardez ces crimes que nos gouvernements laissent impunis et encouragent.
Le terrorisme, rappelons le, a tué 241 personnes en presque trois ans en France.
Pendant ce temps, environ 500 sdf meurent officiellement chaque année dans notre pays (…)
Ces morts de la rue sont des victimes de la misère et des manquements de notre système de solidarité. Ils sont morts parce que nous n’avons rien fait pour eux, ou pas assez. Ils sont morts parce que nous les avons laissés perdre leur logement et parce que nous n’avons pas affirmé qu’il y avait une priorité : celle de protéger tous les Français de la violence d’une vie sans un toit sous lequel se réfugier chaque soir. Une grande partie des sdf meurt d’ailleurs, non du froid, mais d’une cause violente, surtout chez les plus jeunes.
La rue tue donc entre cinq et trente fois plus que le terrorisme en France.
Pourtant, lors de la dernière campagne présidentielle, pas un candidat n’a parlé de ces dizaines de milliers de personnes qui errent dans les villes, sans rien à eux en dehors du contenu de deux ou trois sacs en plastique.
(…)
Les attaques terroristes ont fait officiellement 29376 morts dans le monde en 2015.
La diarrhée tue près de 850000 personnes par an en raison d’un mauvais réseau sanitaire. Cela signifie que la diarrhée tue quasiment trente fois plus que le terrorisme. Pourtant la diarrhée est un sujet absent des journaux. Il faut dire que le thème n’est pas très ragoutant, voire tabou, et que cette maladie choisit ses victimes dans les pays pauvres dont les habitants n’intéressent pas grand monde puisqu’ils n’ont pas d’argent à dépenser
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C'est bien notre système économique actuel qui anesthésie les citoyens et les maintient dans la servitude en échange de quelques plaisirs débilitants et d'une tranquillité minimale: un toit, un bout de salaire, des allocations et des policiers pour les protéger. Le système tient aussi longtemps que les concernés estiment qu'en se rebellant ils ont plus à perdre qu'à gagner. Tout l'art des maîtres tient dans cette nécessité de mesurer le point de bascule, celui où le niveau d'injustice et d'asservissement serait tel que l'exaspération générale fédérerait les volontés révolutionnaires. N'avez vous pas remarqué comment ils testent, non pas notre capacité à la résistance, mais bien au contraire notre niveau de lâcheté et de couardise? Depuis trente ans, ils vont toujours plus loin en détricotant les droits durement acquis des travailleurs et en détruisant la solidarité nationale. Ils observent la réaction, qui ne vient pas, alors ils continuent.
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En fait ce qui vous a perdu dans votre monde, c'est que vos deux modèles de pensée officiellement antinomiques, capitalisme et anticapitalisme, libéralisme et antilibéralisme, ne s'opposent finalement pas sur grand chose. Il diffère sur la façon de distribuer les richesses, et c'est à peu près tout. En revanche, ces deux ennemis officiels se rejoignent sur l'essentiel, à savoir le modèle productiviste qui fait du vivant une matière à exploiter sans restrictions et où chacun n'acquiert son identité que par le travail. L'erreur que vous avez commise depuis des siècles, si vous m'autorisez ce jugement, a été de définir chaque individu comme un producteur-consommateur. Comme vous avez par ailleurs privilégié la logique de l'égoïsme et de l'argent, vous avez multiplié les besoins artificiels et inutiles, et donc tout misé sur un accroissement de production.
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Le libéralisme se veut la philosophie de la liberté absolue : liberté d'entreprendre, liberté de faire circuler les capitaux et les marchandises, liberté de réaliser ses ambitions, liberté d'abattre les frontières, les barrières, les murs et les entraves en tout genre. La brochure est tentante. Mais attention au piège : les photos ont été retouchées, et le texte a été rédigé par des spécialistes de la communication qui vendraient leur mère avec talent. La réalité est tout autre. Dans un système économique libéral, la liberté de quelques-uns s'applique au détriment de celle de tous les autres. Non seulement le néolibéralisme ne peut permettre la liberté de tous, mais en plus il a besoin d'esclaves pour survivre et se développer.

La première contrainte imposée par le libéralisme économique allié au capitalisme est celle du travail. Chacun d'entre nous, à moins d'être né dans une famille particulièrement aisée, est obligé de trouver un emploi pour vivre. Cette contrainte est loin d'être anecdotique. Dans une société du plein emploi telle que celle des trente glorieuses, la nécessité de travailler est compensée par le choix laissé au citoyen : si l'emploi occupé ennuie, si les conditions de travail ne conviennent pas ou si le chef déplaît, le travailleur est libre de quitter le job en question pour en trouver un autre. Dans une situation de crise économique et de chômage de masse, lorsque même les gens diplômés et expérimentés ne trouvent pas d'entreprise qui veuille les embaucher, le travailleur est privé de toute marge de manœuvre et n'a le choix de rien. Il n'est pas libre. Il prend le boulot qui vient, et il s'accroche ensuite pour le garder en se soumettant aux volontés de l'employeur. Sous peine de sanction, il est obligé de se taire face à des supérieurs injustes ou incompétents. Il est par ailleurs contraint d'accepter des conditions contractuelles et salariales défavorables. C'est exactement ce qui se passe depuis plus de trente ans avec la logique néolibérale qui détricote peu à peu les droits du salarié pour ramener celui-ci au rang d'esclave corvéable à merci, comme nous l'avons vu dans un chapitre précédent. Les patrons – laissons de côté les artisans et les dirigeants de toutes petites entreprises, au statut différent – ne cessent de brandir leur propre droit à la liberté : liberté de licencier, liberté d'augmenter la charge de travail des salariés, liberté d'alléger les contrôles sanitaires, liberté d'augmenter la part des bénéfices reversée aux dirigeants et aux actionnaires, liberté de payer le moins d'impôts possible. Sauf que évidemment, chacune de ces libertés ne s'obtient qu'au détriment des libertés des salariés, priés d'être manipulables à souhait ce qui, en langage diplomatique de l'économie moderne, se traduit par « flexibles ».
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Vidéo de Aymeric Caron
Nous mourrons de nous être tant haïs, premier roman d'Aymeric Caron, engagé contre le déclin écologique et politique de notre espèce, entremêle l'histoire et la fiction pour, brillamment, mettre en lumière l'urgence de la conversion écologique universelle.

- @new.hope.production
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